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Gueules et abysses


- Capitaine.
- Je te gonfle cette voile, Landstorm.

Ciel dégagé, vent plein Est. Le soleil matinal chasse le brouillard s'étant installé sur la houle. Le St-Margot fend les flots à pleine allure sous l'œil bienveillant du vieux marin bourru qui, ses deux grandes poignes serrées contre le gouvernail, file grand largue avec une dextérité peu commune. C'est à croire qu'il lui suffit de respirer pour comprendre le vent, en connaître la force et la direction, pouvoir déceler s'il est traître ou s'il est vif, s'il va durer ou s'il s'en ira rapidement. Toutes ces choses, tu peux les voir dans les yeux du Landstorm, alors qu'il se perd dans l'horizon, sa pipe accrochée au coin des lèvres, avec cet air déterminé mais amoureux.

De mon côté, je descends des gréements avec aisance, m'accrochant à une corde que j'utilise comme balancier avant de me lancer vers le pont. J'y atterris, non-loin de la proue, dans une descente parfaite, fort de mes nombreuses années de pratique en compagnie de mon oncle Alla Toreshky. Ce vieux Allan, tu ne l'as pas connu, toi, Napoléon, mais c'était un brave homme. Triste et nostalgique, mais fier aussi. C'est pour mon père que j'entreprends ce voyage, mais aussi pour ce vieil Allan qui plus jamais ne prendra la mer.

Dans moins de deux jours nous atteindrons l'Anse aux mégardes, un site bien connu des pirates pour pénétrer les profondeurs de Red Line, dans cette mer souterraine que l'on appelle La Flaque. Un réseau découvert puis creusé à la démesure de l'homme, créature trop petite ayant toujours voulu faire trop grand. Si La Flaque existe, ses entrailles en sont néanmoins méconnues de beaucoup, contrecoups des explorations trop ambitieuses d'hommes trop avares. Ainsi, il serait étonnant de tomber sur un quelconque croiseur de la Marine dans les ténèbres profondes qui enveloppent les galeries innombrables de La Flaque. Néanmoins, les dangers sont nombreux là-dessous, mais je compte sur le talent et l'assurance de Landstorm pour nous diriger en ces lieux. Il s'y est déjà aventurer, ce brave marin, m'a-t-il confirmé, alors que nous mangions face à un coucher de soleil saumoné, hier.

C'est un coup du sort, ça aussi, mais les cales sont pleines ! Assez pour durer une semaine, à bien y compter, soit un peu plus que le temps nécessaire pour atteindre Rokade, l'île pirate vers laquelle nous voguons.

Et si moi, Landstorm et toi, Napoléon, avons mangé, ce n'est pas le cas pour un dernier de nos partenaires…

Je m'avance calmement vers la proue, là où m'attend un spectacle que j'ai moi-même monté avec l'aide de Landstorm. Sur le haut de la proue, ligoté, gît le Baron Brixius. Complètement saucissonné, il ne peut que péniblement faire face au soleil levant, son teint déjà hâlé depuis hier, jour où nous l'avons entravé, commençant à faire montre de nombreux coups de soleil. Pauvre carcasse, sans eau ni nourriture, dans cette position, je ne lui donne pas plus de deux autres jours.

- Alors, Brixius ? Toujours en vie ?

C'est une vieille sanction pirate que j'ai lu dans un livre, dans la bibliothèque du manoir de mon enfance. On attache les marins retors au mât ou à la proue sans vivres ni eau, afin de mettre à l'épreuve leur moral. Je l'ai juré, je materai l'attitude de Balthazar coûte que coûte. Je m'assois en indien face à lui, alors que tu arrives à ma hauteur, Napoléon, une gamelle d'eau dans la gueule.

- Je te l'ai demandé hier, Balthazar, mais tu n'as pas osé m'offrir une réponse satisfaisante. C'est horrible de manquer d'eau, c'est pour ça que Napoléon t'apporte une gamelle. Tu en veux ? Eh bien tu dois répondre à ma question, Baron.

Alors dis moi. Qui est ton Capitaine ?
 


Dernière édition par Maxwell Percebrume le Dim 6 Sep 2015 - 20:16, édité 1 fois
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C'est tout ce que tu as à me demander, canaille d'opérette ? Crois-tu que tes simagrées m'ont fait changé d'avis depuis hier ? Je n'ai de CAPITAINE QUE MES AMBITIONS ! MA NOBLESSE ! MON RANG ! Je te méprise comme au premier jour !
Je constate que ta salive ne s'est pas évaporée sous ce cagnard ! On dirait que tu n'auras pas encore besoin de ça.


Il s'agit bien de tes dernières forces que tu gaspilles ainsi à cracher ton venin dans le vent. Maxwell n'est pas aussi mou que je l'ai cru à première vue : il semble bien avoir appris sa leçon et s'applique à réitérer de vieilles traditions pittoresques propres aux clochards de la mer. Il est indéniable que dans ce stérile duel d'orgueil, c'est ton vaillant capitaine Percebulbe qui a la meilleure main. Hinhinhin. Je n'ai jamais pensé qu'un déchet tel que toi pouvait tomber dans l'outremonde d'une balle dans la tête ou d'une lame dans la cage ! Mais je me doutais que ce serait ta fierté qui, d'une façon ou d'une autre, trouverait un jour le moyen de te poignarder allègrement !

Il ne te suffit pas de me prendre en otage pour que je me RABAISSE à jurer allégeance envers un tel BOUFFON ! Me crois-tu si sot pour confier ma vie à un SINGE ? Un lunatique, nébuleux, arrogant, insolent, et menteur petit CHIMPANZÉ ?
Lunatique, nébuleux, arrogant, insolent, je l'admets, mais menteur ? C'est bien en toute franchise que je t'ai attaché à cette proue, Balthazar !
Détaches-moi donc, que je mesure l'héritage que t'as laissé L'IMPÉRIALE ÉPAVE QUE TU PRÉTENDS ÊTRE TON PERE ! GHINHIN-keuf ! keuf !-


Il fait la moue et affiche un air un brin déçu, le blondin, probablement déçu que tu n'aies pas gobé net cet immense mensonge qui t'es resté coincé en travers de la gorge. Faut-il nous prendre pour de biens crédules roturiers pour espérer nous faire adhérer à cette grotesque idée ! Je ne suis même pas sûre que la génétique autoriserait l'un des seigneurs des scélérats à pondre une descendance ! Cela confirme une nouvelle fois que Maxwell ne doit être qu'un anonyme fils d'ouvrier, de cordonnier, de fermier, un fils de la foule chapeauté d'un tricorne, qui ne se démarque que par une burlesque imagination assortie d'une mythomanie prononcée. Un faux boucanier, ou plutôt, une parodie de boucanier, dressée par un enfant qui a oublié de grandir avant de repenser à ses rêves !

De la même manière que Landstorm est autant marin que moi je ne suis nonne : regarde-le s'apesantir sur le paysage ! Ça ne t'inspire rien ? Oui oui. Je suis certaine que c'est la première fois qu'il contemple l'immensité de l'océan, ce charlatan, et qu'il s'extasie dessus comme un enfant en vacances. Similaire à ta condition de nobliau excommunié qui s'accroche à un statut dont il ne jouit même plus, aussi ! Magnifique embryon d'équipage ! Trois archétypes de la médiocrité travestis en explorateurs, trois acteurs !


Quoi ? Ghinhinhin ! Je te fais autant confiance qu'à mes ténias, blanc-bec ! Penses-tu que mon langage fleuri ne distille que de la creuse méchanceté ? Je ne suis pas méchant, impudent chiot, en tant que noble d'ascendance divine, en tant que chasseur au riche passé, je SUIS LA LANGUE DE LA JUSTICE ! Si mon verbal te choque autant, c'est parce qu'il SUINTE LA VÉRITÉ ! TU N'AS RIEN PROUVÉ, MINABLE, SI CE N'EST QUE TON AUTORITÉ EST AUSSI FIABLE QU'UNE PASSOIRE ROUILLÉE !

Autant dire qu'après une telle tempête de mots nauséabonds, tes poumons ne se présentent plus qu'en deux dimensions, et tes muscles rongés par la faim et la fatigue comme des termites batifolant en du bois pourris ne te permettent pas de te débattre bien plus face au sort que l'oisillion qui semble se confondre avec un aigle te réserve ! Quoiqu'il en soit... Damoclès y trouvera peut-être son compte...
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L’équipage des héritiers faisait voile vers Rokade en passant par la Flaque. Cet imbroglio de courants souterrains nécessitait une expertise maritime certaine. Fort heureusement, le Landstorm n’était pas un nouveau venu en ces lieux et il s’y déplaçait presque aussi simplement qu’en pleine mer. Du reste, le sloop révélait à l’usage une véritable souplesse. Il l’avait ressenti au moment même où il avait posé ses mains calleuses sur la barre. Il n’était donc pas extrêmement difficile de manœuvrer ici. La véritable faiblesse du sloop était la présence réduite de canons, probablement que le noble napoléon n’avait pas jugé important de sélectionner une embarcation lourdement armée, ou alors n’avait-il pas eut le choix…

Il faut dire que ce noble animal avait déjà fait beaucoup pour eux en parvenant, par un mystère incroyable, à faire prendre la mer au navire. Pourtant, lever l’ancre avait déjà dû être une véritable expédition pour ce rongeur qui s’avérait doté d’une intelligence respectable pour sa qualité de capibara. Passons du compagnon au maitre, Percebrume, le capitaine, avait sur le visage cet air encore juvénile et emprunt d’espérance. Quand il se retournait, Landstorm voyait parfois en transparence le large dos de Vladimir. Il entendait parfois Toreshky rire à gorge déployée. Ce jeune homme était-il promis à la même réussite ? Benjamin l’espérait. Enfin il y avait Balthazar B. Brixius, un nobliau que le marin trouvait agaçant mais dont il avait déjà pu éprouver les qualités. L’inconvénient résidait dans ses défauts ; s’il était un tueur hors-pair, il s’avérait aussi être un tourne-casaque de toute première catégorie.

Maxwell avait jugé bon de régler le problème par une sanction de haute volée. Malheureusement il n’y avait pas assez d’équipage pour que la punition soit grandiose, mais il y avait de l’idée. Le nobliau était solidement attaché depuis un bon moment, restait à savoir ce qu’il allait décider. Benjamin trouva l’homme plus honnête ou plus imbécile que prévu, il s’évertuait à s’énerver alors qu’un ton doucereux et de fausses promesses auraient probablement  convaincus Maxwell. Mais même si le capitaine semblait être un homme foncièrement bon, Benjamin surveillait la scène de son œil bienveillant.

- Il a la tête dure celui-là. Mes avis qu’il faudrait peut-être lui faire sauter le peu de chair qui lui reste sur le dos à coup de fouet. M’enfin… C’est peut-être un peu trop costaud pour le simple fait d’être une grande gueule et un vil personnage. Encore que... Murmura Benjamin pour lui même.

- Capitaine ! Il m’a l’air bien pâlot. Pas qu’il a l’air d’être en bonne santé en temps normal… Mais faudrait pas qu’il nous claque entre les doigts, si la mer fait gros dos, un troisième homme ne serait pas de trop...

Napoléon se retourna vivement l’air courroucé, il renversa une partie de l’eau contenue dans la gamelle qu’il avait toujours entre les mains.

- Ou quatrième homme c’est selon… Rectifia Benjamin dans un sourire faisant apparaître une rangée de dents blanches.

Le capibara donna un bref coup de tête en signe d’assentiment. Décidément, cet équipage était haut en couleurs...


Dernière édition par Benjamin Landstorm le Dim 6 Sep 2015 - 16:06, édité 1 fois
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Ma botte atterri directement entre le dents de Brixius, l'étouffant et lui coupant la parole du même coup. Il m'a piqué au vif, ce sacripant, si bien que je n'ai pu me retenir d'avantage. On peut se moquer de moi, je n'en fais pas grande colère, je préfère d'ailleurs rire avec les autres et me tourner en dérision. Tu peux me remettre en question, tu peux te moquer de moi, tu peux questionner mon autorité,

mais tu ne peux ainsi insulter mon père.

Sous les yeux du Baron, tu t'approches, Napoléon, pour déverser le contenu de ta gamelle directement vers la mer. L'eau file en cascade juste sous les yeux de Balthazar, le touchant pratiquement, avant de rejoindre sa cousine salée dont l'immensité a tôt fait de l'absorber.

- Désormais, Brixius, tu es un pirate. Sache-le. ton acide, air frustré. Et il existe dans la piraterie des codes auxquels personne ne peut souscrire, pas même un marin d'eau douce à l'ascendance aussi ridicule et pathétique que la tienne. Ces codes mentionnent que quiconque veut prétendre au titre de frère de la côte se doit de partager les convictions des pirates, mais il doit aussi appartenir à un équipage, et qui plus est, vouer sa pleine confiance à un Capitaine.

En attendant, toi, Balthazar B. Brixius, tu n'es rien. Rien. Un poids pour quiconque t'embarquera sur son navire. Une source de chaos et de zizanie. Tu n'es pas pirate, tu es une loque. Tu n'es pas marin, tu es un fléau. Tu n'es Baron que de titre, à moins que tu ne possèdes quelque part à travers ces mers un maigre fief rocailleux où plus rien ne pousse.

Sache que sur cette mer et sur toutes les autres, Balthazar, ils seront des milliers à se foutre de tes titres comme des miens. Je n'ai rien prouvé ? Eh bien toi non plus !

Commence donc d'abord par respecter les quelques compagnons qui ont vu, quelque part bien enfoui en toi, ne serait-ce qu'une once minime de potentiel. Car tu écumeras les mers longtemps avant de trouver qui que ce soit d'autre ne voulant pas simplement loger un plomb entre tes deux yeux…


Silence. Le vent qui souffle et rien d'autre.

- Je ne veux pas de ta confiance, Balthazar. La confiance est une denrée trop friable que les plus malsains consomment et dilapident sans considération, trop difficile à accumuler pour être si facilement perdue par la suite. Non. Je ne veux ni de ta confiance, ni de tes maux et vices tordus.

Mon regard se perd vers l'océan. Je me calme, tant bien que mal. C'est fou comme une étendue d'eau aussi immense et absurde peut si simplement me calmer. Me calmer, comme ça, sans problème.

- Je veux ton respect, Brixius. Ton respect et rien d'autre.

Ma botte de cuir se déloge de la gueule du Baron. Je m'en vais, alors que toi tu trottes bien à ton aise jusqu'à Landstorm, Napoléon, probablement pour le surveiller. Téh. Toi et ta manie de dicter quoi faire aux autres, va. Moi, en attendant, j'ai à faire dans la cale, notamment y écrire les débuts de mon aventure, tandis que la mer est belle, mais aussi bien faire l'inventaire de tout ce que nous avons sous la main. En passant je lance un regard malin à Benjamin.

- Ne t'inquiètes pas, Landstorm, j'ai foi qu'il ne clamsera pas si facilement. La haine qui bouillonne incessamment au fond de lui le gardera bien assez longtemps en vie. Un petit sloop comme le St-Margot ne sera pas impossible à faire garder cap si la mer s'enrage, surtout pas pour deux marins chevronnés comme nous. Et puis…

Je relève la tête vers le vautour qui nettoie ses plumes, au sommet du nid de pie.

- …S'il meurt, ce ne sera probablement pas notre faute…
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... R-REVIENS ! JE N'EN AI PAS FINI AVEC TOI ! OH QUE NON !

Un comédien plein de surprises ! Maxwell sait trouver les mots, je suis forcé de lui concéder. Bien qu'il ne raconte que des salades, il sait les assaisonner et elles en paraîtraient presque digestes ! Malheureusement, ce n'est pas des talents d'orateurs et d'acérés arguments qui convaincront les océans de ne pas le dévorer goulûment. Et sa candeur... Sa candeur, mordiable ! Son corps dessine une juvénile vingtaine mais je ne donnerais que neuf à dix ans à la qualité de ses aspirations ! Il ne manquerait plus qu'il décide de hurler au soleil qu'il deviendra roi des pirates !

... Eh bien ? Tu ne parviens plus à t'égosiller ? Las de cet amusant cirque ? Navrant. Tu aurais bien fini par transformer leurs nerfs en bombes électriques, en déchirant la nuit de ta mélodieuse hargne. Une forme de tapage nocturne des plus efficaces. Ceci dit, à part en se servant de tes poumons plats comme toiles de tambours et de tes cottes fissurées comme d'un exotique xylophone, je ne vois guère par quel miracle tu pourrais encore être bruyant.

Une longue et lamentable descente aux enfers semble s'amorcer, dis-moi. Tu t'es emprisonné dans la toile d'araignée que tu as toi-même tissé, et maintenant, tu vas devoir te boulotter toi-même si tu veux subsister. Te sens-tu capable de renoncer à ton orgueil, hm ?


HORS de question que j'évacue ma fierté, fut-ce elle polluée par QUINZE ans de déshonneur ! Je ne permettrai pas à cet outrecuidant bric de me passer une laisse autour de la gorge ! Né Baron, Mort Esclave, par ma sclérose ! JE NE PEUX PAS INFLIGER CELA A LA FAMILLE BRIX-keuf ! keuf !-

Tu vas devoir te rendre compte que le pire a déjà été fait, Balty. Quoique tu fasses aujourd'hui, la lépreuse paluche de l'opprobre s'est définitivement emparée de notre malheureuse famille, une souillure qui ne partira pas même par le nettoyage acharné de cinq générations derrière toi : notre nom sentira à jamais les relents âcres du vice, de la débauche, de l'incompétence et de la folie, oh, d'une FOLIE si profonde que tu n'en as même pas encore touché le fond ! Ton rôle, ignoble aigrefin, ne consiste plus qu'à sauver ce qui peut encore être sauvé. Fortune, domaines, influence. C'est encore à ta portée. Mais tu dois te trouver des serviteurs, qui soutiendront, volontairement ou non, cette démente entreprise que tu t'efforces de pousser laborieusement depuis maintenant plus de dix ans.

Ton orgueil ? Tu ne peux PLUS te permettre de contenir un soupçon de fierté, Balty. Tu n'es plus qu'un rat rongeant ce qui lui reste de bravoure, se gavant des miettes de son passé jusqu'au sinistre jour où il ne lui restera plus rien à se plonger dans la panse. L'orgueil est conçu pour appartenir aux nobles : la fierté d'être bien né et d'avoir su stabiliser et nourrir la gloire que nous ont laissé nos ancêtres. Or, aujourd'hui, tu n'as plus rien de noble. Ainsi, de l'Orgueil ? C'est un met de luxe, pour toi, très cher : tu devras faire sans désormais.


Me soumettre à ces deux terreurs de foire et à leur ménagerie ?! Tu n'y penses pas sincèrement, Maman ?!

Lorsque la situation t'offrira une occasion de t'affranchir de ces guignols, tu t'engouffreras dans la brèche. Et même si ça doit te fendre le palpitant de te l'admettre, Maxwell avait raison : tu n'as nulle part où aller. Alors pourquoi partir, incandescent pestiféré ? Plutôt t'en faire d'efficaces boucliers de viande en cas de besoin. En équilibre sur ton point de non-retour, ton passé parsemé de corps mutilés te rattrape ! Tu joues au funambule au-dessus d'une mer de sang et d'immondices, Balty : prends garde, le niveau monte ! Lorsque ton fil cassera, il te faudra un appui pour éviter de te noyer dans cette misère que tu as fais gicler toutes ces années. De belles années, distrayantes ! Mais il est l'heure de passer à de plus vastes ambitions.

... Hmmf. Tu as sûrement raison.

C'est la parole de ta Mère que tu remets une nouvelle fois en cause, tocard ?

J-Je ne suis jamais sarcastique envers toi, Maman !
Je vais changer de comportement.
Et le jour venu...


Tu reprendras tout ce qui t'es dû. Dont ta fierté...
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Les boutefeux étaient entassés  comme du petit bois et crois le ou non une mèche brûlait encore. Et a côté deux barils de poudre plus proches qu’un mari de sa femme, prêts à exploser. Quant aux canons autant les jeter par dessus bord, des lumières à déboucher, de la rouille sur les fûts. Des écouvillons aussi nus que des broches et des câbles si pourris que je coudrai pas un bouton avec.


La punition était rude mais légitime. Difficile pour des marins de naviguer avec à leur bord un homme susceptible de saborder le navire, de tenter une mutinerie ou pire : de les poignarder dans le dos une fois sur terre ! Benjamin était convaincu qu’il fallait mâter le nobliau. Il accueillit donc avec froideur les insultes livrées au capitaine. Finalement Maxwell se retira, conscient qu’on ne pouvait extraire tout le venin de Brixius en une seule aspiration. Benjamin souhaita également tenter quelque chose. Il n’y a pas d’homme qui ne soit haineux sans avoir une raison. Il s’approcha donc de Balthazar, s’installa confortablement et alluma sa pipe consciencieusement.

Plusieurs minutes s’échappèrent, Benjamin fumait tranquillement en profitant du bruit mélodieux de la mer. Puis il prit la parole.



Gueules et abysses  341595benji

Je ne sais pas vraiment pourquoi tu réagis de cette manière jeunot. Mais je vais t’expliquer comment ça va se passer pour toi. Vu nos frasques respectives sur Poiscaille, on va certainement gagner une petite prime sur nos trognes. C’est sûrement une joie pour Maxwell qui compte marcher sur les traces de son père, ça l’est pas forcément pour nous. Avec une prime, on s’attire souvent davantage d’ennuis. Pour les éviter, il vaut mieux avoir quelques amis partout où l’on va.

Tu peux faire mine de pas écouter freluquet ! Tu vas pas bouger de là alors je vais continuer à parler tout seul et si tu entends quelques bribes ce sera toujours ça de gagné.

Donc je disais, il faut des amis. Si je suis toujours en un seul morceau, moi, Le Landstorm ! C’est parce que je suis un frère de la côte, que partout où je vais je peux tomber sur un homme ou une femme prêts à tout pour me venir en aide. C’est la même raison qui m’a poussé à aider Maxwell alors que je faisais profil bas depuis des années. Ce que j’essaie de te dire, c’est que t’as une chance incroyable d’avoir un homme comme Maxwell prêt à t’accepter sur son navire et à faire de toi un frère de la côte. Une chance pareille, ça se refuse pas à moins d’être un fieffé crétin. Alors si tu veux pas qu’on te balance à la mer, tu serais avisé de changer de ton et de faire fi du passé. En plus, marin est la plus noble des races, ce qui devrait te convenir parfaitement nobliau.



Benjamin réajusta sa position, se gratta négligemment les favoris de sa main et attendit une réaction de Balthazar.

- Mordiou ! Si tu me parlais un peu de toi !? Je connais ton nom que par le capitaine mais guère davantage. Si on est parti pour devoir se supporter un moment, autant se connaître freluquet.

Pas particulièrement pressé par le temps, Benjamin ne bougea pas d’un pouce, gratifiant même Balthazar d’un sourire mystérieux.

- Bon, t’es pas bavard alors je vais commencer les présentations. Moi c’est Benjamin Landstorm, Le Landstorm pour certains. Je suis marin et frère de la côte. J’ai fais tout ce qui pouvait se faire sur un navire. J’ai vu pas mal de mers différentes et ai toujours survécu. Pour mon âge, c’est un gage de compétence ou tout du moins de chance. J’aime le rhum, le tabac, la mer. Je ne rêve que de navigation et de vie en mer. Mais j’ai aussi ma part d’ombre et de peur. Mais tu en sauras plus si tu daignes me parler un peu de toi Balthazar.  

C’était la première fois depuis leur rencontre que Benjamin daignait appeler son vis-à-vis par son prénom… Un signe fort qui signifiait que le marin souhaitait vivement en apprendre plus sur l’ancien chasseur de primes.
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A quand remonte donc la dernière fois qu'un pechenaud t'ait parlé ainsi ? ... Jamais, certes, c'est probable. Jamais. On dirait qu'il souhaite sympathiser, le pauvre, et il ne récolte que du silence ! C'est pourtant le moment de lui offrir ce qu'il veut, si tu veux tomber dans les bonnes grâces de cet équipage de malandrins -ce qui, j'espère que tu ne l'as pas oublié, doit être ta priorité si tu veux percevoir l'avenir autrement qu'à travers le lugubre outremonde-. Fiches moi ton orgueil à la poubelle, tu le récupéreras quand tu auras les moyens de le lustrer et de le faire à nouveau briller de milles feux, aux côtés du nom de notre famille.

Je suis le BARON BALTHAZAR B. BRIXIUS ! Autrefois j'avais TOUT, aujourd'hui je n'ai même PLUS le privilège de conserver ma FIERTÉ ! Je me suis appliqué DIX ANS à rebâtir PATIEMMENT la fortune, le prestige et le statut de ma famille, en traquant trésors et têtes à travers les blues et jusqu'en enfer pour certains, à broyer entre mes mains la racaille la plus nauséabonde de ces mers, à asseoir mon autorité sur des COLLINES DE CADAVRES, à démontrer aux INGRATS, aux BÉATS, aux IGNARES, aux MAROUFLES et aux CHIENS que je leur étais TOUJOURS SUPÉRIEURS malgré la souillure que j'ai étalé sur notre blason !

Et tout cela POUR TOUT PERDRE ! TOUT PERDRE PAR LA FAUTE D'UN MÉCANIQUE PRIMATE DE LA MARINE QUI A TARTINÉ SON IMMONDE FANGE SUR LES MIETTES DE MON HONNEUR ! QUI M'A POUSSÉ A LA FAUTE ! MAIS, GHINHINHIN, JE LUI AI FAIS PAYÉ ! ILS ONT PAYÉ ! J'AI EXTIRPÉ LES FLAMMES INFERNALES ELLES-MÊMES DE LEUR FOSSE A PURIN POUR LEUR FAIRE GOÛTER LEUR ARDENTE JUSTICE !


Bah. Il devrait saisir l'essentiel de ce "résumé". Tu as distillé de nombreux détails bien intimes, mais noyés parmi les parasites verbaux et cette haine toxique, aucun risque qu'il ne parvienne, ce vieux lièvre, à distinguer l'aiguille de vérité perdue dans cet immense tas de fumier qui dessine grossièrement ton noir passé. Une dense purée de souvenirs douloureux, fort indigeste !

Tu veux un rêve, mécréant ? JE VEUX RETOURNER LA-HAUT ! SUR CE TRÔNE QU'ON M'A INJUSTEMENT CHAPARDÉ ! ENTOURÉ DE SERVILES LAQUAIS ! JOUIR DE CETTE NOBLESSE POUR LAQUELLE J'AI ENDURÉ LA -stricte mais efficace- ÉDUCATION DE MA VÉNÉRABLE MERE, QUI S'EST ACHARNÉE A FAIRE DE MOI LE GUERRIER QUE JE SUIS AUJOURD'HUI ! JE VEUX ÊTRE COMME CE VAUTOUR QUI REGARDE LE PETIT PEUPLE MOURIR DU HAUT DE SON PERCHOIR, ET QUI S'EN DÉLECTE ! Je n'ai qu'un rêve et c'est CELUI-CI !

Eh bien, on ne t'arrête plus ! Tel un arbuste empli d'une putride sève, qu'on saigne pour lui épargner de pourrir. Il est vrai que tu n'as jamais connu le repos, Balty. A peine sorti de mon "strict" carcan, comme tu dis, tu m'as TUÉE, sur l'un de ces hystériques coups de folies qui sont devenus quotidiens aujourd'hui, et bien entendu, ce n'est pas un secret que tu délivreras au premier bouffon venu. Te souviens-tu des premières semaines, lorsque je suis "revenue" ? Tu t'es laissé sombrer, terrorisé, brisé par les remords, tu te sentais devenir fou mais c'était une force bien plus puissante que la volonté de n'importe quel homme. C'est finalement probablement l'unique période où je t'ai surpris à ressentir les sentiments les plus humains qui soient.

Ensuite, les déboires se sont enfilées les unes après les autres, un collier de perles sombres et opaques.

Donc, oui, tu n'as jamais connu la paix, tu ne sais pas ce qu'elle est, ni ce qu'elle implique. Tu es en perpétuelle bataille, pour ton passé, contre tes pulsions, face au monde, et mis à part moi-même et mes sages mais désillusionnés conseils, tu as toujours livré tout ces combats complètement seul.

Hinhinhin. Le Mal puise toujours ses origines dans la douleur. Et dans la faiblesse.
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Héhé, si ce n'est pas vrai et sincère. L'humain est tendre à qui s'y intéresse, et Brixius ne fait pas exception à cette règle. Il baisse déjà sa garde, comprend qu'il ne gagne rien à combler le vide émotionnel intersidéral qui l'habite par une haine incontrôlée. Déjà il s'ouvre au vieux Landstorm, alors que dans l'ombre des escaliers menant vers la cale, je les observe tergiverser. S'il crache encore comme un chat de gouttières, s'il fait toujours preuve d'une hargne sans pareil, au moins, déjà, il s'améliore. Je ne sais si je dois me féliciter pour cette minime victoire, mais je me doute que la route sera longue avant de faire de Brixius un homme de bien. Tu t'en doutes aussi, mon brave Napoléon, alors que tu guides le St-Margot en agrippant tes pattes antérieures au gouvernail.

Hm ? Qui a-t-il, Napoléon ? En quel honneur pousses-tu un couinement aussi sonore ?

Surprise ?

Tes grands yeux sombres clignent à plusieurs reprises. Tu lâches la barre, intrigué, pour t'avancer vers le duo qui discute sur la proue. Duo ? Non. Et c'est bien cet improbable doute qui semble te tenailler, Roi des capibaras, puisque tu vois bien trois personnes au devant du St-Margot. Trois ? Oui, puisque le vieux Landstorm et le putride Baron semblent tous deux accompagnés dans leur dialogue d'une étrange compagne ! Qui est-elle ? Oh ! Tu sursautes, Napoléon, lorsque tu considères sa longue robe bouffante totalement déchirée, ses yeux vides et sa peau translucide ! Et elle flotte à mi-hauteur entre les planches du pont et les gréements ! Elle chuchote quelques intrigues à l'oreille du Baron, puis, satisfaite, se relève pour tourner son regard spectral vers toi.

- Snizz…

Tu avances, intrigué, mais fort d'un courage sans pareil, brave Napoléon. Et comme tu progresses vers la mégère dont la peau te semble décharnée et le corps malingre, elle penche la tête de côté avec un air à son tour intrigué. Tu lèves le museau vers elle, tentant de renifler toute trace de vie chez ce drôle d'être fantomatique. Rien. Elle n'existe pas, cette drôle de patricienne ruinée ! Elle n'existe pas et pourtant tu la vois !

- Snizz !
- Comment ?! Par quel effroyable fumisterie ..!

Tu sursautes au même moment qu'elle, Napoléon. Elle semble aussi surprise que toi du fait que tu puisses la voir ! Bon sang ! Un fantôme, sur le navire du Capitaine Percebrume ! Tu t'es débrouillé pour dégoter à ton compagnon d'aventure un navire chargé de vivres qui saurait répondre à ses attentes, fier rongeur, mais ne savais-tu point qu'il était hanté ? Attends… Ou bien n'est-ce pas le navire qui est hanté… mais bien Balthazar B. Brixius lui-même !

Tu renifles, tu observes, sous le regard hargneux et terrorisé de la matrone qui t'invectives en soulevant ses jupes.
Un mot. Un seul, qui suscite soudainement un sens nouveau concernant l'esprit tordu et gangréné du Baron.

Maman.  


Une surprise ? Laquelle ? De quel acabit, Napoléon ?  OH ! Est-ce la menace de cette puissante vague qui a alerté tes instincts les plus sensibles, mon cher ami ? La mer est calme, pourtant… par quelle phénomène climatique le flanc du St-Margot peut-il encaisser une secousse si surprenante ? Je quitte la pénombre des escaliers pour m'avancer sur le pont avec inquiétude. La mer, cette vilaine amante. Quel présent nous réserve-t-elle pour nos premiers jours en son sein ? Parbleu ! À bâbord, la mer s'excite et bouillonne avant qu'une masse d'eau ne gagne subitement en ampleur. La surface gonfle, s'élève en une montagne aqueuse qui prend bientôt des proportions colossales, réduisant le St-Margot à l'état d'insignifiant moustique ! Je savais les mers du monde habitées de mille dangers, mais je ne croyais pas le large de West Blue si bien garni !

La montagne d'eau s'effrite et se désagrège en lourdes pluies et chutes qui arrosent goulument le pont du St-Margot, nous faisant glisser à terre sous des trombes d'eau de mer. M'accrochant tant bien que mal à la rambarde, je lève des yeux empreints d'une fascination apeurée vers la monstrueuse falaise d'écailles ruisselantes qui s'élève à des centaines de mètres au-dessus du navire. Des yeux brillants de fureur, aux paupières assez grandes pour broyer notre sloop, s'ouvrent loin dans les airs, au sommet d'une tête surmontant un cou de plusieurs milles nautiques. Deux énormes pupilles verticales se braquent sur nous, brillant d'une inquiétante intelligence. Quel monstre…

- Mordiaaaable !
- Palsambleu…
- Kiiii !
- Landstorm ! Napoléon ! Tous à vos postes !
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Les courants marins transportaient paisiblement le sloop jusqu’à ce qu’une vague inhabituelle vint choquer la coque par bâbord avant. Benjamin se redressa aussitôt, ce brusque changement d’orientation du courant, il ne l’avait pas envisagé. Ses yeux se raidirent et il se précipita sur le bord du navire. Ses mains se crispèrent sur le haut du bastingage, ses yeux s’écarquillèrent et sa bouche s’ouvrit aussi large que les portes d’Enies Lobby. Devant lui surgissait l’allégorie même de la peur en mer.

- Mordiaaaable !
- Palsambleu…
- Kiiii !
- Landstorm ! Napoléon ! Tous à vos postes !

Benjamin perdit quelques temps à contempler l’animal qu’il avait déjà rencontré auparavant. Il se souvenait avoir grimpé un jour funeste sur ce dos rocailleux. Il regardait avec cette même crainte ce monstre marin si dangereux. Puis il revient à lui aussi vite que la poudre explose au contact du feu.

- Cap de diou ! Cette petite salope de serpent des mers !

Il s’élança aussitôt vers le gouvernail, au passage il retendit le foc d’un coup sec pour assurer une bonne prise au vent. Attrapant la barre, il grinça des dents à la vue de cette tête monstrueuse. Le serpent croisa son regard et tout fut dit, l’instant d’après il ouvrit la gueule et plongea pour avaler une partie de la coque. Benjamin tourna la barre aussi vite que ses bras lui permettaient de le faire. Le sloop changea brusquement de cap et la gueule du serpent replongea dans les sombres eaux de West Blue.

- Capitaine ! Je connais cet infortuné bestiau ! Il va revenir et des bras supplémentaires ne seraient pas de trop.

Et d’un coup de tête entendu il désigna Balthazar qui était toujours solidement ligoté au mât. Le sloop filait droit grâce à un vent de côté vigoureux tandis qu’au loin, l’on pouvait distinguer le corps du serpent louvoyer vers sa cible. Benjamin cherchait une échappatoire mais aucune embouchure ne se révélait, le chemin était irrémédiablement continu. Il fallait gagner du temps, remonter le courant pour trouver une porte de sortie, un passage étroit, n’importe ! Quelque chose !

- J’ai besoin de gagner un peu de temps Capitaine Percebrume. Pour avoir déjà tâté de ses écailles, elles sont dures comme la roche, inutile d’y aller aux canons. La fuite, Capitaine, la fuite est la seule solution. Notre seul salut.

Et il vira de plus belle pour rendre la trajectoire du sloop la moins lisible possible pour le serpent. Une nouvelle vague fut soulevée par le monstre qui  manqua bien de renverser le navire, les hommes s’en tirèrent à bon compte en n’étant que complètement trempé.

- HAHAHA ! L’endroit est bien trop sombre pour accueillir la dépouille du Landstorm ! HARDI AUX BOULINES !

Et tandis que Percebrume s’afférait d’une main experte sur la bouline de la grand-voile, le navire attrapa un coup de vent puissant et le sloop fila grand train. Ils avaient gagné un peu d’avance… Un peu…
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Hum. Surnaturels moments s'enchaînant comme une discordante mélodie. As-tu vu cet infect rat à poils blonds palper ma robe d'éther ? L'as-tu pris en flagrant délit, toi également ? Il flairait l'outremonde, le plan secret intercalé entre la réalité des vivants et celle des morts, il communiquait avec cet univers intriqué dans un autre univers ; à la façon d'une petite poupée russe cachée en une plus grosse. J'étais persuadé que tu étais seul apte à communiquer avec cette quatrième dimension. Mais ce capibara, cette... odieuse bestiole crasseuse issue d'un dessin raté et bâclé de mère Nature... Il a lui aussi le Sens. Qui l'aurait cru ? Voilà si longtemps que je n'ai pas été surprise. Que le monde des vivants ne m'avait pas joué un aussi désarçonnant tour ! J'avais cru le localiser en son regard, sur Inari. Mais je n'y avais pas cru. Ce grotesque animal vient de trouver un point commun avec toi, outre sa stupidité, Balty. Ses yeux et son esprit sont conçus pour voir au-delà de cette plate réalité.

Qu'en penses-tu ?


HAAAAAAAAA ! DÉTACHEZ MOI DE LA, IGNOBLES CAPITULAAAARDS !

Ah ! Bien entendu. Pour une fois que je proposais un débat qui aurait élevé un petit brin ton niveau de conscience, tu te préoccupes de ta bénigne petite survie. Ce n'est rien qu'un gigantesque serpent de mer, une anguille minable au cuir comme une muraille. Et à l'encéphale reptilien gorgé de l'intelligence d'un vicieux prédateur. Rien de...

Oh, oui, il est vrai qu'il est impressionnant tout compte fait : il fait beaucoup de bruit et soulève de nombreuses vagues, de belles houles à l'écume clapotante et vorace. Mais comparé à un "capibara" qui distingue les morts des vivants, c'est tout à fait médiocre et oubliable.


Quelle diablerie... Que signifient CES NOUVELLES MINAUDERIES ?! QU'EST-CE CETTE TRAJECTOIRE DE NAVIRE IVRE ? JE N'AI PLUS RIEN A VOMIR, SACS A VICES, ET S'IL M'EN RESTAIT ENCORE, JE GARDERAIS MA GERBE POUR VOS TOMBES ! BLEUUUARGH !

Une espèce de vase translucide giclant de tes lèvres croûteuses, aucun doute, c'est de la bile. L'une des rares substances de ton corps miteux que l'on voit peu sortir à l'air libre. Là-derrière, sur le pont, à la barre, aux voiles, les trois simplets semblent presque prendre du plaisir à craindre pour leur vie. Inconscients, et d'une prétention à pourfendre celle des dieux, ils se jouent de la créature en adoptant cette erratique trajectoire. Alors donc, le vieux fou buveur d'eau salée connaît ce trouble-fête à écailles ? Hinhinhinhin ! Tu n'es donc pas le seul aimant à problèmes de ce friable équipage, Balty ! Bientôt, c'est un enivrant tsunami de secrets insoupçonnés qui vous fera chavirer !

Les secrets sont un véritable poison pour une société, oh oui ! Si hâte de découvrir lesquels tueront vos ambitions en premier ! Cette grosse hydre pataude et furieuse n'est qu'un hors d'oeuvre !

De narquois hurlements distillés à l'arrière parviennent à tes esgourdes harcelées par d'incessants clapotements, les gémissements du navire brinquebalé comme une âme en peine, ainsi que par les sarcasmes d'une écume hurlante.


DIS-MOI, BALTHAZAR ?!
NUL BESOIN D'ABOYER, VIL CHIOT, EST-CE QUE JE BEUGLE, MOI ? VIENS T'ACQUITTER DE TON DEVOIR ET RAMENES MOI SUR LE PONT DE CETTE COQUE DE...
QUI EST TON CAPITAINE, CHER BARON ?

Une bille de plomb s'immisce dans ta gorge et tu as beau déglutir, tu ne parviens qu'à la rendre plus lourde et douloureuse ! Cette bille, hinhin, c'est ton orgueil, toujours présent, qui entrave les mots justes et intelligents qui devraient sitôt te sortir du gosier pour t'extirper de cet haïssable pétrin ! Repenses donc à mes conseils, à nos réflexions, et à cette indiscrète confession que tu as cru bon d'offrir à la vieille breloque.

Il s'agit de vivre. Et de, faute d'avoir pu sauver ton passé, protéger ton avenir, pauvre buse !


Tu es mon capitaine.
ON ENTEND RIEN, AVEC CE BOUCAN ! PLUS FORT ! TOI QUI SAIT HABITUELLEMENT HURLER PLUS HAUT ENCORE QUE L'OCÉAN !
TU ES MON CAPITAINE, MAXWELL !
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- Hahaha ! À la bonne heure brave compagnon !

Mon sabre d'abordage quitte son fourreau et fend les cordes qui maintenaient le Baron ligoté. Te voilà bien servi par ta clairvoyance, Baron ! Je ne peux retenir un franc sourire alors que les lambeaux de chanvre tombent à l'eau et que Balthazar manque basculer avec eux. Je lui tends une main qu'il n'hésite pas à prendre afin de le tirer sur le pont. De nouveaux soubresauts éprennent le St-Margot, nous jetant à terre, alors que la forteresse mouvante s'approche de nous en soulevant des panaches d'écume. Me relevant aussitôt, je constate que tu escalades tant bien que mal les gréements, Napoléon. Avec du cordage dans la gueule, tu tentes de faire pencher la voile latine de toute tes forces de rongeur, suivant les consignes du Landstorm.

- Tribord toute !

Le gouvernail s'emballe et fait plusieurs rotations avant d'être rattrapé par le vieux marin ! Le virage est sec, et il envoie bouler le Baron contre la rambarde. Un grondement se fait entendre, puis c'est le colossal serpent de mer qui frôle la coque du St-Margot, faisant dangereusement tanguer l'embarcation ! C'était moins une !

- D'où connais-tu ce monstre, Landstorm ?!
- C'est une bête maudite qui a décidé que je serais le seul marin de cette ère à finir dans son ventre, boudiou !

Mes yeux s'écarquillent avec horreur, un frisson me parcoure l'échine. Je rive un regard terrifié vers le monstre qui freine sa course pour revenir de plein front, à la manière d'un taureau en pleine charge. Cette bête serait le Roi des Rois ? Le monstre marin légendaire, invincible créature née des tréfonds du Nouveau Monde et dont le seul loisir est de tuer ? Ici ? Sur West Blue ? On dit qu'aucun navire ne lui échappe, et encore moins le marin dont la bête s'est entichée. Si le Landstorm est véritablement la cible du Roi des Rois, nous sommes déjà frappés d'une bien rude routine…

- Mieux vaut l'apprendre tard que jamais, ma foi ! Comment nous en tirer ?!
- Il faut trouver un endroit où cette saloperie pourra pas nous suivre !
- Merde ! Red Line est encore à plus d'une journée de navigation !

D'un brusque coup de barre, Landstorm fait dévier sèchement le St-Margot, évitant le Roi qui plonge la gueule grande ouverte vers les profondeurs ! Je retiens de justesse un Brixius volant à travers le pont, le saisissant par ses loques d'une rapide attrapée.

- FOUTRE DIANTRE ET DAMNÉE CRÉATURE INFERNAAALE ! SOIS DONC FOUDROYÉE PAR LES CHÂTIMENTS DE TOUS LES MORTS ET LES SPECTRES INIMAGINABLES DE CETTE MER POURRIE ! JE TE SOUHAITE MILLE ANS DE SOUFFRANCES DANS LES PROFONDEURS ABYSSALES DU TERTRE PUTRIDE QUI DOIT TE SERVIR DE GROTESQUE TANIÈÈÈÈÈÈRE !

Foudroyée… Foudroyée !

- Eh bien si tu la souhaites ainsi foudroyée, Brixius ! Fais donc de ton rêve une réalité !

Je le lâche et il tombe lourdement sur le pont, alors que sous nos yeux émerge le long cou et la tête cornue du colossal serpent de mer. Il s'élève si haut que j'en perd son crâne de vue, trop ébloui par le soleil, mais je devine qu'il espère bientôt nous écraser ! Il faut que Balthazar se grouille !

- Dépêche-toi de l'embrouiller de tes pouvoirs, Brixius !

Il me fixe, incrédule un instant que je lui donne un ordre sensé, puis son regard s'assure et se diabolise alors qu'il tend les mains vers le Roi.

- QUE TU SOIS ÉPRIS D'UNE TORPEUR BOUILLONNANTE ET MILLÉNAIRE FACE À L'INCONTESTABLE HÉGÉMONIE DE MA PUISS-
- PLUS VITE BRIXIUS !
- HMPHF… ACÉDIAAAAAA !

Une vive vipère lumineuse est éjectée d'entre les mains du Baron et file à travers les airs vers le monstre. Monstre qui se ramassait d'ailleurs pour nous percuter de sa gueule béante ! Soudain, frappé d'un soubresaut, le monstre cesse toute activité un instant. Le sort de Brixius aurait-il fait mouche ?

- HA ! Le voilà frappé et SOUMIS au vice de PARESSE !

Les yeux du monstre brillent soudainement d'une lueur nouvelle. Inquiétante. Ses dents luisent au soleil alors qu'il pousse un hurlement colossal ! Je ne peux réprimer un grognement en couvrant mes oreilles de mon mieux ! Il n'a en rien été frappé de paresse !

- Tu as confondu paresse avec colère, malandrin !

Une énorme queue jaillit des flots, soulevant des trombes d'eau de mer. Le long serpent hurle et grogne avec insistance alors qu'il se débat et soulève d'énormes vagues dans une rage incontrôlable ! Et s'il écrasait le St-Margot ? C'en serait fini de nous ! La queue tourbillonne, convulse et frappe de  tous côtés… pour percuter de plein fouet le tribord du St-Margot !

- Accrochez-vous !

Le bois gémit  et claque sous les lourdes écailles du monstre, puis soudainement, nous gagnons en vitesse et c'est à peine si nous avons le temps de nous soutenir que déjà le choc éprouve le navire dans une puissante déflagration. Je ferme les yeux, sentant le vent arracher les planches et balayer les voiles, n'entendant plus que le rugissement de navire fendant l'air et les échos du Roi des Rois… Puis le calme. J'ouvre un œil, craintif, puis un autre, et c'est un ciel radieux qui répond à mon regard. Le balancement de la mer ne se sent plus sous la coque, l'air est frais… Je me relève, ne comprenant pas à quel malheur nous sommes proies, alors que Landstorm, toujours cramponné au gouvernail, lève un œil suspicieux à son tour.

Je m'approche de la rambarde, penche la tête et… incroyable !

- Incroyable ! Hahaha ! Nous volons ! Nous volons ! Le coup a été assez fort pour nous faire gagner un bon millier de mètres d'altitude !
- Et quelle insipide falaise ce profile loin là-devant ! hurle un Brixius euphorique et pointant l'horizon.

Une longue ligne rouge grossit à vue d'œil alors que nous planons gracieusement entre les nuages. Red Line et l'Anse aux mégardes, notre passage vers South Blue !

- As-tu déjà amerris Landstorm ?
- Parbleu non ! Mais aies confiance Capitaine, ce n'est pas avec un vent aussi frais que le Landstorm va périr !
- Aha ! Eh bien montre-nous ton talent, et remercions le Roi des Rois au passage !
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Par une chance incroyable, le sloop volait dans les airs avec une remarquable stabilité. Benjamin lorgna sur les nuages, compagnons de voyage pour quelques minutes encore. Il songea à ces mers de nuage qu’il aimerait tant connaître et côtoyer. Le gouvernail étant devenu inutile, le marin quitta la barre pour se lover contre un moment dans un coin du navire et profiter de cet instant insolite. Il tenta bien d’allumer sa pipe mais le vent était trop rigoureux pour permettre ce genre de fantaisie. Il la garda pourtant en bouche comme pour narguer ce vent puissant et ce sort si étrange.

En face d’eux Red Line grossissait à vue d’œil et offrait une vue imprenable sur son immensité. En contrebas la mer se livrait totalement, on pouvait y distinguer les courants principaux, les vents inférieurs léchant la surface de l’eau. C’était un spectacle joyeux, une mer qu’il n’avait jamais apprécié sous cet angle. Cette scène favorisait l’émotion indubitablement et si le vieux marin n’était pas un homme foncièrement réservé à l’endroit de ses sentiments, il aurait probablement versé une larme ou deux. Se retourna vers ses compagnons, il leur donna tout de même un avant gout de son ressenti.

- On ne vit que pour des spectacles comme celui-ci.

Il aurait voulu prolonger ce moment au prix de plusieurs années de sa vie mais il ne le pouvait. Le navire avançait toujours inlassablement sans faiblir, le serpent des mers démontrait une nouvelle fois sa redoutable puissance. Il était toutefois temps pour le marin de laisser place au navigateur. C’est donc un Landstorm plus froid, plus méthodique qui s’approcha de la proue du navire. Il resta seul, au plus près de l’avant du sloop à examiner méticuleusement les alentours. Il ressentait la vitesse du vent, le poids navire, la distance qui les séparait encore de Grand Line. Instinctivement il savait que faire. La chute allait être rude et l’impact important. L’objectif était de ne pas trop éprouver la quille sur toute sa longueur. Il fallait que le navire perde de l’altitude sous peu.

- Allons Freluquet ! Gamin ! Rongeur ! Si vous doutez de la qualité de votre pied, accrochez vous à du solide.

Il laissa encore quelques secondes s’écouler. Non pas qu’il souhaitait s’assurer du respect de sa consigne, non, juste que le moment n’était pas encore venu. Puis soudain sa mâchoire se contracta, son œil se plissa et il sauta légèrement en l’air avant de retomber lourdement sur le pont du navire. Aussitôt le sloop entama une descente rapide vers la mer. Benjamin, mains sur les hanches, ne bougeait pas d’un iota comme s’il était une pièce du navire. Son pied marin était probablement l’un des meilleurs au monde et il en faisait une nouvelle fois la démonstration. Le vent avait redoublé mais il souriait comme jamais.

- Mordiou ! C’est un joli vent qui nous accueille ! Vous sentez ça vous autres ? Demanda-t-il sans prendre la peine de se retourner.
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Les hautes altitudes m'arracheraient un frisson, si seulement j'avais encore une chair capable de trembloter. Je n'ai jamais aimée les hauteurs, brrr ! Le vertige était ma seule et unique nemesis, je crois bien. Une très coriace hantise. Ne te sens-tu pas plus léger ? Moi si, un brin. Ce qui est tout à fait burlesque, compte tenu que je ne suis qu'une projection de l'outremonde. Et que je pèse ainsi encore moins que le rien. Hmmf. Dérangeantes sensations ! Les souvenirs de sentiments savent être de véritables parasites parfois.

La main est différente pour toi, Balty. Tu te gorges d'une sensation de puissance, d'un contrôle effréné sur ce ciel bleu qui t'a toujours nargué : ce soleil arrogant qui diffusait sa lumière là où tu aurais voulu baigner dans les ténèbres. Ce vent débridé qui charrie ton fumet fétide, dans une furtive pollution semée par-delà les blues. En une modeste dizaine de minutes, tu sembles avoir autant voyagé qu'en dix ans.

Et je le perçois ! Écoeurant.
Je le souligne en ton regard.
Ça me saute aux sens comme un terrible coup de tonnerre.

Ce romantisme de ton enfance,
Ces heures perdues, enfoncé dans tes bouquins,
Enfoncé jusqu'au cou et jusqu'aux rêves,
Lire et relire les récits de ceux qui ont façonné ce monde que tu hais,
Des contes t'extirpant de ta sordide réalité pour t'inviter dans un douillet cocon,
Une flamme depuis longtemps éteinte qui réapparaît, une fraction de seconde durant,
Une étincelle de candeur. Tu es redevenu enfant.
Avec tout ce que ça implique.
Les corrections, le martinet, les geôles, les responsabilités écrasantes, ton vieux père grabataire.
Le matricide.
Les pouilleux, les révolutionnaires, les révolutionnaires pouilleux, la plèbe se gaussant de tes malheurs.
Les Brixius rayés subitement du miteux livre de l'Histoire.
Ta haine censure ce bref instant de perdition.

Vous allez atterrir.

TE CROIS-TU DANS UN AÉRONEF, TAUREAU GÂTEUX ?! ON VA S'ÉCRASER SUR CETTE PROTUBÉRANTE HÉRÉSIE GÉOLOGIQUE !
Tu paries combien, l'nobliau ? Accroches toi à ta redingote, ça va secouer !


L'impact arrive à grands vents. D'ici est visible l'Anse aux mégardes, l'une des mâchoires béantes de Red Line la dévoreuse de rêveurs ! A vue de nez... Vous allez tomber pile sur sa langue ; là où est le courant lèche avec gourmandise les noisettes de bois fourrées à la viande qu'offrent les boucaniers trop téméraire à cette démente falaise ! Une exploration dans ses labyrinthiques boyaux. Incontestablement un lieu sain où faire de magnifiques rencontres, hinhinhin. Mise à part d'atroces mutilations assorties de décès plus ou moins lents et savoureux, je ne vois guère ce que vous pourrez bien dénicher de bon, là-dessous ! ... Si seulement tu parviens à te maintenir cloué à ce navire en peine, bien entendu. Impact dans cinq secondes.

Tu câlines le mât. Priant pour qu'il ne cède pas, ou ne valdingue pas, t'emportant dans sa folle envolée.
Impact dans deux secondes.


Par les hémorroïdes frelatées de Basara ! Je m'en vais vous...

La gravité t'interrompt. Une secousse à faire trembler les cieux, le hurlement sourd d'un navire à l'agonie, la violence de la chute de cette minable gabare sur un implacable plancher d'eau moins accueillant encore qu'un tapis de béton, et une désespérante succion, l'horrible bouche rouge qui, sans temps mort, menace de vous aspirer goulûment. Et de vous mâcher dans la foulée, cela va sans dire !
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Le St-Margot gémit et grince alors qu'il s'engage dans l'Anse aux mégardes. Le choc du Roi des Rois ne l'a pas laissé sans égratignure, et déjà le sloop rudement abîmé nous fait sentir les affres de ce légendaire vol plané. Qui aurait cru que l'on pourrait parcourir une si grande distance en si peu de temps, après tout ! La voilà, l'essence du voyage et de l'aventure ; cette tendance constante à l'imprévu et au risque, deux des meilleurs compagnons des véritables frères de la côte. Je garde bien en tête l'air carnassier du Roi des Rois, véritable tribun et incontestable leader au sein de l'assemblée des monstres marins. Il ne peut exister créature plus terrifiante, plus grosse et plus violente que ce terrible serpent de mer… Ici, au moins, nous sommes hors de sa portée.

Mais de nouveaux dangers nous guettent.

Courage, St-Margot ! Je te sens faiblir alors que le Landstorm joue du gouvernail, battant fort contre le courant et les récifs traîtres émergeant ça et là aux abords de Red Line. Et Red Line. Quelle falaise. Elle s'étend du nord au sud à perte de vue, s'élevant en une ombre colossale au-dessus de nos têtes, nous couvant de son inaccessible présence monolithique. Si nous devions percuter le mur du continent, nous n'en sortirions pas vivants, comme bien des marins inexpérimentés. Si l'Anse aux mégardes est un endroit prisé des pirates pour accéder sous Red Line, c'est bien évidemment parce que seuls les plus expérimentés peuvent prétendre à la traverser. Embouchure dentelée de rocs et de récifs, aux rapides voraces et imprévisibles, l'Anse porte très bien son nom.

- Là-bas !
- Snizz !

Devant nous, les courants s'entremêlent et s'entrechoquent dans des grondements effroyables. Des torrents d'écume s'élèvent de longs rochers ciselés par les éléments, délétère chemin menant vers une béante cavité s'engouffrant dans les profondeurs du continent. Le boyau menant à la Flaque ! Le voilà ! Je me tourne vers Landstorm, alors que je m'élance vers les gréements, que Napoléon court le long de la grande voile et que Brixius se cramponne avec désolation à la rambarde à moitié arrachée de notre sloop.

- Ferlez-moi toute la voilure ! On va s'laisser porter par ce courant vicelard !
- QUEL MALIN GÉNIE S'EST IMMISCÉ DANS TON ESPRIT FRELATÉ POUR AINSI TE SOUFFLER UNE DÉCISION AUSSI STUPIDE, MARAUD ?!

Les voiles du St-Margot s'abaissent et se rétractent sous mes gestes habiles et précis. Néanmoins, l'équilibre est précaire, là-haut, et je me retiens de justesse à plusieurs reprises pour ne pas sombrer dans les torrents de l'Anse aux mégardes. Autour de nous, les rapides hurlent et rugissent alors que le St-Margot s'esquive et louvoie entre les rochers acérés. Imperturbable, Landstorm manœuvre le sloop avec une maîtrise froide et sèche, ne laissant jamais de répit à notre piteux vaisseau. Et il a raison d'agir ainsi, puisque sans problème notre minuscule sloop pourrait se faire broyer entre deux furieux courants. La gueule de l'Anse s'approche comme nous gagnons en vitesse ! En un instant, la lumière du jour fait place aux ténèbres du tunnel, et l'écho du torrent nous empêche de communiquer. Par réflexe, je me jette vers une vieille lampe-tempête accrochée à la porte du château-arrière pour en embraser la mèche !

- BRIXIUS ! PRENDS ÇAAA !

Je ne sais point s'il m'a entendu dans un tel vacarme, mais la lumière a attiré son regard vitreux. Il se saisit de la lampe et, en trébuchant maintes fois, parvient à la proue du navire dont il éclaire la glissade effrénée vers les tréfonds de Red Line. Les soubresauts et les chocs se multiplient alors que les tumultueuses eaux luisantes nous guident toujours plus bas dans l'étroite galerie, nous faisant virevolter encore plus que lors de notre crash aérien !

Puis, soudainement, le tunnel débouche ! Propulsé par sa vitesse accumulée, le St-Margot poursuit son élan alors qu'à nous se révèle une large caverne au plafond haut, garni de stalactites et de champignons luisants. Un demi-jour bleuté semble régner sur cette immense grotte dans laquelle se répercutent les échos du torrent s'y déversant, mais aussi les innombrables clapotis des gouttes d'eau suintant des murs.

La Flaque. Dans toute son effroyable profondeur.

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