Un dirigeable de taille modeste s’approchait du Royaume de l’absurde en développant une vitesse de croisière somme toute respectable. On discernait la coque d’un petit navire robuste sur laquelle on avait rattaché un ballon aux formes disgracieuses. A l’arrière on pouvait voir un crâne noir sur un fond rouge, le symbole des rasoirs, l’élite de la Bounty National Agency. Rydd avait préféré conserver son Jolly Roger pour un navire plus imposant, plus marquant. Pour l’heure il se contentait de porter les couleurs de sa faction la plus controversée.
Confortablement installé dans un large fauteuil qui avait appartenu à son défunt prédécesseur, Rydd fumait tranquillement un cigare de qualité en rêvassant. Le transport aérien s’avançait dans un ciel dépourvu de nuage mais agrémenté de chaleureux rayons de soleil. Le leader de la BNA songeait à l’ironie de la situation. Lui qui n’avait été entrainé que dans le but de tuer Midas et de prendre la tête de l’organisation, il était dorénavant dépourvu de tout objectif. C’était peut-être un peu tôt pour réaliser son plus grand rêve. Il fallait dorénavant se trouver de nouvelles aspirations. Mais un homme peut-il si aisément se forger un nouveau but à atteindre ? Pour l’heure il avait encore une tâche complexe à accomplir : redorer le blason de la BNA. Le Tigre avait repris les rênes de l’organisation durant une période bien sombre. Les rasoirs étaient indécis devant un nouveau chef qui n’avait rien démontré sur Grand Line, les Blues étaient loin du contrôle du Tigre, tous les chasseurs attendaient un gros coup de la part de leur chef.
C’est une pression que le chasseur de primes vivait bien. Toute sa vie n’était constituée que de regards suspicieux, que d’hommes prêts à le supplanter. C’est dans ce genre de miasme qu’il s’épanouissait le plus.
Le Royaume de l’absurde apparaissait finalement à l’horizon. Rydd réajusta son cigare dans sa bouche et attrapa un Den Den installé non loin. Aussitôt avait-il décroché qu’une voix d’homme se fit entendre.
« Monsieur Steiner ! »
« Tigre ça ira. »
« Tigre ! »
« Je m’approche du Royaume de l’absurde. Un topo sur la situation de l’île. »
Un silence pesant s’installa l’espace de quelques secondes. Rydd tapotait l’accoudoir de son fauteuil avec l’impatience du dirigeant.
« Nous avons peu d’informations sur la situation. Wakopol est au pouvoir. Un roi aux décisions originales et imprévisibles. Présence d’une armée royale, de la marine, peu de belligérants et de gros primés. »
« En gros tu me lis la gazette du monde garçon ? »
« Euh… »
Conscient qu’il n’obtiendrait guère mieux, Rydd avait raccroché violemment.
« Un de ces jours je vais fumer tous ces cons… »
La mission de l'absurde
Durant cet aparté le dirigeable avait presque rallié l’île. Le Tigre s’approcha d’une extrémité du Royaume et se posa sur la mer. La zone semblait déserte et le dirigeable en sureté. Il posa bientôt un pied sur la terre ferme, un contact appréciable qu’il savoura l’espace d’un instant. Avec expertise, il réajusta son armement. Par-dessus sa combinaison il portait un harnachement accueillant plusieurs revolvers et des couteaux tandis que dans son dos trônait fièrement deux sabres dont l’un n’était autre qu’un réputé Kitetsu.
Il longea la côte pendant un bon moment avec pour seule compagne la solitude. Enfin il découvrit une première trace de civilisation. Une sorte de village de pêcheur s’élevait non loin d’une plage de sable fin. Des coques de noix étaient présentes en nombre et tout autour s’affairait un bon nombre de villageois. Rydd s’approcha pour découvrir des individus hauts en couleur. Si certains individus semblaient être de véritables marins, d’autres portaient des costumes élégants et affichaient un air de dégoût à peine dissimulé. Finalement un vieil homme à l’air doucereux s’approcha du Tigre avec une bienveillance affichée sur le visage. Il tournicotait un béret rapiécé dans ses mains, signe d’une légère crainte qu’il tentait de dissimuler.
« Je peux vous aider monsieur ? »
« Je recherche du travail. »
« Ah Monsieur n’est pas un sujet de notre bon roi Wakopol ? » Questionna le vieillard intrigué.
« Pas du tout… »
« Pardonnez-moi, c’est que votre tenue colle parfaitement aux excentricités royales. »
« Ah bah ça ! Bien la première fois que je fais couleur locale… »
« Mais oui, ici parfois, on marche sur la tête. »
« Regardez celui là était encore un noble il y a peu… »
Et l’homme désigna d’un coup de béret l’homme élégant repéré un peu plus tôt par l’œil expert du chasseur de primes.
« Par quel miracle est-il arrivé à pratiquer cette noble tâche de pêcheur ? »
« Et bien notre très bon roi Wakopol l’a jugé plus à sa place ici. »
« De sorte que… ? »
« De sorte que Monsieur le Comte est dorénavant Bob le pêcheur qui fait briquer des perles pour notre bon Roi. »
« Quelle progression fulgurante… Enfin ! Ainsi va la vie, la roue tourne... »
« … »
« Comment dois-je procéder pour rejoindre la ville ? »
« Tiens c’est curieux tant de touristes qui veulent visiter. Vous suivez ce sentier là bas et vous y serez d’ici une heure. »
« Des touristes ? »
« Un jeune gars à l’air louche qu’est passé y’a pas deux heures. »
« Merci brave homme. »
Et Rydd se dirigea aussitôt vers le sentier avec l’espoir de tomber sur quelque chose d’intéressant. Le sentier était en réalité une route proprette qui sinuait à travers les plaines. Tout autour, de nombreux arbres fruitiers constellés de fruits mûrs étaient orgueilleusement récoltés par des fermiers manifestement ravis de la qualité de la production. La vue de ces fruits rappelait à Rydd le fruit du démon de la lumière. Un brin nostalgique, il tenta de se déplacer à grande vitesse vers un grand arbre à quelques mètres, mais rien n’y fit. Il laissa éclater un rire rauque.
« Ouais… C’était le bon temps. »
Alors qu’il allait poursuivre, un fruit fusa sur sa droite et il l’esquiva en déplaçant légèrement sa tête sur le côté. Le projectile termina sa course bien plus loin s’enfonçant profondément dans la terre. Estimant la trajectoire, le chasseur trouva rapidement le lanceur. C’était un jeune homme à la coiffure insolente et au regard hautain. Il analysa avec attention l’individu. Sa rapide investigation l’amena à remarquer des bras musculeux et secs, signe d’une force importante ; il nota les cales sur ses mains, indice d’un usage intensif ; il remarqua les quelques contusions sur son visage, marque indéniable du combattant. L’homme dégageait une aura dangereuse alors qu’il était encore installé sur une clôture de bois proche. Il lança une nouvelle pomme vers le crâne de Rydd. Le traqueur mit la main au fourreau pour dégainer un revolver, l’instant d’après une balle venait exploser le fruit en plein vol.
« J’ai déjà vu ce costume… »
« C’est possible… Curieux que tu sois encore là pour en parler. »
« Pourquoi donc ? »
« Tu pues comme un primé. »
« Hahaha ! Possible. M’enfin où ai-je vu ce costume de clown ? »
Rydd profitait de cette perte de temps pour recharger son arme.
« Eho ! Je te parle ! »
« Et moi, je recharge. »
« BON ! Je m’appelle Adam Nori ! CINQUANTE MILLIONS DE BERRY ! Dit moi qui tu es ! Je te connais ! »
Le traquer laissa échapper un léger rire. Tous ses muscles se contractèrent, son regard devint particulièrement perçant. D’un geste vif il révéla la lame de son meitou.
« Je suis ta fin. »
Et sans cérémonie il s’élança sur Adam Nori. Il esquiva avec élégance la lame de Rydd et recula de quelques mètres.
« Lâche ! M’attaquer à l’épée. »
Fidèle à son mutisme habituel lors des affrontements, Rydd, impassible, se contenta de se précipiter une nouvelle fois sur son adversaire. Son sabre dans la main droite, il délivrait des coups formidables qui éventraient le sol devant lui. Adam Nori cracha au sol avant d’effectuer un audacieux pas de côté qui lui permit de se trouver sur le flanc de Rydd. Le jeune punk envoya un coup de poing en direction des côtes de son adversaire. Le Tigre para l’attaque du plat de sa lame. D’un saut acrobatique il se retrouva à plusieurs mètres de distance. Contre toute attente il rengaina son sabre avant de prendre une garde à mains nues.« Tu as de la chance, j’avais besoin de tester en combat réel un petit quelque chose que je travaille depuis un moment maintenant… »
Adam, convaincu qu’il avait gagné à l’instant où son adversaire avait rengainé, se rua sur Rydd comme un taureau furieux. Le garçon avait une garde particulièrement nette et délivrait des coups susceptibles d’assommer un roi des mers. Pour l’instant le chasseur de primes se contentait de dévier les attaques à l’aide de ses avant-bras. Il cherchait à utiliser son Haki au moment opportun. Il s’était patiemment entrainé pour maitriser ce Haki de l’armement qui était encore incertain pour l’heure. Le punk ne semblait pas s’épuiser malgré les efforts considérables qu’il fournissait pour maintenir Rydd sur la défensive. Finalement, un crochet du droit ful cueillir le Tigre au menton qui chancela quelque peu.
« Je te reconnais maintenant ! T’es Rydd Steiner ! Le Tigre Rouge de Saint-Urea ! PUTAIN JE VAIS EXPLOSER TA TRONCHE ET ME FAIRE UNE REPUTATION DU TONNERRE WOUUUUUU ! »
« De Saint-Urea ? De Saint-Urea ? Fait belle lurette que je ne travaille plus pour Stanhope. T’as quelques années de retard fiston. Et c’est pas avec ce genre de caresses que tu vas me battre. Non, sérieusement… C’était un coup de poing ton truc là ? J’ai l’impression de m’être fait caressé par une fille de joie. »
Et le combat reprit de plus belle alors que les orgueils venaient de s’ingérer dans la bataille. Ce crochet, Rydd ne l’aurait jamais reçu en temps normal. Mais il se concentrait tellement sur son Haki qu’il n’était pas parfaitement apte à voir arriver les coups. Fort heureusement, cette droite surpuissante l’avait rappelé à la réalité du terrain. Il se remémorait avec force ses entrainements passés, ce sentiment de peur et de survie qui le forçait à faire apparaître le Haki.
Habituellement, Rydd se concentrait pour faire surgir son Haki mais cette fois, impossible de réaliser une telle prouesse sans se faire punir par un combattant aguerri. Car pendant que le Tigre réfléchissait à la bonne attitude à tenir, Adam redoublait de mouvements originaux pour tenter de surprendre le redoutable chasseur de primes. Les deux hommes paraient les attaques adverses ou les esquivaient avec une agilité et une expertise impressionnante. Plusieurs arbres fruitiers firent les frais de ce combat et furent déracinés ou abattus sans la moindre compassion.
« Je m’attendais à plus de la part du célèbre chasseur de primes. »
Rydd impénétrable commençait à maitriser le rythme de son adversaire. Un combattant expérimenté mais trop audacieux et impatient. Au fur et à mesure du temps, il s’épuisait et voulait en finir au plus vite. Adam se fendait de plus en plus loin quitte à négliger la qualité de sa garde. C’est ainsi que l’œil expert du tigre décela une ouverture qu’il exploita aussitôt. Il cogna sévèrement le visage du punk d’un crochet furieux. Si ce genre d’attaque calme souvent définitivement un adversaire, Adam sembla galvanisé par un tel assaut. Une aura particulièrement meurtrière se dégagea du Punk, ses bras se raidirent et semblèrent prendre davantage de volume. Puis il attaqua Rydd de front. Le premier coup fut paré comme tous les autres. C’est alors qu’Adam gagna subitement en vitesse. Il parvint à pénétrer profondément dans la garde adverse et envoya un coup terrible. Il était impossible pour le chasseur de primes de contrer efficacement cette attaque. Tout du moins c’est ce qu’il pensait. Quelques secondes avant l’impact, une pellicule noirâtre, le Haki de l’armement, fit irruption sur son visage cagoulé. Le coup fut encaissé avec aisance. Adam, surpris de ne pas avoir vaincu avec sa technique la plus redoutable, perdit toute contenance et baissa ses mains machinalement. A l’instar de son adversaire, Rydd était décontenancé par cette subite apparition du Haki. Toutefois, une sorte de déclic avait eu lieu. Il avait compris ! Il ressentait le fluide en lui comme s’il ne pouvait plus disparaître. Ses doigts attrapèrent le crâne d’Adam et se gorgèrent de Haki. La tête du punk se fracassa sur le sol, fendant le périmètre sur plusieurs mètres.
Adam gisait, inconscient. Rydd contemplait ses doigts avec intérêt. Il faisait venir et disparaître le Haki avec une déconcertante facilité.
« Et bien… Adam Nori, je n’oublierai pas ton sacrifice… »
Et il porta sa prime sur l’épaule pour reprendre sa route.
Quelques fermiers se portèrent à sa rencontre lorsqu’ils virent que le combat s’était terminé. Certains semblaient furieux des dégâts occasionnés et arrivaient sur lui fourche à la main.
« Clown du Roi Wakopol ! Laissez passer marauds ! »
L’annonce fit un effet formidable sur les pécores qui de dissipèrent avec une vivacité rare. Rydd songea qu’il devait absolument remercier le vieux pêcheur lors de son retour vers son dirigeable.
Il se trouva donc aux portes de la ville assez vite et sans guère plus de difficultés. Un ou deux badauds lui jetaient bien des œillades curieuses mais en restaient là. Il ne fut pas très difficile pour lui de se faire orienter vers le poste de la marine le plus proche.
Le QG de la marine était un bâtiment à l’allure modeste mais occupé par un contingent plus que respectable d’hommes. Une recrue somnolait à l’entrée, bulle à la narine et fusil chancelant. Rydd patienta quelques secondes, amusé par cette jeunesse désinvolte. Il s’imaginait sa réaction si cette sentinelle appartenait à la BNA. Grand dieu ! Il l’aurait probablement cogné dur… Mais l’incompétence de la marine faisait son affaire, alors il l’accueillait toujours avec une satisfaction sans borne. En définitive, une autre recrue fit son apparition et secoua son frère d’arme.
« Je peux vous aider Monsieur ? »
« Non, je suis porteur de mec inconscient. »
« Ah d’accord. »
« … … … »
« C’est une blague c’est ça ? »
« T’es un vif toi… »
C’est alors qu’un officier fit son apparition, voyant que l’entrée du QG restait obstrué. Il releva avec dépit l’air fébrile de ces hommes avant de se retourner vers l’importun. Son sang ne fit qu’un tour devant cette tenue rouge et noire si reconnaissable.
« Bon sang ! Rydd Steiner ! Que faites-vous là ?! »
« Bah je suis porteur de mec… » Commença le Tigre.
« Vous apportez un primé au moins !? Entrez donc ! »
« Ah… Plus malin que les autres celui-ci. »
Les deux hommes entrèrent dans une vaste salle agrémentée, sur sa paroi du fond, de plusieurs cages. Rydd jeta Adam dans l’une d’elle sans ménagement.
« Il n’est pas mort ? »
« Je crois pas. J’ai un peu forcé. »
« Combien il vaut ? »
« A priori cinquante millions mais c’est de sa bouche que je tiens l’information. Pourrait bien être rien du tout mais il m’avait l’air trop jeunot pour le discours mensonger. »
« C’est Adam Nori. Cinquante en effet. Je vous prépare ça de suite. »
L’officier chargea un subalterne de rassembler la somme convenue. En attendant, les deux hommes patientèrent dans un coin de la salle avec un cigare.
« Comment se passe la reprise de la BNA ? On est content de vous avoir de notre côté Tigre. »
« Boarf. Les temps sont durs pour la profession. Je finirai bientôt par vendre ma tenue… »
« Ne dites pas ça ! Voilà déjà cinquante millions qui tombe à point ! »
« Toujours ça oui… »
« J’ai entendu dire que vous aviez fait un gros coup sur Innocent Island ? »
« Quelques pirates ouais... »
Un jeune marine apporta un sac épais qu’il posa non loin des deux hommes. Alors que Rydd allait mettre la main sur le sac lorsqu’un étui de guitare vint le bloquer par le haut. Un homme affublé d’un poncho jaunâtre d’un gout douteux, aux chaussures dépareillées et à la chevelure longue et noire venait d’apparaître. Rydd insista pour récupérer son argent en tirant plus fortement et son interlocuteur leva son étui de guitare pour libérer le sac.
« Rarement une bonne idée de toucher à l’argent d’autrui... »
« Monsieur Steiner, je vous présente Ashrim Coover, chef des armées du Royaume de Wakoland. » Précisa précipitamment le marine qui sentait que la situation pouvait s’envenimer à chaque instant.
« Tigre Rouge, c’est un honneur que de recevoir en notre Royaume le leader de la BNA. Pourquoi ne pas avoir prévenu de votre arrivée ? »
« C’est que j’ai tendance à faire fuir les primés lorsque je m’annonce en avance… »
« Hm… Certes… On m’a rapporté votre combat dans la zone maraichère. Nori était activement recherché depuis quelques jours déjà. Je vous remercie pour votre travail. »
Rydd tapota le sac de berry d’un air entendu.
« Ne vous inquiétez pas, j’ai été grassement remercié par le gouvernement mondial. »
« Certes… Certes… Mais je viens pour tout autre chose. Le Roi de Wakoland, son altesse Wakopol souhaite vous rencontrer. »
« Mais je suis au service de sa majesté le Roi. »
Ashrim sembla soulager. Il faut dire que le chef des armées ne connaissait Steiner que de réputation et craignait de ne pas être en mesure de le faire venir si simplement. Il avait même envisagé de le payer pour s’assurer de sa visite mais fort heureusement, le Tigre ne maitrisait pas encore pleinement les arcanes du commerce politique. Le chef des armées claqua des doigts et une troupe d’une vingtaine d’hommes fit son apparition. Chaque soldat portait un uniforme au moins aussi original que le chef des armées. Une sorte de patchwork de tissu aux couleurs criardes. Steiner comprit pourquoi les pêcheurs avaient pu prendre sa tenue pour un uniforme du Royaume. Mais en un sens il trouvait ça particulièrement insultant…
« Si vous voulez bien nous suivre ! »
Et le groupe se dirigea vers le Palais Royal. Un jeune soldat portait avec respect le sac de millions ; les autres formaient un carré net autour D’Ashrim et de son hôte. Ils remontèrent les ruelles de la ville en direction d’un Palais de taille respectable, aux moulures dorées d’une originalité indescriptible. D’autres soldats patrouillaient autour de l’enceinte, démontrant que le Royaume de l’Absurde était une puissance militaire et pas seulement une bizarrerie de l’histoire du gouvernement mondial. L’escorte resta à l’extérieur tandis que Rydd pénétra avec Ashrim dans le palais. Les salons se succédaient et avec eux la couleur, le style ; tout semblait en mesure de changer d’une pièce à l’autre.
« Quelle décoration. »
« Sa majesté aime innover régulièrement. »
Rydd pénétra finalement dans un cabinet à l’aspect coquet agrémenté d’un lit et d’un mobilier confortable.
« Vous pourrez vous changer ici. »
« Comment ça me changer ? »
« Vous ne pouvez apparaître devant le Roi dans cette tenue guerrière. »
« Si c’est pour mettre une de vos tenues de clown, je te préviens Ashrim, je m’en retourne à mon navire… »
« Non, non, rassurez-vous, c’est une tenue presque identique à celle que vous portiez lorsque vous étiez fugitif. »
Et il désigna une chemise violacée et un manteau de fourrure disposé sur le lit avant de s’éclipser.
Rydd siffla longuement.
« A ce que je vois mon service de renseignement est le moins performant au monde… »
En effet, le Royaume de l’absurde semblait doter de suffisamment de ressources pour connaître et trouver une réplique de l’ancienne garde robe du Tigre Rouge. Bon gré mal gré, il enfila la nouvelle tenue. Il faut dire que notre chasseur de primes commençait à être plus qu’intéressé par ce Roi si étrange.
Une fois changé, il fut introduit dans une salle du trône grandiose. Le roi Wakopol paressait dans un trône mais se redressa à l’arrivée de son invité. Il portait la tenue de Rydd, sa combinaison rouge et noire, mais n’avait pas enfilé la cagoule.
« Monsieur Steiner ! Bienvenue. »
« Votre altesse, si on m’avait dit que vous aviez d’aussi bons gouts vestimentaires, je serai resté vêtu de ma tenue de Tigre. »
Un éclair passa sur les yeux du roi Wakopol. Depuis le début, il jaugeait l’attitude de Rydd. Depuis son arrivée sur le Royaume, il étudiait minutieusement ses faits et gestes. C’est lui qui avait mandaté le pêcheur pour qu’il fasse une réflexion sur le noble ; Rydd n’avait pas paru ému, une bonne chose, personne ne devait contester sa politique. Wakopol s’était arrangé pour qu’Adam Nori se trouve dans les alentours des champs ; Rydd avait démontré suffisamment de force pour écraser le punk, c’était donc un exécutant de qualité. C’est encore Wakopol qui avait invité Rydd par le biais d’Ashrim et qui avait instigué la petite anecdote du changement de tenue. Autant de tests qui prouvaient que Rydd était un exécutant efficace, peu soucieux de la politique, prêt à se soumettre aux fantaisies d’un Roi. Bref, le Tigre avait parfaitement réussi les tests.
« Vous êtes très bien comme ça Monsieur Steiner. Et je dois admettre que je souhaitais fortement voir ce visage qui a tranché la tête de notre regretté Midas. »
« Regretté pour vous peut-être. »
« Regretté pour la BNA peut-être… Monsieur Finnegan avait une capacité unique pour ramener des fonds de partout. Vous semblez capable, mais cinquante millions, c’est peut-être un peu léger pour la BNA. »
Rydd nota la pique, il haussa les épaules, indifférent.
« C’est exact, je ne suis pas Midas. Mais à la différence du gros porc, je suis en vie et je suis plus apte à défendre mon intégrité que lui. »
« Et que diriez-vous de gagner une prime supplémentaire ? Et plus encore, gagner en réputation auprès des Royaumes du Gouvernement Mondial. Je m’engage à vous donner du crédit si vous résolvez mon problème. »
C’était le genre de proposition qu’on refuse que si l’on est un fou.
« Je vous écoute. »
« A la bonne heure ! »
Wakopol sauta sur son trône, la tenue de Rydd flottait dans ce corps chétif.
« Il y a sur Grand Line un complexe gouvernemental abandonné. Blue Line dorénavant appelé Karantane. Un endroit où des coraux bleus furent pendant un moment exploités. J’ai envoyé un homme, un de mes sujets, pour recueillir certains coraux. Il n’est jamais revenu. Ces coraux bleus sont dangereux, mais vous investiguerez par vous même. Je souhaite que vous retrouviez l’homme que j’avais envoyé ainsi qu’un échantillon de ces fameux coraux. Vous serez grassement payé. »
« Vous n’êtes pas sans savoir que j’étais un exécutant pour la Dame de Pierre. Elle ne payait pas bien. Et maintenant je coûte plus cher. »
« Oui, oui. J’ai entendu cela. Mais les royaumes des Blues ne sont pas ceux de Grand Line. Mon Royaume est riche et je suis magnanime. J’en veux pour preuve ! Ashrim ! »
Le chef des armées tendit à Rydd un Eternal Pose.
« C’est un éternal pose qui mène directement à Karantane. Je vous l’offre. Vous pourrez en tirer un bon prix à la revente, ou le conservez à votre guise ! Considérez que c’est un gage de confiance.
Trouvez mon homme, trouvez ces coraux, et je deviendrai un allié plus généreux que la vieille Stanhope. »
Rydd s’inclina en homme qui sait le moment où il faut se retirer. Dans l’antichambre, un officier attendait avec le sac de millions.
« Monsieur Steiner, nous allons vous raccompagner jusqu’à votre dirigeable. »
« Très bien. »