Nous aurions aimé l'apprendre de toi, Craig.
...
La survie de notre cercle repose presque entièrement sur la franchise de ses membres.
Je pourrai quand même continuer à faire des donations à l'académie ?
Tu es en conseil disciplinaire.
Il n'a pas l'air de le prendre au sérieux...
J'aimerais continuer à aider, même si vous me virez. Si je vous avais tout dit, ça aurait été tellement plus compliqué.
C'était un pari dangereux. Inconscient. Une véritable roulette russe avec un flingue semi-auto. Je me suis pris une sacrée fessée en représailles pour mon impudence. Et c'est pas prêt d'cesser de barder pour mon fessier.
La plupart des grandes têtes de l'ordre des toubibs 20 sont réunis, je les connais tous. Mais certains de leurs regards me percent plus salement que d'autres, notamment les yeux inquisiteurs et ardents d'Octopus, les perles vitreuses luisantes derrière le bec de Zélé braqué sur mon museau hébété, l'illisible regard d'Avicenne qui stagne sur moi avec lassitude, ou forcément, l'inquiet et déçu docteur Modo qui m'a beaucoup donné et qui doit bien le regretter. Ils sont éparpillés dans le même amphithéâtre que celui dans lequel je fus adoubé, prennent un par un la parole en entretenant un sang-froid de surface qui camoufle sans aucun doute de puissantes angoisses quant à l'avenir de leur Ordre. Tout commence et se termine ici, en somme, et j'emporterai peut-être dans ma chute une partie de ce qu'ils ont mis des décennies, ou bien des siècles, à élever. C'est un final logique bien que trop amer pour que je l'accepte totalement. Une catastrophe que j'aurais pu prévoir, mais trop rase des pâquerettes pour que j'aie pu l'apercevoir à temps depuis mes nuages. Un foutu comble dont je suis la risée.
Si un seul d'entre nous se permet ce genre d'excentricités, c'est nous tous qui en pâtissons.
Rien ne nous retiens de livrer à la marine leur déserteur ! Ainsi nous aurons la paix ! Car c'est bien ce dont on ne peut pas se passer ces temps-ci, la paix !
Du calme, Octopus ! L'expulser serait bien suffisant ! Que se passerait-il s'ils décidaient de l'exécuter ? Vous auriez une mort sur la conscience !
Oh oui... Vous savez comment ils les traitent, leurs déserteurs...
Recentrons le débat. Il ne s'agit pas d'ergoter sur le dos de la marine. Mais de trouver une issue qui nous permette de nous extirper de cette malheureuse affaire sans dommages.
Nous n'allons pas leur livrer leur bête noire. Mais nous ne pouvons pas la cacher non plus. Je suggère de le libérer dans la nature, de le laisser se débrouiller et de raconter à la marine ce qu'elle aura envie d'entendre.
Pas mieux.
C'est la solution la plus adaptée.
Si nous le relâchons sans plus de procès, la marine risque de nous coller quelques accusations d'entraves à la justice ou de refus de collaboration.
Irait-elle jusque là ?
L'ordre n'est pas en état de prendre de tels risques.
Je me répète : si nous leur livrons, c'est comme si nous le tuions nous-mêmes.
On récolte ce que l'on sème !
Effectivement, Octopus. Et la marine sème bien trop la mort à mon goût, si vous voulez mon avis.
Tu nous mets dans de bien sales draps, Craig.
Je sais. Désolé. Je pensais pas qu'ils iraient jusque là.
Toujours prostré sur son siège, Avicenne semble se perdre dans le dédale des questions qu'il se pose. L'est arrivé un peu tard dans l'affaire, le grand gourou, et n'a eu droit qu'à un bref survol du champ de ruines en flammes qui me sert de passif désormais. Ses questions, il les balance donc comme pour s'en débarrasser. Pas une à la fois, il les crache en un unique tsunami de doutes, qui noie toutes les interventions de ses collègues.
J'aimerais tout de même savoir à quoi tu t'attendais, précisément. Tu croyais qu'on ne découvrirait jamais d'où tu nous tombes ? Que la marine ne lâcherait pas les chiens après toi ? Tu cherchais une espèce de paix, ici, une immunité ? Tu fuyais quelque chose ?
Juste aider l'académie en souvenir du bon vieux temps. Quand m'sieur Modo a évoqué mon intégration à votre ordre, je me suis dis que c'était une occasion en or. Du type qui se présente qu'une seule fois dans une vie, et... Et je voulais en apprendre plus. J'ai plein de projets scientifiques. De grands projets.
Jeune et fou. Tu as fais passer ton ambition avant la sécurité de l'Ordre.
... Oui.
Mais tu n'es pas bête. Et je rechigne à croire qu'il existe une once de machiavélisme chez toi. Inutile de te faire la morale, ou de te taper sur les doigts. Si tu veux aider l'académie, Craig, alors c'est maintenant ou jamais. Cherches avec nous la solution à cet épineux méli-mélo dans lequel tu nous as plongé.
J'accepte de me rendre. J'crois que ça réglerait tout ?
...
La survie de notre cercle repose presque entièrement sur la franchise de ses membres.
Je pourrai quand même continuer à faire des donations à l'académie ?
Tu es en conseil disciplinaire.
Il n'a pas l'air de le prendre au sérieux...
J'aimerais continuer à aider, même si vous me virez. Si je vous avais tout dit, ça aurait été tellement plus compliqué.
C'était un pari dangereux. Inconscient. Une véritable roulette russe avec un flingue semi-auto. Je me suis pris une sacrée fessée en représailles pour mon impudence. Et c'est pas prêt d'cesser de barder pour mon fessier.
La plupart des grandes têtes de l'ordre des toubibs 20 sont réunis, je les connais tous. Mais certains de leurs regards me percent plus salement que d'autres, notamment les yeux inquisiteurs et ardents d'Octopus, les perles vitreuses luisantes derrière le bec de Zélé braqué sur mon museau hébété, l'illisible regard d'Avicenne qui stagne sur moi avec lassitude, ou forcément, l'inquiet et déçu docteur Modo qui m'a beaucoup donné et qui doit bien le regretter. Ils sont éparpillés dans le même amphithéâtre que celui dans lequel je fus adoubé, prennent un par un la parole en entretenant un sang-froid de surface qui camoufle sans aucun doute de puissantes angoisses quant à l'avenir de leur Ordre. Tout commence et se termine ici, en somme, et j'emporterai peut-être dans ma chute une partie de ce qu'ils ont mis des décennies, ou bien des siècles, à élever. C'est un final logique bien que trop amer pour que je l'accepte totalement. Une catastrophe que j'aurais pu prévoir, mais trop rase des pâquerettes pour que j'aie pu l'apercevoir à temps depuis mes nuages. Un foutu comble dont je suis la risée.
Si un seul d'entre nous se permet ce genre d'excentricités, c'est nous tous qui en pâtissons.
Rien ne nous retiens de livrer à la marine leur déserteur ! Ainsi nous aurons la paix ! Car c'est bien ce dont on ne peut pas se passer ces temps-ci, la paix !
Du calme, Octopus ! L'expulser serait bien suffisant ! Que se passerait-il s'ils décidaient de l'exécuter ? Vous auriez une mort sur la conscience !
Oh oui... Vous savez comment ils les traitent, leurs déserteurs...
Recentrons le débat. Il ne s'agit pas d'ergoter sur le dos de la marine. Mais de trouver une issue qui nous permette de nous extirper de cette malheureuse affaire sans dommages.
Nous n'allons pas leur livrer leur bête noire. Mais nous ne pouvons pas la cacher non plus. Je suggère de le libérer dans la nature, de le laisser se débrouiller et de raconter à la marine ce qu'elle aura envie d'entendre.
Pas mieux.
C'est la solution la plus adaptée.
Si nous le relâchons sans plus de procès, la marine risque de nous coller quelques accusations d'entraves à la justice ou de refus de collaboration.
Irait-elle jusque là ?
L'ordre n'est pas en état de prendre de tels risques.
Je me répète : si nous leur livrons, c'est comme si nous le tuions nous-mêmes.
On récolte ce que l'on sème !
Effectivement, Octopus. Et la marine sème bien trop la mort à mon goût, si vous voulez mon avis.
Tu nous mets dans de bien sales draps, Craig.
Je sais. Désolé. Je pensais pas qu'ils iraient jusque là.
Toujours prostré sur son siège, Avicenne semble se perdre dans le dédale des questions qu'il se pose. L'est arrivé un peu tard dans l'affaire, le grand gourou, et n'a eu droit qu'à un bref survol du champ de ruines en flammes qui me sert de passif désormais. Ses questions, il les balance donc comme pour s'en débarrasser. Pas une à la fois, il les crache en un unique tsunami de doutes, qui noie toutes les interventions de ses collègues.
J'aimerais tout de même savoir à quoi tu t'attendais, précisément. Tu croyais qu'on ne découvrirait jamais d'où tu nous tombes ? Que la marine ne lâcherait pas les chiens après toi ? Tu cherchais une espèce de paix, ici, une immunité ? Tu fuyais quelque chose ?
Juste aider l'académie en souvenir du bon vieux temps. Quand m'sieur Modo a évoqué mon intégration à votre ordre, je me suis dis que c'était une occasion en or. Du type qui se présente qu'une seule fois dans une vie, et... Et je voulais en apprendre plus. J'ai plein de projets scientifiques. De grands projets.
Jeune et fou. Tu as fais passer ton ambition avant la sécurité de l'Ordre.
... Oui.
Mais tu n'es pas bête. Et je rechigne à croire qu'il existe une once de machiavélisme chez toi. Inutile de te faire la morale, ou de te taper sur les doigts. Si tu veux aider l'académie, Craig, alors c'est maintenant ou jamais. Cherches avec nous la solution à cet épineux méli-mélo dans lequel tu nous as plongé.
J'accepte de me rendre. J'crois que ça réglerait tout ?