La jeune borgne se retint de laisse échapper un soupir de soulagement, voyant le rebelle le suivre, sa fille sur les épaules.
Tout espoir n'est peut-être pas perdu pour la petite. Il semble tenir un peu à elle.
Choupi, qui était pourtant habituellement du genre à ne pas faire attention à son environnement, fixa des yeux pleins d'interrogation l’enfant qui s’était remise à pleurer. Ses cris stridents firent tourner bien des têtes. Certaines personnes murmurèrent même des messes basses, les accusant sans doute des parents irresponsables.
« Tu pourrais essayer de la calmer ? »
La jeune femme savait pertinemment que sa réclamation était bien futile car le père avait démontré qu’il n’avait aucune volonté de calmer son enfant mais, plus que les regards des autres, les cris de la gamine commençaient sérieusement à lui casser les oreilles. Malgré sa nature plutôt turbulente, la chasseuse de primes aux cheveux blancs n’appréciait pas vraiment les nuisances sonores, tant que cela pouvait l’irriter jusqu'à la rendre violente malgré sa nature pacifiste.
Désirant mettre fin à la torture auditive, la jeune borgne pressa les pas. Accompagnée donc du père et de sa fille, qui avait finit par se calmer, et de son protégé homme-poisson, elle se dirigea vers l’entrée qui menait vers la seconde enceinte de cette ville plutôt singulière. Là où résidaient les bourgeois les plus aisés, les nobles les moins en vue et une grande partie des soldats. La jeune femme s’était fixé comme objectif de la journée de visiter cet endroit qui l’intriguait et pourquoi ne pas accéder jusqu’au cercle intérieur de la ville.
Deux gardes vinrent les intercepter alors qu’ils n’avaient pas franchi le seuil du grand portail qui séparait le monde des miséreux de celui qui était un peu plus doré.
« Halte ! … Vous allez où comme ça ? - Nous souhaitons nous rendre dans un restaurant pour nous restaurer. - Allez donc manger dans votre quartier ! - C’est dans ce quartier que nous souhaitons manger. » Lâcha la jeune borgne d’un ton serein.
La jeune chasseuse de primes était au courant du fonctionnement de cette ville mais jamais elle n’aurait imaginé qu’on l’interdirait d’aller manger dans la seconde enceinte juste parce qu’elle venait de la zone extérieure. Après tout, elle comptait payer et non pas mendier.
« C’est bien trop cher pour vous ici alors ouste, retournez donc d’où vous venez ! Des gestes de la main bien méprisants accompagnèrent les paroles vaniteuses. Chose qui eut pour effet de plisser les sourcils de la jeune borgne d’un début d’irritation. - Je veux parler à votre supérieur ! - Écoute petite, t’es peut-être mignonne et … bien foutue mais cela ne te suffira pas pour convaincre notre chef de te laisser passer. L'homme fixa le père, l'enfant et l'homme-poisson. Surtout pas accompagnée d'un clochard, d'une morveuse et … d'un gros machin ro … »
Un coup de pied qui lui effleura le nez sans crier gare de la part de la jeune borgne interrompit le marine qui, sous le coup de la surprise, tomba sur le séant alors que son compagnon se mit en garde.
« Je vous demanderai de ne pas insulter mes compagnons s’il vous plaît, lâcha la jeune borgne d’un ton calme qui ne correspondait guère à son acte, tout en gardant sa jambe levée, révélant ainsi son sous-vêtement que sa jupe, suivant la loi de l’attraction, ne cachait plus. - Ho mon Dieu ! Lâcha une dame dont l’habit démontrait qu’elle appartenait à une classe aisée, après avoir lâché prise son sac à main face à la vision de la scène qu’elle trouvait fort outrageante. - Quelle indécence ! S’exclama une seconde alors que les hommes qui accompagnaient les deux bonnes femmes se contentèrent de contenir la rougeur qui menaçait de colorer leurs joues poudrées. - Qu’est-ce que je vous disais ? C’est bien elle ! Ce coup de pied, je la reconnaîtrais entre mille ! » Fit un des quatre hommes, confortablement installés sur la terrassa du premier bar prêt de l'entrée de la zone extérieure et de la seconde enceinte de la cité. C'étaient des marines en repos et par conséquent, tous étaient habillés comme des civils ordinaires.
Grâce à sa participation à la campagne publicitaire de la Bounty National Agency, qui avait été diffusée à travers toutes les Blues, la jeune chasseuse de primes aux cheveux blancs semblait avoir réussi à marquer l'esprit de certains marines alors que, jusqu'à présent, son nom n'était connu que dans le cercle des chasseurs de primes de sa guilde.
« Putin, on dirait que notre Jason est pétrifié face à la petite culotte de la demoiselle. - Je parie que c’est la première fois qu’il en voit une. »
Trois hommes rirent en chœur.
« Arrêtez de vous moquer de votre camarade … et si vous aller l’aider plutôt !? - Désolé chef mais tout comme vous je suis de repos aujourd’hui. - Moi aussi ! - Moi aussi mais je veux bien aller au secours de la Danseuse du vent si elle accepte de passer une nuit dans mon lit en échange. - Rêves pas mon gars et puis … on dirait bien qu’elle s’en sort plutôt bien avec le petit Jason. »
En effet, après avoir ramené sa jambe levée parallèle à sa voisine, la jeune chasseuse de primes avait tendu un bras pour aider le pauvre marine à se relever, un beau sourire au visage. L’homme qui semblait être en léger état de choc, autant par la menace inattendue que par la vision qui avait suivi, mit un certain temps avant d’attraper la main offerte. À peine le marine était de nouveau campé sur ses jambes que la jeune femme fit une courbette pour s’excuser auprès de lui. Chose qui eut pour effet de faire rougir le jeune homme qui, de toute évidence, n’était pas habitué à voir une personne courber l’échine face à sa personne.
« Vraiment désolée. Je ne voulais pas vous offenser. - Heu … ne vous inquiétez pas. Tout va bien. »
Le jeune marine se gratta le sommet de la tête, l'air intimité.
« Je vous en prie, accordez-nous donc l'honneur de pouvoir juste manger dans un restaurant dans ce quartier, poursuivit la jeune borgne toujours en position de révérence puis, elle se releva pour fixer le jeune homme dans les yeux. Nous paraissons peut-être suspects mais nous n'avons aucune mauvaise intention et nous avons de quoi payer nos repas. - On dirait bien que le petit Jason est en train de te la chourer mon gars ! - Je me demande ce qu’ils sont en train de parler. - Surement qu'il est en train de l'inviter à dîner. - Je dirai que c'est plutôt elle qui est en train de lui réclamer quelque chose … Surement de la laisser passer. - Et bien sûr, le petit Jason va céder … Qu'est-ce que je disais. - Le pouvoir de la petite culotte mon gars ! Je suis sûr que toi aussi tu aurais cédé. - Moi ? Non. J'aurais demandé bien plus qu'une simple vision sur une petite culotte ! … Je me demande si elle est ici pour chasser … Bon dieu, comme j'aimerais pouvoir assister à ses combats en direct ! - Tu n'as qu'à devenir chasseur de primes puis intégrer sa guilde. - T'es vraiment accro à cette fille on dirait ! … En même temps je te comprends. Ces paires de girons et de miche qu'elle a … On devrait l'interdire de se battre avec ces vêtements qui pour le coup sont bien trop indécents. - Tu rigoles ? Ça serait du gâchis de lui foutre un pantalon et un t-shirt XXL ! - Ouais ! Je suis même d'avis de lui mettre un haut beaucoup moins couvrant. - Vous avez fini avec vos discussions futiles ? - Désolé chef, fit les trois hommes qui se contentèrent ensuite de suivre des yeux, en silence, le petit groupe mal assorti de la jeune borgne s'éloigner dans la seconde enceinte de la ville. - Bon ! Il ne reste plus qu'à dégoter un beau restaurant. Pour la peine, je vous invite vous aussi mais je choisirai ce que vous mangerez et je ne tiens pas à avoir de problème alors tenez-vous tranquille ! »
Paroles qui paraissaient bien sévères mais il valait mieux prévenir que guérir. Elle n'avait pas du tout confiance en cet homme qu'elle avait invité à déjeuner avec elle que par pure amabilité. Un jour sa gentillesse finirait réellement par la perdre … |