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Par delà les sables du désert - Chapitre III

C'est avec les cuisses en piteux état que je descends finalement de mon destrier, devant la porte du palais où, alors que je viens freiner des quatre fers pour mettre fin à ma course dératée, deux drôles de gardes me zieutent avec curiosité. Le visage et le corps en sang, vêtue comme une souillon, ma bure orientale déchirée par endroits, mes sous-vêtements quasiment apparents, c'est toutefois en boitant que je me précipite dans les jardins du palais sans attendre la confirmation des soldats hébétés sur le palier de l'entrée. A vue de nez, il doit alors être aux alentours de midi : j'espère de fait que l'autre pervers a bien réussi à arriver à temps pour mettre fin à la mascarade du Grand Vizir. Car même si, au moment où nous avions quitté ensemble le camp des brigands nous possédions encore une bonne longueur d'avance, des rencontres infortunées avec des animaux sauvages et des sables mouvants nous avaient finalement coûté une quantité de temps non négligeable. Et c'est sans évoquer la rencontre imprévue qui nous avait décisivement séparés, à quelques lieues de la capitale.

Deux heures plus tôt...

Le cou tendu par dessus l'épaule de l'officier, je guettais avec une attention particulière le paysage qui se dressait devant nous. Notre course effrénée nous avait déjà coûté de devoir traverser en hâte un repère de chacals affamés, nous tirer de trois bancs de sables mouvants et éviter de peu un nid de scorpions blancs. A cet effet, nous avions dû nous écarter de la route principale plusieurs fois, ce qui nous avait d'ores et déjà fait perdre une heure et demi de trajet. Mais ç'avait été lorsque nous nous étions rapprochés d'Alubarna pour ne plus avoir qu'une heure et demi de route supplémentaire que les véritables ennuis avaient pointé le bout de leur nez, personnifiés dans une silhouette grise, camouflée dans un nuage de poussière, qui s'était soudain mise à nous pourchasser. Et visiblement dotée d'un destrier en meilleure forme que le notre, celle-ci avait sensiblement gagné du terrain sur nous avant que nous ne commencions véritablement à nous alarmer.

- Il n'a pas l'air de vouloir nous lâcher. dis-je enfin, courbée vers l'arrière, cherchant des yeux notre poursuivant, qui, à ma grande surprise, n'est plus qu'à quelques mètres de nous rattraper.

Mais à peine ai-je fini ma phrase que quelque chose vient soudain s'enrouler autour de mon cou, m'arracher à la monture et me balancer violemment contre terre. Il me faut peu de temps pour saisir la situation dans laquelle je me trouve et reconnaître la qualité de la corde déjà trop familière ainsi que l'identité de la personne qui tient l'autre bout : Effkri Mabhoul. Me redressant maladroitement sur mes deux jambes faiblardes face à l'adversaire qui - dans un état toujours aussi piteux physiquement mais nouvellement animé par un désir irrépressible de vengeance - vient rembobiner son arme autour de sa main gauche, la seule qu'il lui reste à proprement parler.

- Enfin je te retrouve, imposteur ! me toise l'oriental du haut de son canasson gris. Qui que tu sois, je vais te faire payer ton insolence.

Et à nouveau, l'homme vient dérouler sa corde dans une tentative aussi désespérée que futile de me fouetter le flan. Cependant bien que je réussisse aisément à éviter le coup grossier et lent, ce n'est que trop tard que je remarque les shurikens accompagnant l'attaque qui viennent se planter autour de moi... et dans mon mollet. Relâchant un léger cri de douleur, je profite du petit moment de satisfaction de mon assaillant pour me retourner et donner l'ordre à l'officier de la Marine de foutre le camp.

- Qu'est-ce que tu fous, va au palais, vite ! Je m'occupe de lui.

N'attendant pas une minute de plus pour mettre mes consignes à exécution, l'homme tourne les rennes et reprend sa chevauchée sauvage alors que mon regard ne revient que trop tardivement vers l'opposant qui, entre temps, n'est pas resté sans rien faire. Alors, claquant sèchement et ligotant ma cheville, je me vois soudainement tirée par une nouvelle liane vers le cavalier qui, tout en enroulant avec de grands mouvements vifs la corde autour de sa main, m'envoie en même temps des couteaux de lancer que je peine malgré tout à esquiver. Saisissant à mon tour mon couteau de chasse attaché à ma cuisse, je mets fin à la tractation en tranchant le lien d'un coup net avant d'envoyer la lame se planter à quelques centimètres du sabot de l'animal. Hennissant et se cabrant comme prévu, la belle bête vient brusquement se débarrasser du général sur son dos qui tombe lourdement à terre, avant de s'écarter légèrement du champ de bataille.

- Cette fois-ci je ne ferai pas l'erreur de te laisser en vie. souris-je tout me remettant sur pattes pour, à mon tour, toiser l'opposant qui peine un peu plus à faire de même.

- Alors... commence le bonhomme avant de prendre une bonne inspiration et finalement déclarer : ...viens te battre.

Réagissant à ces mots automatiquement, je me fends spontanément d'un Soru pour apparaître devant mon adversaire et m'élancer dans les airs avec un puissant coup de talon avant d'enchaîner avec un Rankyaku Ran l'obligeant à reculer par petits bonds sur une courte distance. Sous l'efficacité de la mitraille, j'attends l'instant propice pour enfin découper l'espace devant moi d'une lame d'air horizontale qui vient propulser l'homme au-dessus du sol. Échouant cependant à le déstabiliser, l'opposant profite alors de l'élan qui lui est conféré par mon attaque pour m'envoyer brusquement un coup de corde roulée en boule dans le ventre et me plaquer au sol avant de me rejoindre. Restée inerte jusqu'à ce que le général fasse le pas décisif, je soulève alors soudainement mon bassin pour venir emprisonner la tête du malfrat entre mes cuisses et violemment l'envoyer manger du sable, sans pour autant arriver à esquiver une courte lame sortie de sous sa manche qu'il vient me planter entre les côtes. Jurant sous l'effet de ma blessure, je me vois alors contrainte de prendre du recul pour dégager la lame de la plaie puis darder un regard sombre sur le ninja enturbanné que mes attaques n'ont pas pour autant laissé indemne.

- Tu te défends bien. admets-je avant de disparaître une nouvelle fois dans l'air, non sans laisser figurer une courte moue de douleur sur mon visage.

Jaillissant donc dans les airs, juste au-dessus de la tête de Mabhoul, j'entreprends finalement de le charger d'une attaque efficace tant qu'il est encore à terre.

- Mais ça ne suffira pas. Tekkai Kenpou... viens-je continuer tout en fortifiant soudainement mes poings, me rapprochant dangereusement du bonhomme qui tarde à se relever.

Puis, me cabrant vers l'intérieur, les avant-bras ramenés derrière-moi, je décide de donner le tout pour le tout et déchainer les enfers :

JUGON OUREN !!


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Mar 29 Déc 2015 - 3:58, édité 1 fois
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Roulant maladroitement sur le côté, réussissant finalement à se libérer de mon avalanche de coups de poings creusant dans le sable un trou immense qui ne cesse d'expulser tout autour de lui les grains que j'envoie valser, le guerrier oriental parvient cependant à se sauver de peu. Ce n'est que trop tard que je le vois alors ramener ses membres malmenés sous son corps frêle pour se relever tant bien que mal. Et au moment où je parviens enfin à m'arrêter, haletante, épuisée par l'effort, je remarque la corde gisant aux pieds du général tandis qu'autour de sa main semble s'être enroulée une toute nouvelle longe plus fine lui occasionnant des plaies ouvertes sanguinolentes sur son unique poing. Relâchant la pression, l'opposant vient alors profiter de mon état de fatigue temporaire pour enrouler son fil froid et tranchant autour de mon bras droit et me tire violemment vers lui d'un coup sec. Tétanisée, je m'effondre donc lamentablement au sol tout en ne pouvant m'empêcher de pousser un cri de douleur, non pas à cause du choc mais plutôt de la liane qui m'enserre le bras : du fil barbelé. La peau cisaillée, la chair rongée, j'essaye vainement de me débarrasser des liens qui ne veulent se défaire, puis de les couper avec mon couteau papillon caché dans ma botte sans y parvenir.

- FILS DE P... commencé-je tout en dardant un regard noir sur mon opposant qui s'est à nouveau rapproché de moi, la lame à la main.

Encore étourdie à cause de ma dernière technique ayant sapé une bonne partie de mes forces, j'essaye malgré tout de parer au mieux les coups de cimeterre de l'ennemi avec mon bras libre recouvert d'un Tekkai Kenpou chétif. Baladée de temps à autre par des coups vifs sur le barbelé, je me vois ultimement dans l'incapacité de bloquer un crochet du gauche dans l'estomac avant d'être propulsée en arrière mais aussitôt ramenée vers l'ennemi pour subir un second coup au visage. Alors devenue vulgaire marionnette dans la danse macabre que je me vois obligée d'exécuter, je lutte tant bien que mal pour limiter la casse, cognée et tailladée de tous les côtés, tout en ne pouvant me délier du fil qui entame davantage la chair de mon bras endolori. Les yeux larmoyants à cause de la douleur, je perds petit à petit espoir tandis que je continue à me vider de mon énergie simplement pour retarder l'inévitable. Ramenée à genoux dans le sable teinté de couleur vermeille, l'ennemi s'apprête enfin à m'achever sans que je ne puisse faire quoi que ce soit, le bras droit bêtement levé au-dessus de ma tête comme pour me protéger du tranchant de la lame, épuisée.

- Utilise ton observation, Anna-chan ! intervient soudain la mioche dans ma tête, comme pour me rappeler qu'il reste un espoir.

Pessimiste à l'idée que je puisse arriver, malgré tout, à découvrir du premier coup un tour qui me permettrait de me sortir du pétrin, je m'essaye à fermer les yeux l'espace d'une seconde pour essayer de trouver une solution que cette capacité si spéciale et si imprévisible pourrait m'apporter.

- Je peux le voir, Anna-chan, c'est... non ça n'est pas encore arrivé ? Je peux prédire le futur ?! A ce que je peux voir il... il va mettre toutes ses forces dans un coup final vertical et laisser son cou à découvert... Anna-chan, avec ton bras : tu peux riposter avec sa propre arme ! T-tu peux le faire !!

Prédire le futur proche, le Haki de l'Empathie pouvait faire ça aussi apparemment. Entendant alors la lame s'élever haut au-dessus de ma tête, entendant l'homme inspirer lourdement pour prendre de l'élan et expirer soudainement, j'ouvre décisivement les yeux pour m'écarter et me relever d'un bond au dernier moment, provoquant la surprise chez l'homme qui n'a pas plus le temps d'agir. Je me plaque alors contre l'opposant avant de saisir le fil barbelé avec la main nue de mon bras lié et de tirer d'un coup sec pour avoir la paume du général à hauteur de son cou. Ne comprenant que trop tard ce que je compte faire, l'homme écarquille progressivement de grands yeux, dévoilant un visage décomposé, la bouche ouverte comme pour hurler une dernière fois. Mais avant qu'il ne puisse émettre un seul son, d'un rapide déplacement dans le vent autour de son corps je viens brusquement lui couper la respiration, la gorge écrasée par deux tours de cordelette. Et tout en continuant de brandir mon bras haut au-dessus de moi, forçant le sien à faire de même, plaqué contre son épaule, je dévoile alors le coup fatal.

- Tekkai Kenpou... SORU !

SHLACK !

Blom.

Malaxant mon bras endolori à quelques mètres de là, à quatre pattes sur le sable fin, je décide après quelques minutes d'absence de retourner vers le cadavre décapité, toujours haletante, pour me débarrasser des liens de ferraille qui ont d'ores et déjà commencé à couper la circulation de mon membre légèrement estropié : une rapide inspection m'informe d'à quel point la peau est arrachée et la chair tranchée sur un bon pouce de profondeur. Puis, délaissant le cadavre du fils Mabhoul que j'offre volontiers aux chacals qui sauront le faire disparaître comme la nature l'a voulu, je m'en retourne finalement vers le canasson. Et, fouillant dans la sacoche accrochée à la salle du cheval, je découvre avec bonheur une bouteille d'eau de vie que je verse alors abondamment sur mes plaies.

- RRRRAAAARRRGHHHHH... !! râlé-je aussitôt avant de m'enfiler le reste de la bouteille d'une traite de le gosier et tousser honteusement.

Jugeant alors qu'il n'est pas nécessaire de perdre une minute de plus dans le coin, je me remets difficilement en selle, entreprends de saisir les rennes avec mes doigts engourdis et donne enfin l'ordre au canasson de foncer à triple galop en direction de la capitale.

Une heure et demi plus tard...

Bien que dans un sale état, j'arrive à tracer ma route tant bien que mal à travers le palais. Rapidement, je remarque que quelque chose ne tourne pas rond, ne dénotant aucun garde dans les environs, même aux postes où il y en a toujours d'habitude. Inquiète, c'est sans trop de mal sinon ma douleur physique que j'atteins enfin la Grande Salle où étaient prévues les festivités. Directement alors, je devine que les choses ne se sont pas passées comme prévu à la vue des portes doubles sorties de leurs gonds et explosées sur le sol...

...et des effusions de sang qui maculent le palier.
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*** Une heure et demie avant les évènements au palais... ***


- « Ooooh ! Tu es toujours en vie… Plutôt fort pour un trav’lo, hé… »

- « KEUF ! KEUF ! KEUF ! CHIL TO PLAIT… »


J’étais surpris. Surpris de voir que l’okama avait réussi à se débarrasser de la meute qui voulait en faire son buffet matinal. Le cadavre des animaux qui trainaient çà et là et les traces de sang m’indiquaient que le combat avait dû être féroce. Mais au final, c’était l’humain, ou ce qui en restait qui avait gagné. Je comptais finalement l’achever, prêt même à dégainer ma lame lorsqu’une chose m’interpella : L’intensité de son regard qui montrait sa détermination à rester en vie. Je haussai alors un sourcil et consentit à lui laisser la parole. Dès lors, l’homme m’expliqua ce qui s’était passé après son combat désespéré contre les bestioles : En me montrant son den-den-mushi, il me raconta qu’il avait réussi à contacter le vizir pour que celui-ci lui vienne en aide, mais le dernier refusa catégoriquement en se moquant de lui. Après tout, il n’avait pas eu l’ordre de repartir dans le désert pour s’assurer de la mort de celle-là même qui avait tripatouillé mon zboub un peu plus tôt dans la journée. En pleurs, il m’avoua ensuite qu’il avait fait tout ça par amour pour le grand vizir et que celui-ci lui avait brisé le cœur, patati et patata… Le plus intéressant survint enfin lorsque sa tristesse et ses larmes se transformèrent en une grimace de colère : Le natif de Kamabakka voulait à présent se venger : Il était prêt à témoigner et faire tout son possible pour nuire à son ancien amour…

- « Une chose : Est-ce que tu lui as mentionné mon nom ? »

- « IL NE M’A MÊME PAS LAISSÉ LE TEMPS DE LUI EXPLIQUER CE SALAUD !!!! »

- « Ooooh… »


Malgré sa tronche pétée, la colère lui avait permis de parler normalement pour le coup. L’effort lui arracha ensuite une quinte de toux et des rejets sanguinolents, mais cette haine qu’il éprouvait à l’égard de son ex-supérieur me paraissait assez authentique, vraie. Je savais reconnaitre les menteurs et je pouvais dire que le gusse était d’une sincérité presque affligeante. Il n’avait plus rien à foutre de sa vie, mais il ne voulait pas crever de cette manière. J’aurai pu lui cracher sur la gueule, couper sa tête et continuer mon chemin, mais j’eus dans l’idée qu’il pouvait être utile. Son témoignage aurait du poids et tous les plans du grand vizir tomberaient sans doute à l’eau. D’ailleurs, c’était mieux que de venir les mains vides. J’avais beau être un contre-amiral correct et « l’enfant du pays » que quelques membres de la famille royale pourraient ne pas me croire et accuser à tort ce pauvre sultan. De ce fait, je descendis de ma monture et m’attelait à prodiguer les premiers soins au travelo qui me remercia infiniment. Et c’est après lui avoir fait boire le contenu d’une gourde en cuir que je le jetai à l’arrière du cheval, sur son ventre avant de diriger mon regard vers le sud. Je me demandais vraiment si ça allait aller pour la gamine. M’enfin bon… Si elle clamsait, tant pis pour sa gueule. Et tant pis pour moi aussi. Mais l’heure n’était plus aux réflexions lubriques…

Il y avait urgence et c’est fort de ce constat que je me mis à cavaler comme un fou en direction de la capitale.


*** Trente minutes avant les évènements du palais… ***


- « Et maintenant, place au buffet ! »

La fête battait son plein dans la capitale. Les rues étaient encore plus bondées que la veille et les habitants s’amusaient avec bon cœur. Chants, danses, partages de victuailles en tout genre… Tout semblait aller pour le mieux à Alubarna. Le palais était aussi proie aux festivités. Après les divers protocoles, discours solennels des dirigeants des deux royaumes, l’heure était au déjeuner d’état comme l’avait annoncé le sultan. Les journalistes locaux s’évertuaient à prendre des clichés, pendant que les serviteurs s’affairaient autour des nombreux dignitaires présents pour leur offrir ce qu’ils désiraient. Tout était à point pour rendre la fête plus que belle. Si la reine Vivi avait un sourire franc aux lèvres, celui du sultan était factice. Intérieurement, l’homme était triste. Il n’avait toujours pas des nouvelles de sa douce et belle Elizabeth et sa gouvernante demeurait elle aussi injoignable. Il avait même voulu reporter la fête, mais son grand vizir l’en avait empêché, prétextant que les intérêts du royaume de Rawhajpoutalah primaient sur les caprices de son dirigeant. Revenu à la raison, l’homme n’avait pu qu’acquiescer mais demeurait abattu. Il faisait d’ailleurs « un effort surhumain » pour ne pas afficher son désarroi, ce qui n'échapperait pas à quelques regards avisés. Et puis, la fête n’était pas si mal que ça. Elle pourrait sans doute lui faire oublier ses déboires, qu’il se disait.

- « Permettez que je vous serve moi-même ma reine ! »

- « Mais voyons ! Sa majesté ne devrait pas, hohohoho ! »
Répondit Vivi en gloussant presque.

- « Mais si ! J’insiste, j’insiste ! Laissez-moi faire ! »

Djahad (Le sultan) se précipita alors vers une jarre de vin tout droit venue de son propre royaume. Tout autour d’eux, les convives avaient un sourire amusé aux lèvres en voyant « l’humilité » et « le respect » qu’affichait le souverain de Rawhajpoutalah. Aux yeux de tous, il confortait vraiment l’idée de paix entre les deux nations, ce qui ne pouvait que faire plaisir ! Djahad s’empara d’une coupe en or et la remplit à moitié d’un vin bien rouge. Une spécialité de chez lui qu’il ne cessait de répéter. Du côté du grand vizir, c’était le scénario idéal ! Il ne s’y attendait pas du tout, mais tout allait comme sur des roulettes et il ne faudrait pas longtemps pour qu’enfin, il puisse intervenir et mettre ses plans à exécution. Derrière lui, Fhï Fhï affichait le même sourire malsain. Seule Lhou avait une mine presque triste. Mabhoul (Le vizir) adressa alors un regard à la fois discret et assez éloquent à son grand complice : Phume-Masigareth. Ce dernier affichait une sérénité bluffante et fit vite de détourner ses yeux ; même si Mabhoul savait pertinemment que lui aussi trépignait d’avance. Il se leva brusquement et s’avança d’un pas décidé vers le sultan qui se dirigeait tranquillement vers la centenaire, chargé d’un petit plateau sur lequel était posée la coupe. Et ce n’est que lorsque le dernier voulut offrir ladite coupe à la reine que le grand vizir le lui arracha carrément des mains.

Le silence fut aussitôt dans la grande salle et la reine, plutôt perplexe (Au même titre que le sultan qui était bouché bée) devant cette scène insolite, ne put que questionner le grand vizir avec un ton plutôt sévère :

- « Mais enfin, qu'est-ce que c'est que ces manières ?! »

Faisant mine d'être à bout de souffle et interloqué, Mabhoul répondit alors :

- « Sa Majesté a failli être assassinée, ce vin est empoisonné ! »

Des murmures s’élevèrent et animèrent aussitôt l’endroit. Le déjeuner d’état prenait une tournure des plus étranges…
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Devant les chuchotis et les différentes réactions de l’assistance, le grand vizir avait marqué une courte pause, mais il renchérit bien vite :

- « Je ne peux laisser agir davantage ce criminel qui ne souhaitait en réalité, par le prétexte du traité de paix, que pouvoir se rapprocher de vous pour vous donner sournoisement la mort ! Pour le bien de Rawhajpoutalah et d'Alabasta je me devais d'intervenir et d'empêcher ce meurtre ! »

- « Mais... mais enfin qu'est-ce que vous- »


Le malabar ne laissa pas à son vizir le temps de continuer sa phrase et tendit le gobelet au gouteur de la reine qui se trouvait non loin de la scène. Geste qui arracha plusieurs exclamations chez les différents invités. L’idée que le sultan ait vraiment tenté d’empoisonner la reine des lieux commençait à choquer tout doucement la plupart des personnes qui se trouvait là. Les journalistes locaux qui pensaient tenir un gros scoop se mirent à torpiller de flashs le grand vizir qui, d’un air sérieux et décidé, tenait toujours la coupe en direction du gouteur. Les différents gardes durent intervenir pour cesser toute cette agitation de la part des journalistes sous un signe discret de Toutankhanon. La tension montait d’un cran et Mabhoul qui bouillonnait assez, prit encore la parole pour avoir encore plus d’impact sur le déroulement de la scène assez surréaliste :  

- « Reine Vivi si vous ne croyez pas en mes sincères paroles, faites donc goûter ce vin et s'il n'est pas empoisonné, alors le Sultan n'aura jamais mis son odieux plan à exécution et je me serai fourvoyé ! »

La reine ferma les yeux et posa quelques doigts sur l’une de ses tempes qu’elle se mit à frotter un peu nerveusement. Puis elle les rouvrit sans daigner accorder le moindre regard à un sultan médusé qui pensait toujours qu’il s’agissait d’une mauvaise blague. A regrets, elle fit donc un signe à son gouteur qui s'exécuta et s’approcha du grand vizir pour prendre la coupe qu’il lui tendait et la boire d’une traite sans aucune hésitation. Imperceptiblement, Mabhoul eut un sourire. De même pour Fhï Fhï qui lui, s’était arrangé à verser une poudre empoisonnée dans le vin, bien avant qu’on ne l’apporte dans la salle des festivités. Pis, en quelques secondes seulement, le pauvre gouteur commença à s'étouffer sous le regard ahuri des membres de la famille royale. Au même moment, un garde rentra subitement dans la pièce et d’une voix criarde, annonça :

- « EXCUSEZ MON INTERRUPTION, MAIS J’AI DE GRAVES NOUVELLES POUR SA MAJESTÉ ! »

- « QUOI DONC ?! TU NE VOIS PAS QUE NOUS SOMMES OCCUPÉS ?! »
Tonna l’un des nombreux officiels présents dans la salle.

- « M-MAIS C’EST QU’ON NOUS A PRÉVENU QUE LES VILLES DE NANOHANA ET DE KATOREA SONT ATTAQUÉES !!! ET SELON NOS INFORMATIONS… IL S’AGIRAIT DE PLUSIEURS TROUPES DU ROYAUME DE RAWHAJPOUTALAH ! »

- « COMMENT ?! »


Stupeur dans l’assemblée. La tension était maintenant à son comble, d’autant plus que le gouteur finit par tomber au sol, raide mort, la bave aux lèvres. Le sultan se mit à trembler, tandis que le Vizir exultait dans son coin. Timing parfait !

- « GRAS DU BIDE ! » Intervint aussitôt Hakypudubekh, gouverneur de Katorea présent pour l’occasion qui d’un salto bien exécuté quitta son siège et se mit aussitôt à foncer vers la sortie.

- « J’AI COMPRIS ! ET ARRÊTE AVEC CE SURNOM RIDICULE ! » Répondit Hahypet, gouverneur de Nanohana qui se leva à son tour pour rejoindre son frère au pas de course.

L’objectif pour ces généraux était clair et net : Rejoindre leurs armées et endiguer cette invasion ennemie au plus vite sans se poser de questions. Sauf que c’était sans compter sur l’un des membres de l’éminente famille royale : Phume-masigareth. L’occasion inespérée qu’il attendait depuis des lustres pour se mettre en valeur aux yeux de la reine était enfin arrivée. Se relevant alors d’un coup sec, il prit alors parole : « Tout ira bien ! La situation est sous contrôle ! Le Grand Vizir ici présent m'a informé de la terrible machination que le Sultan complotait ! A l'heure qu'il est, des hommes sous mon contrôle mettent déjà hors d'état de nuire les forces ennemies ! Je puis vous l’assurer ! » Nouvelle intervention qui occasionna encore une fois la surprise, au point d’immobiliser les deux généraux qui étaient pourtant prêts à aller au front.

- « Djahad, votre complot n'aura pas lieu ! »

- « M-mais... mais je... »


Le pauvre sultan ne pouvait que balbutier. Tout l’incriminait complètement. Il chercha du regard un soutien, un poids, mais n’en vit aucun. Personne ne voulait se mouiller. Pas même ses propres serviteurs présents mais qui n’avaient rien à voir avec le complot. Comment le soutenir dans une telle situation ? La reine, comme on pouvait s’y attendre restait dubitative devant cette succession d’évènements. Elle eut même un soupir ennuyé et fit un signe de tête à Ymdebekht II l’héritier présumé qui ordonna à deux gardes tout près de l’estrade royale de se saisir du pauvre Sultan qui n’en croyait pas ses yeux et ses oreilles. Pendant que les gardes s’approchaient du traitre, Vivi ferma une nouvelle fois ses yeux, souffla un bon coup, avant de s’adresser cette fois-ci au grand vizir qui se tenait tout près d’elle :

- « Cette histoire est grotesque, grand vizir. Qu'est-ce qui me dit que ce n'est pas vous ou l'un de vos généraux qui a empoisonné ce vin ? »

- « Sa grâce se doit de croire que nous n'avons fait qu'obéir aux ordres de notre souverain à tous, dont le cerveau tordu nous a poussé jusqu'à agir contre vous avant de finalement nous rebeller contre son autorité pour vous garder saine et sauve. Phume-masigareth ici présent pourra en témoigner et si cela ne suffit pas, voici une preuve qui saura vous convaincre. »

D’un geste à la fois théâtral et mesuré, Phume-masigareth sortit l'audio dial de l’une des poches de sa veste.

- « Avec ce mécanisme j'ai pu capturer la voix du prince, dissimulé dans sa chambre alors qu'il discutait avec son horrible future épouse, une sorcière avec un seul œil et des cheveux blancs que nous avons d'ores et déjà capturé ! »

Le prince fronça les sourcils, n'appréciant pas les paroles de l'héritier à propos d'Elizabeth. Sa douce et tendre. Le membre de la famille royale resta stoïque et ne calcula pas un seul instant la réaction du sultan qui n’était plus du tout crédible. Plume actionna le dial et celui-ci retranscrivit les paroles du prince : « J-je vais conquérir Alabasta et prendre la place de la Reine Vivi ! Hahaha hahaha ! » Paroles traitresses. Paroles détestables, qui, aussitôt, suscitèrent une vague d’indignations et des huées. Hakypudubekh, le plus teigneux des généraux eut un cri de guerre, dégaina un poignard sans se formaliser des lieux et de l’assistance et fondit vers l’estrade. Il fut cependant arrêté net par son ainé qui le tint fermement immobile. La reine fit signe au général de se calmer et hocha la tête pour que des gardes s’emparent définitivement du sultan.

- « M-mais enfin Reine Vivi, tout cela n'est qu'une grotesque supercherie !! » S’indigna Djahad.

Mais la centenaire fit signe qu'elle ne voulait plus entendre un mot.

- « Gardes, veuillez-vous saisir de cet imposteur ! Un homme sans honneur tel que lui n'aurait jamais dû pénétrer dans ma demeure. Que dis-je ! Mon royaume ! »

Les gardes saisirent un sultan complètement impuissant qui se mit à crier son innocence. Mais peine perdue, puisque plus personne ne voulait le croire, le voir, ni l’entendre. Vivi, quant à elle, se tourna vers Mabhoul, la mine à la fois déçue et soulagée :

- « Grand Vizir Mabhoul, je dois avouer que cette affaire me dépasse mais je me dois de vous remercier pour votre acte de bravoure et de loyauté. Si le Sultan avait réussi à accomplir ses sombres desseins, il va sans nul doute que nos deux pays auraient eu à souffrir d'une guerre aussi terrible qu'inutile. Grâce à vous, nous n- »

- « UN INSTANT, S’IL VOUS PLAIT ! »

Mais alors que tout semblait perdu pour le pauvre souverain du royaume de Rawhajpoutalah, je fis enfin mon apparition. Vêtu d’une belle tunique blanche made in Alabasta avec néanmoins sur mes épaules, le traditionnel manteau des officiers de la marine. Une splendeur et un charisme qui imposèrent aussitôt le silence dans la salle. A mes côtés se trouvait l’okama. Sa gueule était assez amochée, mais il avait été assez arrangé pour faire croire qu’il s’agissait d’une très belle femme sous toutes ses coutures, mais battue. Dire que je ferais un jour équipe avec un travesti. Qui l’eut cru… ? M’enfin bon. Là n’était pas le plus important. Le plus important, c’est que nous étions arrivés à temps. Il n’y avait qu’à voir le visage décomposé du grand vizir pour capter ça. Dans ta gueule mon grand, et t’as encore rien vu !

- « Que sa majesté veuille bien pardonner mon impertinence, mais j’ai jugé qu’il était temps que j’intervienne pour rétablir la vérité. En tant qu’amiral, mais aussi en tant que fils du pays, bien entendu… »

Ma phrase énigmatique suscita l’intérêt de tout le monde. La contre-attaque pouvait désormais commencer.
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- « Rétablir la vérité ? » Reprit lentement le Grand vizir après quelques longues secondes de silence…

- « Tout à fait son excellence. La vérité et rien que la vérité. »

Des murmures s’élevèrent encore. Les gens ne comprenaient rien à ce qui se passait, ce qui était normal.

- « Le sultan est innocent. Il n’a rien à voir avec toute cette histoire. Tout ceci n’est qu’une sombre machination du grand vizir lui-même ! »

C’est d’un doigt inquisiteur que je pointai le vizir, au point que toute l’assistance se tourna vers lui. De nombreuses exclamations éclatèrent et les chuchotements furent encore plus nourris. Le retournement de situation ne laissait personne de marbre, même si à chaud, il était bien difficile de me croire. Le gouverneur de Katorea, Hakypudubekh fut le premier à se retourner vers moi, la mine plus que serrée. Sa calvitie bien avancé et ses traits durs le rendait vraiment très menaçant, même si je ne fus pas du tout impressionné. Après tout, j’avais vu pire…

- « Si c’est une blague, même venant de toi mon p’tit gars, je te jure que je ne pardonnerais pas ! »

- « Je prends en compte les avertissements de son altesse, mais pourquoi ne pas me laisser finir ? »
Qu’avais-je répondu avec un simple sourire aux lèvres.

Hakypudubekh se détendit, mais avait toujours les sourcils froncés en m’observant d’un air de fauve.

- « Est-ce que vous reconnaissez cette femme… ? »

Je portai alors une main sur la tête du travelo qui faisait vraiment femme si on ne s’en approchait pas trop près et l’attention se porta aussitôt sur elle. Certains gardes et servantes hochaient la tête. Ils la reconnaissaient aisément. L’un des membres finit même par mettre en avant qu’il s’agissait de la gouvernante du sultan et tous ou presque se souvinrent aussitôt d’elle. Il faut dire que Mamou ne passait pas inaperçu. Dire que j’avais même reluqué son cul en pensant à ce que ça serait dans un lit. Risible ! J’en connais beaucoup qui se seraient foutu de ma gueule, carrément…

- « Je suis responsable de l’état dans lequel elle se trouve. Je l’ai complètement battu à sang et je l’ai laissé pour morte au beau milieu du désert ! »

Ma mine fut sérieuse cette fois-ci. Et mon aveu eut un tel impact qu’il choqua l’assistance. Il eut même des cris étouffés. Beaucoup me regardaient avec les yeux ronds sans comprendre comment le grand et le noble amiral ait pu s’abaisser à un tel acte méprisant et dégradant. Mamou pour sa part baissa la tête et joignit ses mains devant elle. Je pouvais sentir qu’il était quelque part désolé. Désolé d’avoir pris part à ce plan machiavélique. Désolé d’avoir trahi le sultan. Désolé d’avoir été ne serait-ce qu’un instant amoureux et envouté par un homme aussi méprisable que le grand vizir.

- « Cependant, si je l’ai fait, c’est parce que j’ai découvert qu’elle était de mèche avec le grand vizir pour mettre en place ce plan diabolique. D’ailleurs, cette femme en quittant discrètement le palais la nuit dernière n’avait qu’un seul but : S’assurer de la mort de la nouvelle concubine du sultan. Celle-là même que vous présentiez comme une diablesse ! Mais qui n’est autre qu'une détective privée et ma coéquipière sur ce coup ! »

Nouveau coup de tonnerre dans la salle ! Les invités n’en croyaient pas leurs oreilles. Mais sans leur laisser le temps de digérer toutes ces informations, je me mis à raconter tout ce qui s’était passé depuis nos premières suspicions : Notre volonté d’enquêter, nos différents périples dans le désert et découvertes, les combats que nous avions du mener jusqu’ici, ce qu’approuvait à chaque fois Mamou en hochant docilement la tête. De plus, celle-ci sortit un autre dial qu’elle avait apprêté juste au cas où et qui retranscrivait la phrase entière du sultan ce fameux jour où il pensait juste s’amuser :

- « Je... ? Vous êtes sûr ? T-très bien... J-je vais conquérir Alabasta et prendre la place de la Reine Vivi ! Hahaha hahaha ! C'est... c'était bien ? »

Blague. Une vaste blague. Et voilà qu’elle était claire aux yeux de tous. Phume eut un petit sursaut et regarda avec inquiétude le grand vizir. Tout ça n’était pas prévu ! Ce dernier était presque enragé, mais tentait tant bien que mal de garder son calme. Sur ce, le récit de Mamou commença. Elle expliqua rapidement, mais avec tous les détails le plan de Mabhoul depuis le commencement. Ses ambitions depuis la mort du précédent sultan, son aversion pour Djahad qui menait une politique ridicule et les différentes étapes de son odieux plan et les différents participants… Dont Plume…

- « Foutaises ! Il va de soi que tout cela n'est qu'un sombre retournement prévu par le sultan au cas où je serais amené à le trahir ! Ne croyez pas les paroles de ces bonimenteurs ! »

Qu’il est tenace ce type, que m’étais-je dit intérieurement. Mais un fait auquel je ne m’attendis pas vint tous nous surprendre !

- « ASSEZ !! JE NE PEUX PLUS JOUER LA COMÉDIE PLUS LONGTEMPS !! »

Lhou Lhou, générale des archers de Rawhajpoutalah se manifesta brusquement. Sa voix criarde fit trembler les fondations même de la grande salle et attira toute l’attention sur elle. L’instant d’après, elle se mit à fondre en larmes. Comme une gamine chieuse qui ne supportait plus le poids d’un mensonge qui la dépassait. Sa haine viscérale qui l’avait conduite à participer à ce projet assez infâme avait disparu devant le désarroi du jeune sultan qui n’en croyait pas ses oreilles. Son amour avait refait surface et c’est ce qui la poussa à tout avouer sans hésitations malgré ses pleurs.

- « OH MON SULTAN, JE VOUS AIME, JE N'AI JAMAIS VOULU QU'IL VOUS SOIT FAIT AUCUN MAL ! »

La jeune femme larmoyante quitta sa position sous les yeux ahuris de la foule qui ne cessait d’être étonnée. Il y avait de quoi avec tous ces rebondissements. Elle courut rapidement vers son maitre et se jeta à ses pieds en redoublant de pleurs. Comme signe de soumission et de repentance, elle se mit à lui baiser les pieds, ce qui prit au dépourvu le jeune homme qui ne savait plus à quel saint se vouer. Ni les gardes qui l’avaient agrippé. Ces derniers ne savaient plus quoi faire. Mabhoul et Fhï Fhï, quant à eux, étaient presque rouges de colère. Le plan tombait à l’eau. La supercherie se découvrait…

- « JE VOUS VOULAIS POUR MOI, RIEN QUE POUR MOI… MAIS VOUS NE M’AVEZ JAMAIS CONSIDÉRÉ COMME UNE FEMME ! JAMAIS ! MALGRÉ TOUS MES EFFORTS POUR VOUS PLAIRE ! »

- « LA FERME IDIOTE ! »

- « C’EST PAR PUR ESPRIT DE VENGEANCE QUE J'AI ACCEPTÉ DE PARTICIPER A CETTE MASCARADE ! J’ÉTAIS DÉSEMPARÉE, MANIPULABLE ! PARDONNEZ-MOI, VOTRE MAJESTÉ ! JE VOUS AIME ! JE VOUS AIME ! »

- « J'AI DIT ASSEZ !! »


Le grand vizir perdit définitivement son calme et hurla comme un fou. Sous sa voix de stentor, la plupart des personnes sur place se bouchèrent les oreilles. L’instant d’après présentait un blanc et toutes les attentions étaient sur Mabhoul. La situation lui avait échappé sans qu’il ne comprenne le pourquoi du comment et tout devenait clair à présent. Mais bien avant qu’une tierce personne puisse réagir, le grand vizir dégaina vite fait une longue épée et la plaça automatiquement sous le cou de la reine. Horreur ! Damnation ! Sacrilège ! Qui aurait pu penser qu’il s’agissait d’un imposteur ?!

- « SI QUELQU’UN BOUGE, JE L’ÉGORGE COMME UNE CHIENNE ! D’AILLEURS… »

Sous sa mine sévère et son sourire malsain, une grosse couche de poudre sortit de nulle part. De la poudre noire. Elle s’éparpilla à une vitesse prodigieuse dans toute la salle. Et c’est dès lors que la gouvernante hurla un ordre salvateur : « TOUS A TERRE ! » Les plus rapides -Toute la famille royale à peu près- et quelques soldats se couchèrent à plat ventre au sol, tandis que Mabhoul de sa main de libre tendait déjà vers l’assemblée une arme à feu et appuya sur la gâchette à plusieurs reprises. Une série d’explosions s’enchaina. Comme des grenades. Autant dire que les secondes qui suivirent furent très longues…

Peu après, je me relevai le premier et je constatai l’inévitable : Il s’était volatilisé avec la reine dans le palais, et ce en compagnie de Fhï Fhï… Mais le plus important était tout autour de nous… Le type avait dévasté l’endroit… Portes, piliers, lustres, plafonds… Tout était sens dessus dessous… Le sol était tapissé par du sang, en plus d’être jonché de débris et de cadavres en tout genre… « Putain ! » Je pestai, puis posai me redressai complètement, couvert de poussières et de sang. Il fallait sauver impérativement la reine. Coûte que coûte. Quitte à m’immiscer une fois de plus dans les affaires d’état du royaume.


***Une minute après les évènements au palais***


- « Eh bien… La belle a pris son temps… »

J’eus un murmure amusé pour moi-même. Faut dire que je l’avais complètement oublié celle-là. Mais j’eus une grimace de répulsion lorsque je vis à quel point elle était amochée. Un vrai combat avait dû avoir lieu au beau milieu du désert. J’aurai voulu aller parler au gros derche, mais le sultan fut plus rapide que l’éclair et se rua vers elle, presque joyeux. A croire que ce mec n’avait pas le sens des priorités/réalités. Un vrai pourri gâté. Pas étonnant que l’autre enfoiré ait voulu le buter. Mais bien vite et clope au bec, je me détournai de cette scène assez guimauve pour regarder le reste de la salle d’où on évacuait les civils…

Dehors, l’armée royale devait s’évertuer à sécuriser le périmètre du palais pour ne pas laisser s’échapper les bandits.

Mais le plus dur reste à venir…
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L'intérieur de la pièce laissait facilement penser qu'une bombe venait d'y exploser. Çà et là les meubles étaient rongés, renversés, brisés comme certains corps gisant à terre, des nobles plus que de la simple populace, des gens de la reine et la cour de la famille royale. Bref, un vrai désastre qui avait baigné l'endroit de sang et de chair mais, heureusement, épargné les hauts dignitaires du pays qui se tenaient recroquevillés, entassés les uns sur les autres dans un coin. De façon panoramique, je m'étais intéressée à la scène se déroulant sous mes yeux plan par plan, l'oeil tantôt posé sur le Sultan se ruant vers moi avec son regard de biche, tantôt vrillé sur la femme militaire dont le nom m'échappait et la gouvernante qui lui agrippait le bras, avant de terminer mon état des lieux sur la personne du Contre-Amiral dressé en plein milieu de la pièce qui me regardait lui aussi, une expression familière sur le visage.

- Oh Elizabeth, ma douce, ma tendre, ma bien aimée, comme vous m'avez manqué. J'ai bien craint de ne jamais vous revoir. avait fait le gusse tout en venant me baiser les mains et se serrer contre moi brusquement.

Interloquée, en sang, j'avais toujours du mal à faire semblant d'apprécier ces embrassades et étant donné ce qu'il venait de se passer, j'avais rapidement compris qu'il n'était pas nécessaire de jouer plus longtemps la comédie. Saisissant le souverain à bout de bras, le décollant subitement de mes vêtements poisseux, j'avais alors entrepris de lui coller une paire de baffes avant de lui demander ce qu'il avait bien pu se passer ici. Ce qu'il avait fait presque sans sourciller, une fois les idées un peu plus claires, tandis qu'une ombre menaçante semblait se rapprocher inexorablement de nous au fil de la conversation, jusqu'à finalement venir me pousser en arrière.

- ASSEZ ! JE T'AI BIEN VUE POSER LA MAIN SUR MON SULTAN, COMMENT AS-TU OSE GUENON ? me lance soudain à la figure la femme général sortie de nulle part.

N'ayant réussi à saisir l'histoire qu'en petits morceaux épars, je peine à comprendre ce que la brunette me veut, mais celle-ci, loin d'en avoir terminé et rouge de colère, encoche soudain une flèche que je ne parviens à esquiver qu'au dernier moment. Tournant le regard vers le projectile fiché dans l'herbe du jardin derrière moi, je dénote la vitesse prodigieuse à laquelle la végétation se fane tout autour.

- Qu'est-ce qu'elle me veut celle-là encore ? fais-je donc, hagarde.

Mais déjà la garce prend un nouveau trait et se prépare à m'envoyer une seconde flèche empoisonnée, avant de s'arrêter net en voyant le Sultan se mettre sur la trajectoire, bras et jambes tendus pour me couvrir de tout son illustre corps.

- Cela suffit !! Pourquoi êtes-vous en train de vous battre alors qu'en ce moment-même Mabhoul tient en otage la reine ? Il faut aller la sauver !

- Mais... Mais enfin Djahad je t'aime ! Laisse-moi la punir d'avoir levé la main sur toi, laisse-moi lui crever un deuxième œil... répond donc la générale, hystérique.

Je me remémore alors ma première rencontre avec la jeune femme et comprends subitement que la jalousie la ronge au point qu'elle n'aura de cesse d'essayer de me tuer tant que le Sultan ne sera pas à elle seule. Je souris donc de façon malsaine, attendant que l'homme en vienne à lui briser le cœur, à lui dire qu'il ne l'aime pas et que je suis son seul véritable amour ; mais tandis que le bonhomme se confond dans de sempiternelles paroles aussi niaises que faussement diplomatique, je perds finalement patience. Et comme je n'ai envie que d'une chose, c'est à dire d'en découdre avec l'archère, je saisis soudain la manche du gusse et lui arrache un long et langoureux baiser, tout en n'hésitant pas à darder un œil méprisant sur la guerrière au visage écarlate.

- ESPÈCE DE SALOPE !! mugit finalement la grognasse estomaquée tout en brandissant son arc à nouveau.

Spontanément, je repousse le Sultan pour qu'il ne pâtisse pas de l'accès de colère de la bonne femme et me saisis de mon couteau de chasse puis le lance en direction de cette-dernière avant qu'elle n'ait pu faire un seul mouvement. Cependant la garce est loin d'être une bleusaille et, même dans l'esquive, celle-ci finit tout de même par décocher son tir au cours de son mouvement, m'obligeant à le parer ultimement avec un Tekkai discret mais efficace, brisant la flèche au moment où celle-ci rencontre mon corps. Néanmoins, cette dernière utilisation du Rokushiki n'est pas sans conséquences puisqu'une douleur sourde vient me taillader l'épaule : là où la flèche aurait normalement dû se planter. Me rendant alors temporairement sonnée, je me retrouve dans l'incapacité d'esquiver une charge d'épaule qui m'envoie rouler plus loin, dans la végétation luxuriante du jardin. Visiblement fière de son dernier coup, mon adversaire un peu sûre d'elle en profite pour jouer la provocation :

- Je vais te faire la peau, tu vas geindre comme une truie quand je te trancherai la gorge et que tu te videras de ton sang !

Me relevant fébrilement, je passe le revers de ma main contre la commissure de mes lèvres pour en effacer le sang frais qui s'en échappe. Et comme je n'ai rien à répondre à de tels propos, je décide de contre-attaquer en utilisant les capacités naturelles de mon corps et mon couteau papillon pour effectuer ma charge sur l'ennemie qui, dans le but de parer mes attaques, dégaine le poignard accroché à sa cuisse. Tourbillonnant autour de cette-dernière, enchaînant les coups de poing et les coups de lames, en tranchants et en estoques, je finis par rapidement me rapprocher du point où mon couteau à cran d'arrêt est venu se planter et le récupère alors de la main gauche avant de me figer, toutes lames sorties. Comprenant que son arc ne lui est plus d'aucune utilité et ne fait que l'encombrer, la jeune guerrière décide finalement de s'en débarrasser ainsi que de son carquois pour faire apparaître une dague de sous sa manche et s'en saisir fermement.

- Maintenant le vrai combat peut commencer. On va voir qui va geindre comme une truie.
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- « Ne devrions-nous pas arrêter ces folles furieuses ? Il y a plus urgent que de futiles querelles pour un homme ! » Demanda Hahypet, un brin inquiet.

- « Justement gros porc ! » Intervint sèchement Hakypudubekh ! « Concentrons-nous sur le principal ! Il faut sauver la reine ! »

- « Je crois que c’est le mieux, effectivement… »
Conclut Ymdebekht II, soutenu par le regard de son fidèle bras droit Toutankhanon.

- « Et pour ce qui concerne Phume… ? Il semble avoir disparu après les explo- »

- « On s’occupera du cas de ce traitre plus tard ! »
Coupa Hakypudubekh !

Alors que les vieux étaient en pleine discussion, j’observais le pauvre sultan qui ne savait à quel saint se vouer. La manière dont Elizabeth avait joué avec lui me rappelait comment moi, j’avais joué avec elle, son corps. On peut dire que mis à part un coït, j’avais tout fait ou presque avec elle. Et d’un seul coup, je visualisais un peu l’exagération dont j’avais fait preuve. Néanmoins, ça avait été si tentant que je ne pus qu’avoir un sourire railleur. Mais très vite, les voix des généraux me ramenèrent à la réalité et l’évacuation des blessés et des cadavres éparpillés un peu partout me firent comprendre qu’on avait affaire à un sérieux malade. Comme si elle avait lu dans mes pensées ou plutôt « il », Mamou s’approcha de moi et prit la parole : « Il utilise le fruit de la poudre. Et il est très fort. Deux fois plus que moi. Vous devriez ne pas le prendre à la légère… » J’eus une expression surprise en regardant celui que j’avais écrabouillé dans le désert. Il n’avait aucun intérêt à me mentir. Ce qui signifiait alors que le grand vizir avait un niveau qui se rapprochait sensiblement du mien. Aussi fort qu’un contre-amiral. Ça promettait. Inutile aussi de dire qu’il avait un avantage dès plus embêtants : La reine. Un faux mouvement et il la tuait. Il n’avait plus rien à perdre…

- « Il y a aussi son bras droit, Hamza. Celui que l’on surnomme Fhï Fhï. Il possède un meitou. Et il est plutôt bon en escrime… »

- « Ooooh… »

Voilà qui était intéressant. Un bretteur. Avec un meitou qui plus est. Pas mal. Il allait sans doute nous barrer le chemin dans notre ascension vers le vizir et la reine. Et de ce que rajouta la gouvernante du sultan en pleurs dans son coin, lui aussi était vachement puissant. Des ennemis que les généraux locaux ne pouvaient pas défier même avec toute la bonne foi du monde. Et s’ils partaient tous ensemble, nul doute que certains allaient périr en utilisant l’eau des héros, ce qui serait préjudiciable pour l’armée, mais aussi pour la famille royale. De ce fait, je délaissai Mamou non sans lui pointer son sultan désemparé qui semblait ne même pas s’inquiéter du sort de la reine, avant de m’avancer vers les généraux qui se turent lorsque j’arrivai à proximité. Hakypudubekh qui s’était presque énervé contre moi tout à l’heure eut une mine qui traduisait son regret. Mais étant plus âgé que moi et membre d’une famille royale, il ne pouvait décemment pas s’excuser, ce que je compris en lui affichant mon sourire, puis en reprenant rapidement tout mon sérieux: « J’irai sauver notre souveraine. Vous, restez ici et occupez-vous des autres détails. Les gouverneurs devraient même aller sécuriser leurs villes. » Il eut un silence pendant une bonne poignée de secondes, puis…

- « Nous sommes ravis de voir à quel point vous êtes impl- »

- « Oubliez l’idée de m’écarter, votre altesse. Je suis peut-être un marine, mais je suis avant tout un citoyen d’Alabasta. Je suis aussi plus fort et bien plus expérimenté que vous dans ces situations. Oui, je sais : Je suis extrêmement culotté de le dire ainsi, mais il vaudrait mieux que j’y aille. Moi, je suis remplaçable en tant que citoyen et même en tant qu’amiral. Vous, non. Le peuple a besoin de vous. La reine aussi. »


Je posai un genou à terre, avant d’incliner ma tête bien bas. Mes paroles et l’acte posé avaient touché les quatre vioques au plus profond de leurs coeurs. Ymdebekht II, l’homme pressenti pour prendre la succession de Vivi eut un lourd soupir. L’homme consulta alors ses trois autres frères du regard qui finirent par approuver. Même le teigneux et orgueilleux  Hakypudubekh était d’accord. C’est vous dire ! De ce fait, il s’avança vers moi et posa une main fraternelle sur mon épaule : « C’est bon. Nous sommes d’accord. Mais notez ceci : L’échec est impardonnable. Vous devez réussir et ramener la reine vivante coute que coute. Tachez aussi de ne pas mourir, Fenyang ! » La fierté qui m’emplit à cet instant précis balaya complètement toute trace de fatigue et c’est avec une détermination sans failles que je me levai, bien décidé à ne pas faillir à la mission que les membres royaux avaient daigné me confier ! Sans attendre une seule seconde de plus, je me mis à courir vers la deuxième porte au fond de la salle qui menait à l’intérieur même du palais : Ils avaient dû prendre cette direction et se confiner quelque part. Mais à mi-chemin, je m’immobilisai, non sans un sourire et me retournai vers les vioques qui me regardaient avec surprise. Non, je ne rebroussais pas chemin, mais…

- « J’ai une autre requête : Si l’albinos, ma coéquipière finit son combat à l’extérieur, laissez-la me rejoindre ! Elle me sera d’une aide très précieuse ! »


Et sans même attendre une réponse de leur part, je me mis à courir comme un dératé et empruntai la porte ouverte. Mon haki s’activa aussitôt et je sentis aisément les voix de la reine et du grand méchant loup. Ils étaient carrément sur l’une des nombreuses dalles du palais, tout en haut. D’ailleurs, j’étais tellement focus sur la souveraine, que lorsque je traversai un étage qui ressemblait plus à une énorme terrasse qu’autre chose, je ne sentis pas tout de suite la présence d’un ennemi. Ce ne fut qu’à la toute dernière seconde que sa présence s’imposa à moi et que j’évitai de justesse ce qui semblait être une grosse lame de vent partie s’écraser sur l’un des nombreux piliers des lieux, d’ailleurs. Après deux ou trois roulades latérales, je me relevai assez rapidement et fit face à un drôle de gars qui tenait une arme assez bling bling, gros sourire aux lèvres : Ce mec n’était autre que Fhï Fhï, l’épéiste dont m’avait parlé l’okama. « Vaut mieux que t’avance pas loin mon pote, kukukukuh ! » Je haussai un sourcil et le nom de sa lame que j’observai depuis un moment maintenant me revint en tête : Le Masamune… Beau joujou qui étira mes lippes. Suffirait de le tuer pour s’en emparer non ? Petit problème. Ça pouvait se faire. Ça allait même se faire…

- « Mon maitre demande à ce qu- »

- « Gaspille pas ta salive et viens te battre. J’ai notre reine à sauver et pas de temps à perdre avec un gamin de ton genre. »


Fhï fhï eut une mine surprise avant de sourire comme un vrai taré. Ma réponse était satisfaisante.

Il allait pouvoir faire mumuse avec moi. Qu’il se disait…

Sauf que le combat allait prendre une tournure qu’il n’aurait jamais imaginée.
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Pendant une dizaine de minutes nous nous étions battues à bras le corps, jonglant avec nos courtes lames et dévoilant nombre de figures gymnastiques et autres pirouettes prouvant pour chacune nos dextérités féminines. Perpétrant un déplacement continu dans cette drôle de danse, enchaînant les roues et les salto arrière, les coups de pied sautés et autres figures pompées à différents arts martiaux, j'avais poursuivi sans relâche mon adversaire jusqu'à tomber finalement essoufflée, au bout de mes forces. Dans un état de fatigue moindre, la jeune femme avait l'air de tenir davantage le coup et n'avait eu de relâche de parer et contre-attaquer chacune de mes tentatives. Et, le sourire aux lèvres, elle semblait tout autant s'émerveiller de son sans-fautes que de l'expression macabre laissant transparaître mon irritation sur mon visage.

- C'est dommage, tu es si forte avec le Rokushiki pourtant, Anna-chan ! rajoute la mioche, comme si j'en avais besoin.

Esquivant un coup de dague porté au niveau du cou, je profite d'être baissée pour balayer la jambe de mon adversaire du talon et parviens enfin à faire chuter celle-ci. Entrée dans un état de rage difficilement contrôlable, je me vois alors foncer stupidement dans le tas, donnant du poing, du pied et du couteau pour essayer de sortir l'autre de la course. Mais mon énervement ne fait qu'augmenter la frustration qui m'anime, alors que la femme général s'applique à éviter les coups ou bien les parer systématiquement, avec encore plus de facilité qu'auparavant. Je comprends alors son jeu, de façon plus ou moins tardive, lorsque cette fois-ci c'est un lame qui vient arrêter l'un de mes mouvements, me tailladant le flan en profondeur. Que je m'énerve, c'était son but, dans l'espoir que je laisse davantage d'ouvertures... et j'étais tombée dans le piège comme une bleue.

Contrainte alors de reculer tout en me tenant d'une main la plaie ouverte qui saigne abondamment et vient me faire tourner la tête, me rappelant que j'ai déjà perdu beaucoup trop de sang, je finis par m'écrouler sur une grande plante tropicale qui me recouvre instantanément de ses feuillages jaunes et denses. Mais alors qu'il ne semble plus y avoir d'espoir, que la guerrière fond sur moi toutes dents dehors, avec l'embarras du choix d'où frapper, ma main droite vient buter contre quelque chose de fiché dans le sol, étranger à la nature verdoyante de l'endroit. Et au moment où la jeune femme s'apprête à m'égorger, le sourire au visage, je me saisis soudain du trait pour le lui planter dans la jambe, avant de la faire basculer à terre, soulevant mon bassin pour lui asséner un puissant coup de pied dans les côtes. Comprenant soudain qu'elle vient de se faire empoisonner par sa propre flèche, sa propre arme, la gonzesse lâche soudain ses armes pour agripper son membre endolori et en retirer le projectile envenimé, avant de soudain être prise de spasmes incontrôlés. Je me relève et toise donc la bonne femme qui se cambre dans tous les sens, jusqu'à se contorsionner de façon quasiment impossible, les muscles du cou et du visage tendus par la douleur et le venin. Et c'est au bout d'une minute de souffrances terribles que sa tête retombe finalement mollement sur l'herbe fraiche, les yeux fixés sur l'étendue céleste, aussi vides qu'inanimés.

Avant de poursuivre ma course folle à travers le palais pour retrouver mon compagnon d'armes, je m'octroie une bonne minute de repos, allongée dans l'herbe verte et me plonge la tête dans l'eau d'un bassin à proximité. Légèrement revigorée, je me redresse enfin tant bien que mal et laisse derrière moi le cadavre de l'orientale pour sortir du cloître et traverser les portes défoncées de la salle des fêtes. Là, mon regard croise ceux de deux membres de la famille royale, un homme très fin et chauve à la mine sévère et un autre, petit et gras avec des yeux porcins. C'est toutefois sans dire un mot que les deux bonhommes reviennent à leur discussion avant de rapidement mettre les voiles vers Dieu sait où. Soudainement déserte, la pièce dévastée ne contient plus que moi, seule, sans personne à qui pouvoir demander par où est parti le Contre-Amiral que j'accompagne. Fatiguée, titubant légèrement, j'entreprends alors de faire appel à mon sixième sens. Et bien que j'échoue à étendre ma bulle pour sentir la présence du bonhomme quelque part dans l'immense demeure, un léger sifflement vient tout de même se porter à mes oreilles pour me faire parvenir des cris et des bruits de combat.

- Ça vient de l'ouest, c'est forcément lui ! Regarde Anna-chan, on dirait que c'est dans la grande tour là-bas !

En effet, au fur et à mesure que je me rapproche du bâtiment, les bruits semblent s'accentuer. Progressivement, alors que je me dirige vers l'endroit indiqué, mon audition revient à la normale et me communique à nouveau les sons environnants, comme les gazouillements des oiseaux des jardins du palais ou encore les ondes provoquées par l'agitation du vent. Trainant la patte jusqu'à l'entrée de la vaste salle cubique où je trouve finalement le pervers de la Marine aux mains avec le troisième général, j'apostrophe rapidement le bonhomme qui doit forcément savoir où la Reine a été emmenée. Parant un coup d'épée avec dextérité, celui-ci me répond d'un bref coup d’œil vers le plafond, avant de surenchérir en contre-attaquant. Je ne traine alors pas plus longtemps, contournant l'endroit pour me précipiter vers la cage d'escalier où une lame d'air vient m'interrompre dans ma lancée, échouant à deux centimètres de mon visage. Du coin de l'oeil, je vois alors que l'adversaire de mon allié du moment m'a vue et fonce sur moi, rouge pivoine, le sabre prêt à découper une nouvelle attaque aérienne.

- Fait chier. lâché-je instinctivement.

Malgré son avancée prodigieusement rapide, le gusse est pourtant soudainement interrompu par un coup de pied dans les cotes qui vient le projeter plus loin, me laissant assez d'ouverture pour me précipiter sur le palier et monter les marches quatre par quatre sans attendre davantage mon reste. C'est finalement après deux étages grimpés vélocement grâce à une poussée d'adrénaline instantanée que je retrouve le Mabhoul posté devant le gigantesque balcon de ce que semblent être les appartements de la Reine Vivi elle-même. En me voyant arriver, l'esprit combatif malgré l'état pitoyable dont je fais preuve physiquement, le bonhomme lâche soudainement un hoquet de surprise.

- Vous... ?!

- Moi.
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Le Grand Vizir n'en revient pas, sa mâchoire semble se déboiter spontanément, l'espace d'un instant, avant de rapidement retrouver sa place pour afficher à nouveau un visage neutre. Non, il ne préférait pas poser de questions et semblait plutôt focalisé sur ses objectifs actuels, resserrant la menace de son sabre sur le frêle cou de sa triste otage. Quand bien même m'aurait-il demandé comment j'avais pu m'en sortir que je ne lui aurais pas répondu de toute façon, j'aurais même pu profiter de la surprise temporaire pour tenter un coup rapide et espérer lui soutirer la vieille femme... malheureusement ça n'était pas le cas, il s'était tu et n'avait émis aucun son depuis. Rien, niet, nada, il me regardait, circonspect, attendant que je fasse ne serait-ce qu'un pas pour presser le chien de son flintlock et menacer implicitement de buter la centenaire. Ce que je m'empresse malgré tout de faire... en poussant mon corps dans ses derniers retranchements.

- Si Anna-chan n'est pas assez forte pour le combattre...

Je disparais soudain pour me glisser furtivement devant l'homme au visage perplexe et saisis avec une poigne de fer - littéralement - l'épée à même la lame, profitant de la stupéfaction du bandit pour la lui retirer et l'envoyer choir au loin, depuis le balcon.

- ...alors elle peut toujours essayer de sauver la vieille dame.

En posture de force par rapport au bonhomme pétrifié par l'incompréhension, je choppe la main de la vieillarde pour tenter de l'emmener avec moi, loin du Grand Vizir visiblement désarmé. Mais tandis que je me retourne pour commencer ma fuite en compagnie de l'otage, je remarque soudain une odeur étrange qui emplit l'atmosphère environnante. Un flash spontané vient me rappeler l'étrange phénomène qui m'avait envoyée au tapis avant que je ne me réveille dans le désert, enchaînée. Une poudre rose et soporifique. Cette fois-ci la situation était similaire... mais différente : la poudre était orange, voire rouge.

- Qu'est-ce que...

Ne pouvant esquiver le nuage qui semble s'enrouler autour de ma tête, mon œil unique se met alors à m'irriter fortement et à larmoyer comme pas possible. Instantanément aveuglée, je sens l'étreinte de la main de la reine se défaire aussitôt et la voix du bonhomme gronder derrière moi.

- Vous pensiez que ça serait aussi facile ? Je ne sais pas comment vous avez fait... mais n'espérez pas vous en tirer aussi facilement. énonce le sale type, m'occasionnant simultanément une douleur fulgurante dans les reins par le biais d'un puissant coup de poing.

Propulsée contre le mur le plus proche par la force de l'attaque, je me retrouve obligée de tâtonner pour pouvoir me relever, sans vraiment savoir où je me situe, ma vision étant toujours trouble, inutilisable. Touchée par la "poudre de cécité" que je soupçonne être du piment ou quelque chose d'exotique de ce style, je parviens cependant à tendre assez l'oreille pour deviner un déplacement rapide sur ma gauche, entendre un déclic et esquiver de justesse un tir d'arme à feu. Déportée plus loin, le long du mur, grâce à une rapide roue, je passe à un cheveu du point de chute de la détonation. Mais à peine ai-je fini mon mouvement que déjà l'homme recharge son arme pour appuyer à nouveau sur le chien et me menacer d'une seconde balle. Sous l'effet du stress, j'essaye d'appliquer une manœuvre d'urgence, d'étendre à la fois le périmètre et la précision de mon audition grâce à la capacité récente me donnant la possibilité de mettre mes sens en exergue. Échouant cependant à me concentrer, il est bien trop tard lorsque je capte une seconde détonation et quand cette fois-ci une douleur soudaine vient spontanément me transpercer le bras. Tiraillée par la plaie ouverte, je laisse malgré moi échapper un court râle de souffrance alors que l'homme peste d'avoir manqué sa cible une nouvelle fois.

- Si j'avais su que vous me donneriez autant de fil à retordre, je vous aurais tuée la première fois que je vous ai vu... et cette fois-ci à Nanohana aussi. grogne-t-il avant de recharger une dernière fois son arme. Cette fois-ci vous ne m'échapperez pas.

Pliée en deux, mon état alarmiste occasionne pourtant la création de la bulle que je m'étais précédemment efforcée à créer, échouant quelques instants plus tôt. Percevant une sorte de vrombissement dans l'air et une drôle d'odeur, j'arrive à percevoir grâce à mon audition surnaturelle de tout petits objets sphériques de la taille d'un grain de sable chacun, gravitant tout autour de moi. De la poudre à canon ? Probablement, je ne connais que trop ces spécificités, étant armurière de métier à la base. Instinctivement, tout en me tenant donc l'épaule meurtrie par le dernier tir, je roule nonchalamment sur le sol pour esquiver le nuage explosif. Au même moment, l'homme tire une troisième et dernière balle, provoquant une déflagration à l'endroit où je me trouvais quelques instants auparavant. Percevant un nouveau hoquet de surprise, je dénote dans la voix de l'homme des sentiments incontrôlés.

- Comment est-ce possible ?

Mais ce n'est pas tout, mon champ d'audition va encore plus loin, jusqu'à me signifier le bruit produit par la respiration des individus dans le bâtiment : que ce soit celle de la reine, rapide et haletante ; celle du Grand Vizir, lourde et minutieuse ; celle du Contre-Amiral, relativement calme ou encore celle de son opposant qui, au même moment, vient s'éteindre.

- On dirait que le monsieur pervers a gagné, Anna-chan ! Tiens bon, il vient nous aider.

En effet, j'entends ses bruits de pas signaler qu'il grimpe d'ores et déjà les premières marches de l'escalier. Vu l'état dans lequel je suis, un plan aussi téméraire que stupide me vient alors à l'esprit. Et tandis que le fruit de mes espérances continue à monter les escaliers, je fonce tête baissée vers le Grand Vizir, dont je devine la présence grâce à son souffle pesant à proximité et tente un dernier assaut à l'aveugle.

- Tekkai...

A la vue de ma précipitation, le type lâche un râle de désespoir avant de lever son flingue devant lui et l'armer, me permettant de prendre conscience de ce dernier mouvement et de sa position. Grâce au bruissement du vent qui vient secouer les rideaux, je devine le balcon juste derrière la reine.

- Ha ha ha ! C'est de la pure folie, mais bon... il n'y a plus aucune raison que je te rate désormais. fait le gaillard en posant son doigt sur la détente.

- ...Kenpo !

BAKAM !

Face à mon Rokushiki faiblard, la balle ne vient cependant pas ricocher totalement sur la surface déjà bien endolorie de ma peau et s'enfonce légèrement dans la chair de l'un de mes seins surplombant un poumon. M'occasionnant une douleur sourde au niveau du thorax, la plaie m'oblige malgré tout à m'arrêter spontanément et, feignant la mort, à m'écrouler sur le sol, faussement immobile. N'y voyant que du feu, je devine le souffle haletant du Grand Vizir se retourner pour contempler le nouveau visiteur qui vient d'entrer dans la pièce au même moment. Et puis, entendant les bruits de pas signifier l'éloignement du comploteur de mon corps allongé, je me surprends finalement à récupérer une respiration légère et frêle, avant de murmurer, l'oeil toujours fermé.

- Ha... ha... A toi de jouer... maintenant...
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- « Putain !!! »

- « Touche pas à son cul, il m’est précieux, tu sais, nfufufufu ! »


Un sourire ornait mon visage alors que Hamza se relevait tant bien que mal du coup de pied que je lui avais flanqué. Il avait la rage et cela se voyait bien à son visage complètement décomposé et plus laid que jamais. Quelqu’un avait osé passer la défense qu’il formait et cette « faute » était impardonnable. Complètement. Une sorte d’aura émana de lui. Rien à voir avec un haki des rois ou quoique ce soit de ce genre. Disons que ça avait plus l’air d’un truc de psychopathe qu’autre chose. Cependant, il n’arrivait toujours pas à me faire peur, moi qui en avait vu des vertes et des pas mûres dans ma longue existence. Plutôt que de flipper, j’eus plutôt un sourire moqueur. Mais l’erreur fut grande. Puisque sans que je m’en aperçoive vraiment et malgré mon puissant haki, un je ne sais quoi vint lacérer la chair de mon avant-bras droit, au point que je lâchai mon arme. L’instant d’après, le mec avait bondi vers moi, la lame de son meitou pointé vers moi. Et là, n’eut été une esquive de dernière seconde, il m’aurait embroché net suite à un coup d’estoc. L’enfoiré ! Je portai un coup d’œil rapide à mon bras et la forme de la blessure m’interloqua…On aurait dit qu’on m’aurait taillé la peau et la chair avec des fils de fers, des barbelés même. L’impression était bizarre…

Par contre, je n’eus pas le temps de trop y penser que je sentis un souffle bizarre puis deux de mes membres presque « immobilisés ». L’impression d’avoir été ligoté revint en force, mais je n’eus là encore pas le temps de bouger que du sang gicla de mon bras gauche et de mon pied droit. Et les blessures étaient loin d’être superficielles. On aurait presque dit un vulgaire piège à mâchoire qui voulait complètement me broyer les membres. S’il ne possédait pas déjà un meitou, j’aurai pu jurer qu’il possédait le fruit des fils, carrément. Mais j’étais sûr que c’était autre chose. Lui se mit à rigoler comme un dément, fier du fait que ses attaques avaient eu du succès. « TU VAS CREVER COMME UN CON, HAHAHAHAHA ! » Et là, il perdit la boule ! Il s’esclaffait comme un beau diable, gigotait sur lui-même, se prenait le ventre dans les mains, avant de foncer une nouvelle fois sur moi. Les lames de vent se mirent à pleuvoir. Si je pouvais éviter certaines, j’étais parfois obligé de générer moi aussi des vents coupants à partir de mes bras pour contrer ses assailles. Les miennes se mangèrent -Mes membres ne pouvaient décemment rivaliser avec le tranchant de sa lame- ses attaques qui finissaient néanmoins déviées de leur trajectoire initiale. Au moins…

- « DANSE POUR MOI FENYANG, DANSE ! »

Alors que je comptais récupérer mon arme pour mieux lui faire face, le gars me balança une onde tranchante plus dangereuse que les autres et… lumineuse. L’attaque m’éblouit et s’abattit sur moi de plein fouet barrant mon torse d’une grosse entaille ouverte qui fit gicler le sang. On aurait pu y croire… Sauf que ce fut la vision que mon mantra m’imposa quelques secondes avant que je ne décide d’oublier de récupérer mon arme sur le champ, de sorte à ne pas être totalement à sa portée. Du coup, il me décocha quand même son attaque, mais je pus l’éviter sans mal tout en fermant les yeux, histoire de ne pas être illuminé. Je me retrouvai du coup très très loin de mon sabre, ce qui me força à opter pour un choix radical : Le retour à la vie. En quelques secondes seulement, mes cheveux prirent une taille conséquente et jaillirent vers l’arme. Hamza resta stupéfait pendant quelques secondes, mais lorsqu’il voulut réagir, il était trop tard. J’avais déjà mon épée en main, sourire aux lèvres et ce malgré mes blessures. Il était temps de lui faire mordre la poussière à ce petit con qui croyait qu’il avait affaire à un bretteur de seconde zone. Et c’est dès lors que je poussai mon haki de l’observation à son paroxysme. Tous mes sens étaient en alerte.

- « Bon, c’est pas que je m’ennuie mon pote, mais on va en finir ! »

Mes mots, ma classe, ma décontraction et ce malgré mes blessures le décontenancèrent. Puis il eut un cri. La rage le gagna une fois encore. Et cette fois-ci, je les vis. Les fameux moulinets qu’il fit avec ses poignets de sorte à générer des fils presque invisibles. Voilà qui expliquait la cause de mes précédentes blessures. Il me projeta sa technique si particulière, sauf que je provoquai une rafale de vent qui balaya son attaque comme si de rien était. D’abord choqué, il insista en me renvoyant la même chose, mais je fis pareil. Du moment où ses techniques pouvaient être lues, elles étaient faciles à parer parce que de faible consistance. Et puis disons les choses telles qu’elles sont : Il m’avait peut-être emmerdé un moment, mais il n’avait pas le niveau pour me tenir tête comme il se doit. Suite à ce constat, je me projetai immédiatement vers lui. Il eut une bonne réaction puisqu’il me balança plusieurs lames de vent à la gueule et éblouissantes qui plus, mais je les contrai avec force et aisance pour me rapprocher et lui décocher à mon tour une vague tranchante tellement gigantesque qu’elle détruisit une bonne partie du sol et rasa tous les piliers et autres mobiliers qui se situaient derrière Hamza. Autant dire que j’avais fait fort.

- « Oups… »

Les fondations de tous le palais vibrèrent un instant, avant que le calme ne redevienne maitre de lieux. Je n’attendis pas que la poussière se dissipe puisque je pouvais aisément sentir sa voix. Faible. Agonisante. Preuve que j’avais fait mouche. En moins de trente secondes, je le trouvai au sol, prêt du gros trou qui donnait sur l’étage en bas. L’homme avait un bras et une jambe en moins. Il aurait été mort, s’il n’avait pas eu le réflexe d’utiliser le meitou qu’il avait comme bouclier pour parer une partie de mon attaque dévastatrice. Nonobstant ce fait, il avait grave morflé. Il pissait le sang et pas qu’un peu. D’un seul coup, j’eus pitié de sa gueule. Et sans attendre, je plantai ma lame dans son cœur. L’instant d’après, il n’était plus. Aussi bêtement que cela. Un trop plein de puissance et l’homme y était passé. Comme un con. Mais je n’avais pas le temps de m’attarder sur son cas. D’ailleurs, c’est comme un vulgaire rapace que je me penchai vers lui pour récupérer son meitou avant de quitter très vite les lieux que j’avais endommagé. Et rapidement, je me trouvai au dernier « étage », là même où se trouvait le grand vizir, la reine et gros cul à terre… A croire qu’elle ne savait faire que ça ! La princesse en détresse ! Tellement inutile sur le moment !

Mais il y avait plus important…

- « Cette arme… OÙ EST HAMZA ?!!!! » Demanda le grand Vizir, visiblement très en colère.

- « Ah parce que j’ai la gueule d’un gardien maintenant ? »


Une question qui suscita sa colère au point qu’il s’avançait vers moi rageusement, oubliant même la reine pendant quelques secondes. Quelques secondes très précieuses…
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Allongée sur le sol, comme morte, lessivée, inerte, j'avais attendu le moment propice, simulant mon décès, la respiration coupée pendant plusieurs longues minutes grâces aux arcanes secrètes ressortant de mes dernières formations sur Shimotsuki. Engageant une courte conversation avec le Contre-Amiral qui venait d'arriver, Mabhoul n'avait pas pu résister à l'appel de la colère, délaissant derrière lui son otage, quasiment à portée de main. Et c'était finalement sous le regard ahuri des deux homme que je m'étais soudainement relevée pour agripper la main de sa Majesté...

...et plonger dans le vide depuis le balcon du deuxième étage.

Basculant par dessus la rambarde, j'emmène ultimement ma protégée avec moi, tenue par une poigne de fer qui ne vient se relâcher qu'au moment où nous passons de l'autre côté, celui où l'on a plus pied et où l'on tombe irrémédiablement vers le carrelage de la terrasse, au rez-de-chaussée. Poussant un long cri strident, la reine continue à me dévisager tout en s'accrochant fermement à ma taille. Le moment semble s'écouler très lentement, ce qui me permet finalement d'amortir la chute au tout dernier moment avec un ultime effort de Rokushiki, non sans occasionner une rupture soudaine au niveau de mes tendons et un crachat sanguinolent fuyant lamentablement entre mes lèvres.

- Gep... pou ! fais-je donc de façon désarticulée alors que le sol se rapproche inévitablement.

Rebondissant frénétiquement dans l'air une fois, puis deux, mon corps se fige soudain, paralysé, avant de tomber à terre mollement, servant tant bien que mal de matelas pour la personne royale dont l'âge ne se prête absolument plus à ce genre de cascades dangereuses. Rapidement secourue par des gardes finalement attirés par les bruits des combats, n'arrivant bien évidemment que maintenant, j'observe la vieille dame se plaindre de s'être foulée le bras, dorlotée par ses deux sbires bientôt rejoints par Ymdebekt et son air paniqué. Et tandis que je reste allongée sur le dos, profitant de quelques instants de répits pour me reposer sans vraiment avoir d'autre choix car véritablement épuisée, mon iris unique reste rivé sur la danse empyrée des nuages à la texture si similaire à de la barbe-à-papa, perdu dans le bleu...

...et le blanc.
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- « Oh m… »

Stupéfait. Pendant les cinq secondes qui suivirent, j’avais été stupéfait. Mais je n’avais pas été le seul. L’autre grand dadais à mes côtés avait eu le même air con. Puis, à la sixième seconde, je l’avais ignoré pour foncer vers le balcon et je vis Elizabeth faire usage d’un geppou salvateur qui réduisit la casse. « Putain de bordel de merde... » Que m’étais-je dis à la fois choqué et soulagé. Qu’est-ce qui avait bien pu passer dans la tête de cette folle pour qu’elle opte pour une solution aussi dangereuse ? Non parce qu’on parlait de Vivi quoi… Une centenaire souveraine à la fois crainte et admirée de tous… Halala… Si ma mère venait à savoir ce qui s’était passé alors que j’étais dans les parages, je n’imaginais même pas le savon qu’elle allait me passer. Et ne parlons pas des différents héritiers tout en bas qui devaient criser comme jamais. Aie aie aie… Là tout de suite, j’eus plus peur de la réaction de la cour en générale que celle de mon adversaire derrière moi. D’ailleurs, je me retournai prestement vers lui pour constater qu’il était immobile, le visage toujours marqué par la surprise. Il devait se rendre compte qu’il venait de se fourrer dans une merde assez profonde : Ses hommes étaient mis en déroute, son bras droit était mort et ses généraux/proches l’avaient trahi en plus du fait qu’il venait de perdre son dernier ticket d’évasion…

- « SALOOOOOOOOOOOOOOPE !!!! »


Son cri retentit dans tout le palais et ses environs. La surprise fit brusquement place à la rage et cette dernière faisait trembler les environs. Sans comprendre pourquoi, j’eus la chair de poule en plus de trembler un peu. C’était bien la première fois depuis plusieurs années que j’avais une telle réaction devant un ennemi. Peur ? Pas vraiment… Ou pas totalement. Mais même de très loin, je pouvais sentir que ce type était puissant. Et un homme puissant et acculé ne répondait plus de rien. Là, il avait l’air d’une bête blessée qui n’avait plus rien à perdre. Et les yeux pleins de haine qu’il posa sur moi me confirmèrent qu’il allait faire un carnage. Qu’il allait essayer de tous nous buter, quitte à mourir lui aussi. Mon corps se mut alors de lui-même de sorte à ce que j’adopte une position défensive. Mais à peine avais-je bougé que le mastodonte qui faisait au moins trois bon mètres était apparu devant moi. Sans se poser de questions, il abattit son épée avec une force terrible sur moi, comme pour fendre mon crane d’un seul coup. Surpris par la rapidité et la force avec lesquelles il m’avait attaqué, je parai son coup d’un geste réflexe à l’aide de mon épée de bonne facture ; mais ladite épée finit par se briser lamentablement sous la puissance du grand vizir qui réussit tout de même à taillader ma poitrine une nouvelle fois encore !

- « Que… ?! »


Le sang gicla comme jamais, à un tel point que j’eus les yeux écarquillés devant cette scène qui me semblait être surréaliste. Mais même pas le temps de me remettre de cette horrible douleur qui irradiait tout mon torse qu’il m’assena un direct du droit bien senti. Le punch m’envoya valser jusqu’au balcon de la pièce où je percutai violemment la balustrade avant de basculer par-dessus. Dans une dernière tentative désespérée, j’essayai de me rattraper à une colonnette, mais mes doigts humidifiés par la sueur et le sang glissèrent sur le marbre et je tombai dans le vide. Ma chute arracha un cri d’horreur aux personnes toujours en dessous, mais mes cheveux, à la vitesse de la lumière, poussèrent de sorte à aller s’enrouler fermement autour d’une balustre. Ma chute vertigineuse se stoppa net et mon corps se mit à balancer de gauche à droite comme le battant d’une grande cloche. Suspendu à je ne sais combien de mètres de hauteur, je faisais un effort surhumain pour ne pas sombrer dans l’inconscience. Mais j’avais perdu beaucoup de sang, en plus d’avoir la tête lourde comme une pastèque et les oreilles bourdonnantes. Le combat précédent ne m’avait peut-être pas aussi fatigué que cela, mais les blessures que j’avais trainé jusqu’au grand vizir me desservait. Et puis, je devais bien avouer qu’il était plutôt effrayant dans son genre. Va savoir pourquoi…

- « FENYAAAAAAAANG !!!! »

Le cri qu’Ymdebekht me lança me « réveilla » complètement et c’est sans attendre une seule seconde de plus que je repris mon souffle avant que mes cheveux ne me hissent rapidement jusqu’au balcon en rétrécissant. Une fois que j’eus saisi la tablette à hauteur d’appui du balcon, je fis un gigantesque bond pour me retrouver à l’entrée de la salle. Le conspirateur se trouvait toujours à sa place. Sauf qu’une poudre en grande quantité tournoyait autour de lui. Il avait eu le temps d’en aspirer. Je pouvais sentir du piment rouge. L’air commençait à être vicié et saturé en aromes fortes et piquantes. Saisissant fermement le meitou que j’avais réussi à toujours gardé en main, je me remis une nouvelle fois en garde. J’aurai bien voulu me ruer vers lui, mais dans ces conditions, ce n’était tellement pas possible. J’eus un rire jaune. En à peine deux jours, j’avais vécu des choses pas croyables et j’étais sans doute loin d’avoir tout vu. Sur cette pensée, la poudre fonça sur moi. Pour ma part, je me mis à manier mon sabre autour de moi comme s’il s’agissait d’un simple nunchaku. Les brises que j’engendrais habilement et le plat de la lame faisaient office de bouclier sur lesquels se heurtaient ses produits sans réellement pouvoir m’atteindre. Mais malheureusement pour moi, l’atmosphère était imprégné des senteurs de sa poudre épicée qui provoquer un…

- « ATCHOUUM ! »

… Un éternuement conséquent qui me désarçonna complètement, au point de laisser une petite ouverture. Une brèche dont profita Mabhoul pour faire éclater ses poudres autour de moi. La nuée s’infiltra alors partout. Dans mes plaies béantes, mes yeux, mes narines, ma bouche, mes oreilles, mes pores… Bref, vraiment partout. Epuisé par tous les efforts que j’avais fourni depuis hier, les nombreuses blessures et autres, je me retrouvai un genou au sol, entrain de suffoquer. Mes yeux piquaient, mes oreilles bourdonnaient de plus belle, mes narines étaient enflammés et ma gorge était encombrée au point où je ne pouvais pratiquement plus respirer, parler ou même hurler ma douleur. Je me débattais comme un beau diable en gigotant un peu n’importe comment. D’un point de vue extérieur, cette scène était surréaliste. Une simple poudre ne pouvait pas avoir un tel effet sur un haut-gradé. Sauf qu’avec la fatigue accumulée suite aux différents voyages et combats que j’avais livrés depuis la nuit, j’étais presque limité physiquement. Dans un énième sursaut d’orgueil et de courage, je réussis à me relever et à me tenir debout, mais je ne pouvais rien voir. Il m’avait complètement aveuglé. Plus que larmoyant, j’avais fermé les yeux et froncés les sourcils sous la douleur que je ressentais. Et cette perte de sens malgré mon haki n’était pas pour me plaire…

- « Laisse-moi t’achever… »


Le temps se figea autour de moi. Contrairement à beaucoup d’autres utilisateurs de haki, le mien s’imposait à moi, n’ayant pas trop l’habitude de m’y fier, sauf lorsque je voulais localiser une personne en particulier. Et une vision défila dans mon esprit : Mabhoul vidait son chargeur sur mon corps. Je retins alors les trajectoires de ses projectiles, avant que ladite vision ne s’efface complètement de ma conscience. Suite à cette révélation et malgré mon appareil respiratoire mal en point, je réussis enfin à respirer un bon coup et à reprendre mon calme. La première détonation retentit. Et je bougeai sur la gauche. La balle se logea dans une colonne. La deuxième fusa aussitôt, mais je m’arrangeai à l’éviter pour qu’elle aille se perdre dans le vide derrière moi. Et ainsi de suite. Jusqu’à ce que je bloque la dernière du plat de ma lame, un sourire aux lèvres. Mon adversaire, irrité par ce qu’il voyait là balança son arme à feu et s’avança vers moi avec son épée. Sauf que la même story se répéta. La rage avec laquelle il lançait ses attaques se soldait par des échecs. Malgré ma cécité temporaire, je laissais le fluide me guider, anticipant et évitant ainsi toutes ses attaques. Pour les plus véloces, je réussissais à les parer avec plus ou moins de réussite, accentuant alors la colère de mon vis-à-vis qui sentait que le cours du combat lui échappait tout doucement.

- « Alors, c’est tout ce que vous avez, grand vizir ? »
Demandais-je même d’un air railleur après avoir évité l’une de ses attaques en bondissant trois mètres en arrière.

- « Oh que non, gamin…. Et tu vas t’en rendre compte bien vite... »

Le ton qu’il employa effaça mon sourire. Ce combat était définitivement loin d’être terminé.
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Je pouvais clairement le sentir maintenant que je ne pouvais plus que me fier à mon ouïe et à mon haki : Son rythme cardiaque était redevenu normal. S’il avait réussi à se calmer malgré tout ce qui venait de se passer, c’est qu’il préparait quelque chose de sale. Je me mis à tousser et à éternuer en même temps comme un pauvre malade. La poudre que j’avais inhalée sans le vouloir avait quand même foutu des dégâts au niveau de mes poumons et les plaies brulaient atrocement. Franchement, j’étais plutôt mal parti. Éreinté, blessé au point d’avoir perdu énormément de sang, aveugle… A ce rythme-là, j’allais bêtement crever. Ce n’était même plus la perspective d’être bien vu par les hauts gradés ou même le fait d’améliorer les relations entre Alabasta et la marine qui me poussaient à combattre ; mais plutôt la sécurité de la famille royale. Patriotisme jusqu’au bout des ongles. Crever n’était donc pas une option. En face de moi, l’homme avait un sourire pervers que je ne voyais pas. Tout en prenant son temps, il détacha deux grosses sacoches et les vida complètement. Une nouvelle poudre. J’y mettrais ma main au feu. Cependant, mes narines étaient trop encombrées par le piment pour que j’y puisse sentir quelque chose. Pour mes yeux ? Inutile. Je n’avais pas envie de les ouvrir. Pas encore. J’étais comme un gosse sur le coup, je l’avoue.

Puisque tous ses coups ne semblaient pas marcher, il allait avoir recours aux grands moyens qu’il se disait. La poudre qu’il versait était faite uniquement de fer. Plus fine que de la limaille. Du sable de fer, si on veut. Après avoir vidé toute ses sacs, Mabhoul se mit à faire mouvoir toute la poudre autour de lui. Pour ma part, j’étais toujours sur mes gardes. Foncer tête baissée ne me mènerait à rien et je voulais être sûr de pouvoir lui foutre un maximum de dégâts avant de tenter quoique ce soit. La poudre se compacta et forma très rapidement deux lances massives. Et sans attendre plus longtemps, les lances fondirent vers moi. Leur vélocité payait cependant un prix : Le sifflement aigu qu’elles occasionnaient. Du coup, je réussis à en contrer une, avec force, tandis que j’évitai l’autre d’un saut bien exécuté. Mais j’étais tellement concentré sur ces projectiles que je ne sentis pas tout de suite la présence du vizir qui avait anticipé mon saut et qui avait bondi au-dessus de moi. Sa lame se logea carrément dans mon épaule et ce jusqu’à l’os. Émettant un râle de douleur, je réussis néanmoins à contrer son attaque avant qu’il ne m’arrache complètement le bras gauche, puis je réussis à me réceptionner vers le balcon. Ceci dit, c’était sans compter sur les lances qui fusèrent une nouvelle fois vers ma gueule. Plutôt las de jouer à ce petit jeu, je décochai alors des lames de vent dessus…

- « Hahahaha ! C’est vrai que tu peux détruire leurs formes, mais… »

Effectivement, je les avais désagrégé, parce qu’on ne peut pas couper de la poudre en tant que tel, soyons clair. Ceci dit, ce que je ne voyais pas et que je n’avais pas du tout calculé, c’est que sa poudre de fer pouvait prendre rapidement une autre forme. Et vu qu’elle s’était décomposée autour de moi, il s’amusa à les transformer plusieurs petites armes blanches bien compactes une fois encore : Kunaïs, shurikens… Qui s’abattirent aussitôt sur moi. Sans aucune défense, je fus surpris de sentir tous ces projectiles se planter profondément dans ma chair, avant d’hurler toute la douleur que je ressentais comme un fou. Il avait presque atteint des zones vitales. Je tombai alors à genoux et je me mis à vomir mes tripes : La bouffe d’hier, encore du sang et même de la bave. Le blanc de ma tunique lacérée de toutes parts ne se distinguait presque plus. Avec toutes ces blessures, ma tête se mit à tourner dans tous les sens et mon poing droit serré sur la poignée du meitou clinquant se desserra petit à petit jusqu’à laisser tomber le sabre à terre. Anémie hémorragique. Le grand vizir voyait sa victoire se profiler de très loin sans avoir essuyé le moindre dégât. Satisfait de son combat, il s’approcha alors sans crainte de mon corps qui n’était plus qu’une loque à l’agonie, avant de m’enflammer une dernière fois avec un coup de pied qui me fit voler jusqu’à la balustrade que je percutai. Rebelote.

- « Il est bien beau le contre-amiral, héhéhé ! Si tu étais resté sagement dans ton coin, tu n’aurais pas connu ce sort. C’est d’ailleurs une mort qui te sied. Agonise et regrette ton intervention jusqu’à tes dernières secondes. Pendant ce temps, je vais aller m’occuper du menu fretin. Particulièrement, ce petit con de sultan et sa pimbêche. Oui, je vais commencer par eux… »


Là-dessus, le grand vizir me quitta en ricanant. Il n’était pas peu fier de son exploit. Etant donné qu’il avait écarté la plus grande menace de tous ses ennemis, il n’avait plus qu’à en finir avec les autres et se casser d’ici. Il avait pensé à se suicider à un moment donné avec tous ces gêneurs, mais là, ses perspectives d’avenir étaient on ne peut plus claires : Alabasta ne cesserait de le poursuivre et tout Rawhajpoutalah serait certainement au courant de ses coups montés. Pas question d’y retourner donc. Sa seule alternative était maintenant de vivre et de verser dans l’illégalité : Mafia, piraterie… Les portes du monde souterrain et illégal lui étaient ouvertes. C’était bien moins entrainant que la gouvernance d’un royaume, mais c’était déjà mieux que crever comme un chien ou même croupir en prison. Lorsqu’il arriva un étage en dessous, il vit la dépouille d’Hamza sur lequel il cracha carrément : « Bon à rien. Cela me fait penser que… » Oui… Bien avant de quitter ces terres maudites, il allait s’assurer de tuer tous ceux qui l’avaient lâché… Et Phume, aussi… Alabasta allait connaitre les sombres heures de son histoire dans quelques temps. Clairement. C’est dans cette optique qu’il se présenta enfin tout en bas. Dans la grande cour à ciel ouvert, située à l’intérieur du palais. Là où tout le monde s’était rassemblé : Soldats, convives, famille royale…

A sa vue, des cris d’effroi fusèrent un peu partout.

La psychose gagna le camp de la famille royale malgré les prises de position des différents généraux.

S’il avait réussi à terrasser le contre-amiral, il n’y avait plus d'espoir.

Ce n’était plus qu’une question de temps… Pour que l’horreur débute.
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- C'est pas possible. On peut pas roupiller tranquille sans qu'il y ait un connard pour venir nous casser les couilles ?! fais-je instantanément tout en me relevant difficilement, alertée par les cris et hurlements alentours.

Extirpée de mon sommeil de plomb, ce n'étaient pourtant pas les bruits stridents qui étaient à plaindre, mais cette aura malfaisante que j'avais pu sentir pendant mon coma et qui m'avait parcourue d'un étrange soubresaut, qui m'avait revitalisée d'une énergie nouvelle et salvatrice, une seconde chance.. mais avec des aspirations différentes. Plongeant mon œil dans le regard inquisiteur de l'ennemi sur le palier, je me dresse tant bien que mal entre lui et la populace royale derrière, uniquement bonne à chialer et à crier, gardes compris. Non, c'est bon, cette fois-ci j'en ai ras-le-cul, je pensais que l'autre officier pervers avait les rennes en main mais j'étais bien loin du compte. J'en ai marre de devoir me retaper à chaque fois les mêmes cinématiques, d'à chaque fois devoir bouger mon derche pour finir le boulot, sans compter la discrétion. RAAAAAAH LA PUTAIN DE DISCRÉTION !! Foutues entraves qui me broient les côtes et m'empêchent de tout péter, comme ces criminels qui ne se gênent jamais, comme les Marine abrutis qui n'ont aucune rancœur à détruire des villages pour buter UN TYPE et des exemples, j'en ai à la pelle. Purée, j'en ai coffré pour moins que ça.

- Pas morte ? Hahaha ! Tu crois un instant pouvoir faire le poids contre moi ? Rien ne pourra se mettre sur mon chemin, RIEN ! JE VAIS RÉDUIRE CE PALAIS EN CENDRE ET PLONGER CE PAYS DANS LES TÉNÈBRES !! HAHAHA HAHAHA HAHA...!!

Et suite à ces dernières déclarations, le public gémissant de se mettre à grincer des dents et chialer de plus belle. MAIS C'EST QUE CA VEUT PAS FAIRE PREUVE DE BON SENS ET SE BARRER EN PLUS ?! Bon, tant pis pour la couverture, de toute façon j'ai foiré sur toute la ligne, avec le nombre de fois où je me suis dépannée avec le Rokushiki, à commencer par le fils de Mabhoul. Tiens, d'ailleurs, autant en profiter pour penser à le lui rappeler plus tard... mais pour l'instant j'exprime mon envie de lui péter les dents plus simplement :

- MAIS TU VAS FERMER TA GUEULE ?!

Ouais, ça suffit là, si pour avoir le silence et un peu de repos après cette journée de merde il faut que je te foute une dérouillée, t'inquiètes pas que ça va venir. Les sourcils froncés, les poings serrés, les blessures ouvertes qui ne cessent de se vider de ce liquide pourpre et poisseux m'ont poussée dans mes derniers retranchements... psychologiques. Je ne peux plus faire semblant plus longtemps, je ne peux plus être la gentille fille ordinaire, la sympathique détective Elizabeth Butterfly. Non, désormais il me faut changer de visage pour adopter l'aura sombre d'Annabella Sweetsong. A ces dernières pensées, mes pulsions de haine refont surface tandis qu'un sourire macabre s'étire d'une joue à l'autre sur mon visage. Je ne réponds plus de rien, si ce n'est de la justice divine qui décide du sort des criminels, des pirates. Innocents, coupables, mon cerveau récupère son fonctionnement binaire, tandis que je jauge l'adversaire devant moi, folle à l'envie de lui éplucher la peau, de lui plonger mes doigts dans ses orbites et réduire son corps en miettes. J'ignore toujours comment je fais pour arriver à contenir ma rage aussi longtemps, car lorsqu'elle refait surface tout me révulse et j’exècre le monde, comme le monstre que je suis.

- Il est temps d'en finir...

Droite comme un i, je fais rapidement craquer mes articulations avant de m'élancer vers l'ennemi, immobile. Tout sourire, le bonhomme ne peut s'empêcher de rire face à ma charge grossière et si prévisible, dégainant d'ores et déjà sa lame pour s’apprêter à venir me cueillir et...

- Soru. JUGON !

L'on est jamais aussi faible que lorsque l'on sous-estime son adversaire. Tandis que l'homme vient abattre sa lame sur du vide, je réapparais subitement de son côté gauche pour lui asséner un coup de poing meurtrier qu'il ne parvient à esquiver qu'au dernier moment. Mettant mes douleurs et mes spasmes de côté du mieux que je peux, je ne m'arrête cependant pas là : profitant de la déstabilisation temporaire de mon adversaire, je m'élance soudain dans un Kamisori foudroyant et tente de lui asséner brutalement une lame d'air dans les jambes, l'obligeant tant bien que mal à sauter en l'air ou esquiver l'attaque. Alors que l'ennemi s'exécute, je viens finalement me transporter au-dessus de son crâne, dans les airs.

- Tekkai Kenpou... JUGON !

Aussi direct qu'efficace, mon coup de poing dévastateur vient prendre l'homme par surprise, atterrissant pile au milieu de sa joue droite pour l'envoyer valdinguer plus loin, sous la puissance de la détonation. Reprenant pieds au milieu du nuage de poussière créé par l'onde de choc, je discerne avec difficulté la silhouette du Grand Vizir se redresser.

- C'est ça que tu appelles un coup de poing fillette ? Haha haha haha...

Surgissant alors de nul part, un bloc de fer vient soudain me heurter violemment et me jeter brusquement au sol. Passablement sonnée, je récupère progressivement mon équilibre pour me retrouver face à l'adversaire, me toisant avec un sourire froid, un gant en acier gigantesque à la place de la main ne cessant de se déformer et de se reformer sous mon œil soupçonneux... de la limaille de fer ?

- Je vais te faire payer ta faiblesse, misérable ! exprime-t-il donc avant d'expulser la ferraille de son bras pour me l'envoyer en plein visage.

Propulsée au loin, j'effectue plusieurs roulés-boulés avant de stopper mon déplacement, les jambes enfoncées dans la terre, les doigts d'une main grattant le sol devant moi pour tâcher de me retrouver une attache. Le visage en sang, le nez meurtri, je ne peux m'empêcher de sourire de toutes mes dents tandis que l'homme se dirige vers moi d'un pas lent et présomptueux. L'occasion est trop belle pour ne pas en profiter.

- C'est aussi ce qu'a dit ton fils... commencé-je, dévoilant mon avant-bras meurtri par les fils de barbelés.

L’œil rivé sur le visage de mon opposant, je cherche en même temps un remugle naissant de panique, d'angoisse, de haine et de tristesse qui pourrait faire surface. Puis je ricane de plus belle tandis que le faciès du père devient livide. Sa détresse me nourrit soudain, me fait jouir d'un plaisir innommable et malsain, me complaisant à déchiffrer ses remords, à lire dans ses pensées, à ressentir ses sentiments grâce à un haki faiblard mais assez présent pour comprendre ce qui le tracasse, ce dont il se rend compte. Il avait été tellement obnubilé par sa quête de pouvoir qu'il en avait oublié son propre sang. Profitant donc plus qu'il n'est permis de cette opportunité de blesser mon ennemi psychologiquement, c'est d'une voix acide et goguenarde que je termine enfin ma phrase.

...avant que je ne le décapite avec ses propres armes.
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Le calme avant la tempête, l'oeil du cyclone, véritablement. Le paysage semble s'être figé tandis que l'homme devant moi affiche un sourire crispé et des yeux interloqués. Effectuant quelques rapides mouvements de va et vient, sa mâchoire semble peiner à rester immobile, alors qu'il réalise qu'il a peut-être perdu la chair de sa chair, si la folle à lier que je suis dit bien vrai. Et aussi prévisible qu'il est, aussi prévisibles que sont ses interventions, ses dialogues, ses phrases d'exclamation, l'homme buté nie l'évidence.

- C'est impossible, Effkri ne se serait jamais fait rétamer par un vermisseau comme toi. Tu as probablement réussi à lui échapper et maintenant tu me sers ton baratin pour mieux me déstabiliser ! beugle le vieillard, soudain affublé de vingt ans de plus, désemparé.

En réponse à sa litanie puérile, j'affiche un visage moribond, avant de saisir dans ma tunique un objet récupéré dans la sacoche de la monture dérobée à la suite dudit combat et le jette aux pieds de l'ennemi. Saisissant ce qui ressemble à un poignard oriental serti de joyaux dans ses mains, l'homme affiche une mine décomposée qui passe progressivement du vert au rouge alors que ses yeux reviennent irrémédiablement vers moi. Ne pouvant plus dissimuler ma malice ni la joie que j'éprouve à désarçonner aussi bien mon opposant et le faire entrer dans une rage inédite, je lâche un petit rire furtif, mais bien assez audible pour dévoiler les crocs hors des babines du Mabhoul.

- Satisfait ? émets-je finalement, sentant son courroux sur le point d'exploser.

- Je vais te détruire... JE VAIS TE RÉDUIRE EN BOUILLIE SALOPE !! hurle en réponse le Grand Vizir, avant de lever les bras en l'air et les rabaisser soudainement.

Pendant les quelques secondes qui suivent, seul le bruit du vent arrive à se faire entendre, fauchant les éléments du décors de façon de plus en plus violente pour ne me laisser présager ce qui est en train d'arriver que trop tard. Encerclant la zone, de gigantesques murs de sables flottants et tourbillonnants s'élèvent jusqu'au ciel, menaçant de tout engloutir sur leur passage. J'ai à peine le temps de pointer du doigt un abri pour les quelques civils encore dans la zone que les gigantesques flots granuleux s'effritent et s'effondrent soudainement. Devinant cependant que l'ennemi n'ira pas jusqu'à se sacrifier dans l'exploit, je m'élance vers lui pour éviter le raz-de-marée sableux, finissant ma course dans ses côtes avec un impressionnant plaquage de l'épaule, le jetant soudainement à terre pour qu'il ne puisse pas échapper à sa propre malédiction. Se déversant par vagues successives, la poussière du désert vient alors me secouer brutalement les cheveux et le corps tandis que l'homme parvient finalement à s'écarter, m'assénant une rafale de billes de fer pour m'obliger à lâcher prise. Je comprends à ce moment-là comment fonctionne son pouvoir, car si le gaillard arrive malgré tout à s'échapper, ce n'est pas sans avoir dévoilé dans sa fuite son plus grand secret, trahi par le temps qu'il a mis à exécuter son geste et la réaction brutale de la tempête de sable qui a... soudainement perdu en puissance.

Néanmoins ballotée par les sables qui cherchent à m'emporter et m'ensevelir alors que je m'en dégage grâce à un Geppou incessant, je parviens tout de même à rester à la surface du sol sur cette dune qui ne fait que se surélever jusqu'à ce que le temps soit redevenu aussi clair et calme qu'il ne l'était auparavant. Tout en me tenant les côtes, gagnée par la fatigue et la douleur que je n'ai de cesse de repousser difficilement, j'essaye de repérer l'ennemi pendant plusieurs minutes, en vain, jusqu'à ce qu'une main sorte du sol, bientôt suivie par une seconde, puis le corps entier du Grand Vizir, sablonneux.

- On dirait que tu n'as pas pu contrôler ta tempête jusqu'au bout, héhéhé... fais-je goguenarde, une fois de plus.

Et sans attendre que le sale type n'ait le temps de se relever, je fonds sur lui dans un Soru pour venir lui abattre ma jambe sur la figure. Mais mon Rankyaku vient lamentablement échouer, se heurtant à un bloc compact de limaille de fer... à nouveau. L'impact remonte dans ma jambe fragilisée et vient m'endommager l'os de la cuisse, alors que j'effectue un rapide bond en arrière, les dents crispées.

- N'espère pas que cette petite information te servira à avoir l'ascendant sur moi, vermine !

Effectuant un simple geste du doigt, l'homme guide sa limaille pour en faire un objet tranchant et incisif, reflétant son désir irrépressible d'en finir... A croire que je suis rentrée dans la cour des grands désormais. Esquivant des lames flottantes qui viennent s'abattre de tous les côtés, parant celles-ci du mieux que je peux avec des lames d'air et des Jugon, mon corps ne me permet malheureusement pas d'effectuer des actions à répétition trop longtemps, tandis que les armes se forment et se déforment en continu. Profitant de la colère de mon opposant, j'attends impatiemment le moment où celui-ci laissera une ouverture me permettant de lui porter un coup fatal. Tâchant de contre-attaquer dès que possible, je me heurte cependant systématiquement à des boucliers qui limitent et bloquent mes coups, aussi bien qu'à des armes qui menacent de me transpercer et, de plus en plus souvent, y arrivent.

Au bout de quelques minutes, mon corps endolori me rappelle inévitablement sa limite, tandis que de nouvelles blessures se mêlent aux anciennes pour, toutes, décharger leur flot d'hémoglobine sur les sables désertiques. Haletante, je tiens tête coûte que coûte à l'adversaire, dernier rempart pouvant protéger ce pays de son courroux machiavélique que je n'ai fait que renforcer en lui brandissant la mort de son fils comme un trophée devant ses yeux. Mue par la nécessité de clarifier la situation autant que la fierté de ne pas foirer ce qui est devenu une mission d'enjeu pour le Gouvernement Mondial, bien que très officieuse, je ne peux décemment pas laisser le Mabhoul ravager la zone et partir indemne. Tâchant de faire preuve de clairvoyance en utilisant le don que je me suis découvert une nouvelle fois, j'échoue vraisemblablement à déceler une stratégie, un point faible qui pourrait frapper l'ennemi d'estoc. En revanche, l'action n'est pas totalement désespérée puisque j'arrive tout de même à étendre ma bulle assez loin pour sentir la présence des différentes personnes se trouvant dans le palais... ainsi que celle du Contre-Amiral qui, bien que sérieusement amoché, arrive à se déplacer dans les escaliers du bâtiment où s'était déroulée la prise d'otage. L'atout est certain au vu de la puissance que le gaillard avait déployé dans ses combats, cependant je ne peux pas le laisser me voler entièrement la vedette, quitte à devoir y laisser des plumes.

Faisant toujours face à l'ennemi, je me replie alors sur moi-même avant de partir d'un bond pour surgir à ses côtés. L'action est prévisible et je vois bien évidemment la lame qui m'attend à l'arrivée, mais je ne m'arrête pas pour autant, décalant légèrement mon corps pour qu'aucun organe vital ne soit touché, laissant légèrement ma vie dans les mains du destin, je viens finalement m'écraser contre l'ennemi qui me traverse de part en part avec son épée granuleuse. Interloquée par la douleur soudaine qui m'irradie le ventre, je fais une dernière fois preuve de self-contrôle pour saisir et surélever d'une main le bras gauche à découvert de l'adversaire avec une poigne de fer et de l'autre lui asséner un puissant coup de poing au niveau de l'aisselle, un coup gigantesque dans lequel je mets toutes mes réserves, toute ma force, toute l'énergie qu'il me reste, alors que je suis encore empalée sur l'épée de fer enfoncée dans mon abdomen.

- TEK-KAI... KEN-POU... JU...GON !!!

Balançant un poing sonique dur comme l'acier, écrasant la chair et broyant l'os du gaillard, la pression sur le bras est telle que celui-ci finit par céder dans un craquement macabre, avant de se désolidariser du corps et tomber au sol, quelques instants avant que je ne cède moi-même à mes blessures et ne rejoigne ses côtés. Poussant un cri de douleur mêlé de jurons, l'ennemi reste interdit un long moment, pissant le sang comme pas permis. Puis, notant ma présence à ses pieds, il décide enfin d'abattre son courroux divin sur mon corps inerte, alors que j'ai de plus en plus de mal à rester éveillée, m'assénant des coups de pieds, me prenant et me balançant comme une poupée de chiffon sans que je ne puisse rien faire, trop faible pour lutter, me vidant de mon sang et de mes entrailles. Rouge de fureur, le Grand Vizir arrête soudain de me battre mais n'en a pas pour autant terminé. Décidé à employer les grands moyens, le monstre élève soudain son unique bras restant au dessus de sa tête, effectuant un mouvement similaire à sa technique ayant fait appel à la tempête de sable. Sauf que cette fois-ci, le ciel vient lentement mais sûrement se couvrir d'épais nuages gris. Étendue sur le dos, les yeux entrouverts, je n'ai plus d'autre choix sinon d'accepter ma mort avec une certaine curiosité morbide. Que va-t-il donc utiliser cette fois-ci ? Mais avant que je n'aie pu aller plus loin dans mes cheminements, l'ennemi répond comme s'il avait lu dans mes pensées.

- Je voulais te tuer comme tu as tué mon fils mais... ça ne serait pas assez spectaculaire pour une enflure de ton espèce. commence-t-il d'une voix grave, la tête penchée au-dessus de mon corps, avant de poursuivre avec cette fois-ci le nez levé vers le ciel. JE VAIS T'OFFRIR UNE MORT EXCEPTIONNELLE, GAMINE ! A TOI, AINSI QU'AU PALAIS TOUT ENTIER ! JE VAIS... VOUS FAIRE EXPLOSER !! TOUS AUTANT QUE VOUS ÊTES !! ET ENSUITE J'IRAI MARCHER SUR TOUTES LES VILLES D'ALABASTA ET JE LES DÉTRUIRAI, JE TRANSFORMERAI CE PAYS EN UN TOMBEAU A CIEL OUVERT !!! HA HA !! HA HA HA !!

Et tandis que mes yeux se ferment inexorablement, je vois l'essaim de nuages noirs se rapprocher petit à petit, se composant et se décomposant au-dessus du monticule sur lequel est bâtie la demeure royale... et une partie de la ville. Les yeux désormais fermés, il ne me reste plus que l’ouïe et l'odorat pour deviner ce qui se présage. Et c'est ce fumet que j'ai pu côtoyer si fréquemment, si longuement pendant toute ma vie qui m'informe sur l'identité de la masse sombre qui ne demande qu'à exploser au premier contact incendiaire et ravager toute la zone : de la poudre à canon. Disparaissant à l'intérieur de moi-même, dans un sommeil sans rêves qui ne me laisse plus le choix de rester éveillée, je dépense mes dernières forces dans un lien mental que j'espère effectif.

- Si tu m'entends... grouille toi... il fasse... tout péter... son pouvoir... contrôle... poudreux... granuleux... mais point faible... ne contrôle... une sorte... à la fois...

Puis l'obscurité de m'envahir, ultime, inévitable, froide. L'inconscience. Le coma.
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Aaaaah…

J’ai mal…

J’ai l’impression que ma tête va exploser…

J’ai froid, aussi…

Merde… Mes yeux picotent… J’arrive pas à les ouvrir… Sans compter mes oreilles qui sifflent et bourdonnent sans jamais en finir…

Et puis ce gout métallique dans la bouche… Affreux. Horrible. Je dois avoir une dent pétée… Ou deux…

Ne parlons même pas du reste de mon corps…

Mais pourtant… Là, quelle est cette vision chaotique qui accapare mon esprit… ?


***


Je vis le ciel de la capitale s’obscurcir… Les cris de détresse de tous parts… Puis l’explosion. Immense. Destructrice. Qui souffla tout… Le palais… Ses environs… Tout le monde…

Puis le néant…

Un seul homme avait réussi à survivre. Un seul homme hurlait de rire à n’en point finir. Un seul homme devenait dément au beau milieu de cette hécatombe au point que ses rires tonitruants se répercutaient un peu partout…

Le grand vizir…



***


Ça fait chier…

Il fait chier…

Tuer toute la famille royale ?

Pas moyen.

Pas moyen !!!!

PAS MOYEN !!!

PUTAIN DE CORPS !

Lève-toi.

Lève-toi !

DEBOUT !


*BOUM BOUM*


- « J’vais te tuer… Enfoiré de vizir de mes deux !!!! »

Le cœur accéléra et pompa le reste du sang comme jamais. Miracle ? A moitié. Le retour à la vie y était pour quelque chose. Les paupières s’ouvrirent enfin depuis de longues minutes et laissèrent place à des mirettes rouges ; au même titre que la bouche qui aspirait un grand bol d’air. La main droite tâtonna longuement le sol avant de se refermer sur le pommeau du meitou doré. L’autre patte se dirigea vers l’arrière et les doigts se serrèrent sur la balustrade. Celle-ci craqua légèrement sous la soudaine force exercée par la poigne et le corps commença à bouger sous l’impulsion de cet appui. Les jambes fléchirent et tremblèrent lors des premières secondes, avant de se stabiliser pour que le corps puisse se redresser. Le mental de fer jouait un grand rôle dans toute cette histoire. Le prix à payer allait être lourd, mais l’abandon n’était pas du tout une option. Un rire guttural s’échappa du fin fond de la gorge. L’esprit flirtait tout de même avec ses limites. La rupture était toute proche. Le bon sens s’en allait tout doucement et la bête tapie dans le subconscient attendait le bon moment pour surgir. Tous les éléments étaient réunis pour sa sortie.

- « Attends voir… »

Le corps tituba un instant, puis le pied droit fit un pas en avant. Le gauche suivit tout de suite après et la marche débuta. Lentement mais surement. Pendant quelques secondes. Puis le rythme s’accéléra. La marche devint on ne peut plus rapide. Les muscles se détendirent. Les tempes pulsaient à mesure que la température du corps remontait malgré la perte de sang très importante. Un sourire sanglant fendit alors le visage. Quelque chose de malsain se dégageait maintenant de l’homme qui trottinait. La marche rapide devint alors une course. Et l’homme arriva alors aux pieds des escaliers. Le message télépathique vint « toucher » les derniers méandres d’une conscience défaillante essayant tant bien que mal de s’accrocher à un corps, qui, malgré ses blessures, se transformait tout doucement en celui d’une bête : Les muscles gonflaient petit à petit… Les canines étaient déjà proéminentes… Et la chevelure hérissée en pics beaucoup plus importante. Les pupilles rougies par le piment et le sourire pervers qui trônait sur ce visage déformé par un amalgame de colère et d’amusement rendaient le tout épouvantable. La bête prenait forme.

- « J’vais te faire bouffer tes tripes ! »

Monter les escaliers quatre à quatre ? Connerie. Le corps bondissait çà et là et franchissait plus d’une quinzaine de marches en un seul saut. En un rien de temps, il arriva sur la toiture du plus haut édifice du palais. Position qui surplombait toute la capitale. Mais là n’était pas le plus important. Ce qui importait vraiment était ce ciel menaçant. Ce ciel noir. Ce ciel nocif, bas et lourd qui pesait comme un couvercle. La conscience comprit illico d’où venait cette crainte que le grand vizir engendrait chez tous ses ennemis : Son pouvoir était absolument destructeur et son potentiel presque illimité. Presque. D’ailleurs, cette masse poudreuse compactée au-dessus du palais avait dû lui demander un effort incroyable. Mais pas le temps d’y penser. Le corps n’avait plus ce luxe. Il s’était transformé en machine de guerre, quasiment. La main qui tenait le meitou commença à s’agiter très rapidement et une brise se leva aussitôt. La conscience l’avait compris : La meilleure manière d’en finir avec ce danger était de s’en débarrasser et quoi de mieux qu’un vent violent pour tout emporter loin ? Un rictus se forma alors, alors que les deux mains agrippèrent le sabre bling bling :

- « TATSUMAKI ! »

L’homme abattit son arme en direction du nuage noir et déploya généra un vent violent à l’aide de sa lame effilée. La brise souffla avec une telle force, qu’elle arracha des arbres et toitures environnantes. Mais le plus important fut accompli : La quasi-totalité de la poudre menaçante avait été emporté au loin, dégageant ainsi le ciel d’un bleu éclatant. Les rayons du soleil illuminèrent une nouvelle fois le palais et l’endroit semblait avoir regagné sa quiétude. Tout en bas, le grand vizir était coi, abasourdi. Qu’est-ce qui venait de se passer ?! Comment la poudre qu’il avait eu du mal à accumuler et à dresser au-dessus du palais avait pu disparaitre en quelques secondes seulement ?! Autant dire qu’il était sur le cul. Et il le fut d’autant plus lorsqu’il vit une ombre sur le toit. Une ombre qu’il réussit à reconnaitre malgré l’éblouissement dû aux rayons du soleil. Le contre-amiral en personne ! Ceci étant, celui qui était observé par l’ennemi ne le regardait pas du tout. Ses yeux étaient plutôt fixés vers une personne étalée au sol : L’albinos. Celle-ci ne bougeait plus, comme morte. La conscience quant à elle se rendit compte que «sa voix » avait disparu.

Disparu.

Complètement. Également.

A un tel point qu’il ne sentait même plus son pouls…


*BOUM BOUM*



Ce moment fatidique marqua une rupture profonde : Celle de la conscience qui fut brisé en mille morceaux.

Cette victime était vraisemblablement de trop.

*BOUM BOUM*


La bête tapie dans l’ombre de la conscience émergea enfin et le corps, brusquement, ouvrit grand la bouche !

AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !

Ce cri de colère marqua le début de la fin.

Et du fond de son être, Mabhoul ne put que le comprendre. Tous ses os avaient vibré suite à ce hurlement dément.

Et à son tour, il commença à trembler…
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- « Cet homme… »

La folie meurtrière qui l’animait précédemment avait fait place à un effroi terrible. L’homme avait le poing et les dents serrés. Ce n’était pas possible qu’il se disait. Comment un seul homme pouvait-il autant lui résister ? Il ne comprenait pas. Il ne comprenait plus. Mais une chose était sûre à présent : Il fallait fuir. Parce que ce qu’il voyait sur ce toit n’avait presque plus rien d’humain. Il pouvait le sentir de loin, et tout ça ne présageait rien de bon. Mais à peine avait-il voulu manipuler n’importe quelle poudre à sa portée que son ennemi se mit à sauter de balcons en balcons comme s’il faisait du parkour. Et en un rien de temps, il se retrouva sur le bac à sable géant au beau milieu de la cour à ciel ouvert, à seulement quelques mètres du comploteur. Surpris par une telle audace et rapidité, l’ex grand vizir réussit à s’entourer de sa fameuse poudre d’acier. Cette fois, il fut celui qui adopta une position défensive devant le monstre qui se tenait devant lui et qui avait doublé sa taille un peu comme par magie. A n’y plus rien comprendre.

- « Comment tu as pu survivre ?! » Questionna un Mabhoul à la fois enragé et décontenancé.

- « Tuer… Je vais te tuer… »

La bête n’avait plus de conscience. Ou plutôt savait ce qu’elle devait faire : Tuer son vis-à-vis. C’était lui ou elle. Et tout le monde sait ce dont est capable une bête blessée et acculée dans ses derniers retranchements. De ce fait, « elle » se mit à bondir brusquement vers le vizir qui se constitua rapidement un bouclier compact devant lui à l’aide de sa poudre. Sauf que plus véloce que Salem lui-même, la bête se trouva un instant derrière le vizir. Sourire pervers aux lèvres, elle abattit violemment le meitou sur le large dos de son adversaire. Celui-ci put sentir la protection arrière de son armure voler en éclats et une entaille barrer diagonalement son dos. Même pas le temps de râler ou de bouger le moindre pouce, qu’une autre douleur vint le faire souffrir davantage. L’animal venait de remettre la même attaque, si bien que les deux blessures formaient un grand X sanguinolent sur son dos. Le traitre pissait le sang et pas qu’un peu. Il eut plusieurs râles de douleur, mais réussit à s’éloigner de la bête via plusieurs bonds périlleux.

- « Enfoiré ! »

Constatant que la défense n’était pas du tout la meilleure solution dans ce genre de confrontation, l’ex-vizir opta pour un changement radical de posture : L’attaque à outrance. Il matérialisa cinq lances à partir de sa poudre et les envoya empaler la bête ; sauf que celle-ci, armée d’un meitou et usant du haki à son paroxysme, réussissait à détruire, à contrer, où à éviter les différentes armes qui menaçaient sa vie. D’ailleurs, elle usa d’un coup sec de plusieurs petites lames de vent contondantes qui explosèrent au contact des lances, brisant ainsi leurs formes menaçantes. La poudre se dispersa autour de l’animal, provoquant alors un sourire à son vis-à-vis. La même scène allait se répéter : En quelques mouvements de sa main restante, Mabhoul réussit à former une multitude de petites armes blanches qui fusèrent aussitôt sur son opposant. Sauf que la bête avait réussi à faire pousser sa chevelure dense, de sorte à ce qu’elle forme un bouclier autour de son corps, repoussant ainsi assez de projectiles la menaçant. Inimaginable…

- « C’est quoi ça… ? »

Lorsque les cheveux reprisent leur volume initial, le visage de Mabhoul était déformé par un drôle sentiment d’impuissance. Jamais personne n’avait réussi à se sortir d’une pareille attaque. Et son adversaire, lui, n’avait quasiment rien eu comme séquelles, si ce n’est deux ou trois blessures supplémentaires, mais qui n’allaient vraisemblablement rien changer à la donne. La bête, elle, posa alors son regard sur le natif de Rawahjpoutalah et eut un sourire plus que sadique. Apeuré, le chef militaire oublia complètement sa poudre de fer et utilisa alors le sable autour de lui pour ériger un gigantesque dôme sableux autour de lui. Lorsqu’il eut finit de bâtir sa forteresse en attendant de trouver une solution, il tomba sur ses fesses et porta une main à son moignon d’où le sang s’écoulait sans cesse. L’homme avait perdu beaucoup trop de sang, et d’énergie avec l’accumulation de la poudre noire au-dessus du palais. Son cœur battait à cent à l’heure à l’heure et l’obscurité qui régnait au sein de son dôme ne le rendait pas totalement serein.

- « Il faut que j’… »

BRAAAAAAAAAAOUUUUUUUUUUUUUUUUUUUM

Mabhoul n’eut même pas le temps de finir sa phrase que la moitié de son dôme avait été ravagé par une onde tranchante d’une violence inimaginable. Il resta alors sur place, immobile, le corps tremblant comme jamais. Le reste de sa forteresse s’effondra comme un château de cartes et laissa place à la bête qui n’était plus qu’à cinq mètres de lui. A cet instant précis, le père du défunt Rhï Rhï le sentit du plus profond de son être : Il allait tout bêtement mourir. Désespéré, il se forma une épée en sable et se rua vers la bête sous un cri de rage. Et les coups commencèrent à être échangés dans un ballet plus que macabre. A l’intérieur d’une salle qui avait une vue sur la cour, tous les membres de la famille royale étaient médusés devant un tel spectacle sanglant. Mais ce qui choquait surtout, c’était la monstruosité du contre-amiral qui dominait largement l’ex-vizir. Il était certes puissant, mais assez effrayant. Seule une personne savait ce qui se passait réellement à l’intérieur du cœur et de la conscience du fils du pays : La reine Vivi elle-même.

- « Tu vas mourir… »

La voix rauque de la bête traumatisait encore plus Mabhoul qui ne savait plus à quel saint se vouer. La force avec laquelle l’animal se battait dépassait le cadre du rationnel. Le meitou, une fois sur deux, laissait de longues estafilades sur la peau du pauvre homme qui se débattait tant bien que mal avec les moyens du bord : Il était complètement surpassé. Le corps du renégat ressembla très vite à celui de son persécuteur. Couverts de blessures et de sang. La bête, au-delà de la nécessité de tuer son adversaire, prenait beaucoup de plaisir à trancher la chair de son ennemi qui n’offrait aucune résistance à la lame effilée de son meitou. Elle en était même excitée et s’esclaffait à chaque fois qu’elle faisait gicler le sang du méchant de l’histoire. A l’aide de son arme, le corps sans âme du contre-amiral alla même jusqu’à sectionner l’oreille droite du pauvre homme qui hurla toute sa souffrance et tomba à genoux. Un violent coup d’estoc logea plus de la moitié de son arme dans l’épaule de l’ancien bras droit du sultan.

- « Je… Vais… t’arracher l’autre bras… »

Un geyser de sang vint éclabousser le visage du géant de plus de quatre mètres lorsqu’il retira violemment son épée du côté du bras restant qu’il visait. Son mouvement avait complètement déchiqueté os et chair, à un tel point que l’autre bras avait fini par tomber piteusement au sol. A son tour, le chef de famille de Mabhoul vomit brusquement et tourna presque de l’œil. Il venait de perdre son dernier bras et la douleur ressentie était insoutenable. L’homme si charismatique et intimidant auparavant gigotait dans tous les sens. Des larmes se mirent à couler le long de ses joues. Réaction purement physiologique ou psychologique ? Peu importait, au final. Toujours est-il qu’il bavait son sang et pleurait. Il voulut quand même se relever, mais un coup de pied de la bête en pleine tronche, écrasant au passage son pif, l’envoya valser au loin. Sans aucun bras, il se retourna alors sur son ventre, rampa comme un lamentable vers de terre, avant de prendre son front comme appui pour se mettre à genoux et ainsi se relever…

- « TU PENSES QU’UN IMBÉCILE COMME TOI PEUT ME TUER ?! JE NE VAIS PAS TE LAISSER CE PLAISIR ! »

On pourrait croire que le vizir avait un autre atout dans sa manche, mais non. Plutôt que d’essayer de diriger vers lui une masse poudreuse, il commença à vouloir avaler sa langue. Fidèle à lui-même, vous me direz. Sauf qu’il n’y arriva pas sur le champ, ce qui laissa le temps au monstre de réduire l’écart entre eux et d’avoir un sourire qui en disait long. Mabhoul voyait sa peine se profiler. Il en oublia même de s’étouffer et hurla sa colère une dernière fois : « VA AU DIABLE FENYAAAAAAANNG ! » Avant que celui-ci ne le décapite avec forme. Sa tête se détacha des épaules, fit un vol plané assez haut, avant de tomber et de rouler sur quelques mètres à même le sable. Ainsi s’achevait le complot orchestré par l’ex vizir. La bête observa un moment le cadavre, finit par se retourner et prit le chemin opposé pour s’approcher du corps inerte de l’albinos. Elle posa un genou à côté de la femme, pour la prendre dans ses bras et la secouer dans tous les sens. Mais inutile. La cipher pol n’était pas prête de se réveiller maintenant.

- « Nous pouvons la soigner pour toi. »

L’animal sursauta et tourna sa tête vers celle qui n’était autre que Vivi.

- « N’aie pas peur. Ce n’est que m- »

- « AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHH ! »


L’animal d’un coup sec, gueula sur la tronche de la reine qui ne bougea pourtant pas d’un pouce.

- « Votre majesté ! Reculez, c’est dangereux ! » Clama l’un des membres de la famille royale.

Mais rien à faire. La vieille femme ne lâcha pas le morceau, ce qui décontenança le monstre qui se mit à reculer avec le corps de l’albinos en mains.

- « Je sais que tu as souffert. Que tu as dû abandonner ton humanité pour me sauver. Pour nous sauver. »

Ce qui était vrai. Pour combattre un monstre, le brave n'eut d'autre choix que de nourrir ses instincts primaires de colère et de soif de sang, d'où la bête. D'ailleurs, cette dernière secoua sa tête, hurla une nouvelle fois, lâcha son meitou ainsi que le corps de la cp et usa de ses pattes pour boucher ses oreilles.

- « Mais tout est fini, maintenant. Il est temps que tu reviennes parmi nous, Salem. Fais un effort… »

Des larmes se mirent soudainement à couler sur les joues de l’animal qui se mit à regarder la reine avec grande honte.

- « J-Je ne voulais pas… Il… Il était trop fort… Et effrayant… Je… J’ai… »

Au fin fond de l’être, la bête se voyait tirée de force une nouvelle fois vers les ténèbres. La conscience émergeait tout doucement. La reine elle, eut un sourire, s’approcha davantage vers le corps à genoux, leva les bras vers le visage du concerné et se mit à essuyer ses larmes avec une douceur calculée et un sourire aux lèvres.

- « Je sais, Salem. Merci pour tout… »

La conscience reprit sa place et l’effet du retour à la vie commença à s’annuler tout doucement. La bête devint un homme, un vrai : Moi. J’étais de retour. Pas pour longtemps, mais définitivement là.

- « Je suis désolé votre majesté, je suis sincèrement désolé. » Répétais-je en chialant comme un pauvre enfant dans ses bras.

- « Chuuuut. C’est fini… »

La vieille femme me serra fort dans ses bras pendant un longtemps moment, malgré toute ma crasse et me caressa même la chevelure, avant que je ne m’apaise et que je ne sombre finalement, terrassé par la fatigue et mes multiples blessures.

- « APPELEZ DES MÉDECINS ! TOUT DE SUITE ! »

La reine d’une voix de stentor donna un ordre ferme à ses sujets. Elle le savait pertinemment : Les vies de leurs sauveurs étaient en danger.
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...bip bip bip bip bip bip BIP BIP BIIIIIIIP TUTUTUTUTUTUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUU !

- ...huh... que....

- TUUUUUuuuuuu... bip ?! AAAAH, LA DAME ELLE EST RÉVEILLÉE !!

- Bon sang Sisensis ! Je t'avais pourtant dit de faire moins de bruit !! Ha, elle est réveillée !! Je, oh zut, mince. Médecin ! Médecin ? Ha, vous allez bien ? Ha, ah oui vraiment, vous recouvrez des couleurs, assurément. Trois jours, bon sang trois jours. Vous, sans vous, on ne serait pas là pour vous remercier. Merci, vraiment merci. Vous savez, Alabasta a besoin de gens comme vous, de plus de gens comme vous et le Contre-Amiral, réellement. Han oui vraiment je...

- ...huh... ah...

- Maman, maman ! MAMAN ! La dame elle s'est rendormie !

***

Second réveil, cette fois-ci je le sais, je le sens. Aucun bruit, pas de voix qui piaille dans mes oreilles et qui me donne l'impression d'être encore dans un rêve, pas de bip tonitruant, ni de flashs, juste du rien. Calme, paisible, reposant, il emplit la pièce et me rappelle paradoxalement que je suis encore en vie, le néant. Tranquillement, progressivement, mon corps s'éveille, mes muscles se contractent, mes bandes médicales et mes pansements me pèsent avant que le plus dur ne survienne. Car la douleur, elle, apparaît brutalement, spontanément, se fichant de la douceur du lin, de la tiédeur des draps, de la chaleur des corps. La douleur est là, dans le froid comme dans le chaud, le jour comme la nuit, dans le sommeil comme au réveil. Plus bruyante que l'écho des voix des visiteurs, plus sourde que la déflagration d'une bombe, elle s'étire sur le paysage physiologique pour dispenser de la façon la moins équitable possible ses spasmes et ses crampes.

- GnnaaaaaaaaRGGGHH !! gémis-je donc malgré moi, torpillée par les accès de souffrances qui surgissent par à-coups.

Rapidement surgissent, en réponse à mes longues complaintes et grincements de dents, une troupe de toubibs et d'infirmières parlant à la fois dans leurs barbes et dans leur jargon. "Il faut la stabiliser" ou bien "elle va rouvrir ses sutures" reviennent régulièrement dans les rares bribes que j'arrive à saisir, tandis que l'on m'injecte un anesthésiant dans le bassin, m'amenant progressivement à un nouveau repos, me plongeant dans l'obscurité pour quelques instants, quelques heures ou bien quelques jours supplémentaires...

***

On dit que l'on ne se souvient jamais de l'instant où l'on s'est réveillé. Aujourd'hui, jamais cela n'a été aussi vrai. Je me souviens seulement de ce moment où j'ai sorti la tête hors de l'eau, de ce revirement soudain dans les ténèbres, lorsque la lumière a empli l'espace noir et humide dans mon crâne, lorsqu'elle s'est réfléchie au fond de mon orbite pour me renvoyer mille teintes et nuances à la figure. Lorsque mon bras a saisi la hampe de mon lit d'hôpital pour soudainement me redresser, dans le vague, dans l'inconscience, mais d'ores et déjà réveillée. J'aurais bien aimé conter mon "éveil", peut-être un brin similaire à ce fameux film avec le feu fantastique acteur Rowin Billiams, mais au moment où j'ai ouvert les yeux, il m'est tout simplement sorti de l'esprit.

- Vous allez mieux.

Ah oui, vraiment ? Je vais mieux ? Les médecins passent les uns après les autres, dans leur blouse blanche avec leur stéthoscope ridicule. Je déteste les médecins, ils me rappellent ma mère, que je détestais tant et qu'aujourd'hui je regrette amèrement. Dans mes moments les plus tristes, où les sentiments me submergent, me donnent de l'envie, de la jalousie, pour me faire narguer par ces petites gens stupides et leurs familles complètes. Je les hais tous, surtout les médecins. Alors c'est au tour des infirmières, de venir me faire leurs prélèvement, de venir trifouiller des médicaments, de prendre mon identité. Pas comme à Drum, je dis cette fois : "Elizabeth Butterfly", ça suffira. J'ai pas gaffé, aucun innocent n'est mort. Mais de toute façon, là-bas, à l'Académie, dans le village Drummien, ils étaient pas innocents. Non, sauf peut-être Sophia, c'était un monstre mais elle ne le savait pas. Pâle copie, je regrette, je l'envie et je la hais, pauvre petite. Ici, à priori, s'ils sont tous là, si le soleil resplendit, si le gamin et sa daronne sont venues me rendre visite, me dire que je les avais sauvés, c'est que tout va bien. Alors, il l'a donc buté, ce foutu Grand Vizir ? Grand comment, aujourd'hui il a été raccourci d'une tête, je l'apprends d'une infirmière, au cours d'un énième contrôle, le jour suivant ou celui d'après.

Puis les visites s'enchaînent, enfin, celles où je suis éveillée tout du moins. Toujours dans cet état cathartique lié à l'opium, celui de l'intraveineuse et pas celle du peuple, pour changer, je semble visiteuse, invitée à l'intérieur de moi-même, comme dans un scaphandre. Le Papillon et le Scaphandrier, sauf que cette fois-ci je peux parler, je peux bouger et je suis vivante comme animée, non, je suis juste absente, le temps de me remettre, pas pour longtemps mais assez pour voir le spectacle du temps défiler comme une frise préhistorique sur le mur d'une caverne, comme les images retranscrites par un escargoprojecteur.

- Transition... Fort traumatisme... Quelques jours à quelques semaines... annonce un carabin tout en gribouillant sur son calepin, une sorte de psychologue, d'interne ou qu'en sais-je.

Mon regard se pose sur lui, lourd d'appréhension, de haine, de méchanceté révélée. Il redresse la tête, cherche à rivaliser et perd instantanément, submergé par le doute, la peur, l'incertitude et l'échec, avant de quitter la pièce en silence. Comme un toutou.

Lentement alors, comme si le processus reprenait son cap, comme si l'horloge biologique interne se régulait à nouveau, je retrouve cette impression de temporalité, sans véritable déclencheur. Le corps a ses raisons que le corps a ses raisons, point. A nouveau être à l'intérieur de moi-même, je resurgis dans le feu de l'action pour m'interroger, tantôt à voix haute, tantôt à voix basse. Trois jours que je suis réveillée et je ne l'ai pas vu, le type qui a sauvé ma vie, le type qui a sauvé Alabasta ou au moins une partie.

- Fenyang ? demandé-je, fouillant des yeux la pièce vide, esseulée.

Les pensées reviennent en flot massif, elles me submergent comme tant de papillons. Pas de séquelles, de commotion cérébrale, de trauma crânien, mais un vide qui a besoin d'être comblé, des questions qui attendent des réponses. Et au moment où je commence à les énumérer dans ma tête, où je les liste patiemment pour en déduire la suite logique des choses selon les circonstances actuelles, la porte vient soudainement s’entrebâiller pour laisser une illustre silhouette balayer le sol avec sa longue robe royale, suivie de son petit fils. Sans m'adresser la parole, la vieille femme vient lentement s'asseoir à mes côtés, frêle mais encore relativement forte pour son âge, décidée à se déplacer sans aucune aide, faisant montre de remontrances au cas où son loyal serviteur désirerait lui prêter son bras. Siégeant sur un fauteuil faussement moelleux, aussi confortable qu'un siège dans un hôpital pourrait l'être, l'invitée esquisse une moue de douleur tout en se tenant le bassin avant de se remettre lentement debout.

- Va me chercher un autre siège, un plus confortable, veux-tu ? gémit-elle en pointant l'objet avec sa canne par de petits mouvements circulaires.

Acquiesçant du chef pour se précipiter aussitôt vers la sortie, le sang royal s'effiloche à l'horizon pour enfin me laisser en tête à tête avec la reine, qui plutôt que de rester debout, vient finalement poser son gracieux derche sur mon lit à mes côtés.

- Une semaine que vous êtes ici, je n'ai appris la nouvelle de votre réveil que très récemment. J'ai pensé qu'il serait de bon ton de me déplacer pour vous remercier personnellement.

Hochant la tête à mon tour de façon affirmative sans piper mot, j'observe la souveraine et son expression joviale. Puis, l'espace d'un instant, son sourire disparaît légèrement pour laisser place à un visage neutre.

- En revanche, je ne vais pas vous cacher que je sais la vérité. Je sais que vous êtes du gouvernement. Oh, on ne me la fait pas à moi, hein. Ce n'est pas la première fois que je vois un agent du Cipher Pol ni les techniques que vous êtes les rares seuls à savoir utiliser, le Roku-quelque chose ? Je ne suis pas si gâteuse que j'en ai l'air.

Fronçant les sourcils, je n'ose pas interrompre sa déclaration, de peur d'intervenir dans quelque chose qui me dépasserait.

- Je n'ai jamais trop aimé le Gouvernement Mondial, ce n'est un secret pour personne. Hors, aujourd'hui votre nom, Mademoiselle Butterfly, et celui du jeune Salem résonnent dans les rues d'Alabasta et de Rawhajpoutalah, proclamés par les citoyens, ils font la une de la presse. Vous avez sauvé le pays d'un grand danger, vous avez sauvé le jeune Sultan et vous nous avez sauvés nous.

Inconsciemment, je sens mes joues rougir alors qu'une nouvelle fois, je me retrouve à faire la presse locale sous mon nom d'emprunt. Petit à petit, je me rends compte que la personnalité d'Elizabeth Butterfly prend une ampleur que j'ai de plus en plus de mal à contrôler. Et au moment où je me dis : suis-je si connue que cela désormais ? Je peux irrémédiablement d'ores et déjà répondre à ma question sans avoir à y réfléchir. Décollant légèrement les fesses, je sens délicatement la personne de la reine se redresser, tandis qu'elle se retourne lentement vers la sortie, ouvrant la porte pour découvrir le visage en sueur du pauvre Ymdebekht, dont l'aller-retour aura finalement été sans aucune utilité.

- Je ne peux rien vous promettre pour la suite. Mais quoi qu'il en soit, les Nefertari vous seront éternellement redevables, Miss Butterfly. conclue-t-elle en note de fin, m'adressant un dernier sourire mêlé d'un clin d’œil avant de disparaître derrière la porte blanche.

Hébétée pendant plus d'une minute, je reprends alors conscience et tente de me recroqueviller pour me recoucher. Mais alors que mes jambes viennent balayer les couvertures, un léger tintement clair se fait aussitôt entendre. Me rehaussant contre mon oreiller, je découvre alors au centre du lit un petit tube en cuivre, abandonné sur ma cuisse, léger et fin, discret. Saisissant l'énigmatique objet par l'une des extrémités, j'ôte la capsule qui scelle l'autre bord pour faire tomber entre mes genoux un petit parchemin enroulé sur lui-même. Entamant la lecture des premiers mots de la lettre, je m'arrête soudain, interdite, puis instantanément la remets à sa place et dissimule précieusement le tout sous ma taie d'oreiller. Car autant les informations figurant sur le petit bout de papier ne me concernent pas directement...

...autant je les devine comme ayant pour mes supérieurs une valeur probablement inestimable.
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***Plusieurs jours après le combat...***

- « Il semblerait que j’ai encore beaucoup à apprendre… »

Le sultan malgré son rang semblait extrêmement gêné d’être assis devant moi. Il avait un sourire crispé et la mine désolée. Je pouvais le comprendre puisqu’il avait perdu tous ses proches ou presque. Seule Mamou se tenait humblement à son côté. En la voyant ou plutôt en le voyant, je ne pus m’empêcher d’avoir un sourire. Il était toujours fringué comme une meuf. Okama jusqu’au bout quoi. Son visage affichait néanmoins un repenti sincère. Il allait désormais se dévouer corps et âme au bien être de son souverain. De ce côté-là, il n’y aurait sans doute plus aucun problème. Je redirigeai alors mon regard vers le sultan qui, lui, fuyait mon regard. Puis il finit par se lever brusquement tout en se retournant vers sa gouvernante qui lui tendit un paquet plutôt bien emballé. Je pouvais aisément deviner de quoi il s’agissait : Le meitou que j’avais dérobé à l’un de ses généraux que j’avais même tué. Il le posa sur mes cuisses, puis il s’inclina, les mains croisées. Derrière lui, Mamou fit de même. J’avais leurs remerciements en quelque sorte :

- « Ceci vous revient de droit, amiral. »

- « Je suis touché par le geste votre majesté, mais je n’en veux pas. »

- « Ce n’est pas un don. Il vous appartenait dès lors que vous aviez terrassé son ancien propriétaire. Après votre hospitalisation, les serviteurs de la reine Vivi ont cru bon venir me le rendre, mais il ne m’a jamais appartenu. J’ai juste attendu votre réveil pour vous le restituer en mains propres, bien que j’aurai pu passer par une autre personne pour que le tout revête un caractère moins solennel. »

- « Oooh… Dans ce cas… Je vous remercie. »


Je le savais. Le sultan le savait. Mamou le savait. Cette phrase n’était rien de plus qu’une excuse pour me faire don du meitou de son défunt général ainsi que pour me remercier. Mais puisqu’il tenait à orienter cette affaire dans ce sens, il ne servait à rien de discuter. Il pouvait être têtu comme une mule et je l’avais bien vu avec le cas de sa chère et tendre Elizabeth. Hormis cela, ce meitou, je n’en voulais pas. Il m’avait peut-être bien servi contre le grand vizir, mais son « caractère » n’était pas clairement pas semblable au mien. J’allais donc m’en débarrasser en le refilant à quelqu’un qui en aurait plus besoin que moi. On allait bien voir… En attendant, mon vis-à-vis reprit la parole : « Grâce à vos efforts et à ceux d’Elizabeth, nous avons finalement réussi à signer le traité entre nos deux royaumes. Je vous suis éternellement reconnaissant, Fenyang ! » Mentionner le prénom de l’albinos semblait l’avoir illuminé d’un seul coup. A croire qu’il ne l’oubliait pas du tout, celle-là. Mais de toute façon, ce n’était pas mon problème.

- « Eh bien… » Déclara-t-il en se levant soudainement. « Nous sommes bientôt sur le départ ! Le peuple nous réclame. N’hésitez pas à venir nous rendre visite, amiral. Vous serez le bienvenu ! Je m’en vais de ce pas rendre visite à Elizabeth. Elle est presque sur pieds, parait-il ! Prompt rétablissement ! »

Ni une ni deux que l’homme s’en alla sans que je ne puisse prononcer le moindre mot. Pour ma part, je haussai mes épaules. Nous n’avions finalement pas grand-chose à nous dire, d’autant plus que j’avais eu par le passé l’intention de foutre sa dulcinée dans mon lit. Un fait qu’il avait du savoir. D’ailleurs, j’avais senti qu’il avait voulu parler de la jeune femme avec moi, mais sans doute s’était-il rétracté au dernier moment pour aller lui-même la voir et régulariser leur situation une bonne fois pour toute. Pour ma part, je voyais déjà le gros râteau se profiler. Une gouvernementale et un souverain ? Une combinaison loin d’être gagnante. Pis, trop malsaine la meuf. Trop folle dans son genre. Un mou comme Djahad n’avait aucune chance. J’eus alors un soupir, avant de prendre le paquet pour le poser sur un siège pas très loin de mon lit d’hospitalisé. Ma sortie était prévue dans une semaine, plus ou moins. La guérison était particulièrement rapide. Ce n’était pas la première fois que je finissais dans cet état après tout…

***

Quelques heures après le départ du sultan de ma chambre, j’avais eu la permission de sortir un peu m’aérer dans le grand jardin de l’hôpital dans lequel j’avais été admis. J’avais entendu dire que la reine avait été de passage ici, mais curieusement, elle n’était pas venue me voir. Va savoir pourquoi. Etait-elle déçue ? En colère ? Il y avait de quoi avec la bavure dont j’avais fait preuve. C’était bien la première fois d’ailleurs que j’avais été confronté à une situation de ce genre ; et le poids des vies qui constituaient la famille royale, avait pesé lourd sur mes épaules au bout d’un moment donné et sans doute de façon inconsciente. Je chassai rapidement ces pensées de mon esprit et m’aidai de ma béquille provisoire pour atteindre un banc planté au beau milieu d’un gazon bien entretenu, le tout sous un grand arbre qui trônait dans le coin. De la verdure dans un grand désert. C’était magnifique. Un peu comme un oasis dirons-nous. Je me laissai tranquillement aller, avant d’entendre des bruits de pas se rapprochant de ma position…

« La voix » qui émanait de la personne qui s’approchait ne laissait place à aucun doute possible. Il s’agissait de…
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- Mais je vous AAAAAAAAAAIIMEEUUH !!

La main plongée à nouveau dans son visage, aplatissant son nez et ses lèvres dans l'espoir de le repousser, le Sultan reste malheureusement infatigable, tandis que je m'essaye à refuser ses avances du mieux que je peux.

- Mais bon sang, mais lâche moi !

- Gare à ta langue sorcière !

- Tiens, t'es toujours en vie l'okama ?

- EPOUZZZZZ MEUUUUAAAA ELIZABEEETTHHH !

Déstabilisée par une soudaine giclée de morve qui vient ponctuer la fin de la phrase du souverain, je ne peux tenir plus longtemps sur mes jambes encore affaiblies par les récents événements. Surprise par la force que le Sultan peut déployer lorsqu'il s'agit d'aimer, je finis par me laisser entraîner sous la pression pour atterrir au sol, recouverte par le bonhomme qui ne cesse de gesticuler pour me voler un baiser.

- Aide-moi, toi ! fais-je en direction de la gouvernante dont le visage a viré au rouge pivoine, interdite.

- Comment osez-vous faire ça en public ?! mugit-elle soudain en réponse.

- ...hein ?

Frottant ses talons contre le sol, la bonne-femme-homme se met alors à nous charger pour atterrir dans la mêlée. Et si elle cherche systématiquement à stopper le méli-mélo, elle ne repousse cependant pas la bonne personne, dardant ses grosses mains sur moi pour m'envoyer bouler avant que le Sultan ne suive comme un chien cherchant son os. Ainsi, au bout de deux minutes de lutte acharnée supplémentaires, tandis que l'okama continue à me balancer et le noble à me rattraper, je commence à perdre à la fois patience et espoir.

- Psst. Hé. La fille aux cheveux blancs. m'apostrophe soudain discrètement une voix féminine venue d'un fourré adjacent.

Jetant un coup d’œil dans la direction d'où vient l'injonction, je remarque une mèche bleue qui s'en échappe, signe distinctif des Nefertari. En même temps que je me demande ce que la gamine embusquée peut bien me vouloir, le destin semble inexorablement décidé à me tirer vers le buisson et c'est finalement une main qui se tend lorsque j'arrive à sa portée.

- Attrape ma main si tu veux sortir de là. fait-elle tout en balayant rapidement l'air de haut en bas.

Ni une ni deux je m'exécute sans me poser davantage de questions, traversant brusquement les feuilles pour atterrir de l'autre côté. Presque aussitôt, un important bruit de succion vient m'informer que les deux "amants" ont probablement dû malencontreusement se trouver l'un contre l'autre après mon départ. Et c'est la main toujours ancrée dans la poigne de la fillette que je m'éloigne enfin de l'endroit pour rejoindre un autre secteur des jardins du palais, sous le torrent d'injures entremêlé d'excuses et de supplications.

***

Marchant aux côtés de la demoiselle, je faisais tranquillement sa connaissance depuis une bonne dizaine de minutes tout en me baladant dans les jardins. L'excuse étant bonne pour ne pas me coltiner un énième royaleux lourdingue ou bien le Sultan, j'appréciais la compagnie de la gamine presque autant que les paysages et plantes tropicales qui ponctuaient le gazon du petit parc. Véritable pipelette, Cloclo - c'était son nom - avait aisément engagé la conversation en me parlant de mes prétendus exploits, de ceux de Salem, de sa relation avec le bonhomme et avait fini par totalement dérailler dans un monologue infini que je ne m'étais pas donnée la peine d'interrompre. Respirant l'air frais, dénouant mes membres meurtris, je pouvais bien sacrifier quelques minutes d'audition pour au moins avoir le privilège d'une certaine forme de tranquillité.

Le passage de la reine avait été comme un catalyseur, comme le bouchon fusant hors de la bouteille de champagne, déversant dans sa lancée le contenu du réceptacle. Les uns après les autres, les membres de la famille royale étaient venus me rendre visite, faisant la queue dehors pour venir me serrer la main ou bien me congratuler d'une tape amicale, voire opter pour quelque chose de plus distant et solennel. Puis, comme toujours, ç'avait été au tour des journalistes et autres vautours amateurs de gros titres. A cet effet, après le troisième interview d'affilée, je m'étais vue obligée de fermer la porte à clé et enfiler une vraie tenue pour ne pas sortir le cul à l'air par la fenêtre. Une fois suffisait. Et c'était là que j'étais tombée sur le sultan.

- Oh, je savais bien qu'il y avait quelque chose de pas net lorsque Salem est venu me voir la dernière fois, je me doutais bien que... continue la fillette avant de s'interrompre instantanément.

Quoi, que se passe-t-il ? Elle a vu un fantôme ? Son expression ne trahit aucun sentiment pendant quelques secondes, puis un gigantesque sourire nait sur son visage et je la vois se précipiter en direction d'un arbre pour venir sauter sur quelque chose ou quelqu'un assis sur le banc qui se planque derrière. Le Contre-Amiral. Brusquement envahi par la gamine et son flot de parole continu, le bonhomme ne semble pas remarquer ma présence, faisant abstraction de son sixième sens, son Haki. Observant la scène quelques minutes, j'hésite à aller le saluer une dernière fois, échanger avec lui quelques mots, de potentielles rapides formalités, entre fonctionnaires. Mais progressivement je me dis que l'idée est relativement saugrenue, que la conversation tournerait plutôt court et que l'on aurait pas grand chose à se dire. Pas super tentée à l'idée de devoir entendre des obscénités de sa part ou bien de me faire tripoter à nouveau, je préfère à la limite m'en tenir là, partir sur un bon sentiment, sur une bonne impression.

Alors, jetant un dernier regard dans sa direction, le voyant ébouriffer les cheveux de la gosse qui semble lui vouer un culte, le visage illuminé, je tourne ultimement les talons pour reprendre ma route en direction de ma chambre à coucher.

Bonne chance pour la suite, Contre-Amiral Fenyang.

***

- Je... je suis désolé je n'ai pas pu les empêcher d'entrer. Ils ont foutu un sacré dawa mais lorsqu'ils ont vu que vous n'êtiez plus là, ils sont tous partis en même temps. Euh, au passage, comment vous avez fait pour sortir... ? Madame ?

A mon retour la chambre avait véritablement été mise sens dessus-dessous par les paparazzis. Décidément, ces pourritures n'avaient vraiment aucun scrupule. Devant faire face aux explications ponctuées de questions d'un infirmier qui avait été chargé d'endiguer le flot de visiteurs, j'avais progressivement commencé à ranger sans daigner lui répondre, le laissant se morfondre quelques instants dans son embarras avant qu'il ne parte sous l'effet du silence. Récupérant diverses affaires jetées à terre, principalement des vêtements puisque tout le reste était consigné dans un casier verrouillé à clé dans une salle à côté de l'accueil, le tube en cuivre emporté avec moi dans ma déroute, habilement dissimulé dans mon soutien-gorge, j'avais alors remarqué un petit quelque chose qui ne semblait pas là avant. Profitant du départ de l'autre gugusse, je m'étais alors baissée pour ramasser la petite carte, comme volontairement laissée dans un coin obscur et difficile à atteindre près de ma commode, légèrement mise en évidence pour une personne aussi subtile qu'un agent du gouvernement. Parvenant enfin à la récupérer, j'avais alors essayé de déchiffrer avec difficulté l'écriture terrible qui y figurait, arrivant finalement à saisir ce dont il s'agissait après plusieurs minutes d'échauffement des neurones. Affichant ainsi côté face les coordonnées d'un restaurant à Nanohana, le petit carton possédait coté pile une suite de lettres et de nombres qui s'avéraient être en fait une heure, une date et les initiales du destinateur. Après décryptage, il semblait bien que l'on me conviait à un rendez-vous pour le jour suivant, à dix-huit heures, au KFC (le Katoréen Frèle Cactus). Et au vu des initiales, mon hôte ne pouvait être que lui.

Ao Novas.
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