-Alors, tu viens avec moi où tu préfères crever ici ?
C’est cette question que lui avait posé l’homme au chullo et c’est à cette question qu’il avait eu le malheur de répondre.
Il pleuvait ce soir-là. Mais pas de ces petites pluies qui font se questionner les mères de famille sur la vitesse à laquelle leur linge va bien pouvoir sécher. Non. Un de ces déluges qui font abandonner aux pécheresses embarcations et filets pêlemèle sur la plage pour rentrer s’abriter chez eux, qui transforme les rues pentues en torrents boueux et qui trempe le malheureux, sans toits pour se protéger, jusqu’au os. Land était alors l’un de ces malheureux-là. Sans parents, sans source de revenus il avait dû vendre sa maison et, lui qui n’avait jusqu’à présent jamais eu à se plaindre de ne manquer de rien, quémandait maintenant pour un pauvre morceau de pain rancis. Certes, sur une petite île comme Bux-Island, ou tout le monde se connaissait, les habitants n’hésitaient pas à voler au secours de leurs compatriotes dans le besoin. Mais personne ne connaissait. Land. Ou plutôt lui ne connaissait personne. Ses parents l’ayant enfermé jusqu’à ses dix-sept ans dans l’espoir de parfaire au maximum son éducation.
Ce fut donc un soir comme celui-là, alors qu’il tentait tant bien que mal de se protéger de l’averse sous le porche d’une échoppe portuaire, que Land avait aperçu pour la première fois l’homme au chullo. Outre son couvre-chef ridicule, l’homme aux cheveux roux et gras entre lesquels la pluie refusée de s’infiltrer portait de vieux vêtements crasseux et déchirés de toutes parts. Bref, il n’avait définitivement pas l’air de quelqu’un de fréquentable. En y repensant Rien que le fait qu’il eut été dehors par un temps pareil était louche. Land aurait dû le savoir et s’en méfier. Mais dans l’état dans lequel il était, se méfier était hors de ses capacités.
-Alors, on prend sa douche ? Ah ah ah ! Elle est bien bonne celle-là. Rhô, ça va, ne fais pas cette tête. Je suis venu te filer un coup de main. T’es toujours ici alors tu ne dois pas voir de maison si ?
Il était très probable qu’il avait espéré une réponse. Mais il n’en avait pas reçu. Land venait de perdre ses parents et se méfier des gens comme de la peste à cause de son éducation. Alors déjà qu’il ne parlait à personne, parler avec un gars comme lui était impensable.
-Écoute, j’ai une petite bicoque, dans les criques de l’Ouest. Je te propose de t’abriter, ça te dit ? Bien sûr, ce ne sera pas gratuit … Enfin … Tout ce que je te demanderai ce sera de m’aider à faire marcher mon commerce. Alors, tu viens avec moi ou tu préfères crever ici ?
En fait le jeune homme n’avait pas vraiment eu le choix. Il avait suivi bêtement, il avait obéi bêtement, et maintenant il se retrouvait là, bêtement, à escalader le mur d’une maison de la capitale pour s’y introduire par effraction.
Le concept du "commerce" de l'homme au chullo était simple : Lui, plus jeune, plus habile et plus discret s’introduisait dans la maison pour y voler tout objet de valeur tandis que Snop (ainsi s’appelait l’homme au chullo) occuper ses occupants à l’extérieur ou au pire sur le palier. Ils s'attaquaient à, en moyenne, une maison toutes les deux semaines (afin de ne pas avoir fait le tour des propriétés de l'île en un mois) et ce depuis sept mois. Plus exactement deux cent vingt jours. Deux cent vingt jours depuis que Snop l'avait sauvé du déluge ...
Attention, n’allez pas croire que le jeune homme se plaignait ! Non, la revente d’objets volés aux navires pirates de passage lui permettait de gagner assez bien sa vie. D’ailleurs, il avait même réussi à se racheter une petite maison sur les flancs du mont Simmonds via l’un des nombreux contacts véreux de Snop. Seulement c’était malhonnête. Et cela, ça allait à l’encontre des principes que lui avaient inculqués ses parents. En même temps ses parents n’avaient pas prévu qu’être un génie ne servait à rien sur une île comme Bux-island et que trouver du travail était impossible pour quelqu’un qui ne savait pas se servir de ses dix doigts.
Land enjamba la balustrade du balcon et, d’un simple coup de coude, brisa une vitre pour pénétrer dans la maison. De l’intérieur, comme de l’extérieur, la maison ne semblait pas contenir d’objets particulièrement précieux, mais c’était sans compter sur l’un des indics de Snop qui avait juré qu’elle contenait un coffre-fort judicieusement caché sous une trappe, elle-même dissimulée sous un lit et qui contiendrait une somme rondelette.
Sans faire de bruit, Land arpenta l’étage à la recherche du fameux lit cachant le fameux coffre ouvrant une à une les portes des chambres vides. Apparemment son complice faisait sa part du travail et tout les occupants de la bâtisse étaient sortis. Cela dit, il ne fallait pas que Land perde du temps de son côté. Qu’importe le prétexte qu’il avait bien pu trouver cette fois, Snop ne pouvait pas empêcher ses braves gens de rentrer chez eux éternellement.
C’est pourquoi en à peine cinq minutes le jeune homme avait réussis à fouiller la quasi-totalité des chambres de l’étage (sachant qu’il était peu probable qu’il y en est eu au rez-de-chaussée). Il ne lui en restait plus qu’une seule à inspecter, vraisemblablement la bonne. Elle était située au bout du couloir et, de par son ameublement, laissée penser qu’elle était habituellement occupée par les maîtres de maison. Land allait pour s’accroupir et découvrir la trappe cachée sous le lit lorsqu'un cri l’interrompit net.
-Bas les pattes espèce de sale voleur !
En un éclair le rouquin s’était retourné pour se retrouver face à une jeune fille du même âge que lui brandissant, les mains tremblantes, un vieux couteau de cuisine devant elle. Elle devait être une simple employée de maison à en juger par sa façon de s’habiller … À moins qu’elle n’ait été l’une des filles de la famille. En effet sur Bux-Island même les plus riches habitants faisaient piètres figures face aux nantis des grandes villes des îles voisines.
Il n’avait plus qu’une solution. Lui faire peur pour l’obliger à partir prévenir la milice de la ville et en profiter pour se tirer d’ici au plus vite. Et, connaissant les capacités de ladite milice, il était peu probable qu’il se fasse attraper de sitôt.
Land pris alors son son sourire le plus diabolique et d’une voix rauque et ténébreuse adressa à la jeune ces quelques mots :
-Il est trop tard. Maintenant que tu m’as vu à l’œuvre je vais devoir en finir avec toi !
N’importe où ailleurs cette menace aurait été perçue comme une imitation d’une vieille série policière, mais ici, à Bux-Island, ou les assassinats faisaient régulièrement la une des journaux, il y avait toutes les chances pour que la jeune fille peine peur.
-Je ne pense pas non. Dois-je vous faire remarquer que je suis armé et que, vraisemblablement, vous ne l’êtes pas ?
Bon, eh bien ça n’avait pas marché. C’est qu’elle avait du cran la petite. Certes ses mains continuées à trembler et son souffle haletant traduisait son inquiétude mais elle avait dit ça sans bouger et sans quitter son adversaire du regard. Et le pire est qu’elle avait raison. Bien que Snop l’ais mis en garde de nombreuses fois, le jeune homme avait toujours refusé de porter une arme lors de ses "interventions".
Land ne se laissa pas démonter pour si peut, elle allait partir en pleurant, il pouvait le juré sur son intégrité de voleur ! Mais il fut encore une fois pris de court par la jeune fille qui, au moment où il allait sortir la plus cinglante des répliques, cria en se tournant légèrement vers le couloir :
-TANTE ELLEN ! APPELEZ VITE LA MILICE, IL Y A UN INTRUS DANS VOTRE CHAMBRE ! Puis à l’égard de son prisonnier, quant à toi tu ne bougeras pas d’ici, je t’en fais le serment.
C’est cette question que lui avait posé l’homme au chullo et c’est à cette question qu’il avait eu le malheur de répondre.
Il pleuvait ce soir-là. Mais pas de ces petites pluies qui font se questionner les mères de famille sur la vitesse à laquelle leur linge va bien pouvoir sécher. Non. Un de ces déluges qui font abandonner aux pécheresses embarcations et filets pêlemèle sur la plage pour rentrer s’abriter chez eux, qui transforme les rues pentues en torrents boueux et qui trempe le malheureux, sans toits pour se protéger, jusqu’au os. Land était alors l’un de ces malheureux-là. Sans parents, sans source de revenus il avait dû vendre sa maison et, lui qui n’avait jusqu’à présent jamais eu à se plaindre de ne manquer de rien, quémandait maintenant pour un pauvre morceau de pain rancis. Certes, sur une petite île comme Bux-Island, ou tout le monde se connaissait, les habitants n’hésitaient pas à voler au secours de leurs compatriotes dans le besoin. Mais personne ne connaissait. Land. Ou plutôt lui ne connaissait personne. Ses parents l’ayant enfermé jusqu’à ses dix-sept ans dans l’espoir de parfaire au maximum son éducation.
Ce fut donc un soir comme celui-là, alors qu’il tentait tant bien que mal de se protéger de l’averse sous le porche d’une échoppe portuaire, que Land avait aperçu pour la première fois l’homme au chullo. Outre son couvre-chef ridicule, l’homme aux cheveux roux et gras entre lesquels la pluie refusée de s’infiltrer portait de vieux vêtements crasseux et déchirés de toutes parts. Bref, il n’avait définitivement pas l’air de quelqu’un de fréquentable. En y repensant Rien que le fait qu’il eut été dehors par un temps pareil était louche. Land aurait dû le savoir et s’en méfier. Mais dans l’état dans lequel il était, se méfier était hors de ses capacités.
-Alors, on prend sa douche ? Ah ah ah ! Elle est bien bonne celle-là. Rhô, ça va, ne fais pas cette tête. Je suis venu te filer un coup de main. T’es toujours ici alors tu ne dois pas voir de maison si ?
Il était très probable qu’il avait espéré une réponse. Mais il n’en avait pas reçu. Land venait de perdre ses parents et se méfier des gens comme de la peste à cause de son éducation. Alors déjà qu’il ne parlait à personne, parler avec un gars comme lui était impensable.
-Écoute, j’ai une petite bicoque, dans les criques de l’Ouest. Je te propose de t’abriter, ça te dit ? Bien sûr, ce ne sera pas gratuit … Enfin … Tout ce que je te demanderai ce sera de m’aider à faire marcher mon commerce. Alors, tu viens avec moi ou tu préfères crever ici ?
En fait le jeune homme n’avait pas vraiment eu le choix. Il avait suivi bêtement, il avait obéi bêtement, et maintenant il se retrouvait là, bêtement, à escalader le mur d’une maison de la capitale pour s’y introduire par effraction.
Le concept du "commerce" de l'homme au chullo était simple : Lui, plus jeune, plus habile et plus discret s’introduisait dans la maison pour y voler tout objet de valeur tandis que Snop (ainsi s’appelait l’homme au chullo) occuper ses occupants à l’extérieur ou au pire sur le palier. Ils s'attaquaient à, en moyenne, une maison toutes les deux semaines (afin de ne pas avoir fait le tour des propriétés de l'île en un mois) et ce depuis sept mois. Plus exactement deux cent vingt jours. Deux cent vingt jours depuis que Snop l'avait sauvé du déluge ...
Attention, n’allez pas croire que le jeune homme se plaignait ! Non, la revente d’objets volés aux navires pirates de passage lui permettait de gagner assez bien sa vie. D’ailleurs, il avait même réussi à se racheter une petite maison sur les flancs du mont Simmonds via l’un des nombreux contacts véreux de Snop. Seulement c’était malhonnête. Et cela, ça allait à l’encontre des principes que lui avaient inculqués ses parents. En même temps ses parents n’avaient pas prévu qu’être un génie ne servait à rien sur une île comme Bux-island et que trouver du travail était impossible pour quelqu’un qui ne savait pas se servir de ses dix doigts.
Land enjamba la balustrade du balcon et, d’un simple coup de coude, brisa une vitre pour pénétrer dans la maison. De l’intérieur, comme de l’extérieur, la maison ne semblait pas contenir d’objets particulièrement précieux, mais c’était sans compter sur l’un des indics de Snop qui avait juré qu’elle contenait un coffre-fort judicieusement caché sous une trappe, elle-même dissimulée sous un lit et qui contiendrait une somme rondelette.
Sans faire de bruit, Land arpenta l’étage à la recherche du fameux lit cachant le fameux coffre ouvrant une à une les portes des chambres vides. Apparemment son complice faisait sa part du travail et tout les occupants de la bâtisse étaient sortis. Cela dit, il ne fallait pas que Land perde du temps de son côté. Qu’importe le prétexte qu’il avait bien pu trouver cette fois, Snop ne pouvait pas empêcher ses braves gens de rentrer chez eux éternellement.
C’est pourquoi en à peine cinq minutes le jeune homme avait réussis à fouiller la quasi-totalité des chambres de l’étage (sachant qu’il était peu probable qu’il y en est eu au rez-de-chaussée). Il ne lui en restait plus qu’une seule à inspecter, vraisemblablement la bonne. Elle était située au bout du couloir et, de par son ameublement, laissée penser qu’elle était habituellement occupée par les maîtres de maison. Land allait pour s’accroupir et découvrir la trappe cachée sous le lit lorsqu'un cri l’interrompit net.
-Bas les pattes espèce de sale voleur !
En un éclair le rouquin s’était retourné pour se retrouver face à une jeune fille du même âge que lui brandissant, les mains tremblantes, un vieux couteau de cuisine devant elle. Elle devait être une simple employée de maison à en juger par sa façon de s’habiller … À moins qu’elle n’ait été l’une des filles de la famille. En effet sur Bux-Island même les plus riches habitants faisaient piètres figures face aux nantis des grandes villes des îles voisines.
Il n’avait plus qu’une solution. Lui faire peur pour l’obliger à partir prévenir la milice de la ville et en profiter pour se tirer d’ici au plus vite. Et, connaissant les capacités de ladite milice, il était peu probable qu’il se fasse attraper de sitôt.
Land pris alors son son sourire le plus diabolique et d’une voix rauque et ténébreuse adressa à la jeune ces quelques mots :
-Il est trop tard. Maintenant que tu m’as vu à l’œuvre je vais devoir en finir avec toi !
N’importe où ailleurs cette menace aurait été perçue comme une imitation d’une vieille série policière, mais ici, à Bux-Island, ou les assassinats faisaient régulièrement la une des journaux, il y avait toutes les chances pour que la jeune fille peine peur.
-Je ne pense pas non. Dois-je vous faire remarquer que je suis armé et que, vraisemblablement, vous ne l’êtes pas ?
Bon, eh bien ça n’avait pas marché. C’est qu’elle avait du cran la petite. Certes ses mains continuées à trembler et son souffle haletant traduisait son inquiétude mais elle avait dit ça sans bouger et sans quitter son adversaire du regard. Et le pire est qu’elle avait raison. Bien que Snop l’ais mis en garde de nombreuses fois, le jeune homme avait toujours refusé de porter une arme lors de ses "interventions".
Land ne se laissa pas démonter pour si peut, elle allait partir en pleurant, il pouvait le juré sur son intégrité de voleur ! Mais il fut encore une fois pris de court par la jeune fille qui, au moment où il allait sortir la plus cinglante des répliques, cria en se tournant légèrement vers le couloir :
-TANTE ELLEN ! APPELEZ VITE LA MILICE, IL Y A UN INTRUS DANS VOTRE CHAMBRE ! Puis à l’égard de son prisonnier, quant à toi tu ne bougeras pas d’ici, je t’en fais le serment.