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Cap'taine Joe

Suite des événements joués ici.


***

Ses chances de survie n'excédaient pas le zéro absolu en terme de pourcentage. Piégé entre une issue impliquant un massacre occasionné par la Légion, et la perspective d'embarquer seul sur Grand Line, mer de tous les dangers, il avait choisi la seconde hypothèse.
C'est anxieux qu'il regardait le rivage de l'île des animaux s'éloigner peu à peu jusqu'à disparaître de sa vue. Pour le moment, il était encore dans la zone d'influence de l'île, le courant marin demeurait stable, mais une fois sorti des alentours de l'île, c'était une mort certaine qui l'attendait.

Il se souvenait avec quelle précipitation il avait quitté la Translinéenne la première fois qu'il était descendu du bateau pour faire bande à part. La grêle, les tempêtes, les pires incohérences atmosphériques qui s'enchaînaient à une vitesse prodigieuse. À cette réjouissance, il fallait ajouter les occasionnels monstres marins qui barbotaient dans le coin et enfin, on avait une idée définie de l'enfer qui se dessinait sur les flots.
Sans surprise, Joe regrettait déjà son choix alors qu'il apercevait au loin des nuages qui ne lui inspiraient pas vraiment confiance. Serait-il resté sur l'île qu'il se serait fait capturer et aurait vite regretté de ne pas avoir embarqué. Entre la peste et le choléra, il avait fait un choix par dépit plus que par conviction, et il en souffrirait les conséquences amères bien assez tôt.

Ce son qui tonnait à répétition, quoi de plus angoissant alors que les flots commençaient lentement à s'agiter ? Oui, cela ressemblait au bruit de l'orage. Les mains et même les dents aggripées au rebord de son monoplace, larmes aux yeux, le cafard saurait au moins à quelle sauce il serait mangé. Une mort par orage, assez peu original quand on connaissait toutes les excentricités dont regorgeait  la route de tous les périls.
Au moins, il aurait le "plaisir" d'avoir la surprise de savoir si il serait englouti par une vague de dix mètres, si la pluie ferait couler son embarcation, ou si l'orage viendrait s'abattre sur lui. Pourtant, aussi nuageux pouvaient être les cieux sous lesquels il s'enfonçait, pas de signe d'orage. Décrochant ses dents de son bateau, le forban leva la tête intrigué. Oui, il en était sûr, il avait entendu tonner, il l'entendait toujours d'ailleurs.

Le son se rapprochait, et le bruit se faisait de plus en plus clair. Ce n'était pas de l'orage. Des percussions successives pouvaient être entendues, ça en avait vaguement l'air mélodieux. Commençant à entendre d'où venait ce bruit intriguant, Joe tourna la tête vers l'Est.

- Par les poils de cul de la Vierge d'Acier...

Un bateau intrépide pénétrait lui aussi audacieusement les eaux de Grand Line, mais pas n'importe lequel. En effet, le vaisseau avait une allure bien familière aux yeux du forban.

- La putain de Translinéenne....


Cap'taine Joe Moak_sloop_painting_closeup-4d79f1d


A raison de plusieurs voyages par jour, les navires de la compagnie ne désservaient que deux îles sur la troisième voie : Union John, et Clockwork Island. Mais le cafard se foutait éperduement de sa destination, son salut en train de s'engouffrer dans les eaux tumultueuses de Grand Line, était sa seule chance de s'en sortir.
Aussi, le forban prit la seule décision de bon sens qui s'imposait.

- À l'abordage !

Hélas pour Joe, le bon sens, une immunité qui prévalait contre bien des conneries, ne semblait pas inscrit dans son code génétique. Se sachant évidemment "persona non grata" sur les bateaux de la compagnie suite à un épisode pour le moins fâcheux à bord occasionné par ses soins, seule l'hypothèse d'une entrée en force semblait lui convenir.
Il avait fière allure tout seul sur son petit catalane, à naviguer en direction de l'embarcation bien plus massive, mais il croyait dur comme fer à son histoire d'abordage.
Joe Biutag s'en allait donc aborder, et même détourner à son propre profit, un vaisseau de la Translinéenne. Bien évidemment, il comptait entreprendre cela tout seul.

Sans doute eut-il été préférable pour lui de se perdre sur Grand Line pour y mourir noyé, car le personnel de la compagnie maritime n'avait pas gardé un excellent souvenir de son dernier passage à bord et avait quelques comptes à lui rendre.


Dernière édition par Joe Biutag le Sam 19 Mar 2016 - 8:02, édité 1 fois
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Déjà, les vagues étaient menaçantes. Habitué depuis le temps à manoeuvrer seul son embarcation, Joe arrivait encore à s'en sortir, mais ce n'était que l'affaire d'une dizaine de minutes avant que les éléments ne soient incontrôlables.
Malgré tout, il devait s'enfoncer sur Grand Line et renoncer à toute forme de retraite. S'approchant du vaisseau, bien plus large et donc plus lent que le sien, il craignait de se heurter à la coque qui ne tarderait pas à voir un cafard s'écraser à son encontre. Il était à présent suffisamment près du navire pour y voir les hommes à bord se hâter afin de manoeuvrer les voiles pour d'adapter vent qui s'annonçait violent.
Trop occupés qu'ils étaient, aucun membre d'équipage ne fit attention à la minable embarcation qui approchait. Les transports de la Translinéenne sur la troisième voie étaient assez sommaires, il ne s'agissait que de "sloops" avec à bord un capitaine, un navigateur, et trois membres d'équipage aguérris aux traversées sur Grand Line. Soit, très peu de monde. C'est là dessus que comptait le forban pour perpétrer son larcin sans encombre.

Bien qu'il y ait peu de personnel à bord, chaque homme était crucial pour toute étape de navigation sur la route de tous les périls. Éliminer un seul des trois matelots, c'était risquer le naufrage dans des délais assez brefs. Cela, le cafard ne commença à y réfléchir qu'en essayant d'atteindre la poupe du vaisseau avec son malheureux lasso improvisé à partir d'une corde présente à bord de son catalane d'opérette.

Se trouvant à la poupe du navire, qui, bien que plus épais que le sien, avançait à une vitesse relativement fulgurante, Joe s'efforçait d'accocher son lasso autour d'une extrémité d'une rembarde afin de pouvoir s'y hisser. Quand enfin il y parvint, il noua l'autre bout de sa corde à la proue du catalane. Restait maintenant à se suspendre à la corde afin de s'infiltrer à bord.
Audacieux, mais surtout inconséquent, Joe n'hésita pas une seule seconde avant de se saisir de la corde et d'y nouer ensuite ses jambes autour. Ainsi, il traversait la distance qui le séparait de son monoplace au navire, la tête en bas. Une position de choix, puisqu'ainsi, il eut une vue prenante sur la mer qui se trouvait en dessous.

Plus que les eaux de Grand Line, ce sur quoi son regard s'était porté était les ombres qui s'y faufilaient. Se faisant balancer à droite à gauche par les vents violents, et asperger par les vagues, le cafard tenait bon, il en était à la moitié de la corde. Celle-ci commençait à glisser, du fait des remous de l'eau venu l'humidifier. Ce qui devait arriver arriva, et le forban glissa.
Suspendu au dessus de l'eau, avec seules ses jambes pour le maintenir à la corde, il paniquait, pensant que jamais il ne trouverait la force de se redresser pour agripper à nouveau la corde de ses mains. Lui qui, bien que maigrichon, n'était même pas assez souple pour atteindre ses orteils semblait en bien mauvaise posture.

Inutile de dire que la situation ne s'améliora pas. Son abordage était de toutes manières voué à échouer, mais il semblait qu'il n'y aurait même pas d'abordage, le cafard serait envoyé par le fond bien avant, ses jambes glissant elles aussi peu à peu.

- Rhaaa je veux pas crever comme ça ! C'est trop con aaaaah !

Hurlant à la mort, il ne pouvait pas faire grand chose d'autre. Il venait de faire savoir qu'il ne souhaitait pas mourir ainsi. La noyade était en effet une fin assez horrible, aussi, la Providence décida de lui offrir une issue alternative.
Une des innombrables silhouettes inquiétantes qui frétillaient sous l'eau venait d'émerger. Un requin taupe bleu pointa le museau.

- Veut pas crever comme ça non pluuuuuuus !

Joe n'était jamais content. Alors que la bête plongeait afin de prendre de l'élan sous l'eau afin de bondir à la surface et se saisir d'un repas suspendu au dessus de la mer, le cafard reprit ses forces. Après avoir essayé de nouer à nouveau ses mains autour de la corde, il y parvint soudain en un instant.
Il fallait croire que la peur de la mort était un bon stimulant pour faire certains efforts dont on se serait cru incapable. Se hissant le long de la corde jusqu'à atteindre le vaisseau de la Translinéenne, il avait échappé de peu aux crocs de la bête qui avait bondit malgré la disparition de sa proie. Proie relativement rancunière puisque le forban pointa son mousquet à triple canon en direction du squale dont l'aileron dépassait de la surface de l'eau.

Clic.

- Qu'est-ce qui se passe oh ! Moins de clic clic, plus de pan pan ! Allez !

S'acharnant comme un beau diable sur la gâchette de l'arme, il devait se rendre à l'évidence, les vagues qui s'étaient écrasées contre lui durant son numéro de gymnastique avaient mouillé la poudre de ses armes. C'est à cet instant précis, sans aucun moyen de se défendre, qu'il eut enfin le bon sens de réviser ses plans. Il n'y aurait pas d'abordage.
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Les passagers n'étaient pas nombreux à bord. Depuis que le vent avait stoppé, les quelques voyageurs à bord commençaient à sortir des cales. Ils étaient moins d'une dizaine. La compagnie Translinéenne avait tellement prospéré que les vaisseaux de transport étaient devenus légions. De par le fait, compte tenu de la fréquence accrue de navires prêts à embarquer, chaque vaisseau se trouvait moins chargé.

- Beau travail les gars, allez, on va se mettre une rasade avant que ça ne reprenne !

C'était l'un des trois hommes d'équipage sur le pont qui venait de tenir ces propos. Tous trois étaient de rudes gaillards, et sans pouvoir utiliser ses armes, le forban n'aurait pas la moindre chance contre eux. Ils venaient de se rendre en cuisine.
Planqué derrière les caisses stockées en poupe, un affreux cafard avait mis les pieds à bord. Scrutant du coin de l'oeil la présence des hommes d'équipage, il sortit enfin de sa cachette quand ceux-ci disparurent du pont.

Suite à son premier voyage à bord de la compagnie, Joe se doutait que sa prime était probablement passée entre les mains de l'intégralité du personnel de la Translinéenne. Bien qu'à ce jour, il était encore plus ou moins un inconnu sur Grand Line, le forban ne pouvait pas se permettre de se montrer à visage découvert devant des hommes de la compagnie.
Ceux-ci, absent pour se murger au rhum, Joe en profita pour trouver un endroit à l'abri de l'humidité afin de faire sécher sa poudre au plus vite. Ce n'était pas avec ses Dials, aussi efficaces pouvaient-ils être, qu'il pourrait s'en sortir. Si ce n'est ses  quatre Impact Dials, aucun n'avait de visée offensive, et, trop faible, le contrecoup de chaque Impact pouvait lui déboîter l'épaule.

Pour le moment, il devait faire profil bas. Ruer dans les brancards, ce serait pour plus tard, une fois qu'il aurait l'artillerie pour le soutenir, car sans, il n'était effectivement qu'un cafard qu'on pouvait écraser d'un coup de semelle.
En règle générale, la seule alternative à l'affrontement pour lui constituait la fuite, discipline en laquelle il excellait avec brio. Mais sur un sloop en plein milieu de Grand Line, les issues lui manquaient cruellement.

Alors que les voyageurs à bord discutaient entre eux ou regardaient l'horizon, le cafard, tête baissée, ouvrit la première porte qui lui passa sous la main. L'essentiel était de se trouver loin des cuisines où se trouvaient les matelots.

- Je peux vous aider ?

Lui qui eut espéré mettre les pieds dans une modeste remise, c'était une cabine cossue dans laquelle il venait d'entrer. Un lit une place, un bureau remplit de paperasse, une bibliothèque garnie, le tout illuminé par une lampe à huile, en observant la dégaine du spécimen qui y logeait, Joe comprit assez vite à qui il avait à faire.
Le forban venait de scruter l'homme des pieds à la tête, relevant la sienne se faisant et dévoilant au passage l'inscription "pirate" inscrite par dessus la casquette marine qu'il portait.

- Sacrebleu ! Tu es Jo...

Celui qu'il avait en face de lui n'était autre que le capitaine du vaisseau. Le dit capitaine avait évidemment reconnu en un coup d'oeil le pirate qui venait de pénétrer sa cabine. Ce dernier avait immédiatement brandit son mousquet à triple canon, qui ne fonctionnait pas de toutes manières.

- Je suis Jo....li comme un coeur ? C'est ça que t'allai dire capitaine ?

Maintenant qu'il le maintenait en joue, le cafard exigea la pleine et entière collaboration du capitaine du vaisseau. Voulant se montrer menaçant, s'approchant peu à peu de l'homme, il fut quelque peut surpris par le mouvement brusque de ce dernier qui s'empara du mousquet à une vitesse prodigieuse.

- Pas de chance pour toi cafard, nous autres, hommes de la Translinéenne sommes en grande partie issus de la marine, et avons été entraînés pour faire face aux filous de ton espèce.

Comme par réflexe, voyant une arme pointée sur lui, le forban venait de lever les mains. De tous les êtres peuplant cette planète, il devait être le plus docile quand on le braquait à bout portant avec un mousquet. Déglutissant, il ne s'était pas attendu à ce retournement de situation, quand enfin, une lueur de perspicacité vînt lui traverser l'esprit.
Baissant peu à peu les bras, il se mit à ricaner en fixant le malheureux capitaine.

- Bah vas-y mon gars, tire. Tu veux que je me tourne ? J'ai entendu dire qu'à la marine on ne s'entraînait que sur des cibles de dos hinhin !

Inversion accusatoire des plus manifeste que celle qu'il venait de professer. Ne tenant pas à garder en captivité un pirate primé tout le long de la traversée, et provoqué à l'instant, le capitaine n'hésita pas à presser la détente. Joe eut un sursaut, même si il savait pertinemment que la poudre était mouillée. Un homme qui pointe une arme en sa direction et appuie sur la gachette, ça filait tout de même quelques frayeurs.
Se demandant pourquoi le coup n'était pas parti, l'ancien marine, comme Joe auparavant, pressa la gâchette à plusieurs reprises sans résultat. Pas exactement sans résultat à vrai dire, puisque cet acharnement à vouloir tuer le cafard énerva ce dernier qui vînt lui heurter le nez d'un violent coup de tête.

Manquant de tomber à la renverse, le capitaine s'écrasa contre sa bibliothèque sonné, faisant tomber quelques ouvrages. Ce ne fut là que le seul court répit dont il put profiter puisque les coups de tête similaires se succédèrent, jusqu'à lui faire perdre connaissance.

Joe se mit à vaciller légèrement, se rattrapant sur le bureau et se frottant le front pour y essuyer les gouttes de sang qui s'y étaient étalées. Après un tel boucan, il allait sans dire que le reste de l'équipage ne tarderait pas à se rameuter. Le forban était dans une situation précaire, et sa poudre n'avait manifestement pas encore séchée, il allait falloir ruser pour s'en sortir.


Dernière édition par Joe Biutag le Sam 19 Mar 2016 - 8:25, édité 2 fois
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Quelques minutes après l'affrontement, la porte s'ouvrit brusquement sans même que l'on vienne frapper au préalable. Un homme entra, il ne s'agissait pas d'un des matelots qui, à l'autre bout du vaisseau, en cuisine, n'avaient rien entendu. Habillé d'une marinière, d'un pantacourt beige et de sandales, le Log Pose autour de son poignet indiquait qu'il devait être le navigateur de l'équipage.

- Tout va bien capitaine ? J'ai entendu un peu de raffut tout à l'heure.

Coudes posés sur son bureau, mains croisées placées son son nez, tête baissée, la casquette de capitaine recouvrant jusqu'à ses yeux, Joe n'avait rien trouvé de mieux que de se travestir et de cacher le vrai capitaine sous le bureau. Ainsi positionné, il parvint plus ou moins à dissimuler tout son visage.
L'absence de réponse de l'imposteur interloqua Daneil le navigateur qui ne cacha pas ses sentiments en exprimant un regard suspicieux.

- Capitaine, pourquoi y'a t-il des livres par terre ?

Si il avait eu, de justesse, le temps de se vêtir du manteau et de la casquette du capitaine après l'avoir dissimulé comme il a pu, le forban n'avait pas eu le temps de ranger les dégâts occasionnés par le tumulte de son agression.

- Sacrebleu ! Un homme ne peut plus ranger sa bibliothèque par ordre alphabétique et faire tomber quelques livres ?

En utilisant l'expression "sacrebleu" qu'avait prononcé plus tôt le capitaine, Joe espérait faciliter son imposture en s'appropriant les expressions de celui dont il était censé revêtir la personnalité. Essuyant une petite moue dubitative, le navigateur semblait moins inquisiteur, mais néanmoins curieux puisqu'il poursuivait ses remarques.

- Mais capitaine... Vous ne rangez pas là, vous êtes assis derrière votre bureau à ne rien faire.

Ne pouvant pas se mouvoir, risquant ce faisant de dévoiler son visage, le forban était bien ennuyé. Vraiment, il devait se débarasser du trouble fête. Seulement, Daneil en entrant dans la cabine avait laissé la porte grande ouverte, s'occuper de lui sans attirer l'attention des passagers était inenvisageable. Restait à le faire fuir.

- Sacrebleu filou ! L'est pas né le navigateur qui se permettra de me dire en face que je fous rien ! Dégage d'ici avant que je ne t'envoie par dessus bord.

Utiliser "sacrebleu" deux fois en une intervalle aussi courte, c'était abuser de son stratagème et risquer de se faire griller. À cette expression, il avait rajouté le mot "filou", c'était en effet en ces termes que l'avait qualifié le capitaine.
Levant les yeux au ciel, Daneil haussa finalement les épaules et fit demi tour, lâchant entre ses dents :

- Ça m'apprendra à m'inquiéter....

Une fois la porte fermée, le cafard, avec le manteau du capitaine, trop grand pour lui, se rua pour fermer le loquet. Il était sauf. Pour un temps tout du moins. Quand on entendait le mot "abordage", l'imaginaire collectif voyait des pirates armés jusqu'aux dents en train de faire des ravages. Joe lui, quand il tentait d'aborder un vaisseau le faisait en se déguisant en capitaine et en rangeant des livres tombés par terre. L'existence même du cafard était une insulte au registre épique.
La bibliothèque à nouveau en ordre, le forban tira la carcasse du capitaine entreprosée sous le bureau. Profitant de l'inertie de ce dernier, encore assomé par les coups de tête, Joe plaça son avant bras sous sa gorge et l'autre contre sa nuque, se saisissant des deux extrémités de son cou avec ses mains.

Lui brisant la nuque dans un mouvement sec, il recommença pour s'assurer qu'il était bel et bien mort. La dernière chose dont avait besoin le forban était d'un ancien marine en colère qui se réveille pour faire du grabuge. Cela lui ôtait une épine du pied.
Rangeant le cadavre à nouveau sous le bureau, le cafard poussa un long soupir.

- Chiasse de chiasse, et comment je sors de ce bourbier moi ?!

Même avec le soleil dans les yeux, il était difficile de confondre la silhouette du capitaine avec celle de Joe bien moins grand et carré d'épaule. Le forban ne pouvait pas sortir de la cabine, même vêtu comme il l'était sans qu'on le reconnaisse en un instant.
Alors qu'il était confronté à ce dilemme, on frappa à la porte.

- Capitaine, c'est encore moi, désolé de vous déranger, mais c'est pour discuter des nouvelles consignes qu'on vient de recevoir.

Celui là lui menait la vie dure. Se repositionnant dans l'exacte même posture qu'il avait prise pour qu'on ne le reconnaisse pas, Joe dit enfin :

- Entrez.

La poignée se tourna.

- Je peux pas capitaine, c'est fermé.

Le cafard serait forcé de se lever pour laisser entrer le zélé navigateur, sa couverture ne ferai plus long feu si on pouvait l'apercevoir debout.


Dernière édition par Joe Biutag le Sam 19 Mar 2016 - 8:30, édité 1 fois
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Seule une porte séparait l'imposteur et le brave navigateur. Main autour du verrou, Joe hésitait évidemment à ouvrir l'accès au visiteur qui l'attendait de l'autre côté. Dubitatif, le cafard se demandait comment il pourrait tuer Daneil en toute discrétion. Tuer, c'était un peu sa solution à tout, une solution qui ne faisait que l'empêtrer dans des emmerdes plus profondes, nécessitant davantage de meurtres pour s'en sortir.

- Vas me chercher une bouteille de Rhum avant !

Bien que la porte fut épaisse, le forban avait clairement pu entendre un profond soupir d'agacement de l'autre côté. Daneil commençait à être de plus en plus exaspéré du comportement de son capitaine, se demandant pourquoi il était aussi fatigant aujourd'hui.

- Oui capitaine...

Patientant suffisamment longtemps pour s'assurer que le gêneur était assez loin, Joe déverrouilla la porte et retourna s'installer. À présent, il ne restait qu'à attendre le retour de son navigateur, trouver un énième moyen de l'envoyer chier, et se mettre un coup de rhum par dessus la cravate, après tout, qui a dit qu'on ne pouvait pas joindre l'utile à l'agréable ? Vérifiant son mousquet, posé sur ses genoux, la poudre semblait encore humide.

Sans frapper cette fois, Daneil entra dans la cabine, bouteille à moitié entamée dans la main. Posant la dite bouteille d'un coup sec sur la table, il ne semblait plus vraiment disposé à masquer son agacement. Joe resta de marbre, mais surtout parce que le moindre mouvement aurait pu vaguement dévoiler son visage facilement reconnaissable.

- Capitaine y'a du nouveau.

Un long silence s'ensuivit. Du mieux qu'il pouvait, le cafard essayait de prendre la parole le moins possible afin qu'on ne puisse pas l'identifier, cependant, le navigateur semblait être habitué à ce que son capitaine le relance à chaque fois. On aurait cru un gosse qui avait comme réflexe pavlovien d'attendre que ses parents l'autorisent à parler pour ce faire.

- Poursuis.

S'éclaircissant la gorge, Daneil obéit.

- Un passager vient de nous faire remarquer qu'une barque était attachée à la poupe du vaisseau. On a un passager clandestin sur les bras.

Une fois encore, le silence ponctua sa phrase. Joe hésitait à continuer la conversation, il savait que le navigateur ne tarderait pas à se douter de quelque chose. Toutefois, il tenta tout de même de désamorcer la situation.

- C'est pas grave. Envoie les nouvelles consignes.

"C'est pas grave", ou, comment noyer le poisson sans vraiment chercher à se compliquer la vie. Bien évidemment, cela ne prit pas, même en essayant de le distraire avec les consignes, Daneil n'en démordait pas, le passager clandestin l'inquiétait particulièrement. Il faut croire qu'il avait de bonnes raisons d'être anxieux.

- Mais enfin capitaine, on ne peut pas mettre ça sous le tapis, et si c'était un pirate ?

Joe cachait si bien son visage avec sa casquette et ses mains croisées sous son nez que Daneil ne vit pas les gouttes de sueur qui commençaient à perler le long de son front. Restait à se retenir de ne pas déglutir. Mais ça, il n'y parvint pas. La suspicion commençait à tenir Daneil par les tripes, le comportement de son capitaine n'était pas naturel.
Le scrutant de part en part, il pâlit.

- Bon sang j'y suis....

Le cafard venait d'être percé à jour.

- Vous êtes saoul comme un cochon !

Ou peut-être pas.

- Le boucan et les livres que vous avez fait tomber, c'est en chutant à cause de l'ébriété, ensuite vous m'envoyez chercher une bouteille de rhum, et depuis que je vous ai vu ce matin, vous restez dans la même position comme pour cacher votre visage rougi par l'alcool. Tout paraît clair maintenant.

C'est vrai qu'avec du recul, les manigances de Joe pour ne pas être percé à jour pouvaient être amalgamées avec une forme d'alcoolisme tant il avait été maladroit dans ses manoeuvres improvisées.

- J'ai juste un peu bu.

Lâchant un énorme soupir, levant la tête en direction du plafond, Daneil était atterré. Un capitaine saoul quand on naviguait sur Grand Line, ça pouvait poser des problèmes.

- Bien bien bien bien bien bien bien.....

Là, il se passait la main le long du visage. Puis il pointa du doigt Joe qui restait immobile, toujours dans l'optique de ne pas griller sa couverture.

- Vous savez quoi ? C'est pas grave. Je vais me démerder pour tenir la barre, j'ai de l'expérience. Mais de retour au cap des jumeaux, vous aurez à répondre de vos actes vous m'entendez ?!

Hésitant à pouffer, le cafard se retînt du mieux qu'il put, étouffant un ricanement sordide. Daneil prit ça pour le délire d'un ivrogne et s'apprêtait à quitter la cabine furieux. Ce qui venait de faire rire le forban était de s'imaginer les représentants de la Translinéenne en train de demander des comptes au cadavre du capitaine qu'il avait roulé en boule sous le bureau.
Avant que le navigateur ne sorte, Joe se permit de donner un dernier ordre à ce dernier.

- Préviens moi quand nous serons dans les eaux territoriale de la prochaine île.

Sur un ton sec et amer, avant de claquer la porte, Daneil répondit :

- Je n'y manquerai pas "capitaine".


Dernière édition par Joe Biutag le Sam 19 Mar 2016 - 8:36, édité 1 fois
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On ne l'emmerda pas de tout le voyage. Restant immobile de jour comme de nuit, dormant même dans la position qu'il s'était attribué. Inutile de dire qu'il fut particulièrement rouillé lorsque vînt le moment de bouger le bras pour se saisir de la bouteille de rhum.
Il avait mangé liquide les quatre jours qui venaient de s'écouler. Prisonnier malgré lui de cette cabine suffocante où l'odeur du cadavre du maître des lieux commençait à embaumer dans toute la pièce.

Pour occuper le temps, comme un écolier mal élevé, il gravait des inscriptions dans le bureau. Ceux qui passeraient après lui, ainsi que la marine en feraient probablement partie pour l'enquête sur la mort du capitaine, et pourraient lire : "Joe Biutag est passé par là."

Afin de palier à l'ennui, le forban avait pioché dans les rayons de la bibliothèque. Rien de franchement intéressant à se mettre sous la dent, surtout des cartes et des traités maritimes, mais il fit avec, il valait mieux se détourner l'esprit pour ne pas finir par sombrer dans la folie à force de s'ennuyer. Cette "captivité" ne fut pas si malheureuse que cela puisqu'elle lui permit de se renseigner sur ce qui allait suivre sur la troisième voie de Grand Line.

- Clockwork Island...

De mémoire, l'île avait été détruite pas les Saigneurs il y a quelques années de cela. Joli désastre en perspective.

- L'île maléfique, ça promet.... Ah ! L'île en fête, ça a l'air réjouissant.

Réjouissant n'était pas le mot juste. Une plante dangereuse parasitait l'île entière, faisant des malheureux qui passaient dans les environs pour devenir ses esclaves. Récemment, le capitaine corsaire Jack avait même établi son emprise dans le coin. Aucune réjouissance envisageable.

- Karakuri l'île mouvante, et ensuite des îles célestes sur Strong World... Tout ce que je demande c'est un peu de répit.

Bien qu'il s'apprêtait à poursuivre sa lecture et se renseigner plus intensément sur chaque île, une voix derrière la porte le fit sursauter.

- On est arrivé à proximité de Clockwork capitaine. Aucune trace du clandestin mais je suppose que vous vous en foutez.

Ayant quitté son "capitaine" en de mauvais termes, le navigateur n'avait pas pris la peine d'entrer. Toutes les manoeuvres en mer avaient été son fait au cours des derniers jours, la rancoeur à l'égard de son imbécile de supérieur le tenait aux tripes.
Les bruits de pas s'éloignèrent. L'heure était venue pour le cafard de revêtir son accoutrement habituel, la casquette de capitaine était trop large pour lui de toutes manières. Vissant sa casquette marine modifiée sur la tête, il s'approcha de la porte.

Ce ne serait pas une chose aisée que de quitter les lieux, retourner à son bateau et foutre le camp aussitôt sans être repéré, car cette fois, les matelots étaient sur le pont. Mais peu lui importait, il lui suffirait d'être rapide pensait-il.
Main autour de la poignée, cela faisait bien cinq bonnes minutes qu'il hésitait à franchir le pas. Sans diversion, il n'avait aucune chance d'arriver jusqu'à la poupe du vaisseau, bien que celle-ci n'était pas bien loin. À peine la porte ouverte, l'un des hommes d'équipage s'exclama :

- L'intrus ! C'est Joe Biutag !

Bien que flatté d'être ainsi reconnu par ses contemporains, il devait mettre quelques distances entre lui et les hommes de la compagnie.

- Mais alors ça veut dire que le capitaine....

Les fils commençaient enfin à se toucher dans le crâne de Daneil, mais hélas pour lui, ce fut trop tard. Un flash aveuglant l'éblouit ainsi que le reste des hommes et femmes sur le pont. Joe venait d'activer son Flash Dial en hurlant "Baudroie".
Fusant en poupe, il ne put s'empêcher une énième taquinerie. Poussant la lourde ancre à la mer, le cafard estima que cette manoeuvre suffirait à les ralentir de manière conséquente puis sauta sur son catalane, se foulant la cheville au passage, détachant au plus vite la corde qui liait son embarcation à la leur.

Il naviguait à présent dans les eaux calmes se trouvant dans l'influence de Clockwork Island, il ne risquait plus grand chose à voguer seul. Doublant assez vite le vaisseau de la compagnie qui s'était stoppé, il ne manqua pas évidemment de les provoquer, mélangeant insultes et autres gestes obscènes face à tout l'équipage qui le regardait leur passer sous le nez.
S'éloignant d'eux peu à peu, il disparut de leur vue bien assez vite, s'engouffrant enfin dans les décombres de Clockwork Island.
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