Suite des événements joués ici.
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- Et on brique le pont ! Et on brique le pont ! Et mieux que ça ! Et plus vite !
Soudain, la perspective d'être resté sur Clockwork Island pour être lynché par la population paraissait bien plus agréable. Trois jours qu'il trimait dur, une seconde dans les cordage, la suivante avec un balai dans la main, pour se retrouver ensuite à devoir aider en cuisine. Il n'y connaissait rien pourtant rien en cuisine, mais les hommes manquaient parmi l'équipage de Sliman, nombreux avaient été massacrés par des hommes poissons sur l'île qu'ils venaient de quitter.
Par conséquent, il fallait faire avec les moyens du bord. Manoeuvrer un trois mâts avec moins d'une trentaine d'hommes relevait de la prouesse. D'autant plus quand le capitaine et son second n'en branlait pas une. Elle, Dean Merry, était l'épouse du capitaine. Une seconde tyrannique qui était sans cesse derrière les hommes pour leur dire qu'ils ne travaillaient pas assez, même quand ces derniers n'avaient pas dormi depuis vingt-quatre heures.
- Et la vaisselle va se faire tout seul ? Toi, toi, et toi, vous voilà préposés ! Faites moi dix pompes avant pour me prouver à quel point vous êtes vigoureux !
Pauvre Joe, il avait été désigné parmi les trois malheureux. Tous se mirent en position pour faire les pompes, Joe, qui venait de briquer le pont, glissa sur le sol humide et s'affala à plat ventre.
- Pour la peine toi tu m'en feras vingt !
Impitoyable, elle était impitoyable. Parfois, quand le capitaine n'était pas occupé à aiguiser ses curieuses lames, il allait lui dire qu'elle était trop dure. Son épouse se chargeait bien de lui dire de se mêler de ce qui le regarde. On disait de Sliman J. Jack qu'il était un pirate redoutable et redouté, mais il ne faisait pas le poids face à sa bonne femme, n'osant jamais lui tenir tête.
Les pompes effectuées avec peine, le cafard suivit ses camarades jusqu'en cuisine. Il y avait toujours quelque chose à faire sur le vaisseau. Mais l'un dans l'autre, la corvée de vaisselle était une bonne planque, la seconde du capitaine ne descendait que rarement en cuisine, elle préférait gueuler sur ses hommes tout en étant au grand air.
- Tu devrais pas flemmarder toi, la Red Lady va te gronder autrement.
Tandis que ses deux camarades de corvée étaient affairés à laver les assiettes, le forban lui, s'était assis pour se reposer la tête contre la table. Il ne savait pas depuis combien de temps il n'avait pas dormi.
- Gronder ? Mais vous avez quel âge ?
Même les matelots les plus robustes finissaient par régresser au stade infantile à force d'être confronté à la colère de leur impitoyable seconde en chef. Elle était si rude qu'elle brisait le mental de ses hommes, la voyant comme une matriarche folle qu'il ne fallait jamais contrarier. Seulement, Joe, misogyne comme savaient l'être les pirates, se foutait ouvertement des ordres d'une bonne femme. Tout du moins, aussi longtemps qu'elle n'était pas à côté de lui pour lui crier dessus. Courageux, mais pas téméraire.
Des bruits de pas se firent entendre, quelqu'un approchait des cuisines. Ouvrant les yeux d'un coup, le cafard craignait qu'il s'agisse de Merry. Bousculant les deux autres pirates qui avaient presque fini la vaisselle, il fit semblant de bosser comme jamais il ne l'avait fait auparavant.
- Allons les gars ! On arrête de bâillonner aux corbeilles ! C'est moi qui fait la vaisselle tout seul depuis tout à l'heure.
Qu'il pouvait être sournois. Feignant, et surtout menteur, il était prêt à vendre ses collègues pirates juste pour paraître plus travailleur que les autres et ne pas s'attirer les foudres de la seconde en chef. La porte de l'étroite cuisine s'ouvrit.
- Ça fait plaisir de voir un moussaillon aussi énergique que toi ! Pour la peine je te laisse en charge de faire le repas pour ce soir ! Et si c'est dégueulasse, on te fout par dessus bord !
Lui qui était à peine assez doué pour faire cuire une sardine au feu de bois, le voilà qui était bombardé responsable des repas pour trente personnes. Il avait plutôt intérêt à ce que ça soit fait en temps et en heure. Les deux gaillards qui venaient de terminer la vaisselle lui tapotèrent le dos en quittant la cuisine, lui souhaitant bonne chance. Dean Merry ne plaisantait pas quand il s'agissait de nourriture.
Une larme de dépit coula sur la joue du cafard.
Dernière édition par Joe Biutag le Jeu 24 Mar 2016 - 9:44, édité 1 fois