Ça m'apprendra à être trop bouffie de certitudes, pour une fois dans ma vie j'aurais mieux fait d'écouter.
- Ici, on manque de barricades ! APPORTEZ PLUS DE SACS DE SABLE !!
- TROIS PIÈCES D'ARTILLERIE PLUS EN AMONT ! UNE COULEUVRINE AU CENTRE... JE VEUX TOUS LES MORTIERS...
Immobile face à la pagaille militaire qui vient désordonner la plage nord de l'île, déserte hier encore, j'observe les hordes de tuniques blanches et bleues de la Marine grouiller dans une zizanie rocambolesque et s'évertuer à bâtir des positions pour défendre différents points stratégiques dont l'importance m'échappe. Amusée, je ne peux m'empêcher de différencier les fourmis dans leurs tâches : entre ceux qui donnent des ordres et beuglent comme pas possible, ceux qui se baladent avec toutes sortes d'armureries sur les épaules et les autres qui s'épuisent à porter sur le dos d'épais sacs de sable en courant tous azimuts pour respecter les ordres de leurs supérieurs. Les yeux encore voilés de sommeil, j'avais découvert ce spectacle tout en continuant à marcher en compagnie de mes semblables, ces autres corbeaux vêtus de noir qui, comme moi, ne participeraient pas à ce charnier. Sans même m'en rendre compte, j'avais alors ralenti le pas jusqu'à me stopper totalement en cherchant des yeux les voiles brunes à l'horizon, encore si lointaine à l'oeil nu, mais désespérément plus proches à chaque minute écoulée. J'avais alors remarqué à quel point la tension était palpable dans l'air, mon regard étant furtivement rejoint par des dizaines, des centaines d'autres, par les yeux innocents des mousses participant à leur première bataille et les regards des officiers endurcis par le sang et la chair qu'ils ont dû taillader maintes fois. Hormis l'odeur de poudre à canon, je pouvais aussi reconnaître celle de la peur et celle de la mort. Au vu du nombre de voiles noires qui voguaient au loin, nous ne possédions clairement pas l'avantage et les dogmes que je m'étais bâti commençaient lentement à s'effilocher.
- Nous devons y aller. vient soudain grommeler James en m'arrachant à mes funestes pensées en me saisissant l'épaule d'une poigne sèche pour détourner mon regard hébété de l'océan.
Reprenant donc la route, je reste néanmoins pensive, récapitulant l'enchaînement des derniers événements pour faire un peu de ménage dans mon esprit. Arrivés dans la nuit, les quelques régiments envoyés pour nous défendre avaient à peine eu le temps de mettre pied à terre et décharger leur matériel qu'ils devaient déjà, aux premières lueurs du jour, creuser des trancher et bâtir des fortifications pour accueillir les premiers navires pirates apparus à l'aube. C'était un martellement sur la porte de ma chambre qui m'avait réveillée en sursaut, m’accommodant d'un air furieux au moment d'accueillir le fauteur de trouble qui n'était autre que mon supérieur dont la mine grave me fit rapidement comprendre l'état de la situation. Je m'étais alors préparée aussi rapidement que possible pour expressément lever le camp en direction de la berge au nord de l'île, là où l'intégralité de l'équipe était censée se réunir. L'esprit encore embrumé par les quantités astronomiques de bière que j'avais pu avaler la veille au soir, j'avais difficilement progressé d'un pas lent aux côtés du vieillard dont la marche militaire et rigoureuse semblait impossible à suivre.
Remarquant enfin que mon jugement n'avait cessé d'être altéré par les différentes idées reçues ou préconçues que je m'étais faites du bonhomme, j'en étais finalement venue à le discerner en détail qu'au cours de notre course matinale, à moitié dans la pénombre du soleil levant. Cette fois-ci vêtu d'un ensemble gris passe-partout, le gaillard trainait aisément sa dégaine de Cipher Pol et communiquait une sorte de prestance, de charisme que j'avais d'abord eu du mal à identifier. Malgré tout, son regard ne se voulait pas dur et ses traits sévères, l'homme conservait, malgré ma lourdeur, une expression cordiale et presque chaleureuse.
- C'est une habitude, au CP8, de boire autant avant les batailles ? Tu sais, tu n'avais pas besoin de me suivre, petite. avait-il brisé le silence, un sourire en coin.
Bien évidemment, il n'avait pas pu s'empêcher de la ramener en faisant prévaloir son statut social, hautement supérieur, de chef d'équipe du CP9. Mais quand bien même j'aurais pu mal le prendre avec n'importe quel péquenaud de la division, ici le ton léger de Larson était nettement communicatif et, pour la première fois, je me retrouvais sans répartie, idiote.
- Tu verras, les gars de l'équipe peuvent parfois être un peu durs ou impolis, voire même hautains... mais c'est des braves gars.
- Ici, on manque de barricades ! APPORTEZ PLUS DE SACS DE SABLE !!
- TROIS PIÈCES D'ARTILLERIE PLUS EN AMONT ! UNE COULEUVRINE AU CENTRE... JE VEUX TOUS LES MORTIERS...
Immobile face à la pagaille militaire qui vient désordonner la plage nord de l'île, déserte hier encore, j'observe les hordes de tuniques blanches et bleues de la Marine grouiller dans une zizanie rocambolesque et s'évertuer à bâtir des positions pour défendre différents points stratégiques dont l'importance m'échappe. Amusée, je ne peux m'empêcher de différencier les fourmis dans leurs tâches : entre ceux qui donnent des ordres et beuglent comme pas possible, ceux qui se baladent avec toutes sortes d'armureries sur les épaules et les autres qui s'épuisent à porter sur le dos d'épais sacs de sable en courant tous azimuts pour respecter les ordres de leurs supérieurs. Les yeux encore voilés de sommeil, j'avais découvert ce spectacle tout en continuant à marcher en compagnie de mes semblables, ces autres corbeaux vêtus de noir qui, comme moi, ne participeraient pas à ce charnier. Sans même m'en rendre compte, j'avais alors ralenti le pas jusqu'à me stopper totalement en cherchant des yeux les voiles brunes à l'horizon, encore si lointaine à l'oeil nu, mais désespérément plus proches à chaque minute écoulée. J'avais alors remarqué à quel point la tension était palpable dans l'air, mon regard étant furtivement rejoint par des dizaines, des centaines d'autres, par les yeux innocents des mousses participant à leur première bataille et les regards des officiers endurcis par le sang et la chair qu'ils ont dû taillader maintes fois. Hormis l'odeur de poudre à canon, je pouvais aussi reconnaître celle de la peur et celle de la mort. Au vu du nombre de voiles noires qui voguaient au loin, nous ne possédions clairement pas l'avantage et les dogmes que je m'étais bâti commençaient lentement à s'effilocher.
- Nous devons y aller. vient soudain grommeler James en m'arrachant à mes funestes pensées en me saisissant l'épaule d'une poigne sèche pour détourner mon regard hébété de l'océan.
Reprenant donc la route, je reste néanmoins pensive, récapitulant l'enchaînement des derniers événements pour faire un peu de ménage dans mon esprit. Arrivés dans la nuit, les quelques régiments envoyés pour nous défendre avaient à peine eu le temps de mettre pied à terre et décharger leur matériel qu'ils devaient déjà, aux premières lueurs du jour, creuser des trancher et bâtir des fortifications pour accueillir les premiers navires pirates apparus à l'aube. C'était un martellement sur la porte de ma chambre qui m'avait réveillée en sursaut, m’accommodant d'un air furieux au moment d'accueillir le fauteur de trouble qui n'était autre que mon supérieur dont la mine grave me fit rapidement comprendre l'état de la situation. Je m'étais alors préparée aussi rapidement que possible pour expressément lever le camp en direction de la berge au nord de l'île, là où l'intégralité de l'équipe était censée se réunir. L'esprit encore embrumé par les quantités astronomiques de bière que j'avais pu avaler la veille au soir, j'avais difficilement progressé d'un pas lent aux côtés du vieillard dont la marche militaire et rigoureuse semblait impossible à suivre.
Remarquant enfin que mon jugement n'avait cessé d'être altéré par les différentes idées reçues ou préconçues que je m'étais faites du bonhomme, j'en étais finalement venue à le discerner en détail qu'au cours de notre course matinale, à moitié dans la pénombre du soleil levant. Cette fois-ci vêtu d'un ensemble gris passe-partout, le gaillard trainait aisément sa dégaine de Cipher Pol et communiquait une sorte de prestance, de charisme que j'avais d'abord eu du mal à identifier. Malgré tout, son regard ne se voulait pas dur et ses traits sévères, l'homme conservait, malgré ma lourdeur, une expression cordiale et presque chaleureuse.
- Spoiler:
- C'est une habitude, au CP8, de boire autant avant les batailles ? Tu sais, tu n'avais pas besoin de me suivre, petite. avait-il brisé le silence, un sourire en coin.
Bien évidemment, il n'avait pas pu s'empêcher de la ramener en faisant prévaloir son statut social, hautement supérieur, de chef d'équipe du CP9. Mais quand bien même j'aurais pu mal le prendre avec n'importe quel péquenaud de la division, ici le ton léger de Larson était nettement communicatif et, pour la première fois, je me retrouvais sans répartie, idiote.
- Tu verras, les gars de l'équipe peuvent parfois être un peu durs ou impolis, voire même hautains... mais c'est des braves gars.
Dernière édition par Annabella Sweetsong le Sam 11 Juin 2016 - 18:30, édité 2 fois