Posté Lun 30 Mai 2016 - 5:49 par Joe Biutag
Afin de ponctuer une nouvelle nuit de débauche orgiaque plus ensanglantée qu'à l'accoutumée, les oiseaux chantaient. À l'horizon, les premiers rayons de soleil commençaient à briller tandis que les Blattards couverts de sang se dirigeaient vers les quais de bon matin ne croisant personne. Et pour cause, à cinq heure du matin, les honnêtes gens et même les moins honnêtes somnolaient.
C'était aussi l'heure à laquelle Zujo se levait. Extirpé du dortoir du "Grouillant" là où il passait ses nuits, il sortit sur le pont afin d'humer l'air frais et goûter à la rosée du matin tout en étirant ses muscles.
Ses étirements tournèrent court puisqu'il se retrouva vite les bras balants, dépité de ce qu'il apercevait devant lui. Le cafard suivi de ses dix huit hommes paradaient fièrement en arborant le sang de leurs ennemis qui couvrait leurs vêtements ainsi que les bandages des blessés.
- Note à moi même. Ne jamais les laisser seuls en compagnie de Joe.
Face à ce spectacle pour le moins inquiétait, le chasseur fut néanmoins rassuré de voir que personne n'avait l'air mal en point. Cependant il craignait le pire. Généralement quand une bande de pirates revenait dans cet état, c'est que le pire était à prévoir. Pourtant, le cafard était tout sourire tel le dernier des imbéciles heureux et ses hommes semblaient de bonne humeur.
- Joe je jure que si tu es retourné faire chier des hommes du malvoulant je mets les voiles.
Baillant, son capitaine fit non de la tête après être monté à bord. Grite vint à lui attiré par l'odeur du sang et lui lécha la main rougie du sang de King Arthus dont les boyaux avaient explosé au contact des balles qui lui avaient transpercé la panse.
- Mais non mais non, pour qui tu me prends ?
Trop poli pour répondre à une telle question, Zujo se contenta de faire silence.
- Je viens pour rembourser ton prêt.
Alors, l'ancien second du capitaine commença à faire quelques déductions. L'hypothèse la plus probable dans sa tête étant que Joe se serait servi de son argent pour parier, que l'opération aurait échoué, justifiant les vêtements couverts de sang. En somme, un braquage.
Soupirant, le chasseur monta dans les cordages avec la ferme intention de déplier les voiles comme il l'avait promis.
- Pas envie d'être impliqué dans un braquage d'établissement pirate, je fut honoré de te cotoyer tout ça tout ça.
Devant ce spectacle, Joe se mit à rire légèrement. Un de ses hommes poursuivit la conversation à sa place.
- Y'pas d'braquage qui tienne Zujo ! On a buté un équipage pirate entier sans témoin.
Avant de se décider à descendre, Zujo fixa Joe pour essayer de voir dans son regard si il cachait quelque chose. Apparemment, il ne remarqua rien de plus pernicieux que d'habitude dans le blanc de l'oeil de son capitaine.
Une fois redescendu, Joe et ses hommes avaient fini par le persuader de les suivre plus loin à quai avant de montrer du doigt l'une des nombreuses embarcations amarrées dans le coin.
- Tiens con de chasseur ! Si tu veux mettre les voiles, prend ce navire là. C'est le tien.
C'était ainsi que le cafard l'avait remboursé. Trop radin pour acheter un nouveau vaisseau, et n'en ayant de toutes manières par les moyens, il avait alors décidé d'investir deux millions de yen en gnôle pour anéantir un équipage et leur piquer leur bien.
Cela dit, l'affaire n'était pas pliée. Sur le pont, trois matelots firent une drôle de tête en voyant s'approcher une vingtaine de pirates aussi douteux.
- Eh dites ! Dégagez voir de là ! C'est le bateau de King Arthus ça, on touche pas.
Essuyant les rires des Blattards, les trois hommes comprirent que quelque chose s'était passé.
- Ton capitaine est mort. Le reste de l'équipage aussi. Crise cardiaque collective hin-hin.
Avec tout le sang qui recouvrait les vêtements des Blattards, les derniers matelots des Merlans enchanteurs savaient qu'un règlement de compte avait eu lieu, et qu'ils n'en étaient pas sorti gagnant.
- Merde alors....
Un grand blond aux cheveux mal peignés se gratta le cuir chevelu relevant une nuée de pélicules. Ne perdant pas le Nord suite à cette terrible nouvelle, il demanda l'air de rien :
- Et euh... Vous recrutez ?
Ce fut ainsi que trois nouvelles recrues s'ajoutèrent à la quarantaine engagés par Zujo la veille durant l'après-midi. Ainsi se faisaient les prises lorsque le cafard était en charge des opérations. Pas de bataille, pas cris si ce n'est l'agonie des malheureux, pas de poudre. Tout en sournoiserie, sans victime au sein des Blattards. Joe n'avait que sa ruse perfide à faire valoir. Elle l'avait amené jusqu'à Shabondy, il espérait bien qu'elle le mène plus loin dans un avenir proche.
Deux jours après le bienheureux incident induit par le cafard et ses hommes, les Blattards, passés de vingt à soixante et un hommes clamèrent à l'unisson que le temps de la chasse aux esclaves et aux pillages en mer était enfin venu.
Joe commençait à se lasser de sa vie "d'honnête" commerçant. Sa boutique faisait des affaires correctes puisque amputée d'une grande partie de la concurrence qu'il avait annihilée il y a de cela environ une semaine. Mais si il était un esclavagiste, il restait avant tout un pirate. L'appel de la mer était inévitable.
- Avec le Log Pose pour Union John trouvé à bord du "Nuisible", on est bon pour ratisser la troisième voie et faire un joli plein dans les stocks d'esclaves ah-ah !
Il s'en frottait les mains d'avance. Plus que pour les impératifs de son commerce, c'était un esprit de revanche qui l'animait. Cette troisième voie qui lui en avait fait baver allait bientôt subir son courroux. Renforcé de par un arsenal plus conséquent et surtout d'un équipage pour l'épauler, son trajet serait assurément plus agréable. Tout du moins, c'est ce qu'il se plaisait à croire. Devenu confiant à force de victoires, il finissait par oublier que Grand Line était une mer particulièrement traître et ne faisait pas de cadeaux à ses habitués.
La décision de partir fut prise. Toutefois, avant cela, le cafard se devait de déterminer quels seraient les hommes chargés de rester sur Shabondy pour administrer la boutique en son absence. Cela n'était pas une mince affaire. Pour gérer ses comptes, il se voyait mal laisser un voleur en puissance tenir la caisse durant plusieurs mois d'absence. Avoir un équipage conséquent était une chose, ne pas lui faire confiance était une tare certaine.
Passant en revu tous ses hommes, le cafard se refusa catégoriquement à employer l'une des nouvelles recrues à la tâche. Zujo partirait avec lui en tant que capitaine de la seconde embarcation de sa flotte. Restait dix-huit gaillards. Mettant de côté ceux susceptibles de le trahir pour moins d'un million de berries, il ne restait qu'Olaf. Cependant, il n'allait pas se priver d'un cuistot à bord, surtout si ce dernier était celui qui s'occupait en plus de soigner les gangrènes entre deux ragoûts. Il lui fallait embaucher quelqu'un de confiance. Seulement, paranoïaque de par nature, considérer une telle qualité chez ses semblables relevait de l'improbable.
En charge de nourrir les esclaves, le cafard mis la main à la pâte une fois encore. Il tenait à ce que ses biens soient en bon état et veillait à ce qu'ils soient nourris convenablement. La trentaine d'esclaves rachitiques qui appartenaient à l'établissement du malvoulant commençaient à reprendre du poids. Elles reprenaient bonne mine et de tout le stock d'esclaves, étaient les seules à s'estimer heureux d'être les captives du cafard. Elles avaient connu l'enfer, les abus et les maltraitances. Au moins, à "Enchaînés et à Vendre", elles étaient bien nourries, avaient une cellule correcte avec un coin où dormir, le minimum nécessaire pour leur hygiène et même de la lecture.
Elles étaient les seules à oser adresser la parole à leur nouveau maître qui ne les intimidait pas le moins du monde.
- Dis voir le maître, t'aurais pas des bouquins avec les images, je sais lire que t'chi moi.
- Et tu t'étonnes d'être esclave après hinhinhin !
Nombreuses furent les furies à rire en coeur suite à la répartie sordide du capitaine des Blattards. Après avoir distribué tous les bols, une demoiselle l'interpella alors qu'il s'apprêtait à sortir du sous-sol de sa boutique où se trouvaient les deux-cent cachots.
- Vous devriez faire attention, y'a une épidémie de dysenterie qui couve. Il faudrait peut-être l'endiguer en vitesse.
Cette information glaça le sang du cafard. Il suffisait en effet d'une simple maladie contagieuse pour décimer sa marchandise. Il se retourna vers l'esclave qui affichait un air froid et triste. Elle aussi faisait partie des anciennes esclaves du malvoulant, mais elle semblait plus vive d'esprit que ses comparses.
- Comment tu sais ça toi ?