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Il parle avec les animaux.

Il plut dans la matinée, peu après que les foyers du QG eurent été remplis de charbon de bois. Mais le temps que je pris pour me préparer, le ciel s’était dégagé, et au crépuscule la fraîcheur de la fine brume battait son plein. Pour ceux dont c’était le jour de congé, le temps se prêtait à une virée dans l’une des villes voisines, ou la bière, sombre et mousseuse, coulait à flots des tonneaux et des barriques dans les pichets. Pour le déjeuner, des carcasses entières de porcs et de moutons rôtissaient sur de grandes broches de fer, répandant d’odorants nuages de fumée argentée sur la toiture de la taverne. Pour ma part, j’étais reparti en campagne dans mon interminable guerre contre la faim, la viande et les épais vêtements chauds.

Je décidai de partir tôt, au moment où les étoiles étaient encore de pâles luminaires dans les cieux. Même s’il faisait encore frais, je pouvais sentir un vent chaud souffler du sud. La journée s’annonçait longue mais chaude pour la saison. En regardant au loin, je vis une brume bleutée s’attarder sur l’eau et, plus loin, sur les forêts de l’île voisine. Le vent apportait une odeur de marée, non désagréable. Chaque semaine, je restai quatre jours au QG de la marine, plongé dans la paperasse et examinant les affaires en cours ou futures. Chaque jour, j’étais pris de cette envie d’emmener mon esprit dans une vaste clairière et de m’asseoir pour me parler à moi-même.

Quelques minutes avant mon arrivée sur l’île, je m’habillai rapidement. Je choisis une pomme dans la coupe posée à côté de moi et sorti sur le pont pour profiter d’une dernière brise avant de poser pied à terre. Alors que je croquais la chair tendre et acide, je vis quelqu’un attendre au loin, le long du port bordé de filets, de petits navires marchands. Pendant quelques minutes, je ne fis rien d’autre que d’observer la petite ville se rapprocher de plus en plus de moi. Posant ma pomme à peine entamée en équilibre sur une balustrade, je descendis les marches d’un pas léger, m’élançant à la rencontre du vieil homme du port.

« Je ne resterai pas très longtemps. Combien l’amarrage coûte-il pour la matinée ? »

« Vous êtes de la marine ? Pour vous, c’est gratuit ! Allez-y, je prendrai soin de votre bateau ».


Dernière édition par Gilgamesh le Mer 8 Juin 2016 - 12:35, édité 1 fois
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La petite île que j’avais choisie se trouvait à environ deux heures de navigation du QG, dans de petites collines verdoyantes. De ce côté de la mer, le climat n’est pas aussi humide ni aussi brumeux que celui de South Blue. Et au cœur de l’été il peut  y faire très chaud. La chaleur qui s’élève de la terre danse en ondes miroitantes le long des crêtes et soulève des nuages de poussière. Mais pas aujourd’hui. C’est une belle île. On y trouve en abondance de l’eau des rivières, sources et étangs. Les arbres poussent haut et les bois regorgent de plantes et autres baies. Un paysan pourrait se considéré comme fortuné de posséder de telles plantations. De fait, j’en connais beaucoup qui possèdent bien moins et se jugent plus riches. C’est donc pour moi un mystère que cette île ne soit pas plus habitée et exploitée.

Les bâtiments étaient construits en bois sur les rives escarpées de la mer. La plupart des commerces avaient choisi de s’établir au bord de l’eau. La forêt n’avait jamais été entièrement défrichée, certaines habitations étaient dispersées parmi les arbres. Cela renforçait le sentiment de discrétion, assurément, mais cela conférait aussi aux lieux une atmosphère de silence. Je me remis lentement en route, observant le village en quête d’un signe commercial à mon approche. M’arrêtant devant un premier édifice, je tombai face à un grand bâtiment au toit de chaume. J’attendais son ouverture tandis qu’un étrange pressentiment s’emparait de moi. Fronçant les sourcils, je scrutai les bâtiments comme si quelque chose de grave allait se produire.
Sentant cette atmosphère peser sur mes épaules, je pris soin de me retourner pour…

« Mwiiiiiiiashhhhh ! »

Un hurlement ! Un cri strident, lugubre, comme si quelqu’un venait de se faire égorger juste sous mes yeux. Etait-ce un homme ? D’où cela pouvait-il bien provenir ?

« Dis donc, vous ! Vous ne pouvez pas faire attention ? Espèce de gourdin ! »

« Excusez-moi, madame. Je ne vous avais pas vu. Je vous prie de me pardonner pour votre chat ».

Un chat. J’avais simplement posé le pied sur la queue d’un chat. Était-ce la source de mes pressentiments ? Possible, je ne ressentais alors plus rien. Cela valait bien la peine de me sentir acculé.

« Maintenant que vous m’avez causé du tort, il va falloir payer ! Mon adorable petit chat à la queue cassée, à cause de vous ! Il va falloir payer ! »
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« Payer ? Et comment voulez-vous que je p… »

Dans un rapide mouvement, sans une once d’hésitation et sans se trahir une seule seconde, la grand-mère m’empoigna par le col et me jeta à terre avec un déhanché hors de l’ordinaire pour son âge. Je me retrouvai là, dos à terre sur un sol sablonneux et encore humide. Cependant, je n’étais pris ni d’un sentiment de honte, ni de colère. J’avais été distrais, emporté par une chute dont je ne faisais pas attention. Mes yeux étaient en effet encore portés sur la dame qui, loin d’être seule, était accompagné par une dizaine de chats. Etaient-ils sauvages ? Ils n’en avaient pas l’air, mais se comportaient plutôt comme des animaux de compagnies fidèles. C’est encore encré dans cette stupeur, cet instinct d’étrangeté, que je pris le temps de me remettre debout tout en m’inclinant devant la vieille dame.

« Tu devras payer. Et je sais comment. Je vends du thé, probablement le meilleur de toute la région. Les plus belles feuilles poussent sur cette île. Plus la feuille pousse en altitude, meilleure elle se trouve être pour un thé d’excellence. Il se trouve une plante, très rare, appelée le Gyoukouro. Ces feuilles ne poussent que dans les hautes altitudes, sur le flanc Sud de la montagne. Si tu montes m’en chercher, si tu me ramène plusieurs pousses de cette plante, alors tu seras pardonné et tu auras payé ta dette envers moi. »

Je savais que cette expédition allait être dangereuse, d’autant plus que le temps avait brutalement et soudainement viré. Les premières gouttes s’écrasèrent sur mon visage, mais je ne bougeai pas. Les nuages s’accumulaient, teintant les cieux de noir et de violet, telle une plaie d’où la pluie ruisselait. Les ténèbres tournoyaient autour de moi, autour de la montagne elle-même sous la forme d’une brume noire qui surgissait de nulle part en bouillonnant. Il se passa un moment avant que je ne puisse parler.

« Très bien, j’accepte. »
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Je marche. Droit devant moi, grimpant cette rude montagne en quête d’une feuille, une simple feuille. Certes simple, mais représentant également la plus grande importance pour une personne. Il fut un temps ou… mais cela n’a pas d’importance. Avancer, trouver ce que je recherche ; ces choses me sont alors importantes. Tout le reste peu disparaître. Je contemple les gouttes de pluie qui brillent d’un éclat dur dans le ciel glacé. Si j’avais eu plus de temps, je conjurerais un feu pour me réchauffer. Au lieu de cela, je regarde les cieux accomplir leur impénétrable tâche. Je regarde le givre sur les rochers et j’y vois la trace d’une vie. Plus j’avançais, plus la montagne devenait difficile d’accès. A présent, je comprenais pourquoi cette plante était si difficile à trouver. La température changea rapidement, et les intempéries aussi.

Après quelques heures de marche, je ne savais où aller. La pluie avait cessé et avait laissé place à un ciel bleuté surplombant les nuages. Je ne savais nullement à quelle hauteur je me trouvais, mais l’atmosphère de cette île était quelque peu spéciale. Il m’était possible de contempler la condensation des mers de North Blue depuis la cime luxuriante des rochers et, avec la plus précise des délicatesses, je touchais de la paume les nuages glacés. Je n’étais pas monté très haut, et j’étais déjà suffisamment avancé pour ne plus pouvoir distinguer la vallée et le village sous mes pieds.

J’allais ou mes pas me conduisaient, à travers roche et forêt, en quête de cette plante miraculeuse. Balayant les contrées d’un regard agile et précis, il m’était alors impossible de la trouver. Ma promesse ne me permettait pas de rebrousser chemin, je ne pouvais me permettre de retourner dans ce village les mains vides.

Alors que ma patience me conseillait d’abandonner, une étrange grotte se présentait devant moi. La plante recherchée ne s’y trouvait probablement pas, mais je n’avais rien à perdre à aller y jeter un coup d’œil. Et, je me devais de prendre quelques instants pour me réchauffer, ne serait-ce que pour être certain d’avoir l’énergie demandée pour revenir sur mes pas.
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J'avançais d'un pas lent mais sûr. L'étroitesse des lieux ne me laissais présager rien de bon, mais l'éclat argenté des rochers ainsi que le reflet exaltant du soleil sur les parois dorées de la grotte m’ensorcelait. J'étais pris comme dans un rêve, une beauté lumineuse qui ne s'empêchait de m'attirer à elle comme le doux chant d'une sirène égarée. A la différence des grottes traditionnelles, celle-ci m'avait l'air non seulement familière, mais également amicale. Plus ma route progressait et moins celle-ci se trouvait obscure. Aucun danger ne se dressait sur mon chemin, malgré la grande distance parcourue depuis mes premiers pas. Cependant, vint le moment ou un sentiment nouveau prit le pas sur les autres, ou ma confiance se retrouvait ébranlée. Le confinement, ce sentiment de se retrouver acculé. En effet, bien que relativement étroite dès son entrée, la grotte se faisait de moins en moins praticable, si bien qu'il me fallut me mettre à genoux, ramper pour poursuivre mon périple.

La température était fraîche, proche du froid. Cependant, le pouvais ressentir la sueur glisser le long de mon dos, de mon front même. Je n'avais pas chaud, mais je me sentais de plus en plus lourd, comme si l'oxygène me manquait. Plus j'avançai, et plus il m'était difficile de continuer. Peut-être était-ce pour cela qu'aucun danger ne se faisait ressentir ? Peut-être qu'aucune créature ne pouvait simplement vivre ici ? S'y déplacer ? Peut m'importait, il me suffisait d'arriver au bout pour le savoir.

Une fois à destination, l'air m'était revenue, comme si une grande aération permettait d'apporter et de brasser les courants montagneux.Ce coin de la grotte était comme une petite construction circulaire de torchis badigeonné à la chaux. Le sol de terre battue avait été crée par l'homme, mais non entretenu depuis des années. Tout avait semblé neuf, mais plus rien ne l'était alors. Mais ce n'était pas tout. Une montagne, dans la montagne. Une montagne d'os, de squelettes en état de décomposition. Des hommes, des femmes, l'endroit ressemblait plus à un cimetière qu'autre chose. Qui étaient-ils ? Je ne le savais pas. A en juger par leurs vêtements délabrés mais encore entiers, j'avais affaire à des pirates. Je m'étais aventuré si loin, je m'étais volontairement piégé pour ne trouver qu'une mort d'une autre millénaire.

Abattu et découragé, je cherchais une consolation à l'heure du besoin. Laissé à moi-même, je crois que je serais volontiers resté pour toujours au QG, à l'abri de tout cela. Mais je me devais d'accomplir mon oeuvre. J'étais prêt à affronter le monde des hommes, à faire face à toute l'adversité qui se présenterait devant moi.
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Approchant, scrutant la caverne avec une précision chirurgicale, certains détails pouvaient me sauter aux yeux. Les corps décomposés des pirates portaient encore, pour certains, des objets et aux ornements probablement inintéressants. Cependant, parmi les rares trésors présents, d’autres pouvaient se révéler d’une importance peu négligeable. Prenant le temps de décortiquer ce qui se trouvait devant moi, je tombai rapidement sur un parchemin, ainsi qu’une clé accrochée au cou squelettique qui semblait être celui d’un homme en bien mauvais état. En effet, la plupart de ses membres étaient brisés, broyés ou arrachés. Si ce massacre avait eu lieu durant leur vivant, cet endroit renfermait alors une effroyable douleur, comparable aux portes de l’enfer, aux flammes du diable.

Peu m’importait ce qui s’était passé en ces lieux, je me devais simplement de ne pas m’y éterniser. Mon périple n’était pas achevé, et je me devais de redescendre cette montagne avant le levé de la lune. Mon visage pouvait encore ressentir la douceur du soleil à travers les parois  arides qui m’entouraient, je savais qu’il faisait encore jour, mais je savais surtout qu’une sortie se présentait non loin de moi. La roche était fine, une légère brise pouvait caresser mes chevilles. Il me suffisait de trouver sa provenance.

Je ne mis qu’un temps insignifiant pour trouver la sortie. En effet, cette brise printanière glissait à travers la roche comme l’eau glisse sur un calme fleuve endormi. Avec le temps, la corrosion avait probablement fragilisé l’endroit, qui devait avoir plusieurs milliers d’années maintenant.
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Je scrutais avec attention la partie fragile de la parois argentée. Même si les rayons du soleils ne savent traverser, il me suffisait de poser la main contre le mur pour ressentir sa présence, son amour indescriptible parcourant mon corps et me couvrant d'un léger frisson des plus agréables. Je savais parfaitement qu'il allait m'être relativement facile de sortir d'ici. Il me suffisait de détruire ce mur, passer au travers cette fine couche de roche pour atteindre la libération, pour goûter à nouveau à la fraîcheur de la brise qui m'attendait.

Première tentative, un échec. Seconde tentative, échec. Le froid ambiant engourdissait mes membres, il m'était plus difficile que prévu d'user de mon potentiel musculaire. Cherchant une solution alternative, je trouvai un sabre, relativement ancien, aux côtés de l'un des corps. La lame était vieille, émoussée, mais devait probablement suffire à ébrécher la roche, alors peu solide. Après une courte concentration, je donnai un coup net et précis, créant ainsi une brèche. La lumière du jour m'apparaissait, telle une magnifique toile aux couleurs chaudes et exquises. Une fois ébranlé, il était aisé de faire tomber le reste de ce qui me séparait de la nature montagneuse.

Il ne me restait plus qu'à sortir, emportant avec moi le parchemin ainsi que la clé trouvés plus tôt. Profitant d'un court instant pour laisser la chaleur du soleil caresser mon épiderme, je me repris vite en main. Piqué par le curiosité enfantine que laissait cette trouvaille dans mon esprit, ce fut la première chose que je me devais de faire avant de poursuivre ma route.
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Défaisant le nœud du parchemin, je ne me rendis compte de ce que cela représentait seulement après avoir lu quelques lignes.

« Si un autre lis ses lignes en ce moment-même, cela reviendrait à dire que je suis soit mort, soit complètement idiot d’avoir perdu ce parchemin. Quoiqu’il en soit, brigand que tu dois être, je paris qu’après avoir lu cette lettre, tu saliveras et tu baveras comme un bébé qui réclame le sein de sa mère ! Et bon dieux, pourvu que ce ne soit pas un putain de Marine qui tombe dessus, foi au seigneur.

J’ai passé ma putain de vie de pirate à tourner en rond dans toutes les mers des blues, à la recherche de quelque chose… et à vrai dire, je ne me souviens même plus de quoi. Putain de mémoire de vieux gâteux ! J’en ai maté des pirates dans ma vie, et des marines aussi tiens, c’était le bon temps. Aujourd’hui, je ne suis plus bon à rien, je ne sais même pas si je serais capable de reprendre la mer un jour. Mais tout cela, je l’ai prévu depuis belles lurettes, je l’ai bien prévue, cette putain de vieillesse de merde. Je ne laisserais pas grand-chose derrière moi, un bateau complètement moisi, quelques pièces d’or… même mon petit singe Timmy a réussi à crever avant moi. Une chance pour lui, paix à son âme. Enfin bref.

Tout ça pour dire que, si jamais ce parchemin est retrouvé par quelqu’un, cela voudra dire que mon trésor est toujours là où je l’ai laissé. Piller les petites villes des blues était plutôt facile, même si cela ne rapportait pas toujours grand-chose. Enfin, cela me suffit à amasser quelques millions de Berries ceci-dit.

Déchiffre cette carte, cette énigme, et tu seras capable de mettre la main sur mon bien le plus précieux. Dans la mesure où ma mémoire de merde en oublie le fonctionnement même de la logique, cela de vrai être un  jeu d’enfant. Sauf pour quelqu’un de plus stupide que moi. »
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128.14.15.18.4-97.5.19.20-628.14.15.18.4


Dernière édition par Gilgamesh le Sam 11 Juin 2016 - 8:58, édité 1 fois
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En y réfléchissant, cette énigme se trouvait être des plus faciles à résoudre. Était-ce là réellement une carte destinée à cacher un trésor de grande valeur ? Cela paraissait un peu trop facile à mon goût. Evidemment, ces chiffres représentaient la trajectoire à suivre pour atteindre le lieux indiqué. Les nombres 14, 15, 18 et 4 revenant deux fois, il ne pouvait s'agir que d'une seule chose, un mot. En associant les bons chiffres avec les bonnes lettres, il devenait alors aisé de trouvé le mot : NORD. En utilisant le même procédé, le mot EST devenait alors enfantin à découvrir. De ce fait, les 3 nombres restants ne pouvaient représenter qu'une seule chose, la distance à parcourir. Était-ce une mesure de distance ? Un nombre de pas ? Difficile à savoir.

Les arbres de la montagne étaient éveillés et s’agitaient au doux murmure d’un vent nerveusement agité comme sous l’effet d’une violente tempête, mais l’air demeurait calme. Des mots, des murmures incompréhensibles, un soufflement perturbant et désagréable se portait à mes oreilles. Un grincement sinistre, puis les buissons s’écartèrent, se couchant sur les côtés, comme séparés par la main d’un géant. Mais il n'en était rien. Il ne s'agissait là que de la manifestation de la nature et de la flore. Même si le soleil persistait, même si sa chaleur manifestait ma sérénité, le temps ne pouvait s'empêcher de se dégrader.
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Le blond de mes cheveux reflétait la tendre chaleur de l’astre de la vie. Le bleu de mes yeux s’irritait à la vue d’un ciel lumineux. Je restai là, pendant plusieurs minutes, laissant le souffle du vent se glisser au travers de ma chevelure. Même si celui-ci était quelque peu violent, la sensation restait agréable à sentir. Cependant, je ne pouvais me permettre de trop m’attarder. Je devais poursuivre ma quête, en commençant par suivre les indications que donnait cette carte. Les cartes aux trésors donnant généralement des indications en pas, je savais ce qu’il me restait à faire. De plus, il m’était dans tous les cas impossible de redescendre cette montagne sans avoir tenu ma promesse, sans avoir trouvé le Gyokoukou.

Je me remis donc en marche, suivant les indications de la carte. Mes premiers pas devaient donc être en direction du Nord. Pour contrer le vent et les feuillages, je marchai bras devant les yeux, sans pour autant perdre de vu ce qui se trouvait devant moi. Après quelques minutes à marche en forêt, il était temps de prendre une seconde direction, qui menait à un petit cratère rocheux, à l’extérieur des arbres. En levant la tête, je m’aperçus que j’étais dans l’alignement du sommet, et qu’un chemin permettait d’y arriver, visiblement sans trop de contraintes.

Arrivé à destination, je n’en cru pas mes yeux. Comment un endroit si haut, dans les montagnes, pouvait être aussi beau ? L’hiver, la neige et la glace devaient être rudes, ne pouvant laisser aucune trace de vie sur ces montagnes et pourtant, tout était vert, le sol, les arbres, les fleurs. Dès mon arrivée, j’avais déjà repéré la plante demandée par la vieille dame. C’était une sorte de fleur blanche, avec des feuilles proches de celles de l’épinard. Son parfum était fort, mais agréablement odorant. Son conseil était de n’en ramener qu’une dizaine de feuilles, pour ne pas risquer de briser l’écosystème me de cette merveille de rareté.

Quant au plan, lui, je pu le ranger dans mon sac, ne me servant plus à rien. Un seul arbre surplombait tous les autres. Plus haut, plus grand, plus large, il avait droit de regard sur l’ensemble de cette inattendue petite prairie, comme s’il la dominait, ou la protégeait. Sur ce même arbre, sur cet imposante masse de bois, se trouvait gravé un symbole, celui d’une croix.

Quoi de plus évident ?
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Je me trouvais là, à genoux devant le roi des arbres. Un petit coffre en main, verrouillé à l’aide d’une serrure. Mais cela m’était évident, je n’avais pas ramassé une clé pour rien. Je m’apprêtai à reboucher le trou qui se trouvait alors face à moi, pour rester respectueux envers cette nature sauvage et accueillante.  Remerciant cette terre sacrée pour ce don qu’elle venait de m’offrir, je décidai d’ouvrir le coffre en question.

Une seule chose se trouvait à l’intérieur. Un fruit. Mais pas n’importe quel fruit. Il me suffit de l’observer une seconde seulement pour m’en rendre compte ;  c’était là l’un des légendaires Fruit du Démon. Pourquoi un tel trésor était-il caché ici ? Dans un endroit plus ou moins facile d’accès ? Et plus étrange encore, pourquoi personne ne l’avait-il encore jamais trouvé ? Je ne le savais pas, et je n’avais pas envie de le savoir. Que devais-je faire avec ce fruit ? L’offrir à mes supérieurs ? Le vendre ? Non. J’avais choisi mon destin avant même de trouver ce fruit maudit. Ce même destin s’est scellé au moment où j’ai ramassé cette carte et cette clé. Il était temps de lui faire face, et de l’accepter.

Fermant les yeux, j’avalai ce Fruit de Démon en quelques bouchées seulement.

Rien. Je ne ressentais nul changement. Ma peau restait la même, mon esprit, mes membres. Je ne voyais là aucun changement. Etait-ce un véritable Fruit de Démon ? Un faux ? Difficile à savoir.
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Ma mission étant accomplie, ma promesse étant tenue, je pouvais à présent redescendre la montagne, plus lourd de quelques grammes que représentaient les feuilles de Gyokoukou. Avec ça, mamie devait avoir assez pour confectionner un délicieux thé vert.

La nuit commençait à tomber, mais le vent s’était grandement calmé. Plus de bourrasque, de pluie, tout était redevenu plus ou moins calme. Les premières étoiles commençaient à apparaître dans le ciel, le soleil laissant sa place à sa moitié lunaire. Le chemin inverse allait être beaucoup plus facile et rapide et, ce même dans un début d’obscurité.

Après une ou deux heures seulement, je me retrouvais en face de la maison, en face de ma destination. Elle était là, m'attendait devant le pas de sa porte. J’aurais pu tout simplement m’en aller, ne pas revenir et ignorer ma promesse, mais elle savait parfaitement que je n’en ferais rien. Elle était persuadée de mon retour, comme si cela était pour elle une évidance.

« Je savais que tu tiendrais ta promesse, je l’ai vu dans ton regard à la seconde même ou tu es parti. As-tu trouvé ce que je t’ai demandé ? »

« Je l’ai trouvé, c’est une plante magnifique. »

Je lui remis son bien, m’asseyant sur un petit tabouret pour me reposer et reprendre des forces. Elle me proposa un thé, que je pu refuser. Patientant seul dans l’une des trois seules pièces de sa maison, j’avais l’impression que les choses commençaient à devenir étranges.

« Tiens tiens, mais c’est monsieur je marche sur les queues de tout le monde qui revient…

-Qu’est-ce qu’il nous veut, lui ?

-Regarde, il n’ose même pas nous regarder dans les yeux, ce minable ».


Je… Qu’est-ce que… Je ne comprenais pas. Et pourtant, si, je comprenais tout, et c’était bien là le souci. Je pouvais non seulement entendre, mais également comprendre ses chats ! Comment diable arrivais-je à comprendre ce que les chats me disaient ? La panique. La panique fut ma première réaction, mais elle ne tarda pas à laisser place à la seconde, la compréhension et la logique. Finalement, il ne me fut pas longtemps pour cerner ce qui m’arrivait. Je venais de manger l’un des Fruits du Démon, et voilà quel était son pouvoir. Je pouvais comprendre, mais également parler aux animaux.

« Je m’excuse, pour tout à l’heure, de t’avoir marché sur la queue… »

« Oooh ? Mais c’est qu’il peut nous parler, l’humain. Excuses acceptées, nyihihi ».
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