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La crise des menottés

 
- Tu te souviens de la fois où on était dans une suite toi et moi ?

- Laquelle des fois ? La première ou la seconde ?

- Y en a eu deux ?

- Oui. La première fois, c'était en Février. Je me remettais de mon raid contre la base militaire d'Ashura. Vous êtes venue et nous avons fait les présentations. Et vous m'avez menacé de mort alors que j'étais déjà à l'article de la mort.

- Ah bon ? Vraiment ? M'en souviens pas. Mais ça me ressemble assez.

- La seconde c'était un mois plus tard, quand ma suite a été proprement canardée par les Autres. Vous m'avez sauvé la vie à l'occasion. Et encore menacé de mort.

- Oh ça, m'en souviens parfaitement. C'était super drôle.

- Pas pour moi. Donc vous comprenez pourquoi la perspective de vous et moi dans une suite royale m’incommode des masses ? Que voulez-vous, Bee ? Fouiner ?

- Naturellement. Et toi, tu prépares un mauvais coup ?

- Naturellement.

Je la laisse entrer. Recevoir une Commandante d’Élite aussi pointue et dangereuse que Midnight chez soi quand on s'appelle Loth Reich et qu'on planifie toujours plusieurs coups foireux n'est pas vraiment une bonne idée. J'avais pris des précautions cependant et fus prévenu de son arrivée imminente. Toute preuve fut transférée derrière la tapisserie murale de la douche qui cache une porte dérobée vers la suite voisine.
Elle s’assoit et prend ses aises, le Dard de la Mort.

- Où sont-elles ?

- "Elles" qui ?

- La dernière fois, y avait pas mal de bimbos ici.

- La dernière fois, c'était les filles de Dena', pensai-je. Je ne fricote pas avec des escortes.

- Alors ? T'es seul ?

- Oui...

- Non. Il ne l'est pas.

J'hallucine.

- Votre visage me rappelle quelqu'un... Vous travaillez au port, c'est ça ?

- Aella Madoff. Directrice du Système d'Information à la Capitainerie.

- Oui, tout à fait !

- Loth m'a beaucoup parlé de vous.

- En bien ou en mal ?

- En mal, fatalement.

- Allons, soit plus aimable chéri. C'est grâce à des Marines comme la Commandante que je peux dormir sur mes deux oreilles en sachant notre royaume protégé et sûr. Soyez en remerciée, madame.

- Merci. Je fais juste mon devoir.

- Pfff, c'est grâce à moi que ce pays est sûr. Chérie. Ce dernier mot a dû mal à sortir de ma gorge.

- C'est pour ça que je t'aime !

Ne pousse pas trop sur la comédie. Qu'est-ce que tu fais, bon sang ?

- Donc vous deux ?

- Ce ne sont pas vos oignons.  

- C'est assez récent. Six mois. Un peu après cette histoire du Moine Hérétique. On s'est rencontré à l'opéra. Et la magie a opéré !

Ben voyons.

- Le héros de Boréa pour moi toute seule ! Dans la presse, il a l'air froid, vous savez. Mais quand on apprend à le connaitre, c'est un vrai boud'choux ! Un cœur tendre enrobé de chocolat.

- J'ai grand peine à imaginer.

- Moi aussi.  

- Allez, je sais que vous allez parler affaire et sécurité, je vous laisse. Merci encore Commandante et une prochaine fois, nous vous inviterons à dîner.

- J'en doute.  

- Ça veut dire que vous êtes la bienvenue !

- Merci, Aella.

- Je la raccompagne à l'ascenseur, je reviens, Bee. Faites comme chez vous mais n'oubliez pas que c'est chez moi.  

Bras dessus, bras dessous, nous sortons de la suite. Ses longs cheveux châtains cascadent de ses épaules à sa hanche et répandent dans son sillage un entêtant parfum. Mon numéro deux, le socle de toutes mes activités. Aella est une meneuse d'hommes extraordinaire, une planificatrice hors pair, une mathématicienne de génie. Mais je n'imaginais pas que la comédie faisait partie de ses talents.

- Non mais, tu as perdu la tête ? C'était quoi ce numéro ?

- Garde tes amis près de toi, tes ennemis encore plus.

- Quoi ? Tu aurais dû t'éclipser via la suite de Dena' ! Là tu lui as permis de me relier à toi, ça pourrait nous être préjudiciable dans le futur !

- J'en doute.

- Ne sois pas si hautaine ! Bee n'est pas n'importe quel Marine et tu le sais. Sans parler de sa sœur qui est trois fois pire qu'elle ! Elles passent ma vie au peigne fin, elles sont à l’affut de la moindre source d'information à glaner ! Elle va te placer sous surveillance ! C'est un vrai suicide ce que tu viens de faire !

- C'était le but.

- Pardon ?

- Je suis ton bouclier, je prends les coups à ta place.

- C'était censé être l'inverse !

- Plus maintenant, en tout cas, pas tant que nos affaires restent centralisées à Boréa. Avec Carcinomia sous notre contrôle, avec le lancement de Shadow Law, tu vas attirer de plus en plus l'attention. Les Tempiesta ne tarderont pas à t'envoyer des préleveurs d’impôts et si notre plan est toujours d'actualité, tu vas te retrouver au cœur d'une tempête. Je m'occupe d'accaparer l'attention de Midnight.

- Tu aurais dû m'en parler avant de faire ça.

- Aurais-tu donné ton aval ?

- Non.

- Alors j'ai bien fait. Ciao et préviens-moi avant de bouger.

Je la regarde s'éloigner avec un mélange d'exaspération et d'indignation. A bien des égards elle est plus douée que moi. Et rarement le génie va de pair avec l'humilité. C'est encore plus vrai chez elle. Travailler avec risque d'être un combat de tous les jours. Si je n'hésite pas à mâter la moindre velléité d'indiscipline chez mes hommes, la formule doit être toute autre pour gérer cette femme. Et j'espère la trouver très tôt.

- Comme ça on file le parfait amour ?

- Arrêtez, je vais finir par croire que vous êtes jalouse.  

- Je préfère encore souffrir de la lèpre.

- Haha. Dommage, vous ne savez pas ce que vous ratez. Sinon, plus sérieusement, quel mauvais vent vous amène chez moi ? Avec Ashura fini, j'espérais vous revoir mais disons dans trente ou cent ans. Qu'y a-t-il dans votre sac ?  

Des rapports d'enquête. Des centaines environ et chacun d'entre eux traite de la disparition d'un homme ou d’une femme. Ils sont de tous âges et de tous sexes. Midnight me laisse feuilleter et me scrute d'un œil interrogateur. La plus ancienne de ces disparitions date déjà de décembre 1625, les plus récentes de quelques jours. Quelque chose cloche, mais je maintiens mon expression placide, je la sais aux aguets.
J'étais au fait d'une certaine recrudescence des rapts dans la région. Mais quand Émeline fut enlevée, je me rendis à Carcinomia pour mettre un terme à cet immonde commerce. Le clan Burn -que j'ai totalement éradiqué- était le seul responsable des kidnappings sur North Blue, j'en étais convaincu. Jusqu'à maintenant !
Les rapts auraient dû cesser depuis la fin du mois passé.  

- Cinq cent trente sept.

- Pardon ?  

- C'est le nombre de Boréalins enlevés depuis le début de l'année.

- Vous plaisantez ? Comment se fait-il que je ne sois pas au courant de ça ?  

- Trop obnubilé par Ashura sans doute. Tu sais, comme une grenouille dans un puits qui pense que le ciel se limite à la circonférence dudit puits.

- Et combien depuis un mois ? demandai-je en sachant pertinemment que cette question ne ferait qu'attiser sa curiosité.

- Pourquoi cette date précisément ?

- Parce qu'une amie a été enlevée il y a un mois, sur Holiday Isle.  

- Ah ! J'ai entendu parler de ce rapt durant la fête des fruits. Cent deux personnes ont été capturées aux larges de la Baie des Glaçons depuis un mois, en majorité des étudiants de l'institut océanographique de Jalabert. En fait, sur tout North Blue, c'est plus de dix milles personnes qui ont disparu en l'espace d'un an.

Alors je me suis royalement fourvoyé. Le clan Burn de Carci' n'était pas le seul maître d’œuvre des rapts sur cet océan. Il ne devait en réalité représenter qu'un minuscule pourcentage en fait, l'ogre est à chercher quelque part ailleurs. Après ce que j'ai vécu à Carci', la banalisation de l'esclavage et l'endoctrinement des miens, la révolte dont j'ai planté les graines suivie de la rébellion et de l'affranchissement de masse, je suis trop instable émotionnellement  pour côtoyer à nouveau une telle affaire. Mais ces visages sur les rapports, des vies fauchées dans leur prime jeunesse, de la détresse et de la souffrance. Je ne m'en souviens que trop bien, je porte encore les stigmates de ma cette période où j'étais un enchainé.

- Pourquoi me montrer tout ça, Bee ?  

- Parce que je sais qu'en tant qu'ex-esclave que tu ne peux pas leur tourner le dos. Dans la cour de ma base, il y a les familles de tous ces gens qui scandent ton nom et qui réclament que tu enquêtes personnellement dessus. Comme ils ne savaient pas où te trouver, ils sont venus me le hurler à l'oreille.

- Je n'ai pas le temps de me consacrer à ça. J'ai des impératifs.  

- Plus maintenant. Tu ne lui diras pas non, à celui-là.

- Salut Loth.

Maximilian Nordin. Le Roi de Boréa. Arborant sa tête des mauvais jours.
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Qu'est-ce que je peux détester ces situations qui ruinent mes projets et me font perdre un temps précieux ! Qui plus est, impossible de dire non, surtout pas à Maximilian. J'ai sauvé Boréa de plusieurs désastres, j'ai affermi son trône face au Conseil des Six Lunes et à la Révolution, et pourtant, jamais je ne lui ai demandé une quelconque compensation de quelque nature que ce soit. Ce sont des investissements que je capitaliserai un jour ou l'autre, c'est pour ça qu'il est important de continuer à entretenir d'excellentes relations avec lui.

Du palace que j'occupais dans la cité portuaire de Lavallière, je me retrouve propulsé dans un autre palace, à Bourgeoys cette fois-ci. De la luxure en veux-tu, en voilà, une succession d'édifices rutilants d'arabesques et de vitraux, des fontaines aux eaux dorées et des rues impeccablement pavées. La capitale de Boréa, uniquement dédiée à l'aristocratie. Je m'étonne d'ailleurs qu'en un an dans ce pays, ce soit la première fois que j'y mette les pieds. Maximilian m'entraine dans son hôtel personnel où je me retrouve encerclé par une dizaine de gens à l'allure très prospère mais aux visages endeuillés. Je n'aime pas l'espoir qui pétille dans leurs yeux quand ils me dévisagent.

- Loth, Commandante, je vous présente Lord Altheus Coldheart, Baron des Crocs Givres; Lady Arabella Joliflocon, Marquise de Black-Ice; Lor...

- Pardonnez-moi, Max. Directement par son prénom, et même un diminutif, ça dénote la familiarité et casse les codes. Allons directement à l'essentiel, je vous prie. Nous avons une situation d'urgence je suppose ? Les noms de vos distingués amis ne changeront rien à la situation, pour l'instant. Par contre, je serai ravi de faire plus ample connaissance avec eux -et leurs bourses- quand j'aurais solutionné leurs problèmes. Et la petite phrase en fin accompagnée du sourire chaleureux pour faire passer la blague.

- T'es culotté toi ! susurra-t-elle.

- Je n'aime pas me perdre en blablatage.

- Loth est un homme d'action, je vous l'avais dit ! fit sa Majesté avec entrain.

Ils ont tous perdus quelqu'un et désirent ardemment que je retrouve leurs chers disparus. Un fils, une fille, un cousin ou une belle-sœur. De ce qu'ils m'exposent, il ne semble avoir aucune corrélation entre les conditions des disparitions, pas plus que les lieux ou les dates des rapts. Certains ont disparus en pleine mer, leurs bateaux retrouvés vidés de tout occupant, d'autres kidnappés à l'intérieur des terres ou sur la côte.

- J'ai personnellement enquêté sur ces cas et il n'y a...

- Vous avez échoué ! tonna avec mépris une vieille chouette au chapeau orné d'un vautour empaillé. Doriana Artiquin, Duchesse de Bocande. La moitié des fermes de la ville appartient à sa famille depuis des générations.
C'est intolérable ! Trois semaines que Bijou a disparu ! C'est pour ça que je veux, que nous voulons tous que quelqu'un de plus performant travaille sur ce cas. Vous, Marines, ne comptez plus sur mes donations ! Quand la tristesse cède place à la colère...

- Si vous me permettez Duchesse, Midnight n'est certes pas ma meilleure amie mais je lui confierais sans hésiter ma vie. C'est l'une des plus droites et expérimentées Marine qu'il m'ait été donné de côtoyer et sincèrement, si même elle n'a pas pu faire avancer ces dossiers, je doute de pouvoir y arriver. Et qui plus est, elle a enquêté à chaud; moi je viens après la fête, si vous me passez l'expression.  

- Certes, certes. Mais vous allez essayé Loth, hmmm ? dit-il avec des sourcils pressants. Il veut contenter ses bannerets et moi je suis son pion.

- Bien entendu, je vais essayer, je ferai de mon mieux.  

- Espérons alors que votre mieux soit d'un palier plus élevé que celui de la Marine. M. Reich, je suis Charlie.

- Vous êtes Charlie ?  

- Charlie Drinkwater, président de la Fresh Water Society, le Numéro Un de l'eau de Minérale sur North Blue.

- Ah ouais, pardon. Mon imagination avait fusé.  

- Nous sommes tous des gens puissants, M. Reich. Retrouvez nos enfants et nous vous en serons éternellement reconnaissants.

- Je tâcherais de m'en souvenir.  

- Désolé pour ça, Bee, mais ça fait trop longtemps qu'ils espèrent. Deux parents se sont même déjà suicidés, leur colère est compréhensible.

- Vous ne devriez pas vous excuser, votre Majesté.

- L'égo est le dernier de mes problèmes actuellement. Loth, je m'en contrefiche s'il te faut retourner chaque lopin de terre ou d'océan mais retrouve moi ces disparus !

- Les leurs seulement ? Je t'ai connu plus soucieux de ton peuple. D'après Bee, les petites gens ont aussi perdu des proches. Qui va se charger des leurs ?  

- Ce n'est pas le moment de faire de l'esprit mon vieux. Trouve les, bordel ! Et si en chemin tu arrivais à nous débarrasser de ceux qui sont à la tête de cette traite, mon escargophone arrêtera de sonner.

- Depuis quand vous vous tutoyez, le roi et toi ? s'enquit-elle en le regardant s'éloigner.

- Aucune idée.  

________________________________________
   

- Tu plaisantes, j'espère ?

- Meeec ! C'truc va boul'verser not' programme !

- A qui le dis-tu ? Midnight m'a remis tous les rapports d'investigations, il y a plus de cents cartons contenant des tonnes de paperasses dans le hall. Je ne suis pas prêt de finir, répondis-je blasé. Je m'étale de tout mon long dans le sofa sous les yeux médusés d’Émeline. Le plan, les programmes c'est son truc, elle déteste les accrocs.

- Et tu comptes vraiment enquêter sur ça ?

- Je pensais que tu serais plus réceptive à leur sort, marmonnai-je avec sournoiserie. Par deux fois tu as été esclave et durant la dernière -deux semaines plus tôt-, tu as failli finir mariée à un psychopathe pathologique.

- Oui, oui je sais. Mais non, je ne suis pas plus concernée que ça. On ne peut pas sauver tout le monde voyons ! Ou pire, partir à la poursuite de la veuve et de l'orphelin !

- Aella, sors de ce corps...

- On a des points de vue similaires elle et moi.

- Désolé mais je compte bien travailler dessus. Tout simplement parce que je n'ai pas le choix. C'est une requête directe du Roi, il s'est même déplacé jusqu'à moi. Je lui ferai affront si je refusais et je n'ai pas les moyens de me mettre l'un des plus puissants monarques de North Blue à dos. Savoir où est sa place, c'est aussi ça la clé de la survie. Le sobriquet dont mes ennemis m'ont affublé dans l'underground n'aura jamais aussi bien porté son nom. "Le Chien de Givre". Max siffle, j'accoure en aboyant. Wouh ! wouh !

- Arrête, ce n'est pas drôle.

- Hahaha. Dans ce cas, très chère, regarde les choses autrement. Depuis un an, c'est la guerre entre les Sept, il suffit de suivre les traces de sang, de Manshon à Luvneel en passant par Inu Town. Le pouvoir des Tempiesta est en ballotage défavorable. Le bateau appelé Mafia de North Blue tangue, il n'y a plus de capitaine à bord. Les alliances se font et se défont, c'est la désunion des unions. Et depuis un an, une nouvelle famille a émergé presque sans déclencher d'alerte. Peut-être tout le monde a-t-il pensé comme moi que ces rafles provenaient de Carcinomia ? Et pendant ce temps, cette famille inconnue s'est développée à vitesse grand V, Émeline. Il est dans notre intérêt de la trouver et de l'éradiquer. Dix milles rapts depuis décembre 1625, c'est énorme ! Leur puissance financière et matérielle doit être colossale.  

- Et forcément, ce sont des ennemis ?

- Travaillerais-tu avec des esclavagistes ?

- Jamais !

- Alors c'est entendu. Notre nouvelle priorité, c'est de retrouver ces gens et de les mettre hors d'état de nuire. Qu'ils aient l'intention de soutenir ou de combattre les Tempiesta, ce seront à coup sûr des ennemis. Agissons maintenant, les Tempiesta sont occupés à guerroyer avec les Venici.

- T'es sûr que c'est l'moment idéal ? demanda Dena'.

- Et pourquoi pas ?

- L'mandataire des Tempiesta arrive.

- Bon Dieu ! J'avais presque oublié ! Il accostera dans les Fjords des Oubliés vers seize heures !

- Ah oui... Eden et Nox sont déjà à la datcha non ?

- Oui.

- Dans ce cas, nous avons du chemin à faire à travers les steppes gelées. Ce serait impoli de faire patienter de si illustres invités.
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Nous rejoignons à cheval "Les Oubliés", un immense glacier sur la côte orientale de Boréa où un bras de North Blue a creusé une vallée en s'enfonçant dans les terres. C'est l'endroit parfait pour des affaires discrètes, bien loin de toute civilisation, difficile d'accès par la mer à cause des icebergs dérivants. En janvier, j'y découvris une datcha en ruine et abandonnée que je fis retaper et agrandir. Depuis cet endroit est devenu ma résidence secrète et secondaire dans ce royaume.

La datcha est adossée à une falaise de granit gelé et fait face à la petite jetée que j'ai fait construire. Jusqu'à l'horizon, le paysage est éburnéen et la mer, lactée. Tout ici respire le calme et la paix de vivre. Je ne m'en lasserai jamais. Pour nous accueillir, Eden et Nox. Le second est le chef des Fumiers, mes forces spéciales, une unité d'assaut de cent hommes rodés aux techniques de guérilla, d'exfiltration et de protection. Entrainés par le plasticien Jonathan Nivel et la tueuse à gage Avada Kedavra, les Fumiers forment un corps d’Élite dont je suis particulièrement fier.
Eden quant à lui est un partenaire d'affaire que j'ai rencontré pour la première fois en début d'année à Poiscaille. Il a du potentiel et de l'avenir, c'est pour cela que je lui ai fait appel pour m'assister dans la guerre que je m'apprête à déclarer.

- Ça se passe, Eden ?

- Ils sont là.

- J'ai vu leur bateau attaché au quai. Combien ?

- Sept.

- Ça va le faire alors.

Qu'est-ce que c'est que ça ? Je tombe des nues en entrant dans le vestibule du chalet. Une glaciale colère s'empare de moi quand je réalise que les mandataires envoyés par les Tempiesta sont... Est-ce des mineurs ? En tout cas, ils n'ont pas l'air assez vieux pour boire de l'alcool et pourtant, ils ne s'en gênent pas. Mon meilleur scotch dans une main et un cigare dans l'autre, ils me dévisagent depuis les meilleurs fauteuils, ceux sis près de la cheminée. Ils me saluent juste d'un vague signe de la tête en prenant des airs derrières leurs verres fumés. Il y a vraiment des gifles qui se perdent.

Roy et Joy

- C'est sympa chez toi. Moi c'est Roy.

- C'est coquet chez toi. Moi c'est Joy.

-  Et nous sommes les mandataires des Tempiesta ! ajoutent-ils en chœur. Je rêve.
 
- Bienvenue à Boréa.    

- Trop chiant comme trou perdu. On s'les caille en plus et tu nous as fait attendre !

- Retourne à la civilisation mec. J'pensais qu'on allait atterrir en ville pas sur la banquise quoi. Bon bref, on va trop s'les geler ici. On est venu pour parler.

- Bien sûr. Parlons.

- T'as rapidement pris d'l'aile. En un an, t'as déposé Ashura et Carcinomia. C'étaient des poules aux œufs d'or pour la famille. Surtout Carci, mais t'y as foutu l'bordel, t'y as aboli l'esclavage et exterminé les clans Burn et Wave. T'as d'la chance, l'Don Carbopizza est trop occupé pour s'occuper de toi. Donc, il passe l'éponge et nous envoie encaisser.

- Je vois. Je dois considérer que j'ai de la chance alors.

- Ouais, carrément mec ! Peu ont eu autant d'veine. La taxe c'est vingt briques par mois pour ton réseau, Shadow Law, c'est ça ? Et cinquante pour Carci'.

- Soixante-dix millions par mois ? Vous plaisantez ?

- Non, et en plus, on t'fait une fleur pa'ce qu'on n'a pas trop majoré. Juste 20% d'plus que c'que payaient ces deux groupes avant que tu n'foutes le dawa.

- D'accord. Mais avant, renseignez-moi. Comment se passe la guerre ?

- Y a pas d'guerre. La guerre c'est quand deux camps s'affrontent. Là, on leur botte juste l'cul. Dans un petit mois, piooouf, plus rien. Les Venici et leurs alliés, morts. Ils apprendront tous qu’il faut pas défier les Tempiesta.

- Je vois. Eden, la mallette, s'il te plait. Nous payons toujours nos dettes.

Je croise les jambes et me sers un douze ans d'age pendant qu'il s'approche, le porte-document en cuir de serpent à la main. Ce truc ne saurait contenir plus de cinq millions en liquide et pourtant, les jumeaux tendent la main. Peut-être pensent-ils que je vais payer en diamants. J'analyse la situation et m'interroge sur ce manque flagrant de respect de la part de Don Carbopizza. M'envoyer ces deux rejetons alors je viens de mettre la main sur Carcinomia, le temple même de l'underground de North Blue, ça m'a l'air abusé. Aucun respect non plus de la part des mandataires, ils se sont adressés à moi comme si je n'étais qu'un petit truand à extorquer. Soit la guerre a fait perdre le sens des réalités à Manuel Tempiesta, soit il est aux abois et ses meilleurs récolteurs d'impôts ont été tués dans les affrontements. Je penche plus pour la seconde option. Ils ont besoin d'argent pour tenir à flot, financer leurs campagnes et redémarrer leurs activités. C'est le meilleur moment pour déclencher une guerre.

- AaaaaAAAaaaaah ! Saletés !  

- C'est quoi ces merdes ?

Joy sursaute de son fauteuil en hurlant. Dans la mallette ouverte, une dizaine de Monstres de Gila vivants. Les cris des jumeaux alertent leurs gardent du corps qui se ruent dans l'antichambre armes aux poings. La fête commence et de ma position, j'ai un panorama dégagé sur la scène où Eden poignarde le premier gorille à passer la porte. Tout à coup, mon vin devient plus gouteux qu'à l'ordinaire.
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L’atmosphère était jusqu’alors assez tendue. Comme convenu, Loth conversait avec les Tempiesta. Tout changea lorsque Joy ouvrit la mallette. A la vue des Gilas il comprit l’entourloupe, et ce dernier donna l’alerte. Et cette alerte, en plus de prévenir les gardes du corps marque également le début de leur fin. Une sorte de glas macabre.

La porte s’ouvre, et un des gardes du corps se précipite dans la salle. Etant le plus à côté de la porte, je me charge de le cueillir avec ma lame, que je plante dans son abdomen, pour arrêter sa progression. Je le saisis par la veste, puis lui assène de multiples coups dans le ventre, puis réduit progressivement mon emprise sur lui lorsque je sens son corps s’effondrer sur le sol.
De l’autre côté, les quelques Fumiers – les hommes de Loth - qui s’occupent de la protection de leur patron se sont jetés sur les deux jumeaux.

Le calme a laissé place à la tempête. Dans la salle baignée par la lumière, le silence a laissé placer à des cris, et des coups. Nous voilà donc, Moi et Nox, pour concrétiser le plan. Les quatre hommes qui montaient la garde à l’extérieur, et qui viennent de voir leur ami tomber au sol, s’élancent comme un seul homme.

Le premier arrive vers moi, et tente de sortir son arme. Très mauvaise idée. J’anticipe puis me précipite vers lui, et attrape son poignet pour l’empêcher de sortir son arme. En guise de bienvenue dans la mêlée, je lui envoie un coup de tête qui manque de le mettre K.O. Derrière, son ami sort une arme et tire vers moi.

Nullement besoin d’esquiver la balle : je tiens encore dans mes mains mon premier agresseur. Je me sers de son corps comme d’un bouclier, et la balle termine sa course dans le garde du corps des Tempiesta. Dans le dos plus précisément, arrachant un cri de douleur à mon gilet pare-balle de fortune.

Après m’en être servi, je le jette lourdement au sol, puis bondit sur le deuxième. En arrière-plan, Nox frappe un des hommes à terre, tandis qu’un deuxième essaye – sans succès – de l’empêcher de battre à mort son ami en lui assénant des coups qui ne semblent avoir que très peu d’effet sur le Fumier. Le commandant des Fumiers est un véritable atout.

J’esquive le premier coup de poing de mon adversaire, puis lui sort une de mes bottes secrète, travaillé maintes fois dans l’Arène de Las Camp. Un subtil mélange d’ingéniosité, et de force brute. Je me redresse, lui attrape l’épaule fermement puis fait preuve d’ingéniosité : ma jambe droite vient se raidir, et lui faucher les deux jambes. C’est ça l’ingéniosité : une balayette capable de renverser n’importe quel bonhomme.

Puis, vient la force brute : un coup de talon dans la mâchoire de l’homme encore au sol. Après des centaines d’essais, j’ai enfin réussis à trouver la force exacte pour réussir à casser cet os avec mon talon. Et j’y arrive presque toujours. La par exemple, j’ai réussis.
Nox a également réussis à liquider les deux derniers : le corps de l’homme qu’il frappait tout à l’heure git maintenant derrière lui, et celui qui essayait de le frapper auparavant, se retrouve en train de se faire étrangler par le commandant des Fumiers.

Il ne nous reste donc que de nos amis, Joy et Roy qui en train de prendre l’avantage sur les Fumiers. Loth – qui a plutôt la belle vie – assis sur son siège, continue de regarder la scène.
Joy et Roy de leur côté se débrouillent plutôt bien, et finissent par prendre le dessus sur les hommes envoyés contre eux. Les Fumiers tombent au sol, plutôt amochés. Les deux jumeaux, blessé également fulminent contre Loth.

-Espèced’enfoiré ! crachèrent-ils en cœur
-T'as voulu jouer avec Roy ?
-T'as voulu plaisanter avec Joy ?
-Petite merde, o…

Impossible pour Roy de finir sa phrase. Normal, je viens de transpercer ses cordes vocales avec ma lame venue de sa nuque. Je retire la lame d’un coup sec, ce qui a pour effet d’envoyer un jet sous pression de sang de sa gorge, avant que le corps de Roy ne s’effondre d’un coup sec.

-ROOOOOOOOOOOOYYYYYYYY !!!!!
-La ferme.

J’envoie un premier coup de poing sur Joy, ce qui a pour effet de le déstabiliser et de le faire tomber. Une fois au sol, je me place sur lui, et le frappe, encore et encore. Mon poing gauche ne s’arrête plus, et je mitraille son visage de coups. Cette fois ci le calme est revenu dans la salle, l’atmosphère semble plus reposante. Seul résonnent les bruits de coups.

Je m’arrête subitement, laissant Joy recracher ses dents. Le visage tuméfié par les coups, et la bouche pleine de sang il tente de se dégager, rampant vers le cadavre de son frère. Péniblement, il réussit à arriver jusqu’à Roy, étendu au sol. Des larmes perlent sur ses joues, tandis qu’il essaye de marmonner en direction de Loth

-…en…foirés…vous…les….Tem…ie…sa…
-Les Tempiesta tu veux dire ? Je sais bien, sinon tu ne girerais pas sur le sol. J’ai justement un message a faire passer aux Tempiesta.
-…un..me…ssa…ge ?
-Ouais, et le message c’est toi.

Mon pistolet déjà sorti pendant qu’il s’adressait à Loth, je pointe le canon vers sa tête et lui tire une balle dans la tête, le projetant contre le cadavre de son frère.

-J’ai achevé les deux derniers que t’avais pas fini.
-Merde désolé, j’ai dû oublier. Merci Nox !
-Pas de quoi.

Je range mon pistolet derrière mon dos, dans mon pantalon pendant que les Fumiers rassemblent les cadavres. Je relève les manches de ma chemise blanche – éclaboussée de sang – puis allume une cigarette

-Bien, placez-leur les Gilas dans la bouche.
-Dans la bouche ?
-Oui, sur eux également. On va les renvoyer aux Tempiesta. Marcus, place les corps dans un bateau avec l’aide de quelques fumiers, et naviguez jusqu’à Manshon. Abandonnez le bateau, pour qu’ils le retrouvent. Don Carbopizza comprendra mon message.
-J’adore ta façon d’envoyer des messages.
-Merci, Eden.
-Pas de soucis patron. On s’en occupe.

Les Fumiers présent dans la pièce se répartissent chacun sur les différents corps, et après les avoir réunis, les portent par groupe de deux à l’extérieur de la maison pour les emmener sur les quais. C’était un putain de jet d’adrénaline, et je commence à me dire que j’ai vraiment bien faire de venir ici. Loth m’a contacté il y a moins d’une semaine pour une nouvelle affaire. C’est pas notre première ensemble, et on s’est plutôt toujours bien entendu. Il a une sacrée tête, et c’est un des futurs plus gros caïds des quatre Mer Bleue. Je serais bête de ne pas m’allier à lui.

J’ai surtout une dette envers lui. Grace à lui, j’ai réussis à me faire quinze millions pour mon premier coup, ce qui m’a permis de mettre à l’abri sur une île tranquille ma mère et mes sœurs.

Vingt ans et déjà millionnaire. Pas mal pour un petit voyou de Las Camp. Mais l’argent appelle l’argent, et cette fois ci je sens que je vais gagner autre chose que de l’argent. Quelque chose qui me manque encore cruellement : la renommée.

- Alors Loth, on fait quoi maintenant ? dis-je au chef des lieux, tandis qu’en fond, on débarrasse les cadavres de Joy et Roy

    - On se pose et on attend. La guerre, c'est pour bientôt.

    Finalement, je me dis qu'on aurait pu choisir un autre endroit que ma datcha pour cette boucherie. Le parquet en orme blanc est teinté de vermillon. Mes hommes reconduisent les corps au bateau qui lève aussitôt les voiles vers Manshon avec sa cadavérique cargaison. Dans ce cas-ci, la vengeance est un plat que nous allons manger très froid. Presque deux ans se sont écoulés depuis les incidents de Manshon où mon maître, celui qui m'apprit toutes les ficelles du métier, j'ai nommé le Gila a fait l'objet d'une tentative d'arrestation très musclée à Manshon. La flotte du Vice-amiral Jared l’Étau imposa un blocus à l'île exigeant des Sept qu'ils le lui remettent. Le Monstre n'est pas n'importe quel mafieux, sa petite nièce qu'est autre que Kiyori, Impératrice Pirate de son état. Capturer le Gila signifiait alors avoir un moyen de pression sur Kiyori, la toucher directement.

    Alors que le blocus s'éternisait, les mafieux se retrouvèrent confrontés à un choix cornélien. Remettre le Gila à la Marine ou à l'aider à s'échapper. Cette question désunit les Sept à tel point qu'une confrontation directe éclata entre les partisans du Reptile et ceux de la Marine. Les Tempiesta prirent partie pour les Mouettes et jugulèrent leurs efforts pour capturer le Saurien. Manque de bol pour eux, la troisième flotte de Kiyori commandée par Shoti Shota déboula directement du Nouveau Monde par Calm Belt et s'attaqua au blocus. Les combats furent violents et dévastèrent une grande partie de Manshon. A l'issue de ce que les autochtones considéraient encore comme un Armageddon, le Gila s'engouffra dans la brèche ouverte par Shota et disparut, préférant demeurer sur les Blues pour ruminer sa vengeance plutôt que de partir dans le Nouveau Monde.

    - Les Tempiesta ont perdu leur prestige, honnis par la fuite du Gila. A contrario, les familles qui le soutinrent -les Venici en tête- ont tout à coup pesé plus lourd dans le milieu, commenta Émeline. Par cet acte mûrement réfléchi, nous venons de déclarer la guerre aux Tempiesta, ce qui d'un certain point de vue ne change pas grand-chose pour eux. Juste un ennemi de plus dans la balance.  

    - Hé ! On n'est pas n'importe qui !

    - Certes, Nox. Mais les mandataires qu'ils m'ont envoyés traduisent le peu de considération qu'ils ont à notre égard. Ce que veut dire Émeline c'est qu'on s'ajoute à une longue liste d'ennemis qui veulent leurs peaux et que dans ce jeu-là, l'ennemi de notre ennemi n'est pas notre ami. Juste un autre concurrent qu'il faut éliminer.

    - Mais pour prendre la place des Tempiesta, faudra bien faire des alliances non ?

    - Sans doute, Eden. Mais pour l'instant, nous allons nous contenter d'observer leur réaction. Peut-être vont-ils chercher à s'attaquer à Carcinomia. Ce qui m'arrangerait bien.

    - Ils sont pas fous !

    - Nos efforts présents seront consacrés à la nouvelle affaire que m'a confiée Maximilian Nordin. Nous devons à tout prix mettre fin à cette traite des esclaves et détruire cette nouvelle mafia qui a émergé. Et bien sûr, ce ne sera pas gratuit.

    Désespérée par l'échec de la Marine à retrouver les leurs, beaucoup de familles ont émis des avis de recherche à la façon de celles des criminels primés. On peut en trouver chaque jour dans les presses locales, dix millions de Berry par-ci pour retrouver Agnès Abbot, vingt millions de Berry par-là pour retrouver Fabien Butt. Non seulement on se débarrassera d'un potentiel concurrent si nous mettons la main sur les responsables de ce trafic mais on récoltera un joli magot si on retrouve tous ces fils de richards. Sans compter l'appui et les relations qui naitront, leurs parents me seront redevables à vie. En plus, c'est un projet intéressant pour toi, Eden, tu vas pouvoir réellement t'illustrer en combattant aux côtés de la Marine.

    - Tu comptes associer les Mouettes ?

    - Naturellement. Je sais déjà qui appeler dès que nous trouverons une piste valable. Pour réussir à kidnapper dix milles personnes en un peu plus d'un an, ces gens ont de la logistique, une base, des hommes et bien sûr des armes sinon ce ne serait pas drôle. Je n'ai aucunement l'intention de m'y attaquer de front avec mes propres moyens. Je réserve ça aux Tempiesta. Il vaut mieux se cacher derrière la Marine pour faire ce job, la gloire rejaillira sur nous de toute manière.  

    - Et là, t'as une piste ?

    - Non. Il me faut encore lire les rapports que m'a transmis Bee. On retourne à Lavallière. Émeline, contacte Aella, que ses Oiseaux viennent me récurer tout ça. Je veux retrouver ma datcha brillante et parfumée.

    Pendant trois jours successifs, je planche sur les rapports d'enquête. Et plus j'avance et plus je me rends compte qu'on s'attaque à quelque chose de très gros et lourd. Les efforts de la Marine pour endiguer le sinistre sont louables, on est très loin du cliché des Mouettes inefficaces qui n'en branlent pas une comme aimeraient le faire croire les collectifs de familles des victimes qui donnent de la voix dans les journaux. Cinq flottes au total ont déployées pour quadriller chaque zone de North Blue mais par de malheureuses circonstances, les Marines semblent toujours arriver en retard. Pas systématiquement cela dit, selon les rapports, ils auraient empêché le rapt de presque mille personnes en intervenant avant ou pendant l'action. Une cinquantaine de kidnappeurs au total furent capturés, torturés mais il s'avéra que ce n'étaient que des sous-fifres. Dès qu'ils enlevaient leurs victimes, leurs commanditaires leurs donnaient rendez-vous en mer pour transférer la marchandise, si bien qu'ils ne savaient rien du tout d'eux. La plupart du temps arguèrent-ils, les prisonniers étaient transférés sur des galions déguisés ou des sous-marins.

    - On dirait le mode opératoire du clan Burn, dit Eme' au quatrième jour de ma lecture alors que mon cerveau surchauffait.

    - Mon problème se résume à dissocier les deux. Toute activité liée à l'esclavage en provenance de Carcinomia a cessé il y a un mois. Là c'est facile d'attribuer tous les rapts ayant eu lieu à partir de cette période à notre organisation inconnue mais si on remonte à plus d'un mois, ça devient un galimatias. Leurs modus operandi se ressemblent tellement que j'en viens à me demander si le clan Burn n'a pas ouvert une succursale à la surface.

    - Une succursale plus grande que la maison mère dans ce cas.

    - C'est ça qui est bidon. Pourquoi iraient-ils délocaliser leurs activités à la surface, avec le risque de se faire arrêter alors que ça marche très bien sous terre à Carci ?

    - Et la Marine n'a vraiment aucune piste ?

    - Si, lis ce rapport.

    - Des nains ? répéta-t-elle, étonnée. Il y a deux mois, ils ont réussi à intercepter un sous-marin esclavagiste qu'ils ont coulé. Et ils ont repêché des cadavres de nains ? C'est censé être un indice ?

    - A priori oui. La Marine pense officieusement que la Famille Audifreddi est de retour.

    ___ ___ ___

    Deux jours plus tard...

    PULUPULUPULUPULUPULUPULUPULUPULU !!!

    - Mon escargophone a une manière hargneuse de hurler quand c'est vous qui m'appelez.

    - Sûrement parce que tu as quelque chose à te reprocher. On m'a informé qu'une razzia vient d'avoir lieu sur l'ile de Huajing. C'est seulement à seize milles marins de Jalabert mais en dehors des eaux de Boréa. L'enquête est entre les mains du Commodore Koke du G-6.

    - C'est le même qui s'était chargé de la razzia à Holiday Isle. J'ai de bons rapports avec lui, je pourrais travailler à chaud sur cette affaire. Vous venez ?

    - Non, ma juridiction s'arrête à Boréa sauf ordre contraire du QG. Vas-y et trouve ce qu'on a raté.

    - Si vous avez raté quelque chose...

    ___ ___ ___


    Moins de dix minutes plus tard, je suis à bord de "Barracuda", le bateau le plus rapide de la flotte personnelle de Maximilian. Le bébé est profilé comme une torpille et fend les flots à plus vingt nœuds, tel espadon. Propulsé à la vapeur, il a été conçu pour la course dans les chantiers navals de luxe de Bliss. Ce n'est pas la première fois qu'il me prête ce bijou pour rallier rapidement un lieu de haute importance. L'équipage est composé de quinze gardes royaux bien entrainés qui ont été placés sous mes ordres par le Roi. Sur le pont, il est primordial d'avoir une main bien agrippée, autrement, on court le risque de voler par-dessus le bord. La sensation de vitesse est toujours aussi incroyable, l'air qui te gifle le visage, l'embrun dans tes narines, le sel sur ta peau.

    - Tu n'es jamais monté à bord d'un bateau si rapide, je suppose ? demandai-je à Eden en hurlant presque. A cause des vagues contre la coque et du vent hurlant, on ne s'entend presque pas parler. En fait, viens, rentrons en cabine, on en a assez vu !

    - Wow, j'ai les oreilles qui sifflent là. C'était...

    - Grisant ? Jouissif ? Un jour, j'aurai assez de temps libre pour m'intéresser aux raisons qui poussent les humains à toujours vouloir aller plus vite.

    - L'argent, c'est une bonne raison. Tiens, tu m'as pas expliqué. C'est qui ces Audifreddi ? T'en sais plus ?

    - Par où commencer... Pour faire bref, disons que les Audifreddi furent autrefois une des Sept familles mafieuses composant le conseil de Manshon. Ils ont eu les yeux plus gros que le ventre et ont voulu accaparer plus de pouvoir en conquérant Carcinomia. La chasse gardée des Tempiesta quoi. Ils se sont retrouvés à affronter les six autres familles en plus d'autres démembrements de la mafia.

    - Ils ont pris cher ?

    - Très cher. On les a canardés et en beauté.

    - "On" ? T'y as pris part ?

    - C'était en 1623. Depuis Saint-Uréa, le Gila a envoyé un contingent de cinquante hommes pour aider les Tempiesta à mater l'insurrection Audifreddi. Tu comprends pourquoi je dois absolument venger leur trahison ?

    - Mais du coup... Les Tempiesta connaissent tes liens avec le Gila ? Ils ont vraiment pensé que tu baisserais le pantalon devant eux après ce qu'ils ont failli lui faire ?

    - Improbable que les Tempiesta aient retenu mon visage, je n'étais qu'un sbire en ce temps-là, je venais juste de rentrer dans le cercle du Gila.

    - Hahaha ! Désolé, mais ça me fait assez drôle de t'imaginer en porte-flingue.

    - Il faut bien commencer par le bas. La plupart des cadors de la famille Audifreddi ont été éliminés durant ce carnage à l’exception d'Égéria, la femme du parrain ainsi qu'un de ses fils. S'ils sont de retour, ce n'est sûrement pas de bon augure pour les Sept en général.
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    Huajing est un îlot appartenant au Gouvernorat de Rand, un groupement d'une vingtaine d'îles au sud de Boréa administré au nom du Gouvernement Mondial par un seul Gouverneur, un des plus puissants de North Blue. Trois milles habitants vivent ici, principalement de l'industrie artisanale de la tannerie et des dérivés de la pèche à la baleine. L'ilot n'abrite qu'un petit détachement de Marines, plus dévolus aux conflits civils et aux disputes conjugales qu'à une mission de protection.

    A notre arrivée, Eden et moi sommes conduits au Commodore Koke, un vieux débris de Marine, grisonnant, la soixantaine passée depuis longtemps. Ma célébrité et réputation de "bras droit de la justice" n'est plus à faire, le vieux m'accueille avec un certain soulagement. Je lui présente Eden comme un assistant très doué. « C’est encore ces couillons de Shadow Law, non ? » tempête le Commodore.

    Ah oui, j'avais oublié ce détail. La dernière fois quand Émeline fut enlevée sur Holiday Isle, elle laissa involontairement sur place la bannière de mon organisation. Et comme elle avait été typée pour ressembler à pavillon pirate, j'encourageai les Marines à suivre la piste de pirates esclavagistes alors que je savais très bien que l'attaque provenait de Carcinomia. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas, mais j'ai encore intérêt à ce qu'on catégorise Shadow Law comme une bande de pirates quand la production de Dance tournera à plein régime, histoire que nul ne fasse un lien avéré entre moi et cette nouvelle résurgence de Dance Powder maintenant qu'Ashura est détruite.

    - Qu'est-ce qui s'est passé ici, Commodore ?

    - D'après les Marines, ils leur sont tombés dessus à l'improviste. Une trentaine, entrainés, rapides. Ils ont massacré les soldats en ronde et se sont attaqués aux hameaux qu'ils ont brûlés.

    - Et comme la plupart des maisons sont en paille ou en bois tout a flambé. Et pendant que les habitants sont occupés soit à éteindre le sinistre ou à s'enfuir, ils sont d'autant plus faciles à cueillir.

    - Vous avez une information sur eux ?

    - Non, mentis-je. C'est juste facile à deviner. A l'image d'un apiculteur qui se sert de la fumée pour dégager un chemin vers le miel. Combien de personnes ?

    - Vingt-neuf. Tous des enfants.

    - Quoi ? Putain !

    - Le plus âgé à quel âge ?

    - Douze ans. C'est la première fois qu'on voit ça.

    - C'est horrible. Ces gens n'ont aucune conscience !

    - Il ne faut pas en avoir pour penser à faire de l'humain une marchandise. Les témoins n'ont donné aucune description des ravisseurs ?

    - Ils étaient grands, bien baraqués. Des bodybuildeurs. Ils portaient de longues barbes hirsutes.

    - Et pas de nains ? Les rapports de la Commandante Bee en mentionnaient.

    - Si. Les habitants qui ont poursuivi les kidnappeurs dans leur retraite ont parlé d'un nain qui donnait des ordres. Un nain roux à la barbe tressée. Ils ont aussi vu deux sous-marins à la surface dans lesquels les enfants ont été entassés, sans doute. Ensuite, ils ont rapidement plongé mais les habitants tenaces les ont suivis sur quelques mètres en pirogue, à la rame, tant qu'ils les voyaient encore. Peine perdu, ils se sont enfoncés si profond sous la flotte qu'ils les ont perdu de vue. Les patrouilleurs de ma flotte ratissent la zone mais bon, en sous-marin...

    - Le combat est inégal. Dans quelle direction se dirigeaient les submersibles d'après les habitants ?

    - Au sud. Mais ils ont très bien pu changer de cap une fois à leur profondeur de croisière. Les enculés !

    - Bon, merci Commodore.

    - Vous partez ?

    - Il n'y a plus rien à faire ici. Le fait qu'ils n'aient enlevés que des enfants va peut-être les trahir. Ça répond sûrement à commande spéciale, je vais voir mes indics, si quelqu'un a entendu parler de ça. Je ne ménagerai aucun effort avant de les retrouver. Je ne laisserai pas ces chiens couper les branches de notre jeunesse !

    ___ ___ ___


    - Joli discours. J'ai même failli verser une larme.

    - Je le pensais. Des hommes ou des femmes, c'est ignoble. Mais des enfants, il n'y a aucun mot pour qualifier ça.

    - Ouais. Je me trompe où t'as une vraie piste ?

    - Si. Dis au capitaine de lever les voiles vers Boréa sans pousser le moteur, puis rejoins-moi en cabine.

    Dans l'habitacle du navigateur, je trouve ce que je cherche. Une carte à jour, un compas, une règle, une équerre et un rapporteur. Je décroche mon escargophone et contacte la seule personne qui peut me donner les infos que je requiers. Elle est toujours contente de d'entendre celle-là et espère que je lui apporte une affaire. Pas aujourd'hui. Avec ses données, je me mets au travail, un mix de mathématiques et de déductions. Aella me ferait ça en dormant, dommage que le terrain ne lui sied pas trop. Eden me retrouve et me laisse travailler en silence. Pendant cinq minutes, je gribouille, j'efface, je râle et finalement, j'empale mon compas sur la carte avec un sourire. Je les ai trouvés, j'en suis certain.

    - Ça sent bon ?

    - Plutôt oui. L'allégorie de l'apiculteur n'était que du flan. Le commodore a vu juste, j'ai effectivement reconnu le mode opératoire. Le feu, faire sortir les gens pour mieux les rafler, c'est Jon Dwarf tout craché.

    - Dwarf ? C'est pas le capitaine esclavagiste du clan Burn qui a enlevé Émeline ? Celui de Holiday ?

    - Lui-même. Sauf que sur Holiday, il a dérogé à sa stratégie habituelle parce que l'île était en fête, les gens étaient déjà attroupés. Pas besoin de les faire sortir.

    - Mais... On l'a pas zigouillé à Carci ? Enfin, j'pensais que tu avais réglé son compte.

    - Non, il est parti en mer avant que la guerre civile que j'ai déclenchée n'éclate et depuis, plus de nouvelles. Peut-être est-il revenu, a vu le pays en flamme et s'est éclipsé.

    - Okey d'accord. Il s'est échappé. Là, il se serait mis à son propre compte ? Déjà ?

    - Non. Ce n'est finalement pas une coïncidence si le mode opératoire des Burn et de notre famille fantôme se ressemblent autant. Quand les Audifreddi ont tenté de gagner en pouvoir il y a trois ans, c'est le clan Burn qu'ils ont voulu absorber en premier, avant de jeter leur dévolu sur tout Carcinomia. Et note que Jon "Dwarf" est un nain.

    - Tous les Audifreddi sont des nains, t'avais dit.

    - Ce ne sont pas juste des nains, ce sont des nains haineux. Je me souviens qu'ils ambitionnaient de créer un pays uniquement composé de nains. C'est aussi pour ça qu'ils trempent dans le commerce d'esclave, ils se considèrent comme une race à part et détestent les autres, à l’exception des Tontattas qui sont plus petits qu'eux. Chaque nain dans le monde est un frère pour eux, c'est pour cela que je pense que Jon était sûrement un agent double Audifreddi.

    - Ils l'auraient placé à Carci pour préparer leur guerre ? Et quand ça a tourné au massacre, Jon est resté avec ses nouveaux maitres ?

    - Oui un truc comme ça. Maintenant qu'ils sont de retour, il a rejoint sa famille.

    - Okey, ça c'est fait. On le retrouve comment ?

    - C'est déjà fait, il est probablement là, dis-je en désignant le compas planté. Dans les Atolls de la Reine Genièvre.

    - Comment tu sais ça ?

    - Parce que je viens d'appeler Malfada Kripke, l'armateur de Zaun qui a fourni tous les sous-marins du clan Burn. C'est elle qui m'a vendu le mien. Elle m'a donné les caractéristiques techniques des submersibles de Jon Dwarf. Il en commande réellement deux, de classe Abyss.  

    - Ah ouais, ils ont même des sous-marins divisés en classe !

    - Les classes Abyss sont des espèces de sous-marins cargo en fait, dédiés au transport, pouvant accueillir jusqu'à soixante personne assises. Le contrecoup c'est qu'ils sont allez lents et surtout leur grande faiblesse c'est la réserve d'air. Tu m'en diras tant, avec soixante personnes les épurateurs sont vites saturés. Ils doivent remonter à la surface chaque deux heures pour refaire le plein d'oxygène.

    - A partir de là, t'as calculé ?

    - Oui. Midnight nous a contactés trente minutes après la fin de la razzia et nous en avons mis autant pour rejoindre Huajing. Donc avec cette heure de retard que nous avions sur eux, ajoutée au maximum de deux heures qu'ils peuvent tenir sous l'eau, et prenant en compte leur vitesse maximale, j'ai déterminé une zone de confort de quarante kilomètres de rayon autour de Huanjing où ils doivent forcement se trouver.

    - De rayon, carrément ? C'est immense ! Comment tu peux savoir qu'ils sont dans ces Atolls ?

    - Parce que c'est situé au sud, à la bordure la plus extérieure de la zone. Regarde bien la carte.

    Spoiler:

    - Carcinomia est là, tout au nord-est, à cent kilomètre de Huajing. Je l'ai rajoutée hein, elle ne se trouve pas sur la carte. Boréa, au nord, à trente kilomètres. Manshon au sud-ouest, à cinquante-cinq kilomètres. Nous sommes dans une zone à peu près déserte de North Blue, à part Boréa et les autres îlots du Gouvernorat de Rand, la seule île habitable et visible qu'on puisse trouver dans le coin, c'est Manshon. En partant de Huajing vers le sud, l'île la plus lointaine que Jon puisse atteindre avant de manquer d'air, ce sont les Atolls de Genièvre. Elles sont inhabitées et colonisées par des oiseaux migrateurs.

    - Y a d'autres îles désertes dans le coin.

    - Certes, mais ce sont des îles plates. N'oublie pas, il y a cinq flottes de Marine qui ratissent tout ce secteur de North Blue. Un sous-marin sur de telles îles se verrait comme un nez au milieu de la figure. Par contre, les Atolls de Genièvre sont ce qu'on appelle des Atolls exondés. Pour faire court, ce sont d'anciennes iles volcaniques surélevées puis érodées par l'eau mer qui les a transformées en une espèce de gruyère. Il y a des grottes, des cavités et assez de végétation et d'oiseaux pour dissimuler deux submersibles en repos. La Marine n'a pas de raison réelle d'aller explorer ces atolls, elle ignore que les sous-marins des ravisseurs ont besoin de pause. Pour moi c'est l'endroit parfait pour se refaire un brin de respiration avant de replonger.

    - Le commodore a dit que les sous-marins se dirigeaient vers le sud hein ? Donc ta théorie tient, mais seulement si Jon vient de plus loin que ta zone de confort, c'est ça ?

    - Tout à fait. Mais on va aller vérifier, c'est la seule piste que nous ayons de toute manière. Donne au capitaine notre nouvelle destination. Nous y serons dans une heure.
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    - Direction les Atolls de la Reine Genièvre capitaine.
    - Très bien monsieur, cap sur les Atolls de la Reine Genièvre les gars !
    - Oui chef !

    Monsieur. J’aime beaucoup ce titre, et ça fait bien un moment qu’on ne m’a pas appelé comme ça. Ici, ils pensent tous que je suis l’assistant du Moine Hérétique, homme que leur roi tient en admiration. Par conséquent, je bénéficie également d’un certain respect des hommes présent. Et ça ne me déplaît pas. Le capitaine du voilier vient de donner les ordres, et les hommes s’attèlent pour naviguer vers la direction. Le voilier est bien évidemment un atout dans cette opération, sa vitesse est incroyable. Sur le pont, aux côtés du capitaine, je m’accroche à une des rambardes, et de mon autre main tient mon chapeau pour éviter qu’il ne s’envole.

    Cette vitesse est un avantage pour nous, puisque elle nous permet de vite rejoindre les deux sous-marins d’esclavagiste. Une vraie bande de fils de pute, toucher a une femme ou un enfant est impardonnable. Je peux comprendre les familles, si on touchait à mes sœurs, je ne sais pas ce que je ferai. Je comprends donc tout à fait leur peine, et ça commence même à me toucher à cœur, puisque ces enfoirés de demi-homme auraient pu s’attaquer aux triplées. Ou à ma mère. Par conscience et expérience professionnelle, je ne fais pas de cette affaire une affaire personnelle, mais inutile de dire que je ne vais pas bouder mon plaisir lorsque je vais leur faire manger leur barbe.

    Maltraité par le vent, je décide de rentrer dans la cabine. Nous arrivons d’ici une heure, et nous allons devoir planifier avec Loth comment s’y prendre. Dans la cabine, Loth est accompagné du capitaine des gardes royaux. Nox et Emeline ne sont pas venus avec nous. C’est étrange, mais on pourrait penser qu’il se passe quelque chose entre Loth et Emeline. Je vois quelque chose dans les yeux de Loth, mais je le vois très mal avec une femme. En même temps, je ne sais pas grand-chose sur mon partenaire d’affaires. Pas même sur son histoire.

    Mais il ne sait également rien sur moi. C’est assez étrange, mais nous partageons un trait commun : nous ne parlons que très rarement de nous, le travail prime. Nous partageons également une qualité : on est des gros travailleurs. Dans le bon sens du terme.

    - C’est bon, on se dirige vers l’Atoll.
    - Très bien, nous allons pouvoir discuter de la suite.
    - Tu as déjà une idée ?
    - Une ébauche plutôt. Ils possèdent deux Abyss, il s’agit donc de submersible particulièrement imposant. Et ils sont deux. Ce qui doit les contraindre à se cacher dans un lieu assez large, pour laisser passer les deux sous-marin, et leur permettre de remonter à la surface cote a cote. Une fois arrivé sur place, nous aviserons. Mais il faut les coincer, nous allons devoir nous battre. Il est inconcevable de les laisser partir avec les enfants. Ils seront une trentaine d’hommes d’après ce qu’a dit le Commodore Koke. Nous ne sommes que dix-sept, le combat donc risque d’être inégal.
    - Ouais, mais on a l’effet de surprise et la vitesse de ce bateau. Il faut les frapper d’un coup, et les empêcher de redescendre.
    - Exactement. L’effet de surprise est primordial dans cette opération. Nous devons attaquer d’un coup et vite. Mais il ne faut surtout pas endommager les submersibles, la sécurité des enfants est primordiale. Faites passer le message a tout le monde Rodrig.
    - Très bien Monsieur.

    Le plan était clair : attaquer vite et d’un coup. Le problème est que nous n’avons aucune information sur le terrain de la bataille. Ça risque d’être compliqué.

    1h plus tard

    -Atolls en vue !

    Loth et moi qui étions dans la cabine, remontons sur le pont. Le Barracuda file vers l’amoncellement de roche qui forme l’atoll sur l’horizon. Accroché chacun au bateau, nous attendons d’être plus prêt pour pouvoir mieux discerner notre environnement. Je sens la bataille arriver, et comme à mon habitude ça ne me dérange pas tant que ça. Le plus important est de sauver les enfants. Quelques minutes plus tard, notre bateau grâce à sa vitesse vertigineuse, a avalé la majorité de la distance qui nous séparait de l’ile, et nous voici enfin à portée de longue vue. A travers la lunette, Loth observe l’Atoll. A côté de lui, j’attends d’entendre ce qu’il a vu

    - On ne verra rien de l’extérieur.
    - A ce point ?
    - Oui, la topographie de l’ile est plus compliquée que prévu. Cette Atoll n’est formé que de dédales et autres, je ne sais même pas si notre bateau est capable de pénétrer la dedans.
    - Vous inquiétez pas msieur ! je suis un des meilleurs navigateurs du coin, ce n’est pas deux trois rochers qui vont me faire peur ! coupa le capitaine du bateau
    - Je ne remets pas en cause vos talents de navigateur capitaine, mais la faisabilité de la chose. D’après «Ma passion, les Atolls » de Maximilien Tegaus, j’ai réussis à tracer un semblant de carte.
    - Attends, en une heure ta réussis à lire un livre et à faire une carte à partir de ça ?
    - Non pas en une heure voyons. Une trentaine de minutes tout au plus.
    - Trente minutes tout au plus ? Bordel de merde.
    - Je suis atteint de mémoire eidétique.
    - Merde désolé je savais pas.
    -C’est pas une maladie Eden, j’ai une mémoire hors-norme. Je t’expliquerais un autre jour. J’aperçois des vigies sur les hauteurs. Au moins, nous avons confirmation que c’est bel et bien ici.

    Loth posa la longue vue, et descendit a la cabine en faisant signe de le rejoindre a Rodrig et moi. Une fois dans la cabine, il sort une carte puis commence à gribouiller des points avant de la dérouler entièrement devant nous


    - Voilà, l’ile n’est accessible que par deux endroits qui sont tous les deux à l’entrée : un passage mène vers la gauche, l’autre vers la droite tout simplement. Il existe également des tunnels sous-marins, mais ils sont obligé de sortir par une des deux entrées. Ce qui nous laisse deux endroits d’arrimage possible, que j’ai marqué sur la carte.
    - Donc ça veut dire que le timing est encore plus compliqué que prévu. Les vigies ont déjà dû nous repéré, le temps qu’on les trouve… il va falloir se bouger.
    - Oui, ils ont encore besoin de trente minutes, au grand maximum pour pouvoir replonger.
    - Trente minutes ? Comment tu peux le savoir ?
    - C’est ce que j’ai calculé pendant les trente dernières minutes.
    - Ah. Quand même. Alors, c’est pire que ce que je pensais, on risque d’être limite. Les tunnels ont l’air compliqués.
    - Allons Eden, ne crois-tu pas aux talents de navigateur du capitaine ?
    - Mouais…

    Maintenant que nous avons le plan, il ne nous reste plus qu’à le mettre en exécution. L’Atoll se rapproche à grande vitesse, bien aidé par notre bateau qui semble ricocher sur la mer. Sur le pont, les majorités des Gardes Royaux de Borea tentent tant bien que mal de rester accrocher. Nous remontons avec Loth pour être aux premières loges. Accroché au pont du bateau, nous arrivons enfin au fameux Atoll.

    Bien évidemment, les cris des Vigies retentissent pour signaler notre présence.

    -Accrochez-vous, c’est parti !

    Le capitaine décélère une fois arrivé à l’embouchure, pour ne pas qu’on s’écrase contre les parois. Mais ça ne l’empêche pas d’entrer dans le tunnel à grande vitesse. Et nous y voilà enfin ! La lumière a laissé placé à l’obscurité, seul les quelques rayons de soleil qui passent à travers les innombrables trous au plafond, permettent au capitaine de se guider. C’est déjà un mini exploit en soi d’avoir que d’être entré
    Concentré, le capitaine du bateau parvient à naviguer travers le tunnel, en gardant une certaine allure. La cavité est à peine plus grande que le bateau, et intérieurement je commence à avoir peur pour ma vie. On va sortir de la ? Nous arrivons à une nouvelle embouchure, et Edgar – le capitaine – manque de peu de rater la sortir, endommageant la coque au passage

    -Ne vous inquiétez pas c’est rien !

    Ne vous inquiétez pas bordel ? bien évidemment que je m’inquiète. On était à deux doigt de finir notre course dans un mur, comment tu veux pas que je sois un minimum inquiet bordel.[/color]


    Dernière édition par Eden le Mer 6 Juil 2016 - 17:46, édité 2 fois
      Enfin, au loin nous apercevons un halo de lumière. Il doit s’agir d’un des premiers lieux possibles d’arrimage. Le capitaine réduit son allure, afin que tout le monde puisse se mettre sur le qui-vive. Lentement, nous sortons du dédale pour rejoindre un endroit dégagé, dont le plafond, laisse passer la lumière

      - Personne.
      - C’est peut-être le deuxième endroit alors.
      - Ou alors c’était celui-là, et ils ont eu le temps de partir.
      - Ca fait que quinze minutes, et ça m’étonnerait que tu te soit trompé sur le calcul.
      - Moi aussi.

      Nous voici donc, au premier lieu d’arrimage possible. Tout le monde essaye de regarder un peu autour, certains se risquant même à essayer de discerner une forme au fond des eaux. Rien. Rien, sauf le calme. Pas un bruit. La tranquillité. Trop de tranquillité même. Quelque chose cloche. Tout a coup, les oiseaux migrateurs présent sur les hauteurs s’envolent, presque tous comme un seul oiseau.

      - Atten…

      Trop tard, le coup de feu est parti. Un des gardes royaux passe par-dessus bord, abattu d’une balle. Pendant une fraction de secondes, tout le monde sur le bateau regarde le cadavre du garde flotter sur la surface, qui commence à se teinter du sang de l’individu.

      -Sniper !

      Un second coup de feu retentit. La balle se loge dans un deuxième garde, qui suit le même schéma que son prédécesseur. Loth et moi levons la tête en l’air instinctivement : des silhouettes noires, perchées sur les hauteurs. It’s a Trap !

      Ils sont donc au deuxième endroit, et nous ralentissent ici pour pouvoir reprendre la mer.

      - Tire nous de la bordel de merde !adressai-je au Capitaine, en criant
      - Je fais ce que je peux !

      Pour sortir de ce guet-apens il n’y a qu’une seule sortie, et elle est en face de nous. Les tirs retentissent une nouvelle fois, touchant la coque. Tout le monde se met à couvert, pour éviter d’être pris pour cible. Pour nous sortir d’ici, le capitaine est obligé d’accélérer au maximum, afin de nous faire éviter les tirs, et de gêner les snipers. Mais cela a une contrepartie :

      - Oi, t’est sûr de pouvoir passer ?
      - Presque.
      - Presque ?!

      En effet, la sortie est à peine plus large que le bateau. Et nous arrivons à très grande vitesse. Une seule erreur, et la prochaine fois que nous naviguerons tous ensemble, ce sera sur le fleuve des Enfers. Je m’accroche une nouvelle fois, en tenant mon chapeau tandis que nous arrivons à l’entrée. J’inspire, puis souffle un grand coup quand nous nous engageons enfin dans le tunnel.

      Les yeux fermés, le corps crispé je n’ose pas regarder. Ou suis-je ? Dans le tunnel ? Ou en Enfer ? Fébrilement, j’ouvre mes yeux : on est toujours dans ce putain de tunnel. Je tape dans le dos du capitaine avec un grand sourire, qui sue et rit jaune. Avec le recul, peut être que lui-même n’y croyait pas… et pourtant nous l’avons fait. Nous avons réussis à passer. Maintenant, nous avançons dans le tunnel, le capital confiance de Rodrig étant à son paroxysme, il n’hésite plus à accélérer, même dans des virages très serrés. Nous rattrapons notre retard !

      Nous avons perdus deux hommes, et le bateau à essuyer quelques tirs. Bordel de merde, nous ne les avons pas encore rencontrés que déjà nous subissons des pertes. Enfoirés d’esclavagistes !

      - Allez les gars, le prochain lieu n’est pas loin.

      En espérant que ce ne soit pas non plus un guet-apens. Un second halo de lumière apparait enfin au loin, signe que l’endroit n’est plus très loin. Il va falloir maintenant se dépêcher, si on veut avoir encore une chance de les attraper.

      Nous arrivons enfin, et les deux submersibles apparaissent. Des hommes s’affairent autour, et on voit des vigies descendre au loin d’un escalier naturel, qui mène visiblement sur les hauteurs de l’ile. Les deux sous-marines côte à côte - relié par une planche de bois - sont situé à côté d’une petite plateforme naturelle sur laquelle une dizaine d’homme semble faire un feu.

      - Les voilà !

      Notre arrivé n’est évidemment pas passée inaperçue, et les hommes qui faisaient cuire leur nourriture, se retrouvent à saisir leurs armes. Plusieurs tirs fusent vers notre direction, et abiment de nouveau le bateau. Certains des hommes se précipitent à l’intérieur des submersibles. Merde, ils vont replonger ? Le Barracuda continue sa folle remontée, en essayant d’esquiver les tirs. Quand tout à coup, une idée me traverse la tête.

      - Loth !

      Ce dernier, accroché également tant bien que mal se décale pour écouter ce que j’ai à lui dire. Je lui chuchote mon plan dans l’oreille, ce qui a pour effet de le laisser quelque peu… surpris.

      - Tu veux vraiment faire ça ?
      - Ouais, je suis chaud.
      - Tu es bien conscient de ce que ça peut impliquer ?
      - Pas de soucis pour moi, je suis bouillant. On va leur défoncer la gueule à ces putains de kidnappeurs d’enfants.

      Loth esquisse un petit sourire, puis se met en position. Ses doubles articulations lui permettent d’avoir de meilleures prises, et de bénéficier également de meilleurs appuis. Conformément aux ordres de Loth, Edgar ralentit la cadence, pour que le bateau soit au moins un peu plus stable. J’en profite pour enlever ma veste, et mon chapeau. Loth se concentre quelques secondes. Pour cette utilisation, une concentration maximum n’est pas nécessaire. Une fois prêt, mon partenaire Long-Bras attrape fermement mon tee shirt, prêt.

      - Tu es sûr pas vrai ?
      - Je suis toujours sur.
      - Très bien, a tout à l’heure. Mantis Fist, Launch Eden !
      - A tout à l’heure !

      Et me voilà, attrapé par Loth puis lancé à toute vitesse vers les submersibles. Sa souplesse, couplée à sa technique et à sa double articulation est suffisamment forte, pour pouvoir envoyer un homme vers un endroit. Et quand je suis envoyé, c’est bien évidemment – bordel de merde – au sens propre. Projeté par le Mantis Fist de Loth, j’avale la distance qui me sépare de la petite plateforme encore plus vite que le bateau. Sauf que justement, c’est ça le problème. Ma vitesse.

      Sur le coup, j’ai pensé que ça serait plutôt cool d’arriver comme ça, mais j’ai quelque peu sous-estimé la force du Moine. Impossible de m’arrêter maintenant. A l’horizontal dans les airs, je vois la plateforme se rapprocher, et un peu trop vite à mon gout. Pas le temps de tergiverser, de toute façon va falloir assumer ! Je me mets en boule, et – par chance – atterris sur un bodybuilder, que je mets K.O à cause du choc. Il aura réussis au moins à amortir ma chute ! Je lève un pouce vers Loth, pour lui montrer que je suis toujours en vie ! Même si je me suis vraiment fait mal au bras.

      - Bordel mais c’est qui lui ? butez cet enfoiré !

      Je sors mon pistolet, puis tire sur le premier arrivé à mon niveau. L’effet de surprise est immédiat, et les tireurs hésitent, laissant au bateau quelques secondes de répit, ce qui devrait leur permettre nous rejoindre sans encombre. Le premier homme tombe, à cause de mon coup de feu. Un deuxième se jette sur moi, par surprise. Il m’entraine, et me jette au sol. Je me retrouve en mauvaise posture : mon agresseur commence à me mitrailler de coup de poing. J’essaye de me protéger, d’esquiver, de répliquer mais impossible : il est bien trop costaud.

      Mais au bout de quelques secondes à me débattre, j’aperçois enfin une faille : un seul moment d’inattention, et j’arrive à lui planter mon doigt dans l’œil. Aspergé par un filet de sang, ma vision se trouble. Dans le doute, je plante mon deuxième doigt dans son deuxième œil, et il relâche enfin son emprise. J’essuie mes yeux avec mon poignet, et aperçoit enfin le reste des troupes : les voici arrivé sur la plateforme.

      - Ne les laissez pas s’échapper !

      D’un côté, Loth et les Gardes déboulent, de l’autre la moitié de nos cibles s’enfuient vers les sous-marins, tandis que le reste s’en va au contact. Toujours sur le sol, je glisse pour faire un croche patte à un des hommes qui s’élançait, et le fait tomber au sol. Je lui plante plusieurs fois mon couteau dans le dos, pour être sur que ce soit la dernière fois qu’il s’élance. Je réussis enfin à me lever. Loth et les gardes se battent contre des soldats. De l’autre côté, deux hommes tirent sur notre bateau pour nous empêcher de les poursuivre. Ça veut dire qu’ils sont prêts à retourner sous les eaux !
      Merde ! J’arrive au niveau des deux hommes qui tirent, et esquive une balle in-extremis. Mon couteau vient se planter dans son torse, et je me sers de son pistolet pour tirer dans la tête de son ami, qui tombe à la mer dans un bruit lourd.

      - C’est bon les gars !

      Un des hommes vient de jeter la planche de bois qui leur sert de passerelle. Malheureusement pour eux, les quelques hommes affecté à leur défense sont en train de se faire liquider par Loth et les gardes. Il faut que je les empêche de plonger. Je saisis le pistolet de mon ennemi au sol, puis commence à avancer en tirant vers tout ce qui ressemble à un bodybuilder et qui se trouve vers les sous-marins. J’arrive en avoir seulement un seul, dans la jambe. Il tombe sur son sous-marin, tandis que ces derniers sont en train de s’enfoncer dans la mer.

      - Loth !cria-je pour lui signaler que les submersibles étaient en train de s’enfuir

      J’accélère, puis saute sur le premier submersible. In extrémis, je parviens à retomber dessus. Le deuxième a déjà fermé l’écoutille, et est entrain de rejoindre les profondeurs. Mais la balle dans la jambe de ma cible l’empêche de mener à bien sa mission.

      Me voilà donc, sur un sous-marin qui essaye d’enclencher sa plongée. Des hommes tentent de fermer l’écoutille, mais je tire vers eux pour les empêcher de s’approcher trop près. Un violent coup de pied dans la mâchoire calme l’homme avec une balle logée dans la jambe

      - Mais fermez cette putain d’écoutille bon sang !

      Impossible. Je vous laisserais pas faire. A bout de bras, je tiens l’écoutille pour les empêcher de la fermer. Ils ne pourront pas plonger si elle n’est pas fermée. Au contraire, ils risquent même de mourir. Je suis en train de jouer avec la vie d’enfants, mais c’est la seule façon pour les empêcher de sortir. Les deux pieds en appui, je force de toutes mes forces pour empêcher le submersible de rejoindre les eaux profondes.

      Il ne reste plus qu’un mètre avant que le bateau ne soit complètement immergé, et l’écoutille est toujours ouverte. Je crie, force, résiste tant bien que mal… mais voici que l’homme que j’avais calmé d’un coup de pied dans la mâchoire se jette sur moi, permettant ainsi à ses comparses de refermer l’écoutille.

      - Haha… trop tard.

      Le submersible s’enfonce, et nous sommes encore dessus lui et moi. Comme réponse, haineux de ne pas avoir réussis à les attraper, je le frappe à coup de poing dans la tête. Je le frappe jusqu’à ce que le submersible s’enfonce complètement, et que je sois forcé de sauter sur la plateforme pour ne pas me faire happer par le déplacement d’eau. Accroché à une main à la paroi rocheuse, la main de Loth apparait de nulle part et m’aide à remonter sur la plateforme. Exténué, je m’allonge, et tente de reprendre mon souffle

      - Je les… ai ratés.

        Ils ont plongé plus rapidement que je ne l'aurais parié et malgré les efforts vains d'Eden pour retenir le second sous-marin. Nous faisons six captifs, comptons cinq morts dans leurs rangs, en déplorons trois dans les nôtres. « On fait quoi des prisonniers ? » s'enquit le chef des gardes royaux alors que j'aide Eden à se hisser sur la plateforme. Je n'ai pas l'intention de faire des prisonniers et encore moins de faire de cadeau à des esclavagistes.

        - Envoyez-les nourrir les poissons.
        - Ha. Ha. Désolé. halète Eden.
        - Ce n'est pas de ta faute, plus de la mienne. Je ne me suis pas investi à fond parce que je n'ai pas réglé mon dilemme intérieur.
        - Quel dilemme ?
        - Les capturer ou les laisser filer.
        - C'est un dilemme ça ?

        Son regard incrédule me fait sourire. Je n'ai pas oublié que le plus souvent, il poignarde d'abord et pose les questions ensuite. Les ennemis sont envoyés à la mer, les alliés déposés sur l'île et recouverts d'une multitude de pierres pour les soustraire aux becs des charognards. Les gardes reviendront les chercher pour leur offrir des sépultures décentes à Boréa. Je déteste perdre mes hommes, même si ceux-là appartiennent en réalité à Maximilian. Nous regagnons le Barracuda. « On fait quoi maintenant qu’ils se sont tirés ? » demande Eden.

        - Howie !
        - C'qui ça ?


        Howie émerge des entrailles du Barracuda dans son exaspérante combinaison gonflable dont il s'attife à chaque fois qu'il prend la mer. Il a horreur de l'eau et son teint verdâtre le confirme. Eden recule par précaution vu la démarche chancelante de l'homme. Je fais les présentations. Howie fait partie de ces hommes que j'ai reçus en "cadeau" de Malfada Kripke après l'achat de mon sous-marin. C'est un opérateur sonar qui doit former quelques un de mes techniciens avant de s'en retourner chez sa patronne. De nos jours, les sous-marins sont les armes furtives par excellence, le meilleur moyen de forcer un blocus, de transporter des choses à l'insu de tous. Autant cette technologie en est à ses balbutiements, autant les recherches pour détecter l’indétectable progressent. Et dans ce registre-là, peu sont aussi avancés que Wayne Lee, l'un des principaux ingénieurs de Malfada.

        - Grâce à une invention du Dr Lee, nous pourrons suivre les sous-marins. C'est pour ça que j'hésitais. En leur donnant l'illusion de nous avoir échappé, ils nous conduiront malgré eux à leur base si jamais nous arrivons à les pister. Pouvons-nous, Howie ?
        - C'pas. Lee. qui. Beeoooorrrreeeeeee !!!
        - Merde, il gerbe ! Va faire ça par-dessus la rambarde !
        - Il a le mal de mer.
        - Et il s'dit ingénieur marin ? Et il n'est pas maitre-nageur aussi pendant qu'on y est ?
        - Ces Abyss se déplacent à huit ou neuf nœuds maximum, nous aurons le temps de les rattraper. Hey toi, file dans la cuisine lui chercher un remontant. Du rhum ou du cognac.

        Cinq minutes après, il arbore de nouveau quelques couleurs rassurantes. Il s'équipe d'un pistolet doté d'une mini antenne parabolique au bout du canon et se coiffe d'un casque audio. Howie semble bien étrange comme ça à appuyer sur la queue de détente de l'arme sans qu'aucune balle n'en sorte. Il fait le tour du bateau en "tirant" dans toutes les directions. J'explique alors à Eden que si nous étions capables de percevoir ce qui est éjecté du pistolet, nous serions de bien curieux êtres humains, plus proche des chauves-souris ou des dauphins mais pas humains. L'arme est en fait un canon à ultrason qui envoie par vague successives des impulsions sonores dans une direction. Le son traverse la mer jusqu'à ce qu'il rencontre un obstacle, auquel cas, il est renvoyé vers sa source.

        Cet obstacle peut être n'importe quoi, un rocher, un ban de poisson ou un sous-marin. L'écho retour du son est donc capté par les casques d'Howie. Il se charge ensuite de l'analyser en fonction de son intensité. Ce n'est pas une science exacte, très loin de là, on peut facilement repérer et confondre un monstre marin avec un submersible. Les deux se déplacent, les deux renvoient un fort écho sonore. Mais chaque métal a un écho qui lui est propre, une sorte de signature qu'on peut détecter. En tant qu'élève du docteur Lee, Howie est l'un des pionniers dans cette science émergente. Après avoir fait deux fois le tour du Barracuda, il s'immobilise, le sonar tendu vers mes dix heures. « J’crois… Eurk. Pardon, j’rote. J-je pense qu’ils vont vers l’ouest là. J'ai l'écho d'deux massif objets en acier. Ils s'déplacent à douze nœuds. Pardo... Oeurrrrrkrrrrr ! »

        - Ils sont bien plus rapides que je ne le pensais. Ils ont dû modifier les Abyss après l'achat. Capitaine Rodrig, cap à l'ouest. Maintenons une vitesse de quatorze nœuds histoire de leur laisser une avance confortable. Eux aussi utilisent une sorte de sonar rudimentaire en plus du guidage à vue. Nous ne devons pas nous faire repérer.
        - A vos ordres. Baissez les voiles, tendez les cordes !
        - Loth, à l'ouest y a Manshon.
        - Je sais. La seule autre île habitée dans le coin à part Manshon, c'est la Calonnie, l'état policier, le pays sans crime. Tu peux écoper d'une peine de prison à vie pour un banal mensonge. Ce n'est pas le paradis pour un trafic d'esclaves.
        - Manshon non plus. T'as dit que les Audifreddi ne pouvaient pas blairer les Tempiesta.

        Et comment. Une alliance entre Audifreddi et Tempiesta est aussi grotesque et invraisemblable qu'un souper entre Freeman et la Vierge d'Acier. La base des esclavagistes ne doit être ni à Manshon, ni en Calonnie. Rodrig maintient le cap et j'ordonne à Howie de se gaver de remontant autant qu'il le désire pour aiguiller le capitaine sur la bonne voie. Je laisse tout ça sous la surveillance d'Eden et me retire dans ma cabine où je commence à feuilleter la bibliothèque à la recherche d'un ouvrage plus détaillé sur les eaux occidentales de North Blue. Ils squattent forcément une île déserte qu'ils ont dû transformer en bastion. En tout cas, c'est ce que moi je ferai. Mais depuis la Crise des Menottés -c'est le nom qu'a donné la presse à la résurgence de l'esclavagisme sur North- les différentes flottes de la Marine surveillent toutes les îles désertes connues. Enfin, plus ou moins, c'est ce que disent les rapports que Bee m'a transmis. Entre les mesures politiques et les actes...

        [...]
        Une heure plus tard...

        - Rebroussez chemin, ne les suivez pas plus loin !

        Trop tard. Nous y avons déjà pénétré. Dans le Nid de Vaches.


        Un éclair fourchu zèbre le ciel d'Est en Ouest. Le temps est apocalyptique. De gros amas de nuages anthracites bloquent le moindre rai de lumière. Tel un épileptique, le Barracuda est balloté de gauche à droite par la violence de la houle et du vent. Aucun doute, nous sommes dans cette partie occidentale de North Blue que tous les marins un tant soit peu connaisseurs ont appris à éviter. Malheureusement Rodrig est un capitaine au sein d'une flotte royale, plus habitué aux voies officielles et aux escortes qu'aux vadrouilles dans les Rugissantes.

        - RODRIG ! C'EST LE NID DE VACHES ! DEMI-TOUR, VITE !
        - C'est quoi le Nid de.... OH PUTAIN !

        Vache Marine (500 D)

        Et elle n'était pas seule, cette vache. Deux, cinq, huit copines à elles émergent des profondeurs insondables. Voilà pourquoi cette mer est le cauchemar des flottes marchandes. Ce n'est pas Calm Belt mais pour une raison inconnue, cette race de vache marine a décidé d'y élire domicile et d'en faire son lieu de nidification. Rodrig tourne la barre comme un possédé, il est presque le seul de l'équipage à posséder encore ses entières facultés. Ils sont tous tétanisés par cette apparition cauchemardesque. Heureusement que le Barracuda est un navire de course, facilement maniable qui plus est. En un battement de cœur, il fait un tour complet à donner le tournis et file à l'anglaise. Tout le monde est désarçonné et s'accroche à ce qu'il peut. Comble du malheur, nous avons le vent en proue, trois quart face, ce qui ralentit considérablement notre vitesse. Ses vingts nœuds de croisière, c'est maintenant que nous en avons besoin !

        « Meeeeeeeeeeeeeeuuuuuuuuuuuuh ! »
        Le beuglement est d'outre-tombe. En fuyant nous avons déclenché l'attaque mais je préfère cela à l'immobilisme. L'une des bêtes pique une tête la poupe. « Tir de barrage ! » hurle Eden. J'avais oublié sa présence. Bel état d'esprit, il fait sortir l'équipage de sa torpeur et ça mitraille de partout. Ça ralentit un chouia la bête ce qui me permet d'armer ma technique. « Lordly Tiger, Poing du Messie ! »

        C'est juste un coup de poing. Un seul, exécuté à une vitesse éclair. Quand mon bras à double articulation se plie puis se tend, il génère un déplacement d'air qui est expulsé à la vitesse d'une balle de révolver. C'est la première essence de l'Inner Beast, l'art martial du peuple Long-bras. De la taille d'un ballon de foot, la balle d'air comprimé fouette le monstre en pleine face ce qui lui arrache un beuglement de fureur et de douleur. C'est à glacer le sang. Mais il en faut plus pour le faire flancher. Beaucoup plus. « Mantis Fist, Poing du Bourreau ! »

        Sa partie émergée nous surplombe de ses dix mètres. Concentrant mes forces dans mes jambes, je bondis à sa hauteur et du tranchant de ma main, je cingle l'air. L'onde de choc est tranchante cette fois-ci, mortelle. Une cascade de sang m'éclabousse quand la tête de la créature se détache de son corps. Dégoutant. Me voilà tout poisseux, tout collant, tout écarlate. Et la pluie choisit cet instant pour faire son entrée en scène.

        Merde !
        J'ai juste le temps de croiser mes bras en bouclier avant d'être percuté de plein fouet par une de ses saletés. Bon sang ! Je sens presque mes os craquer. Une tonne ? Deux tonnes ? Combien pèse-t-elle ? Le goût du sang imprègne ma gorge. Ma descente est vertigineuse. Direct dans la mer noire tumultueuse. Je ne dois pas perdre connaissance, autrement, je suis fichu.

        Émeline...

        J'ai beaucoup trop à faire pour mourir ici. Surtout tué par une vache marine. Je barbote dans l'eau obscure. Elle est glacée. Un adversaire à la fois, s'il vous plait. Attends ton tour, hypothermie. Je sens un fort courant à mes trois heures, la bête qui m'a fauché s'approche. J'ai peut-être tué sa mère qui sait. Là, clairement j'aurais préféré être un homme-poisson. Je nage bien, rapidement grâce à mes Longs-bras mais pas au point d'échapper à cette créature dans son élément. Au lieu de gaspiller d'inutile force à fuir, j'attends l'impact, concentré au maximum. Je ne vois rien. A part deux grands yeux jaunes. Qui s'approchent.

        - Style de la Pieuvre. Retour à la Vie.
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