Il ne restait qu’à s’exécuter. Prenant mes katanas et mon courage à deux mains, je me levai promptement de ma chaise, remerciai la serveuse ainsi que le barman et me dirigeai d’un pas décidé vers la sortie nord d’Attalia. Le nord, le nord… Rapidement, je stoppai ma marche et regardai autour de moi.
« Ah ! Excusez-moi ! »J’interpellai un passant dans la rue, au hasard. Je lui fis un petit signe de tête en guise d’excuse puis je lui demandai quel chemin prendre pour arriver aux entrepôts du nord. S’en suivi cinq bonnes longues minutes où le pauvre passant essayait de m’indiquer la route, mais ce que je n’avais pas prévu, c’est qu’il n’était pas du tout clair. Je lui avais demandé, je n’allais pas le rembarrer, même s’il me faisait perdre mon temps. Le pauvre s’emmêlait les pinceaux, un coup, c’était la troisième à gauche après l’échoppe à la toiture rouge, un autre, c’était la quatrième après le toit bleu.
« Ne… Ne vous en faîtes pas, monsieur. Je vais finir par trouver, merci quand même » Finis-je par dire en soupirant légèrement.
Le vieil homme s’excusa lui aussi et je repris mon chemin vers la sortie nord. Les mains dans les poches, la démarche nonchalante et quelque peu forcé, j’accostai plusieurs autres personnes pour trouver mon chemin, péniblement. Le sable s’engouffrait entre mes pieds et mes claquettes, alors que le soleil tapait fort sur ma peau claire. Et cette chaleur… Pénible, c’était vraiment pénible. Dire que je préférais ne pas demander pour chemin et partir à l’aventure. C’était sans compter cette pénibilité pour se déplacer. En plus, C’était désert la rue que je traversais. En plus, les bâtiments avaient l’air vieux, presque abandonné. Pas âme qui vive, personne à qui demander son chemin. Je m’étais complètement paumé, c’était bien ma veine.
J’en allais même à penser toquer à chaque porte de chaque bâtiment de cette rue pour savoir s’il y avait quelqu’un a l’intérieur, à croire que toute la ville se trouvait partout, sauf ici. Je me suis même surpris à m’approcher d’une des portes, à regarder à droite à gauche pour voir qu’il n’y avait personne et frapper. Le bruit raisonna dans toute la baraque, tellement qu’il prit de l’ampleur pour devenir un vacarme ahurissant qui s’entendait limite dans tout le quartier. Je me figeai sur place, un rictus sur les lèvres. Une goutte de sueur froide glissa le long de ma tempe gauche alors que je regardai autour de moi comme un robot. Personne… Même pas un chat qui se baladait. Mon sang ne fit qu’un tour et je me mis à détaler comme un lapin, peur de me faire choper par un fantôme ou quelque chose de non-vivant. L’endroit était beaucoup trop louche pour y rester.
Après une course effrénée de plusieurs minutes, je me fis stopper net par… Par rien. Mon pied s’enfonça juste dans le sable, ce qui m’arrêta net et m’envoya valser la tête la première sur le sol. Je n’en pouvais plus de tout ce sable, de ce soleil, de ce vent.
« Putain de pays de merde !! »Oups… Ça m’avait échappé. Je me relevai vite fait, m’assurai que personne n’était aux alentours. Cependant, ma surprise fut grande lorsque je remarquai enfin que j’étais arrivé au niveau des entrepôts. Et qu’il y avait quelqu’un, assis sur une chaise sous un parasol, un magazine à la main, qui me fixait d’un air ahuris. Cet homme avait les cheveux bleu foncé, qui tiraient u peu vers le noir. Il portait une tenue de la même couleur, qui couvrait l’entièreté de son corps. Je le regardais, il me regardait, cet échange de regard dura plusieurs secondes avant que je ne me lève, me gratte l’arrière du crâne et me retire lentement, suivi du regard par l’homme. Je me cachai rapidement de sa ligne de vue en me plaquant derrière un mur au niveau d’un croisement. Bon, deuxième objectif rempli : trouver les entrepôts. Il restait plus qu’à : trouver le 3-A, rentrer à l’intérieur, choper le trésor et fuir à toute jambe. La prochaine étape était donc de bien localiser les lieux. Furtivement, je lançai un petit regard pour voir si la personne était encore là. Mais il ne l’était plus. Il avait disparu ! Sa chaise longue, son parasol, son journal, plus rien ! Rapide ! Je m’en frottais les mains d’avance. Il devait sans doute avoir autre chose à faire, sinon pourquoi serait-il donc parti ?
Furtivement, je sortis alors de ma cachette, je balayai les environs pour vérifier qu’il n’y avait personne et je m’approchai de ces fameux entrepôts, à la recherche d’écriteau ou de pancarte qui pourrait m’aider à trouver celui qui m’intéressait. Ah ! J’étais en face du 1-C. Si on admettait le fait que les lettres désignaient des rangées et les chiffre le numéro de bâtiment dans la rangée, il fallait que j’aille deux colonnes à gauche et avancer de deux. Je me collai alors à la porte de la bâtisse en face de moi, me glissai lentement contre celle-ci dos à elle et lorsque j’atteignis le coin, j’évaluai les distances qui me séparaient de l’autre entrepôt pour ensuite effectuer une rapide roulade afin de passer de l’autre côté. Jetant un œil pour la petite pancarte, je me rendis compte que j’avais pris le chemin inverse. J’étais sur le 1-D. Une petite claque sur la tête et plusieurs autres roulades plus tard, je me retrouvai enfin contre le 1-A. Il me suffisait alors de longer alors deux autres dépôts pour arriver à l’endroit tant convoité.
Après avoir fait le tour à la recherche de fenêtre ou d’un autre endroit pour entrer, je me retrouvai un peu sans solution devant la grande porte de l’entrepôt 3-A. Je n’avais aucun moyen de m’introduire et cela m’embêtait pas mal. Je tapai de manière agacée du pied sur le sol avant de mettre un coup sur la porte… Qui s’ouvrit sans autre malice. Un grincement accompagna l’ouverture de la porte alors que la lumière envahissait peu à peu l’endroit et un nuage de poussière se souleva à cause du vent qui s’engouffrait à l’intérieur. Je ne pouvais rien voir pendant plusieurs secondes, je toussai même tout en balayant l’air devant moi de la main pour essayer de ne pas mourir étouffer et sans attendre, je m’engouffrai à l’intérieur.
Une fois rentrée, la première chose remarquable était que tout était recouvert de bâche, de tissu ou d’autre revêtement qui permettait d’éviter à la poussière de s’installer. Poussière qui régnait en maître dans ces lieux au vu de la quantité de celle-ci. Cela faisait bien 2-3 mois que rien n’avait été touché ici, du moins de ce que je voyais. Je découvris plusieurs formes au hasard, un peu partout. Je pouvais voir des armoires, des malles, des coffres et des bricoles. Tous étaient vides. C’était bien ma veine. Je m’enfonçai alors de plus en plus, jusqu’au moment où je remarquai qu’une des bâches avait des traces de doigts à son extrémité, comme si quelqu’un l’avait récemment soulevé. Non… Était-ce le mec qui gardait la place ? Se serait-il caché ici pour me choper ? Non, je divaguais. J’approchai ma main de la bâche très lentement pendant que mon rythme cardiaque s’accélérait. Plus la distance s’amenuisait, plus je me mettais à suer. J’avais réussi à me faire peur rien qu’en imaginant que quelqu’un s’était caché dessous. Mon autre main s’approchait en même temps de la garde d’un de mes katanas, prêt à le dégainer. Lorsque je saisis le bout de tissu, d’un geste vif, je la jetai derrière moi et je décrochai sans attendre mon arme de ma ceinture pour la pointer en face de moi. Et je pris pour cible… Une simple petite malle. La tension environnante et de mes épaules retomba d’un coup sec, je soufflai bruyamment et fortement à en lever du sable autour de moi. J’étais vraiment stupide !
Après avoir retrouvé mes moyens, j’observai de près la malle. Elle était plus récente que les autres, la peinture n’était pas délavée comme sur les autres. Le métal brillait encore. J’avais juste de la chance que, comme toutes les autres, elle n’était pas fermée par un cadenas ou autre. Aucun trou de serrure n’était visible. La personne qui l’avait déposé ici pensait que personne n’allait la remarquer, sans doute. Je levai le loquet et je l’ouvris sans trop de soucis. Ma stupeur fut grande lorsque je remarquai plein de trucs à l’intérieur. Des objets qui brillaient, d’autres qui dataient, mais surtout… Et surtout, quelque chose qui capta directement mon regard. Je n’en croyais pas les yeux… Ça.
Je m’en souvenais comme si c’était hier, de ce marin qui m’avait parlé de cette chose. Je devais avoir 15 ans. Alors que j’aidais la vieille dame qui s’occupait de la taverne sur Tanuki, une meute de marins fraîchement débarqués rentra pour s’abreuver jusqu’à plus soif et plus que de raison. Après plusieurs heures de chansons enjouées et de boisson alcoolisée, l’un des marins se mit à raconter les histoires de leur traversée. C’était super intéressant, j’avais des étoiles pleins les yeux, le sourire aux lèvres, même en étant corvée de planche. La discussion bascula lentement vers des histoires fantastiques et de piraterie. À ce qu’il paraissait, un moyen existait pour acquérir des pouvoirs surnaturels. Certains avaient le pouvoir de glacer les océans, de cracher du feu ou même de fendre les cieux tel un phœnix. Il suffisait pour cela de trouver des fruits étranges à l’aspect bien reconnaissable qui renfermerait l’intérieur eux des démons avec lesquels la personne passerait un pacte en le mangeant. Sauf que le prix à payer était de ne plus savoir nager, la personne liée à un de ces démons coulait comme une enclume. Bien sûr, ces marins n’en avaient jamais vu de leurs yeux. Ces fruits étaient très rares et très convoités. Cela pouvait coûter des fortunes.
Un truc aussi rare, planqué dans un vieil entrepôt dans une malle même pas fermée… Soit j’étais né sous une très bonne étoile, soit c’était un piège. Mon instinct penchait sur la seconde solution. Mais, la question était surtout de garder ou non le fruit pour moi. Oui, c’était grâce à Yashin et aux pirates Roux que j’avais cette occasion rêvée et je ne pouvais jamais les remercier de m’avoir pris avec eux. Cependant, une chance pareille, je ne pouvais pas passer à côté. N’empêche, ce fruit avait l’air vraiment bizarre. Il ressemblait à une grenade avec plein de spirales dessus. Je le pris dans mes mains pour l’observer sous toutes ses coutures en m’asseyant sur la malle que j’avais refermée. Manger, ou ne pas manger ? Telle était la question que je me posais en le regardant. Je ne pourrais plus nager si je le mangeais et vu le périple que j’avais envie d’entreprendre, savoir se débrouiller dans l’eau était quand même un grand avantage. Mais d’un autre côté… C’était vraiment excitant de savoir ce qu’il allait se passer et ce que j’allais gagner à le manger. Au pire, il suffisait de ne jamais tomber en mer. Allez, bouché par bouché ! Lentement, je croquai à pleine dent dans ce fruit, petit à petit, mangeant aussi la peau sans faire de concession. Simplement, plus je mangeai, plus c’était dur. Chaque croc devenait un supplice tellement c’était infect ! J’avais l’impression de manger le truc le plus dégueulasse qui m’avait été donné de manger. Mais je le finissais en entier, il n’en resterait que la tige !
Après avoir tout englouti, je restai assis quelques minutes, en attendant un quelconque effet notable sur mon corps. Mais rien ne venait. Je haussai alors les épaules. J’avais peut-être mangé un truc infâme pour rien. Qui ne tentait rien n’avait rien, hein ? Je le levai alors et décidai d’ouvrir une nouvelle fois la malle pour en voler le contenu. Rien ne se passa d’inhabituel, ce qui me frustrait pas mal. J’attrapai tous les objets un à un pour les poser sur le morceau de bâche. Après plusieurs minutes, le coffre était complètement vidé et une petite montagne d’objets brillants et/ou anciens se trouvait devant moi. Je fis quelques grimaces en me demandant vraiment comment j’allais porter tout ça. Pendant ma petite réflexion, j’enveloppai le barda comme un baluchon que je nouai très solidement avec l’aide d’une corde trouvée non loin de là. Je me frottai alors les mains, crachai même dedans afin d’augmenter l’adhérence de celle-ci et, respirant un bon coup, j’attrapai l’extrémité de mon sac de fortune pour le lever et le poser sur mon épaule. Ce n’était pas chose aisée, le bousin devait peser au bas mot un bon cinquante kilos, plus ou moins. Bref, ça pesait son poids quoi ! Si seulement j’avais un moyen d’alléger tout ça…
À cette pensée, je sentis quelque chose d’inhabituel se passait : une petite aspérité apparut sous mon doigt, comme si c’était un genre de petit bouton et un petit clic bien distinctif s’entendit dans tout l’entrepôt. Je regardai d’un air désabusé ma main, je ne comprenais pas vraiment ce qu’il venait de se passer. Et, lentement, sans aucune explication, je ressentais de moins en moins de poids sur mon épaule, je pouvais me redresser de plus en plus, jusqu’à me retrouver droit comme un i, portant le sac d’une seule main. J’avais les yeux écarquillés, un air complètement ahuris sur le visage, je regardai sans comprendre ma main qui soulevait cet énorme paquet sans effort, jusqu’au moment où une illumination me traversa l’esprit. Tout devenait clair dans ma tête. Ce fruit, c’était un vrai ! J’en connaissais même son nom dorénavant : le Masu Masu no Mi, le fruit de la masse. Lorsque je le désirai, je pouvais créer et actionner un bouton qui allégeait, ou alourdissait sur un objet. Pratique pour les vols ! Cela tombait bien, c’est ce que je faisais. Mais, je sentais tout de même que ça ne se faisait pas sans un certain effort de ma part. C’était un peu éprouvant, mais il suffisait de diminuer le poids de manière raisonnable. Je devais le porter à deux mains, mais au moins ça ne me pompait pas. J’avais encore besoin de force pour y aller.
Sans me faire prier, je m’engageai vers la sortie d’un pas sûr, décidé et fier de moi. Lorsque je vis la lumière du jour, je me fis éblouir à cause des rayons du soleil qui se reflétaient dans le sable. Après avoir déposé le bordel, je mis la main devant les yeux pour continuer à avancer, mais je me fis arrêter quelques mètres plus loin par une personne qui était plantée juste devant l’entrepôt. Cette personne ressemblait fortement à celle qui gardait l’endroit… À la simple différence qu’il n’avait pas cette énorme épée avec lui dix minutes auparavant !
« Bonjour » Lança le jeune homme devant moi, sa grande épée derrière l’épaule.
« Euh… Bonjour ? »« Je peux savoir ce qu’un étranger peut bien faire dans un entrepôt lié au cartel Capital ? »« De… Mais de quoi parlez-vous ? »Je n’avais pas la moindre idée de ce qu’il me parlait. En plus, j’avais du mal à voir, le soleil m’empêchait de correctement voir.
« Pourquoi avez-vous embarqués des antiquités ainsi que des trésors dans votre sac ? »« Mais… De quoi ?! » Répondis-je un peu paniqué.
Ce mec me filait vraiment les jetons.
« Ah. J’ai oublié de me présenter. Hikari Hurano, Commandant aux ordres de la Marine, pour vous servir. »« Eh… Kagami, Kan Kagami… Heureux de vous rencontrer. »Eh merde… La Marine. Qu’est ce qu’elle pouvait bien faire ici ? J’étais cuit, vraiment.
« Bon, alors, tu vas m’expliquer la situation ? » Reprit le jeune homme en me tutoyant directement.
« Euh… Baaah … Euh… »Rien ne pouvait sortir de sa bouche, j’étais comme coincé sur place, paralysé. Il se mit à soupirer longuement et souleva sa grande lame pour la planter sur le sol. La garde lui arrivait bien au niveau des pectoraux, c’était démesuré.
« Je crois savoir moi. » M’interrompit-il.
« T’es venu pour récupérer les objets destinés pour ensuite les vendre aux plus offrants, non ? »Il avait raison sur ce point. Ces babioles devaient avoir une quelconque valeur marchande. Ça devait être une bonne prise pour bien me faire voir des autres pirates.
« Bien… Bien. Donc, soit tu déposes gentiment ce sac et tu pourras partir sans bobo, soit tu refuses d’obtempérer et je serais dans l’obligation de t’arrêter. Qu’est-ce que tu choisis ? »Bien sûr, la première solution ne me plaisait pas du tout. Je n’avais pas subi tout ce climat merdique et ce sable chiant pour repartir bredouille. Il ne restait qu’une seule solution. Je pris alors mon courage à deux mains, me délestai lentement puis décrochai les deux katanas de ma ceinture. Lorsque le commandant de la Marine remarqua mon geste hostile, il déterra son arme et se mit en garde.
« Eh bien… Tu l’auras voulu ! »