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Rouge et Monstre en révolution.

C’est un bar sympa, le Chaloupeur. Il y a le vin qui coule à flot, les gosiers qui se marrent, les chaises qui raclent le sol sous les mouvements de coudes, l’odeur de saucisson qui emplit l’air et les voluptés de clopes qui recouvrent le tout. Les nuages de nicotine emplissent tant l’air que chaque homme ne fait qu’apercevoir son voisin. Alors on se tape l’épaule, on renverse sa pinte et le sol s’abreuve des erreurs de bras.

C’est un bar sympa, le Chaloupeur. C’est un bar sympa jusqu’à vingt-deux heures. Parce qu’après il y a le couvre-feu, et quand la cloche sonne, les hommes partent, les gueules se taisent et les lits se remplissent. C’est drôle, ça, parce que dans ce bar il y a du beau monde : il y a les pirates qui tuent, les voyageurs impétueux et les gamins plus fous que courageux. Mais étrangement, malgré les règles qui s’oublient et les torses qui se bondent, la règle du coure feu est respectée. C’est comme si cette règle-là, et seulement cette règle-là était au-dessus de toutes les autres. Parce qu’à bien y regarder, les poches non surveillées se font voler, les bières oubliées vidées et même la caisse du bar perd quelques fois une liasse de billet. Mais le couvre-feu, lui, tient toujours par une alchimie que l’homme ne comprend pas. C’est comme si avec la cloche, la joie s’oubliait pour laisser place à une chose que chaque foutu cœur qui bat ne voudrait connaître.

Et le Monstre, d’horreurs, il en a vu. Il a vu des âmes s’envoler, des corps disparaître et des cœurs arrêter de battre tant et trop de fois. Oh il n’a pas peur, non, juste qu’à fumer son cigare chaque jour que le bon Dieu lui donne sur cette ile lui suffit. Le thé remplace les bières des autres. Les cigares sont préférés aux mégots de roulés. Et quand la sonne cloche, le Monstre se perd dans sa minuscule chambre d’hôtel. La pièce sent le renfermé. Les murs jaunis par le tabac perdent chaque jour des morceaux de tapisserie. Le matelas, aussi dur qu’un mur de brique et aussi puant qu’un nid de merde lui donnent du fil à retorde alors il préfère la chaise au lit. Le dossier en bois lui donne des courbatures mais entre ça et des maladies qu’il ne veut pas connaître, le choix a été rapide. Le soir, quand les lumières s’éteignent et les rideaux se ferment, lui les garde ouverts. La lampe éteinte, seuls les braises de son cigare viennent de temps à autre éclairer sa gueule. Le sommeil ne se trouve pas facilement alors ses deux énormes globes se perdent à contempler l’immense mur en face de l’hôtel. L’édifice de pierre fait bien dix mètres de hauteur et plusieurs pieds de large. Des barbelés rougis de rouille et de sang viennent fermer toute volonté de sauter sur plus de 3 mètres. Mais du haut du quatrième étage de l’hôtel, ce n’est pas cela que le Monstre aime admirer. Non.

Il y a dans cette ville des rituelles que tout homme aurait du mal à comprendre. Ici, quand les yeux s’endorment et que vient l’heure des chats, quand le grand clocher de l’église vient sonner les douze coups de minuit, il y a une messe d’une drôle de sorte qui s’organise. Cela commence par un homme. Il arrive toujours seul, en courant. Il sprinte le long du mur jusqu’à aussi loin que permet la vue du Monstre. Durant les deux minutes qui suivent rien ne se passe. Vient alors le chant d’un mésange. Rapide, presque inaudible. Il ne dure qu’à peine une demi-seconde mais cela suffit. Ensuite, et c’est là où le Monstre sourit chaque soir, une troupe d’hommes apparaît. Ils agrippent chacun un énorme sac qu’ils tiennent tant bien que mal sur leurs épaules fatiguées. Arrivés aux pieds du mur, ils balancent leurs cabas en un instant. Leurs yeux se lèvent alors pour vérifier que la charge ne se bloque pas dans les barbelés. Pas une fois leur lancé ne rate, et chaque fois, le groupe s’éparpille aussi vite qu’il s’est créé pour disparaître dans les ruelles de la ville. Le rituel est fini. Oh bien sûr de l’autre côté des pas rapides et brefs se font entendre. Le Monstre aimerait savoir ce qu’il s’y passe mais les règles sont claires sur cette île. Ce qui se passe derrière le mur ne regarde que ceux derrière le mur. Et la curiosité maîtresse du monde n’est qu’une putain qui n’a qu’à bien se tenir. Car ici la curiosité meurt à coups de fouets.

Les douze coups sonnent. Le Monstre sourit. Sa paluche se perd à trouver un cigare pendant que le sprinter file sous la fenêtre. Il cherche une allumette dans son veston durant un temps et c’est seulement à la première volupté de cigare que le mésange se met à chanter. S’en suivent 4 hommes. Le Monstre reconnait la démarche des 3 premiers. Le dernier est un nouveau, plus petit, plus maigrichon. Au vu de sa carrure on ne lui donnerait pas l’âge de connaître les femmes. Il a l’air pataud avec son énorme cabas qu’il tire tant bien que mal. Les autres ont déjà lancé le leur mais lui tente désespérément de gagner en force en jouant le balancier avec ses minuscules bras. Enfin il lance. Le sac gagne en hauteur et en vitesse mais vient lamentablement embrasser les barbelés. Le cabas se balance entre les chaînes un moment avant de se bloquer, là, au-dessus du mur, à une dizaine de mètres de hauteur. Les trois autres hommes gesticulent des mains et sans même le son, c’est la colère que le Monstre entend. L’un des hommes de la bande signe alors le dispersement et les 4 ombres disparaissent bien vite.
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aut dire que ce soir, en ville, l'ambiance est encore plus tendue que d'habitude. Car demain soir, dans un palais de la haute on fête l'anniversaire de Franklin Junior, le fils de L'Archityran. Un gala ou sont invités tous les gros pontes du coin, et plus particulièrement la plupart des officiers de la Brigade de Protection du Peuple, fidèles entre les fidèles et premiers garants du maintien au pouvoir de son infecte majesté Franklin.

Ce qui fait qu'aujourd'hui le peuple s'est enfermé chez lui une heure plus tôt que d'habitude, et que les rues sont pleines de milicien, arpentant les pavés dix par dix et prêts à bondir sur le pauvre crétin qui oserait bafouer le couvre feu.

Heureusement l'archityran est un type qui a bon fond. Et demain, ceux qui applaudiront le plus fort au discours qu'ils seront obligés de venir écouter sur la grand place, auront droit a une distribution de bons de vacance qui leur permettront de prendre quelques jours de congé.


En face de ta fenétre, une immense affiche affichant le visage du Tyran semble te faire un clin d'oeil moqueur. Soulignant le slogan absurde peint en dessous.

VOTEZ MALIN, VOTEZ FRANKLIN !

On dira ce qu'on veut, mais il fait bon vivre à Citadelle...


Dernière édition par Red le Mer 14 Sep - 20:13, édité 1 fois
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Le Monstre est là, comme un imbécile. La gueule par la fenêtre il voit le sac qui le  nargue et il pense au couvre feu qui le bloque. Il y a ce bruit, bien reconnaissable, narguant, du papier du cabas qui poussé par le vent vient se déchirer contre le barbelé. Il y a ce lampadaire, droit comme un I qui éclaire la rue de sa lueur pale. La fenêtre ouverte, les souffles d'air viennent rallumer le mégot de cigare presque éteint, pendu lamentablement aux lèvres du Monstre. Il respire un instant, avec les « pour » et les « contre » qui se battent en duel dans son pauvre crâne. Il respire un instant et puis sort son épée. La lame d'air part presque aussi tôt comme une minuscule fissure  au milieu de la ruelle. La seconde d'après, la vitre du lampadaire explose.

Le Monstre sourit. C'en est presque trop facile.

Son corps saute par la fenêtre pour atterrir au milieu de la rue. Il lève les yeux pour apercevoir le sac se faire ballotter par le vent et chatouiller par les barbelés dix mètres plus haut. Ses genoux se plient, son torse se bombe et c'est tout son corps qui s'envole. Lorsque ses deux pieds retouchent le sol c'est pour avoir le poing serré sur le sac. Ses main se mettent à agrandir frénétiquement l'ouverture faite par les fils de fer pour réussir à voir à l’intérieur. Le poids est extrêmement léger et plus il ouvre délicatement le sac et plus la curiosité monte. Lorsqu'il réussit à enfin enfoncer un poing à l’intérieur c'est pour en ressortir un petit bout de papier où sont griffonnés à l'encre rouge quelques mots.

Soudain, un bruit se fait entendre. Ce bruit là, celui du réservoir qui se ferme et de la balle qui s’enclenche dans le chargeur, le Monstre l'a de trop entendu pour ne pas la reconnaître. Lorsqu'il lève les yeux c'est pour apercevoir quatre ombres dispersées de chaque côté à une dizaine de mètres de lui. Il sourit. Il ne lui faut pas plus de quelques secondes pour reconnaître le groupe de joyeux lanceurs de sacs.

Le Monstre ferme les yeux un instant. Sa respiration se met lentement à réguler la fluctuation du sang ayant de trop augmenter. Son adrénaline baisse peu à peu et c'est le haki qu'il lance aller chercher les volontés du groupe. Le Monstre ne lit que de faibles informations : la peur, la suspicion, le calme quand même et la préparation au combat, surtout. Il lance le sac aux pieds du plus proche. A ses larges épaules, à sa démarche élancée, le Monstre croit reconnaître l'éclaireur.

-Hmm. De rien. Ça m'a fait plaisir.


Les hommes restent là. Leurs armes pointent maintenant le corps du Monstre. Il sourit et plutôt que de se mettre en garde préfère garder ses mains au fond de ses poches. Un ange passe, le temps au bec du cachalot d'avaler quelques voluptés de cigare.

-Hmm. A votre place j'éviterais les armes à feu. Ça attire. Hmm. Si vous voulez vraiment me tuer, préférez les armes blanches.

C'est à ce moment que le Monstre sort de son dos l'énorme lame lui servant d'épée. L'élancé siffle entre ses dents et d'un claquement de langue les 4 ombres s’envolent. Le Monstre sourit.

Il commence à aimer cette île.

Le lendemain, lorsque le ciel se réveille, à l'heure où Madame la lune embrasse les rayons endormis du soleil, une vingtaine de soldats de l'île sont déjà autour du lampadaire abîmé. Ils s’activent à tenter de trouver quelque indice laissé par le casseur et chaque bout de verre est ramassé comme une preuve de crime. Le Monstre admire le spectacle de sa fenêtre, un regard perdu sur le drôle de mot trouvé durant la nuit.

« Soldats, faites tomber les armes et rappelez vous que cette île est la votre, la notre, et pas celle d'un seul homme. Rappelez vous que ce qui fait la richesse du Monde, c'est la liberté des âmes. »

Le Monstre sourit avant de se perdre de nouveau à admirer le spectacle du bas.  Un drôle d'homme aux lunettes épaisses et au bloc note fourni semble noter sans s’interrompre de drôles de notes. La scène continue ainsi durant de nombreuses heures. Et le thé a beau être bu, et le repas descendu et les bavarderies du bar se transformer en discussions de soûlards, les soldats restent. Alors lorsque le soleil commence lentement à descendre, c'est d'un sommeil las que le Monstre s'endort péniblement sur sa chaise.

Il est à peine l'heure de la lune lorsqu'un explosion survient. A peine audible, bien éloignée. Elle résonne un instant dans l'esprit endormi du cachalot avant de le laisser replonger dans son sommeil. Et puis vient la deuxième, plus forte. Violente avec le souffle d'air qui coupe le cœur et surtout un énorme bloc de pierre qui vient exploser la vitre de la chambre avant d'arrêter sa course à quelques centimètres de la gueule du pirate. Il sursaute comme un gamin pris en flagrant délit de sommeil durant un cours d’algèbre. Ses deux pieds prennent appuis et son corps atterrit au milieu des gravas.  La poussière a tout recouvert, empêchant n'importe quel œil de voir, n'importe quel nez de respirer. Il a beau remonter le haut de son costume à sa gueule, l'air est irrespirable et ses poumons ne s’arrêtent pas de cracher de la poussière. Après quelques secondes il réussit enfin à apercevoir quelque chose.En face, le mur semble s'être écroulé comme un vulgaire château de cartes. La poussière retombe peu à peu et plus le temps passe et plus le Monstre aperçoit deux camps se faire face.

A sa gauche, une armée de soldats pointe les armes vers la centaine d'homme de gauche, armés de pioches, pelles et parfois fusils.

Il sourit, s'étire un long moment avant de sortir sa lame et de se tourner sur sa droite.

Non, vraiment, il aime bien cette île.
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Tout d'abord, il y a le silence, avec les deux camps qui se font face. Les armes se chargent d'un côté. On entend la poudre remplir les canons, les pioches se cogner entre elles dans un crissement de métal. On entend certaines toux et presque les respirations haletantes des hommes parés au combat.

Il y a ce silence et puis soudain deux volets à battant d'une battisse encore étrangement intact s'ouvrent en claquant pour laisser sortir des fenêtres deux gros canons de morts.

La seconde qui suit, les balles jaillissent. Les corps tombent comme de pauvre marionnettes sans vie dont les files auraient été coupé d'un coup de ciseau. Simple. Impressionnant d'efficacité. En un instant la grande majorité des soldats est tombée pour ne plus jamais se relever. Des gerbes de sang ont fleuri tout autour, maculant les murs des dernières traces de vie de ces hommes, de ces gamins pour certains. Quelques âmes ont résisté et des toux de sang crachent encore de certaines gueules. Mais les révolutionnaires ne sont pas décidés à garder des vies : les fourches s'enfoncent déjà dans les trognes sanguinolentes des survivants.

Le Monstre lui, n'a toujours pas bougé. Oh son Haki discerne bien le groupe de quatre de la veille le surveiller du coin de l’œil, mais les autres ne s’intéressent pas à lui.

Le plan a l'air bien rodé et les révolutionnaires semblent connaître l'organisation sur le bout des doigts.
A leur manière d'achever les blessés sans sourciller, de faire très régulièrement un tour d'horizon entre deux gestes, à leurs façon de tenir le canon des fusils fermement bloqués contre l'aisselle, le Monstre comprend que quelques soldats se cachent dans la meute.

Ce n'est pas une révolution ordinaire, non. Ce n'est pas un révolution de villageois et une armée se cache derrière.

Un bruit survint derrière le Monstre. Il s'est fait avoir. Comme un bleu. Il sent le canon froid d'une arme dans son dos. Un instant plus tard les quatre autres hommes apparaissent. Il les reconnaît, à leur démarche, à leur manière de bouger presque comme un seul. Il y a le grand, maigre, avec ses lunettes rondes vissées sur le nez. Il y a le gamin qui n'a pas quinze ans. Il y a la marmule, un grand sac de muscles de plus d'un mètre quatre-vingt. Et puis il y a l'autre, la femme, celle qui se déguise en homme, qui cache ses seins en les serrant dans des bandages et ses autres formes dans le grands vêtements larges.

L'homme à lunette s'avance vers lui.

-Qui êtes vous ?

Le Monstre sourit.

-Moi qui pensait être connu... Hmm...
-Qu'est ce que vous venez faire dans notre guerre ?

Un cigare s'allume. A la première volupté, ses paupières se ferment et ses narines se rebiffent comme si tout son corps se lovait dans un songe.

-Hmm. Dans deux minutes, une vingtaine d'hommes arrivera de la gauche, le double fonce vers la ruelle derrière moi. Hmm... Un peu d'aide, ça ne peut pas vous faire de mal.

L'homme à lunette ne bouge pas et l'arme braquée dans le dos du Monstre non plus. Quelques secondes passent ainsi sans que quiconque ne sache quoi faire. Le Monstre lui sourit, et à chaque seconde qui passe le compte à rebours qu'il s'est donné avance de plus en plus vers le 0. Alors quand le tic tac intérieur se termine, il en oublie l'arme pointée et ses deux paumes s'envolent pour claquer une immense lame d'air sur sa droite.

Le Monstre n'aime pas ça. La première rafale a fait tomber une poignée de soldats et déjà, les autres l'entourent. De l'autre côté c'est le double qui sort les armes. Les lames sorties, ce sont les corps qui bougent et le métal qui claque. Les coups volent. Les hommes tombent, le sang gicle, la lame du Monstre brise les corps et casse les gueules mais de lui, aucun sang n'éclabousse. Il y a juste ce bruit, horrible, de la peau brisée par le fer et des organes broyés par le choc. Son corps bouge tout seul, comme une routine, comme une sale machine automatique, rouillée, qui ne fait rien de plus que ce qu'on lui demande, que ce qu'elle a répété tant et tant de fois qu'elle ne sait plus faire que cela. Alors quand les corps ont fini de tomber, le Monstre a le regard ailleurs. Ses muscles suintent l'effort. Sa chemise trempée dégouline de sueur et de sang. Peu à peu son esprits reprend pied et quand ses yeux mouillés sèchent la sueur c'est pour ne plus voir qu'un autre corps à côté de lui. Celui du grand homme sec.
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J'avoue, j'ai douté. J'ai douté parce qu'à voir tous ces morts, on doute forcément.
Je me suis demandé à quoi bon sauver un peuple si c'est pour en tuer tous ses hommes. Je me suis senti vieux, lasse. Je me suis dit que la guerre c'était bon pour les jeunes, ceux qui ne savent pas, ceux qui n'ont pas encore compris que la vie, il n'y a rien de plus sacré. Ceux qui n'ont pas vu naître leurs enfants et ceux qui n'ont personne à vouloir revoir.

Moi qui suis tout droit, qui me force à rester stoïque en toute circonstance, j'ai laissé tomber mon cul sur le sol. Mes jambes ne me portaient plus. Je crois bien que j'aurais pû rester là longtemps. Le Monstre à côté a alors sortis une phrase bateau, une de celles qu'on a entendu mille fois, comme une prière qu'on se répète en croyant que le bon Dieu nous entend.

« Il n'y a pas de révolution sans morts ». Je crois que c'est ça qu'il a dit. Il pouvait le dire, lui, il s'en foutait. Il ne les connaissait pas. Il avait pas changé les couches du plus jeune, il n'avait pas embrassé la sœur de l'autre. Il ne les connaissait pas. J'ai eu envie de le cogner comme rarement j'ai eu envie de cogner et je crois bien que c'est ça qui m'a fait me relever. J'avais les poings serrés jusqu'à m'en faire saigner les paumes. Il a souris.

« A toi de voir s'ils sont morts pour rien. S'ils seront enterrés en héros ou en traître. »

Au début, je me suis dit que je m'en foutais de ça. Je me foutais de la gueule de leur cercueil moi c'était leur sourire que je voulais voir et pas leur tombe.

Et puis je me suis dit qu'il avait raison. J'ai craché sur le sol et avec la salive c'est l'envie qui est revenu. J'ai frotté mon costume plein de sang et de poussière en comptant mes blessures. Une plaie à l'épaule peu profonde, une autre sur l'abdomen qui me faisait bien plus mal. Je l'ai tâté et j'ai compris que de toute manière, j'allais bientôt les rejoindre. Mes amis.

« C'est quoi, le plan ?» qu'il a dit, en prenant comme à chaque fois sa respiration entre chaque mot.

« On fonce vers la caserne. On vérifie que l'Etat Major est un souvenir et cours vers la Tour. C'est là que se cachent les dernières défenses de la ville. »

Je n'avais pas confiance en lui. Faut pas croire. Simplement je sentais bien que ce Monstre là, on ne pouvait pas trop lui mentir. C'était comme un drôle de sentiment, un drôle de sentiment qu'à chaque mot qui sortait, c'étaient mes pensées qui suivaient. Et puis je n'étais pas de taille, plus de taille. Je sentais bien qu'au premier mouvement trop violent mon ventre allait s'ouvrir et déverser ce qu'il me restait de sang sur le sol. Il ne me restait pas longtemps mais je voulais être certain de pas mourir pour rien. J'avais participé à trop de combats pour que le dernier de ma vie soit une défaite.

Alors on a marché, calmement. On a fini par arriver devant la caserne pour y trouver un carnage que mes vieux globes avaient rarement vu. Quelques camarades restaient là à éteindre les dernières âmes de marines encore en vie. C'était immonde : Des jambes détachées du corps ;des gueules rougies, noircies et qui ne dépassaient qu'à peine d'immenses gravats ; des râles ; une odeur à faire gerber le plus dur au mal. On n'est pas resté. On a repris notre marche vers la Tour et plus on avançait et moins la ville que j'avais connu m'était familière. Les murs noirs impeccablement entretenus tombaient en lambeau dans certaines rues. Des traces de balles jonchaient le sol au milieu des cadavres. On était presque rendu à la Tour que le Monstre s'est arrêté. Il a fait un geste de la main avant de murmurer qu'il valait mieux que je m'en aille.

Il est drôle le bougre. Il avait certainement oublié que plus je marchais et plus je devenais lent, plus je me tenais le ventre comme un futur mort.

Je me suis approché d'un mur et j'y suis laissé coulé, bien conscient qu'on n'arriverait pas à aller plus loin. Je ne savais pas ce qui allait nous tomber dessus mais je n'avais pas hâte. Ça non.
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