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Il faut payer la taxe, mec ! Part 1

QG des Echos de la Liberté, Sous-sols de Luvneel, 1627

La choppe glisse rapidement le long du comptoir et vient s’immobiliser devant moi. Avec mon doigt, je longe le bord du récipient et constate qu’il n’y a pas la moindre goutte. Comme toujours. Je regarde l’homme qui me balance son plus beau sourire et je lève le pouce en signe de félicitations. Ce Jerry est trop fort, il arrive à balancer des chopes de bières à l’autre bout de la salle avec une précision chirurgicale sans jamais rien renverser. La dernière fois que j’ai essayé, j’ai pété trois verres et un gros orteil. Il m’en veut encore le vieux Barney… Ca lui passera. D’une traite, je siffle la moitié de la choppe. C’est une bière qui est faîte ici même, fermentée dans les sous-sol de Luvneel, entre la crasse et les cloportes, dans l’obscurité. Elle est forte et un peu raide, mais par ici on dit qu’elle a du caractère. Ca m’a pris du temps, mais j’ai fini par m’habituer à vivre sous terre, dans la base des révolutionnaires. C’est d’ailleurs vachement bien foutu, leur système. C’est une succession de tunnels qui se croisent et s’entrecroisent à différents niveaux. Non seulement, ça forme un parfait labyrinthe pour tenir à l’écart tout ceux qui n’ont rien à venir faire ici, mais ça permet aussi un brassage de l’air. Nous sommes une bonne centaine à vivre ici et ça ne sent pas le renfermé.

Le QG en lui-même est composé de dix grandes salles dans lesquelles sont aménagés une cantine, une salle de détente, deux dortoirs, un bar, deux salles d’entraînement, une salle de réunion, un bureau pour les chefs et un hangar de stockage. Pour tout le reste, il faut remonter à la surface. Mais c’est souvent plus par envie que par besoin. Chez les révos, on sait vivre, on ne peut pas leur retirer ça. Ils font parvenir des bouteilles de contrebandes dont je n’ai jamais entendu parler malgré ma longue expérience en la matière. Je sors justement une flasque de la poche intérieure de ma veste afin de corser un petit peu cette bière. A cet instant, Judith, « La Tôlière » comme on l’appelle, s’approche. Pas particulièrement belle, elle a l’avantage d’avoir des seins et un vagin. En ce moment, je n’en demande pas beaucoup plus à une femme. Elle porte les cheveux longs mais aime se faire des couettes pour paraître plus jeune qu’elle ne l’est. Je la regarde me tourner autour, tout en sachant très bien ce qu’elle veut. Elle s’assied sur mes genoux et passe ses bras autour de mon cou en me regardant avec malice. La coquine sait ce qu’elle veut et elle va l’avoir, pas de problème. Je finis ma choppe d’une traite et la repose dans un grand soupir de soulagement. Je commence à explorer les plis et les replis de ses jupons lorsque je sens que quelqu’un me tapote l’épaule. Je grogne mais ne prête pas trop attention. Mais ça insiste. En râlant, je finis par me retourner pour tomber nez à nez avec Manuelo del Poncho, le chef de la section. Je me lève d’un bond, envoyant valser Judith par terre, en balbutiant quelques mots incompréhensibles. La demoiselle se relève en me hurlant une flopée d’insultes à la gueule. Je me retiens d’exploser de rire et je sens bien que Manuelo aussi. Elle frotte rapidement ses fringues et rejette ses cheveux en arrière en tâchant de conserver un semblant de dignité avant de disparaître au coin du couloir. Boarf, elle reviendra. Elles reviennent toujours vers le docteur…


-Je ne dérange pas au moins ?
-Du tout, du tout. On devisait joyeusement, rien de plus.
-Tant mieux, tant mieux. Je peux te voir dans la salle de réunion ? Il faut qu’on discute.
-Pas de soucis.

C’est étonnant. D'habitude, lorsqu'il a quelque chose à me dire, il le fait directement, peu importe s'il y a des gens autour. Difficile de deviner les raisons de cette réunion. C’est peut-être la première fois de ma vie que je peux dire avec certitude que je n’ai pas fait de connerie. Tout simplement parce que je n’ai strictement rien fait. Je grimpe les escaliers à la suite de mon supérieur direct et nous sommes rapidement rejoints par Catrina Mejicana, la seconde. Comme à son habitude, elle ne dit pas un mot et se contente d’ouvrir la porte de la salle de réunion et de nous inviter à entrer. Manuelo me précède et va s’installer au fond, en chef de table. Je le suis et Catrina m’emboîte le pas en refermant la porte derrière elle. Je prends le premier fauteuil venu et j’attends de savoir de quoi il retourne. La seconde en chef s’approche d’une armoire, l’ouvre et sort un gros dossier jaune, tellement rempli de papiers que la pochette ne ferme plus. Elle le lâche sur la table ce qui provoque une détonation qui me fait sursauter. Pendant une seconde, j’ai craint qu’ils n’aient appris que j’appartiens au Cipher Pol. Mais là aucun risque. Même en accumulant mon ancienne carrière de Marine et mon poste actuel au CP, il n’y aurait pas de quoi remplir un tel dossier. A peine quelques post-its. Je me redresse sur mon fauteuil et je tends le cou pour tenter de lire ce qu’il y a d’écrit mais ce n’est pas la peine puisque le chef des Echos de la liberté commence à m’expliquer.

-Bon, Dan, je sais que tu es assez nouveau ici. Mais chez nous, il n’y a pas de poids morts. Chacun doit participer et mériter sa place. Tout simplement parce qu’on ne peut pas se le permettre. La révolution n’a pas de gros moyens et ne peut pas multiplier les bouches inutiles à nourrir. Tu me suis ?
-Cinq sur cinq, boss. Qu’est-ce que je dois faire ?
-Ne te réjouit pas trop vite. D’après nos teste d’aptitudes et le rapport que m’a fait Juan Pablo, je lis là que tu es doté d’une très grande force physique, une addiction forte à l’alcool et des notions avancées de médecine, bien que je trouve ces deux dernières affirmations pas franchement complémentaires. Tu confirmes ?
-Yep. Vous inquiétez pas, j’opère mieux quand je suis désinhibé.
-Bon. Alors j’ai une mission à te confier. Ta médecine ne te sera pas utile et j’espère sincèrement que ta force non plus mais c’est moins sûr. Ce sera plutôt ta capacité à boire beaucoup d’alcool.
-Génial ! Je suis votre homme !

Catrina ouvre le dossier sans prononcer un mot et le boss m’invite à m’approcher. Je vois des pages et des pages de rapports de la Marine, d’autres rapports rédigés par des membres de la révolution, des articles de journaux, des feuilles de calcul… C’est un beau bordel de paperasserie que j’espère ne jamais devoir lire. Soudain, une feuille glisse du dossier et tombe au sol. Je me penche pour la ramasser. C’est un avis de recherche. Un homme au sourire carnassier et au regard mauvais est représenté avec en dessous, une prime de cinq millions de berrys. On est sur de la petite frappe. Harlem Snake. Jamais entendu parler.


Dernière édition par Dan Ki Qong le Sam 05 Nov 2016, 16:10, édité 1 fois
    Le topo de la mission commence alors. Ce Harlem Snake est un révolutionnaire dissident.
    Anciennement rattaché au groupuscule de Luvneel, il a mis les voiles et s’est enfui lorsque la Marine a effectué la grande Purge, en 1611. Difficile de leur en vouloir, pour avoir été appelé en tant que médecin pour tenter de soigner les rares survivants du carnage, je sais qu’il valait mieux être le plus loin possible de cette opération meurtrière d’envergure. Du sang recouvrait entièrement les pavés des rues et les cadavres jonchaient le sol. Révolutionnaires, civils, marins... Dans la mort, ils étaient tous égaux et semblaient se réconforter les uns les autres. Deux hommes qui s’étaient entretués dans la vie s’étaient retrouvés enlacés dans les bras l’un de l’autre une fois morts. L’absurdité de la guerre.

    Toujours est-il que notre homme a décidé de partir de son côté et d’effectuer ses propres opérations dans son coin, montant son unité personnelle. Il a donc fondé les Saturn, en référence à la planète autour de laquelle gravite des anneaux composés de millions de satellites. Nom peut-être un poil ambitieux quand on sait qu’il n’a sous ses ordres qu’une quinzaine d’individus, chacun ayant le coefficient intellectuel d’une huître. Mais pourtant, son groupe a commencé à rapidement montrer des résultats, faisant exploser des garnisons de la Marine à des moments stratégiques de façon à détourner l’attention, à ralentir ou à handicaper les agents de l’ordre. Leurs interventions ont permit la réussite de nombreuses missions. Ils sont également responsables de bon nombre de dérobades dont les butins sont venus entretenir les caisses de la Révolution.

    Jusqu’ici tout va bien. Les rapports sont assez élogieux vis-à-vis de cette organisation. Mais petit à petit, au fur et à mesure que je fais défiler les feuilles de rapports, je constate des incohérences. Des rapports de Marine condamnant les Saturn pour divers braquages ne sont plus répertoriés par la Révolution. Les comptes-rendus ne concordent plus. Je comprends assez rapidement où tout cela me mène. Le groupe terroriste continue d’effectuer des vols et des escroqueries, mais l’armée révolutionnaire ne reçoit plus grand-chose.


    -En gros, le père Snake continue de se battre sous le drapeau révolutionnaire mais tout le butin lui tomberait directement dans les poches, c’est ça ?
    -C’est ce que l’on craint en tout cas. Harlem a rendu de grands services à la cause et nous avons donc décidé de lui accorder le bénéfice du doute. C’est pourquoi nous t’envoyons là-bas. Tu vas devoir éclaircir la situation.
    -Je vois. Lui faire cracher le morceau. C’est sûr que l’alcool, ça délie les langues.
    -Voilà, vous vous retrouverez autour d’un bon repas et au cours de la conversation, tu devras l’amener sur ce terrain. Tu te sens à la hauteur ?
    -Pour manger, picoler et discuter ? Je devrais m’en sortir, boss.
    -Fais gaffe quand même, s’il se sait repéré, il se sentira menacé. Je ne peux pas te promettre qu’il ne deviendra pas agressif et tu seras alors dans la gueule du loup.
    -Et s’il a véritablement retourné sa veste ?
    -A voir. Si possible tu le captures et tu le ramènes ici. Sinon…
    -Okay. Je gère, je gère.

    Je gère pas du tout, en fait. Il faut bien me donner un peu de consistance, après tout c’est ma première mission au sein de la révolution. Ce serait pas mal de me montrer à la hauteur si je ne veux pas stagner parmi les pions comme mes prédécesseurs. A quoi bon infiltrer un tel mouvement si c’est pour rester au bas de l’échelle ? Pour capturer Judith ? Hahaha, la pauvre serait bien plus utile dans mon plumard qu’entre les quatre murs froids d’une cellule. Toutefois, j’ai quand même quelques questions à poser sur la mission et Manuelo semble enclin à y répondre. Je demande déjà où il se trouve, ce Snake ? S’il est dissident, il n’est donc pas sur Luvneel à priori. Comment je vais pouvoir me rendre là-bas ? Et est-ce que j’y vais seul où est-ce que je peux amener des collègues en soutien ?

    -Harlem Snake n’a pas de pied à terre, il se déplace constamment pour ne jamais se faire repérer. Mais nous avons établit une communication par DenDenMushi et il accepte un entretien à bord de son navire, en pleine mer. On te fournira une petite embarcation avec un navigateur pour l’occasion. Quand au fait de te faire accompagner… A toi de voir. Je ne te l’interdis pas mais vous voir débarquer à plusieurs risque de lui mettre encore plus la pression.
    -Okay. Et sinon c’est quand ?
    -Cet après-midi.

    Oh putain, ça fait court pour se retourner ça. J’essaye de prendre un air décontracté mais je sens une petite boule de stress se faufiler au milieu de mes entrailles. Il va falloir que je me prépare rapidement. Je remercie le chef et la seconde de la confiance qu’ils me portent et je quitte la salle en affirmant que je reviendrai avec des réponses. A peine sorti de la salle, je me précipite vers mes appartements et je sors mon DenDenMushi. Hors de question de me pointer tout seul dans ce guêpier. J’entre en communication avec Jason, Simon et Mindy, les trois autres membres du CP6 infiltrés avec moi. Ils sont tous les trois plus anciens que moi dans la révolution tout comme dans le Cipher Pol et pourtant ils n’ont jamais réussi à grimper les échelons ni dans une organisation, ni dans l’autre. Du coup, je me permets de les traiter comme mes égaux. Quand il y a une mission, entre agents infiltrés, on se sert les coudes. Mais bon, vu leurs précédents échecs, ils ne se voient plus confier grand-chose si ce n’est l’entretien du QG et la gestion des stocks de nourriture. Du coup, c’est à moi que revient la responsabilité de percer vers les hautes sphères. Le CP leur a intimement ordonné de me soutenir, sans quoi le projet « Luvneel Inside » devra être avorté. Donc je suis un petit peu le chef d’équipe.

    En une dizaine de minutes, les trois compères sont là ; prêts et motivés à enfin recevoir une petite part de gloire. Je leur explique la situation et ils comprennent, déçus, qu’ils vont devoir rester dans l’ombre. Ba oui, c’est dommage mais ils ne seront là qu’en renfort si jamais les choses tournent mal. Comme l’a dit Manuelo autant éviter d’affoler le dissident en débarquant à plusieurs. Je tente de leur remonter le moral en leur expliquant qu’avec mon tact naturel, la situation va très probablement se barrer en couille et que j’aurai alors besoin de leur aide. Ils sourient en acquiesçant mais restent un peu frustrés.
      On arrive au vieux port. Ici, les navires les plus vieux et les plus délabrés sont amarrés. Certains sont tellement pourris qu’on s’attend à les voir s’enfoncer à tout moment dans les eaux troubles et ne jamais remonter à la surface. Pas étonnant de constater que bon nombre d’entre eux appartiennent à la révolution. Je regarde Jason, Simon et Mindy  qui acquiescent tristement de la tête. Eux, ils sont habitués. En rejoignant les rats de la révolution, terrés dans les soubassements de la société civilisée, il faut oublier le luxe et le service auxquels on a droit dans le Cipher Pol. Notre navire se nomme « Le glaive ». Je marche le long des quais, essayant de déchiffrer les noms des navires, à moitié effacés par l’eau et le sel, partis avec le reste de la peinture ou recouverts d’une mousse verdâtre et de différents coquillages. Je finis par trouver le notre. Je regarde à nouveau mes trois compères qui haussent les épaules en soupirant, l’air blasé.

      Le bateau qui se trouve face à nous est peut-être le plus pourri de tout le port. Les voiles sont tellement usées qu’elles semblent transparentes, elles sont déchirées sur de nombreux côtés et d’une couleur gris sale. La coque est recouverte de lichen, si bien que la peinture, probablement rouge à l’origine, laisse place à une couleur « vert vomi ». La rampe de bastingage est brisée en deux endroits, comme si un canon l’avait traversé à cause d’un trop grand roulis. En principe, les canons ça s’attache… La figure de proue est décapitée et représentait visiblement… une grosse moule ? Ce pauvre glaive ne tranchera plus rien.

      Un homme surgit de la cabine de bois vermoulu et nous invective de loin. C’est un homme à toute petite tête avec des lunettes rondes qui s’enfoncent si loin dans ses orbites qu’on jurerait qu’il est dans l’impossibilité de les retirer. Des grosses joues accentuées par un grand sourire finissent de bloquer définitivement les lunettes. Il porte une tenue de marin du dimanche avec un petit béret, une salopette bleue qui dissimule difficilement son énorme ventre et des petites jambes. D’un geste de la main, il nous invite à monter.


      -Hohé ! C’est vous que je dois emmener ?
      -Ben ça dépend. Vous allez où ?
      -Bé voir Harlem Snake, pardi !

      Oula, bonjour, la discrétion celui-là… Je fais un rapide signe de tête et on cache notre visage. S’il y a le moindre marine compétent dans les 500 mètres à la ronde, on risque de voir une équipe débarquer dans les prochaines minutes. Le gars remarque notre attitude et rigole. Il affirme qu’il fait ce genre de mission tout le temps et qu’à cette heure-ci, il n’y a personne dans le port. De toute façon, des guetteurs sont postés à chaque entrée des quais et signalent le moindre individu suspect. Alors, d’après lui, on a rien à craindre.

      Peu convaincu, on monte tout de même à bord. La mission passe avant tout. Si on doit éliminer des marins, bah tant pis. Une bonne couverture a plus de valeur qu’un simple marin. L’homme dit s’appeler Skippy. Il me serre vigoureusement la main avec ses grandes paluches moites et m’invite à m’asseoir. Je m’assieds pour éviter de trébucher, mais ce n’est vraiment pas de gaieté de cœur. Les sièges sont enfoncés, mouillés, ce qui forme une petite flaque et une fine couche noire au fond évoquant de la moisissure. Je sens ma raie du cul se remplir du liquide froid et je grimace. Les autres ne semblent pas ravis non plus de la sensation et surtout de la situation. Qu’ils ne se plaignent pas, eux n’auront pas à aller à un repas diplomatique avec une grosse tâche humide au niveau des fesses. Le navire s’ébranle et un épais panache de fumée s’élève de la cheminée.

      Alors que le navire passe l’embouchure du port, une sirène retentit. A tribord, un petit hors-bord d’interception nous rejoint à grande vitesse. Et voilà, bingo, la Marine… On s’approche de Jason. L’autre abruti aux commandes semble tomber des nues.


      -Occupez vous de distraire l’autre con de navigateur avant qu’il ne gaffe encore. Je me charge des marins.

      Alors que leur embarcation se rapproche, nous ralentissons notre allure pour permettre une bonne communication. En guise de bonne coopération, je leur lance l’extrémité d’une corde afin qu’ils puissent s’amarrer à nous. Skippy semble vouloir s’approcher pour parlementer mais Simon effectue une magnifique interception en lui demandant une explication sur la façon dont les voiles doivent être orientées pour bien prendre le vent. Nickel. Je m’approche du bord et je fais signe aux marins d’approcher. Ceux-ci sont armés et braquent des fusils dans ma direction. Je lève les bras en l’air et j’attends qu’ils montent à bord. Celui qui semble être leur chef s’approche avec un sourire narquois. D’un geste vif, je l’attrape et je lui bloque la gorge avec le bras pour l’immobiliser. La manœuvre provoque un vent de panique chez les autres marins, ainsi que dans mon équipe. J’approche mes lèvres de l’oreille du chef qui a perdu de sa superbe.

      -Agent Ki Qong du Cipher Pol d’infiltration révolutionnaire. Vous êtes en train d’interférer dans une mission gouvernementale de la plus haute importance.

      Tout en parlant, je lève mon poing à hauteur des yeux de façon à ce qu’il soit seul à voir la plaque d’agent CP que je tiens dans ma paume. Je sens son corps se détendre sensiblement lorsqu’il comprend qu’il ne va pas mourir aujourd’hui. Les autres ne comprennent pas ce qu’il se passe et attendent des ordres. Des bons marins quoi, si personne n’ordonne rien, ils ne font rien. Je demande au chef s’il a bien tout compris et lui demande de faire comme si de rien n’était, notre navigateur n’étant pas au courant de l’opération. Ce dernier est d’ailleurs toujours plongé en pleine explication de techniques de navigation maritime. Il n’a rien remarqué de ce qui s’est passé. Quel con… Je relâche le gradé qui se dégage, soulagé de retrouver sa liberté de mouvement. Il s’éclaircit la voix.

      -Ahem… Rien à signaler ici. On y va, les gars !
      -Ah ? Vous partez ? Bonne journée messieurs ! s’exclame Skippy. Vous voyez, il n’y avait rien à craindre, mes amis !
      -Ho, ta gueule Skippy !

      Le navire repart alors dans le silence, le révolutionnaire s’étant muré dans une bouderie salvatrice pour nous autres.