Suite des événements joués ici.
***
- Ah le sale con !
- Moi sergent ?
Presque innocent, ou alors trop habitué à ce que le sergent Frobb ne lui rejette tous les tords de la planète sur le dos le tout enrobé d'un florilège d'insultes, Yvel se pointa du doigt comme interloqué. Frobb sortait des locaux des officiers d'un pas pressé et déterminé. Considérant sa réaction, on l'avait manifestement titillé là où il ne fallait pas.
- Non. Cette chiure de sous-amiral ! Quoi que, ça s'adressait à toi aussi remarque.
Insulté de bon matin par son sergent d'affectation, la journée n'aurait pu commencer commencer autrement. Surcouf fut néanmoins rassuré de voir le bougre le quitter à vive allure à peine sorti du bâtiment, il semblait consumé par une colère débordant sous la forme de répliques tonitruantes adressées à tout ce qui vivait et était moins gradé que lui. La joie du deuxième classe ne fut que de courte durée, Frobb lui avait fait signe de le suivre.
La cadence qui rythmait ses pas forçait presque Yvel à trottiner à ses côtés pour conserver la même allure.
- Le commandant m'a demandé d'écrire un rapport sur ce qui s'est passé en mer après qu'on ait quitté Poiscaille.
- Oh...
Le sujet était pour le moins sensible. Certains esprits chagrins prenant en compte le nombre de morts et le manquement au devoir de secours à des camarades de la marine auraient pu y voir une bavure de la pire espèce. C'était au sergent de nettoyer et de faire reluire les événements tragiques pour offrir une version édulcorée. Bien que rude, ne s'exprimant qu'à coup de gueulantes corrosives, l'expérience avait amenée Frobb à exceller dans la rédaction de rapports tendancieux de sorte à exonérer ses supérieurs. La rumeur voulait même que son doigté en la matière lui valait quelques pots de vin de la part de multiples hauts gradés.
- Seulement, voilà que l'autre con me convoque.
- L'autre con... On parle du sous-amiral sergent ?
D'un vif geste de la main, tout en continuant de marcher aux côtés du matelot, Frobb claqua la nuque d'Yvel.
- C'est une honte d'parler comme ça de tes supérieurs ! Mais ouais, c'est de lui qu'on cause.
Ruminant sa hargne un instant, le sergent tyran prit sur lui afin de ne pas hurler trop fort, que ce qu'il avait à dire ne tombe pas des oreilles indiscrètes. Vraisemblablement, un mauvais coup se tramait, Surcouf réalisa qu'il fut amené à être mêlé à cette sale histoire dès l'instant où il avait emboîté le pas à son sergent.
- Y'a un concours d'affectation à la huitième. Des tas d'apôtres de la mouette venus de tout West Blue vont affluer dans le coin pour rejoindre la huitième. Ces cons s'imaginent qu'ils se la couleront douce au Q.G... Bref ! Le sous-amiral Niromoto veut que je fasse partie des examinateurs. Seulement si je fais ça, j'aurais pas le temps de trafiquer le rapport !
- En effet c'est bête.
En réalité, Yvel ne suivait le fil de la conversation que d'une oreille. Les rapports bidouillés, les examens d'entrée au Q.G de West Blue ainsi que toutes les frasques de Frobb lui glissaient dessus comme sur les plumes d'un canard. Moins il en savait, plus il serait tranquille, le moindre prétexte pour fausser compagnie à son sergent d'affectation lui serait salutaire.
Soudain, la marche haletante se stoppa et les immenses paluches du sergent tombèrent sur les épaules de Surcouf qui ne manqua pas de tressaillir.
- C'est d'autant plus bête que si je m'occupe pas de ce foutu rapport, tout l'équipage de patrouille est dans une merde noire ! Toi et moi inclus ! Alors tu vas me remplacer pour les examens.
Remonter le temps. À bien y choisir, Yvel aurait aimé avoir le pouvoir de remonter le temps et rester dans le dortoir plutôt que de sortir pour aller s'entraîner et rencontrer Frobb en chemin. Toutefois, en l'absence de pareilles dispositions, il n'avait plus d'autre choix que d'obéir. L'attribution qui venait de lui être confiée mettait beaucoup de pression sur ses épaules, et contrevenait aux ordres de la hiérarchie. Une fois de plus, Frobb le mettait en porte-à-faux vis à vis des hautes instances de la marine.
Après avoir griffonné quelques mots sur un bout de papier, le sergent plaqua le rendu sur la poitrine d'Yvel qui s'en saisit après avoir repris son souffle.
La note était signée, et l'écriture navrante ne laissait planer aucun doute sur le fait que le sergent l'avait bel et bien écrite.
- C'est à dire sergent que je m'appelle pas Viv....
La paume large et caleuse dudit sergent se planta devant la tête d'Yvel, le stoppant net dans sa vaine tentative de rectifications. C'était une manière comme une autre de clore une discussion.
- Encore une fois petit, ta vie : je m'en fous. Si on te demande des comptes, tu montreras ça aux officiers. Ça a pas la moindre valeur légale, mais ça fera gagner du temps si on vient nous les briser. Allez ! Au turbin !
Déjà, Frobb avait disparu de la vision de son mandataire, resté là, planté comme un piquet au milieu de la cour, son papier entre les mains. Son "turbin" il ne savait même pas en quoi il consistait, ni par où commencer. Mais hélas, l'avenir du commandant Leke et une partie de la huitième division à laquelle il était affectée se jouait sur sa prestation d'examinateur.
Se ressaisissant, même si le cœur n'y était pas, Yvel finit par se ruer au bâtiment administratif afin de glaner le plus d'informations possibles sur les modalités d'épreuve. Il était onze heure du matin, les épreuves écrites du contingent de marines venus passer le concours avaient déjà commencées.
- Ils ont vraiment attendu le dernier moment... Bon... Si c'est de l'écrit, Frobb devait pas y être affecté.
Observant le planning, il serait question d'une épreuve physique à treize heure, ponctuée d'une épreuve de tir à seize heure et un entretien avec examinateur une heure plus tard. Frobb, en tant qu'ancien sergent instructeur de la marine, fort de plus de vingt ans de métier avait été assigné à l'organisation de toutes ces épreuves.
- Naaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa....
Genoux à terre devant le panneau d'affichage sur lequel étaient affichées de multiples fiches informatives, dont la planning d'épreuves qu'il consultait, Yvel fit s'abattre ses poings contre le mur de manière dramatique. Une colère morne et dépassionnée, voilà de tout ce dont il fut capable pour beugler son insatisfaction.
- Un problème soldat ?
- Non non, juste euh.... une carence en potassium.
Et, résigné toujours, le seconde classe Surcouf se redressa époussetant son pantalon. Aussi pénible allait être sa mission, il lui fallait la mener à bien. Cela valait mieux qu'être en mer à risquer sa vie pensait-il. Il lui restait deux heures avant de devoir commencer les hostilités. Il irait à la cafétéria pour cogiter l'estomac plein. Cela lui donnerait aussi l'occasion de jauger les candidats au concours qui ne tarderaient pas à sortir de leur épreuve écrite pour se repaître avant d'entrer dans le vif du sujet.
Peut-être y croiserait-il Tenko. Ce dernier s'était montré assez discret depuis leur retour de Poiscaille.
- Moi sergent ?
Presque innocent, ou alors trop habitué à ce que le sergent Frobb ne lui rejette tous les tords de la planète sur le dos le tout enrobé d'un florilège d'insultes, Yvel se pointa du doigt comme interloqué. Frobb sortait des locaux des officiers d'un pas pressé et déterminé. Considérant sa réaction, on l'avait manifestement titillé là où il ne fallait pas.
- Non. Cette chiure de sous-amiral ! Quoi que, ça s'adressait à toi aussi remarque.
Insulté de bon matin par son sergent d'affectation, la journée n'aurait pu commencer commencer autrement. Surcouf fut néanmoins rassuré de voir le bougre le quitter à vive allure à peine sorti du bâtiment, il semblait consumé par une colère débordant sous la forme de répliques tonitruantes adressées à tout ce qui vivait et était moins gradé que lui. La joie du deuxième classe ne fut que de courte durée, Frobb lui avait fait signe de le suivre.
La cadence qui rythmait ses pas forçait presque Yvel à trottiner à ses côtés pour conserver la même allure.
- Le commandant m'a demandé d'écrire un rapport sur ce qui s'est passé en mer après qu'on ait quitté Poiscaille.
- Oh...
Le sujet était pour le moins sensible. Certains esprits chagrins prenant en compte le nombre de morts et le manquement au devoir de secours à des camarades de la marine auraient pu y voir une bavure de la pire espèce. C'était au sergent de nettoyer et de faire reluire les événements tragiques pour offrir une version édulcorée. Bien que rude, ne s'exprimant qu'à coup de gueulantes corrosives, l'expérience avait amenée Frobb à exceller dans la rédaction de rapports tendancieux de sorte à exonérer ses supérieurs. La rumeur voulait même que son doigté en la matière lui valait quelques pots de vin de la part de multiples hauts gradés.
- Seulement, voilà que l'autre con me convoque.
- L'autre con... On parle du sous-amiral sergent ?
D'un vif geste de la main, tout en continuant de marcher aux côtés du matelot, Frobb claqua la nuque d'Yvel.
- C'est une honte d'parler comme ça de tes supérieurs ! Mais ouais, c'est de lui qu'on cause.
Ruminant sa hargne un instant, le sergent tyran prit sur lui afin de ne pas hurler trop fort, que ce qu'il avait à dire ne tombe pas des oreilles indiscrètes. Vraisemblablement, un mauvais coup se tramait, Surcouf réalisa qu'il fut amené à être mêlé à cette sale histoire dès l'instant où il avait emboîté le pas à son sergent.
- Y'a un concours d'affectation à la huitième. Des tas d'apôtres de la mouette venus de tout West Blue vont affluer dans le coin pour rejoindre la huitième. Ces cons s'imaginent qu'ils se la couleront douce au Q.G... Bref ! Le sous-amiral Niromoto veut que je fasse partie des examinateurs. Seulement si je fais ça, j'aurais pas le temps de trafiquer le rapport !
- En effet c'est bête.
En réalité, Yvel ne suivait le fil de la conversation que d'une oreille. Les rapports bidouillés, les examens d'entrée au Q.G de West Blue ainsi que toutes les frasques de Frobb lui glissaient dessus comme sur les plumes d'un canard. Moins il en savait, plus il serait tranquille, le moindre prétexte pour fausser compagnie à son sergent d'affectation lui serait salutaire.
Soudain, la marche haletante se stoppa et les immenses paluches du sergent tombèrent sur les épaules de Surcouf qui ne manqua pas de tressaillir.
- C'est d'autant plus bête que si je m'occupe pas de ce foutu rapport, tout l'équipage de patrouille est dans une merde noire ! Toi et moi inclus ! Alors tu vas me remplacer pour les examens.
Remonter le temps. À bien y choisir, Yvel aurait aimé avoir le pouvoir de remonter le temps et rester dans le dortoir plutôt que de sortir pour aller s'entraîner et rencontrer Frobb en chemin. Toutefois, en l'absence de pareilles dispositions, il n'avait plus d'autre choix que d'obéir. L'attribution qui venait de lui être confiée mettait beaucoup de pression sur ses épaules, et contrevenait aux ordres de la hiérarchie. Une fois de plus, Frobb le mettait en porte-à-faux vis à vis des hautes instances de la marine.
Après avoir griffonné quelques mots sur un bout de papier, le sergent plaqua le rendu sur la poitrine d'Yvel qui s'en saisit après avoir repris son souffle.
Moi, Sergent Ripert Frobb, déclare solennellement faire du matelot deuxième classe Vivel Soucoupe mon mandataire pour organiser les épreuves de sélection au concours d'admission des troupes du Q.G.
La note était signée, et l'écriture navrante ne laissait planer aucun doute sur le fait que le sergent l'avait bel et bien écrite.
- C'est à dire sergent que je m'appelle pas Viv....
La paume large et caleuse dudit sergent se planta devant la tête d'Yvel, le stoppant net dans sa vaine tentative de rectifications. C'était une manière comme une autre de clore une discussion.
- Encore une fois petit, ta vie : je m'en fous. Si on te demande des comptes, tu montreras ça aux officiers. Ça a pas la moindre valeur légale, mais ça fera gagner du temps si on vient nous les briser. Allez ! Au turbin !
Déjà, Frobb avait disparu de la vision de son mandataire, resté là, planté comme un piquet au milieu de la cour, son papier entre les mains. Son "turbin" il ne savait même pas en quoi il consistait, ni par où commencer. Mais hélas, l'avenir du commandant Leke et une partie de la huitième division à laquelle il était affectée se jouait sur sa prestation d'examinateur.
Se ressaisissant, même si le cœur n'y était pas, Yvel finit par se ruer au bâtiment administratif afin de glaner le plus d'informations possibles sur les modalités d'épreuve. Il était onze heure du matin, les épreuves écrites du contingent de marines venus passer le concours avaient déjà commencées.
- Ils ont vraiment attendu le dernier moment... Bon... Si c'est de l'écrit, Frobb devait pas y être affecté.
Observant le planning, il serait question d'une épreuve physique à treize heure, ponctuée d'une épreuve de tir à seize heure et un entretien avec examinateur une heure plus tard. Frobb, en tant qu'ancien sergent instructeur de la marine, fort de plus de vingt ans de métier avait été assigné à l'organisation de toutes ces épreuves.
- Naaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa....
Genoux à terre devant le panneau d'affichage sur lequel étaient affichées de multiples fiches informatives, dont la planning d'épreuves qu'il consultait, Yvel fit s'abattre ses poings contre le mur de manière dramatique. Une colère morne et dépassionnée, voilà de tout ce dont il fut capable pour beugler son insatisfaction.
- Un problème soldat ?
- Non non, juste euh.... une carence en potassium.
Et, résigné toujours, le seconde classe Surcouf se redressa époussetant son pantalon. Aussi pénible allait être sa mission, il lui fallait la mener à bien. Cela valait mieux qu'être en mer à risquer sa vie pensait-il. Il lui restait deux heures avant de devoir commencer les hostilités. Il irait à la cafétéria pour cogiter l'estomac plein. Cela lui donnerait aussi l'occasion de jauger les candidats au concours qui ne tarderaient pas à sortir de leur épreuve écrite pour se repaître avant d'entrer dans le vif du sujet.
Peut-être y croiserait-il Tenko. Ce dernier s'était montré assez discret depuis leur retour de Poiscaille.