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Entre les lignes, à livre ouvert

Après moultes escales, nous voilà enfin arrivés à la Nouvelle Ohara depuis El Jezada dans le Nouveau Monde, le Commandant d’élite Pognefer et moi. Ironique, n’est ce pas ? Qu’un dignitaire de l’autorité mondiale aide une potentielle future ennemie. Bien sûr, cela n’a pas été bon coeur, rien ne l’est, mais la contrepartie a été généreuse : je l’ai sauvé, lui et le pauvre reste de son équipage, des sables vivants d’El Jezada, et lui m’a permis de me sauver sur les mers bleues habituelles où j’ai peaufiné mes notions de navigation grâce à lui. Il a même explosé de joie quand j’ai sû différencier une survague d’un courant sous-marin bondissant, peu de gens y parviennent d’après lui.

Toujours est-il que nous accostons sous le regard des locaux qui s’arrêtent même de vivre à notre approche. Cela pourrait sembler déstabilisant pour un étranger, mais je connais l’île et son histoire grâce à un des livres de la grande bibliothèque de Siddharta, une des cités d’El Jezada. Comment ne pas s’émerveiller devant l’immense arbre qui recèle une bibliothèque en son creux ou se prendre de vertige devant un tel miracle quand on sait que l’île a été rasée par un Buster Call ? C’est époustouflant ! Tellement que je n'entends presque pas ce fameux Commandant d’élite Pognefer qui braille non-loin de mes oreilles !

- Haha ! Te voilà arrivée à bon port gamine ! Par contre, si tu pouvais te dépêcher de poser le pied sur le plancher des vaches ça m’arrangerait. Pas envie de jouer les piafs de mauvaise augure.

Je lui réponds un sourire amusé dans un hochement de tête. Je rassemble mes valises et dévale la passerelle pour enfin fouler le ponton !

- Bon les gars, on se remet en marche ! Allez allez, on s’active ! Marshal, tu ouvres grand quand dès que tu peux ! On retourne au QG !

Je regarde les marins manœuvrer dans l’effervescence la plus totale, non sans un pincement au coeur. J’ai tout de même passé de bons moments à bord, maintenant, je dois gagner ma vie en me débrouillant seule. On ne change jamais vraiment. Le bateau file à l’horizon, les gens reprennent leur activité tout doucement, certains se méfient encore de moi. Je prends un grand bol d’air frais qui emplit mes poumons ! Cette odeur fraîche de sous-bois me ravive et me conforte dans l’idée que cette île est un superbe endroit propice à la méditation !

Mais je ne suis pas ici pour flâner, j’ai une idée bien précise en tête. Je me dois de retrouver une certaine Jodiana Innes, une archéologue très connue et appréciée, surtout par la Révolution. Or, il n’y a rien de mieux qu’une bibliothèque à tendance révolutionnaire pour débuter ! Je gagne donc la ville pour trouver une auberge et m’y installer le temps de la recherche.
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C’est donc au bout d’une petite heure, après avoir trouvé une auberge potable, loué une chambre, posé mes valises et redescendu pour souffler un peu devant un chocolat chaud saupoudré de cannelle que je me suis rendue à la bibliothèque. Enfin, devant celle-ci puisque cela fait quelques minutes que je prends pour l’admirer !

Elle est tellement grande ! Ses immenses baies vitrées laissent apparaître les dizaines et les dizaines d’étages de livre dans lesquels j’aimerai tellement me noyer si j’habitais sur place ! Il y a même une représentation mécanique de notre monde, de notre soleil et des satellites ! L’endroit regorge de savants qui se perdent dans les différents ouvrages ou qui collaborent en petits groupes, le tout dans le respect des autres, un silence agréable qu’il serait dommage de perturber ! Quelle ambiance studieuse !

Une allégresse farouche déferle dans mes veines bien que je m’évertue avec peine à la juguler, et il me faut attendre encore quelques instants avant que je ne reprenne mon calme. Je replace une mèche derrière mon oreille droite en étouffant un dernier petit cri de joie folle et je pousse enfin la porte. Je suis tellement enthousiaste que je pourrais presque trouver harmonieux le tintement de la petite clochette qui trahit ma présence. Je referme délicatement la porte derrière moi pour ne pas troubler le travail des autres personnes avides de savoir présentes sur place.

- Je peux vous aider ?

Je me fais surprendre par le ton sec de cet homme que je n’avais pas vu dans mon emballement. La cinquantaine passée, les traits de son visage sont bruts, la peau presque rocailleuse, comme autant de signes que j’ai à faire à un bourlingueur plein d'expériences. Il est engoncé dans plusieurs couches de vêtements très fins peu colorés et arbore une lourde chaîne à son cou. Il m’a adressé la parole sans même un regard, ce qui le nimbe d’une aura froide mais implacable qui m’a fait un peu redescendre sur terre.

- Euh oui, bonjour, je cherche des ouvrages écrits par Jodiana Innes.

Il me fait soudainement volte-face, presque sèchement. Et il me dévisage, droit dans les yeux, dans la noirceur des rétines comme s’il sondait mon âme elle-même, ce qui est très déstabilisant et gênant. Je n’ose pas lui tenir le regard mais je n’ose pas non plus baisser les yeux alors je lui souris maladroitement en le regardant également et outre sa coupe de cheveux qui ressemble presque à du crin et qui confirme qu’il a été un homme de terrain avant d’être celui qu’il est, son regard plein de mystère en dit long sur le savoir immense qu’il détient ! Ses iris changent presque de couleur à mesure qu’il plisse les yeux et qu’il me juge.

Puis il reprend son tri de livres comme si de rien n’était.

- Vous croyez aux élucubrations d’une vieille folle avant son décès ?

J’écarquille les yeux de surprise. Jodiana ? Morte ?!

- Je vous demande pardon ?
- Vous ne savez pas ? La vieille Jodiana a dû contracter une maladie exotique durant l’un de ses voyages. Ses derniers ouvrages sont d’un complet non-sens ! Le premier qu’elle a écrit sans qu’elle n’ait toute sa tête a fait scandale dans le monde culturel, scientifique et historique. Elle est même revenue sur ce qu’elle avait écrit auparavant ! Malheureusement, un fanatique devant l’éternel de l’archéologue cinglée a tenu à éditer en petit nombre tous ses torchons jusqu’à sa mort. Tss ! Je suis d’avis qu’elle aurait mérité de s’éteindre avec un peu plus de dignité !
- Oh ... Eh bien ... Je ne sais quoi dire ... Je ... Je suis tout à fait d’accord avec vous. Mademoiselle Innes était très appréciée, même par ses pairs ... Voilà une bien triste histoire ...

Il soupire.

- Ouais.

Il range les derniers livres qu’il tenait dans sa main et se tourne à nouveau vers moi, mais avec de douceur, comme n’importe qui le ferait.

- Vous voulez les voir ?
- Vous les avez ?!
- Bien sûr. Ce n’est pas n’importe quelle bibliothèque !
- Dans ce cas, je veux bien !
- Mais je vous préviens : ne leur accordez pas trop d’importance. Pas plus que nécessaire. Et vous constaterez qu’un rien suffit amplement.

Il avance, alors je le suis. Quelques rayons et un étage après, il s’arrête. Sans même une seconde d’hésitation, il trouve ce qu’il cherchait.

- Tenez, Hinu Town. La première édition, et la seconde. Si on peut appeler ce charabia une réédition.
- Merci beaucoup !
- Ca va vous faire un choc, ne soyez pas surprise.

J’opine du chef et me rends à une table libre. Je le regarde s’éloigner pour reprendre son activité de bibliothécaire.
Curieuse, j’ouvre d’abord le livre réédité. Plus je le feuillette, plus la surprise me gagne et enfle, plus mon visage est déformé par la stupeur de ce que je suis en train de lire.

Je trouve, pêle-mêle, des poèmes, des recettes, des croquis, et autres pages avec un seul mot, sans aucun rapport avec l’île en question.

Je suis extrêmement choquée, j’ai longtemps considérée Jodiana Innes comme ma mentor, comme un modèle à suivre. Mais maintenant, j’ai presque pitié d’elle. Quel est le monstre qui l’a laissée publier cette horreur qui la prive de tout honneur ? Pour toute son oeuvre, pour toute sa vie, ne méritait-elle pas qu’on lui épargne cet affront, quelque soit son acharnement pour être publiée auprès de cet éditeur véreux ?
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- Aberrant, n’est-ce pas ?

Je jette un coup d’oeil machinal par dessus mon épaule, même si j’ai reconnu la voix. Encore cet homme, le bibliothécaire. Je lui réponds dans un soupire d’exaspération :

- C’est un doux euphémisme ...

Il s’étire un peu dans un craquement d’articulation, son âge doit visiblement lui faire mal aux reins.

- Oh ! J’ai bien mérité une pause, je peux ?

C’est la chaise voisine qu’il désigne mais ce qui m’intrigue, c’est sa voix. Elle n’est plus aussi froide que lorsqu’il m’a accueilli, elle est presque chaleureuse, avec un soupçon d’aménité mais surtout, un regard complice et le visage presque amusé. C’est très léger, très fugace, le temps d’un éclat plus brillant que les autres dans ses yeux, juste l’instant que les miens croisent les siens, comme s’il voulait me montrer à moi seule qu’il est prêt à m’aider. Je comprends que lors de notre première rencontre, quand je lui ai parlé de Jodina Innes et qu’il m’a sondé du regard, c’était pour me juger et savoir si j’étais digne d’en savoir plus. Et ça ne m’étonne pas, le Commandant Pogne lui aussi avait su lire en moi comme dans un livre ouvert.
De suite, je suis convaincue qu’il a prétexté sa fatigue pour s’asseoir à côté de moi et me parler en privé. Amusée à mon tour, je baisse la tête une seconde quand je réalise, un sourire complice courbe déjà gracieusement mes lèvres quand je la relève. Je souris devant tant de malice aussi discrète qu’intelligente.

- Bien sûr !

Il s’exécute lentement et émet un râle de satisfaction une fois assis. Il se rapproche encore plus de moi, pose ses coudes sur la table et commence à me parler discrètement dans des chuchotements à peine audible mais pourtant très clair. Toute la dureté de son ton s’est envolé.

- Vous savez, peu de gens s’intéressent encore à Jodiana depuis son naufrage intellectuel. La plupart savent ce qui lui est arrivé et ceux-là sont déjà venus me consulter. Personnellement, je ne pense pas que ce soit la maladie qui l’a emporté si vite dans les méandres de la folie. Elle a beaucoup voyagé, son système immunitaire devait être habitué, il a dû s’armer contre les maladies exotiques à force de tant d’années d’exploration en milieu hostile ! Non, Jodiana a la peau dure !

Il se redresse, toujours ce petit sourire farouche niché dans le coin de ses lèvres. Je plisse les yeux en regardant son visage comme pour deviner qu’il a voulu me dire, perdue dans mes pensées.

Jodiana ne serait pas devenue folle à cause de la maladie ? Mais à cause de quoi alors ? De la vieillesse ? Outre ses escapades risquées, j’imagine qu’elle ne devait pas faire d’excès et qu’elle tentait de garder un corps sain pour rester apte à l’exploration ! De fatigue ? Peu probable, elle devait certainement savoir s’arrêter malgré sa passion dévorante. Un choc peut être ? Que ce soit physique ou psychologique, bien que cela m’étonnerait, elle devait avoir un corps et un mental d’acier ! Quoi qu’échapper à la traque constante du Cipher Pol parce qu’elle savait lire les...

Oh !

Mon visage s’illumine brusquement, animé par une expression trahissant l’agréable surprise de la découverte ! Je vais pour ouvrir la bouche sans pouvoir m’en empêcher quand le bibliothécaire me coupe net.

- Au fait ! Je ne me suis pas présenté ! Calchas, enchanté.

Mon sourire de satisfaction se transforme en sourire complice et amusé, comprenant qu’il faut que je me taise et que je suis sur la bonne voie. Alors j’essaie de rester solennelle le plus possible et m’incline légèrement pour saluer ce fameux Calchas.

- Keith Nekhbet, enchantée !

J’ai compris ! Si Jodiana a écrit ces ouvrages sans queue ni tête, c’était pour brouiller les pistes, la faire passer pour folle pour qu’on ne lui prête plus aucun intérêt, puis morte !

Calchas se relève en étouffant un râle entre ses dents, range sa chaise et tonitrue, faussement irrité :

- Bon, c’est pas le tout, mais la journée est loin d’être terminée ! Et puis je vous l’ai déjà dit, n’accordez pas trop de crédit à ses vastes blagues, bien que je regrette leur existence ! Il n’y a rien à tirer des délires d’une vieille femme sénile ! Ce n’est que pure folie de persister à essayer de lire entre les lignes ! Discutez avec un lardon de quatre ans, ça vous sera plus profitable !

Je le regarde partir travailler à nouveau. Quel homme ce bibliothécaire ! Merci de confirmer que Jodiana a laissé trainer des indices ça et là "entre les lignes", mais je connais le tempérament de cette chère archéologue !
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Alors je commence à parcourir frénétiquement les pages du bouquin réédité sur Hinu Town. Je tourne les pages avec une motivation ardente sans même savoir ce que je cherche, peut être un détail plus marquant que les autres ? Peut être les croquis ? Ou alors il faut le coupler à la première édition ?!

Je ne me rends même pas compte que je commence à m’éparpiller bruyamment et il faut qu’une des personnes présentes dans la bibliothèque manifeste son mécontentement pour que je me calme. Ce après quoi je m’excuse immédiatement, mais s’il y a bien choses qui me tiennent à coeur dans la vie, c’est être devant un mystère à résoudre et trouver la clé pour le résoudre et avancer ! C’est inexplicable, j’aime que les choses me tiennent tête, mais j’aime aussi les percer à jour après quelques temps de réflexions ! Voilà pourquoi je n’aimais pas ma vie dans la noblesse marchande : le seul mystère qui persiste chaque mois réside dans le calcul du chiffre d’affaire. Passionnant, vraiment.

Mais revenons à nos moutons. Ou plutôt à Jodiana Innes. Je ne sais pas si elle est décédé ou même en bonne santé, autant physique que mentale, mais j’ignore surtout ce que je cherche. Est-ce qu’elle cherche à divulguer des informations sur les Ponéglyphes ou est-ce qu’elle veut donner signe de vie ? Bon, commençons quelque part, ça ne sert à vouloir tout résoudre sur une vue d’ensemble. Pour cela, j’ouvre le livre à une page au hasard. Une recette sous forme de poème ... Loufoque.


Tarte au concombre et aux anchois

Prenez une pâte sablée,
Réchauffez là jusqu’à lui donner un bronzage fin Juillet.
Mangée seule, sa sécheresse pourrait vous étouffer,
C’est pour cela que nous allons l'accommoder

L’eau évaporée, il faudra bien pourtant la rafraîchir
Mais une tarte à l’eau, d’envie ne fait pas pâlir !
C’est donc un déluge que nous allons lui servir
De fruits de la terre et de la mer que nous allons la sertir !

Prenez un concombre au vert si profond
Qui de la pluie la terre se nourrit jusqu’aux tréfonds,
Et du cette eau du concombre, nous nous gaverons
Parce que cette tarte la fabriquer nous savons.

Faites mousser de la crème en un nuage
Inutile sera son salage
Mais de thé matcha vous la colorerez en bon dosage
Nul part ailleurs ne verrez un tel ouvrage !

Et maintenant, la touche finale !
Oubliez ce poisson argenté serait fatal !
Sans cela vous n’assouvirez pas votre faim animale
Mais si le résultat n’est qu’un bloc immangeable
Alors l’interdiction de cuisiner à nouveau sera totale !


Je reste perplexe un long instant, sans rien dire, avec une tête d’ahurie. Je me pose un instant, ce texte m’a donné mal au crâne.
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Je me suis penchée sur le problème pendant plus d’une heure ! Une heure à me prendre la tête sur ces phrases et cette recette débile ! J’ai tout remis en question, les goûts, les symboles, les figures de style, le numéro de page, la comparaison avec l’ancienne édition et rien ! Rien ne m’a vraiment satisfait, rien n’a transparu ! Il a fallu que je prenne une pause dans les sous-bois pour trouver un début de piste ! Ces sous-bois et un foutu champignon ! Quand j’ai compris le rapprochement, j’ai couru pour rejoindre la bibliothèque au plus vite et recommencer à gratter !


Parce que j’ai compris que ce n’est pas tant que les ingrédients qui sont importants que ce à quoi ils renvoient. Quand on cuisine un champignon, il dégage un parfum de sous-bois qui remémore la petite promenade durant laquelle on l’a cueilli ! Et c’est là dessus que Jodiana à jouer pour rédiger sa recette !

Il y a quatre choses à prendre en compte : la pâte en elle-même, le concombre et la crème fouettée et les anchois.
Donc d’abord la pâte. Sablée. Sablée ... Sable ? Ca ne me semble pas incohérent avec Hinu Town. Sinon, la pâte sablée en elle-même ne me fait penser à rien en particulier ... Sinon à un dessert, la tarte aux dattes que nous préparait la bonne ... Je dois avouer qu’elle était particulièrement savoureuse ... Bon, Keith, arrête de penser à ton estomac, tu dois te concentrer ! Donc admettons que la pâte soit Hinu Town. Alors on comprend aisément l’histoire du bronzage, de la chaleur, et de la sécheresse.
L’eau évaporée ... Non ?! Mais si ! La sécheresse évoque l’absence de pluie et des sources qui se tarissent ! Les gens souhaitent son retour sans parler d’inondations, qui ne font pas pâlir d’envie de retrouver de l’eau à l’état naturel, le déluge !

La Dance Powder ! Quelque chose relie Hinu Town à la Dance Powder ! Peut être que les locaux veulent l’utiliser pour attirer les nuages de pluie jusque sur l’île ! Ah mais c’est ça ! Haha ! Les nuages ! Comme ceux de crème fouettée ! De la crème fouettée colorée par le thé vert, vert comme la Dance Powder ! Et par le concombre, c’est le cycle de la vie qui est interprété ! Les plants absorbent l’eau de pluie que lui même contient dans sa chair ! Et c’est un des fruits issus de la terre, comme les composants de la Dance Powder doivent être ! Peut être des minerais ... Des minerais ... d’argent !

Ce qui voudrait dire qu’il existe une version de la composition de la Dance Powder à Hinu Town ? Et si je pense vrai, j’imagine qu’il figure sur un Ponéglyphe puisque avant de sombrer dans cette fausse folie complètement géniale, Jodiana s'intéressait à eux ! Haaan ! Mais d’où ce bloc immangeable ! Ce bloc incassable qui révèle la composition de cette recette interdite !

Il existe donc bel et bien un Ponéglyphe à Hinu Town qui explique comment fabriquer de la Dance Powder, et visiblement, elle est issues de minerais !


J’exulte dans tous les sens, faisant voler mes feuilles à droite et à gauche pour ne pas ralentir mon raisonnement. Parfois, quand je me souviens que je suis dans un endroit calme, j’essaie d’étouffer mes petits couinements de satisfaction. Il m’arrive même de me reprendre complètement, quand quelqu’un fait mine de tousser ou de s’éclaircir la voix surtout, histoire de me ramener sur terre. Alors je rassemble jalousement mes brouillons et je les garde précieusement à l’abri de tout regard comme un trésor inestimable.

Une fois mon travail de décryptage, je décide de retourner voir mon bon Calchas. De mon pas pressé et de mon sourire béat, il devine facilement que j’ai percé à jour le mystère, un peu comme une épreuve qu’il m’a confié pour voir si j’étais digne de confiance ou je ne sais quoi. Il m’adresse un large sourire, plein de sens.

- Alors ?
- Absolument édifiant ! Comment un esprit humain peut-il partir aussi loin ?
- Je vous l’ai dit, c’est une bien triste histoire ... Et vous n’êtes pas au bout de vos surprises ...
- Ah bon ?
- Non ... Regardez plutôt ce que je vous ai mis de côté : ses deux ouvrages sur l’Amerzone, sa dernière expédition ... Son état ne faisait qu’empirer, on l’a retrouvé morte, calcinée comme un vulgaire cochon par les abrutis locaux ... Son délire est bien important ...

A ce moment là, il a semé le doute en mon for intérieur. Est-il encore ironique ? Est-ce là bas que se cache Jodiana ou bien y est-elle réellement décédée ? En tout cas, il m’a sacrément refroidi.

- Tenez. Je vous fais confiance, mademoiselle Nekhbet, vous êtes quelqu’un de bien. Pour une fois, je vais fermer les yeux sur la date du retour, par contre, je serai intransigeant sur l’état dans lequel vous me le rendrez.
- Merci infiniment ! Et ne vous inquiétez pas, les livres sont de petits trésors à mes yeux, je ne permettrais pas de les dégrader.
- Je n’en doute pas, mademoiselle Nekhbet, je n’en doute pas. Je vous souhaite bon voyage ... et bon courage surtout.

L’Amerzone ? Je connais. En théorie seulement, puisque la Nouvelle Ohara a été ma première vraie destination. Et quelle destination ! Le séjour en Amerzone ne sera pas une partie de plaisir à patauger dans la mangrove et l’inculture locale ... Une vraie errance m’attend aussi là bas, dans le désert et dans la solitude de l’intellect.

Mais bon, si Jodiana est réellement cachée là bas, je parie que le jeu en vaut la chandelle !
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