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Camaïeu de bleu II

“Par où commencer ?”

Je m’étais posé cette question des dizaines de fois. Je n’avais qu’un début de piste, et il valait presque rien tout en coûtant cher en cas d’échec : Carmin. Un marin turbulent sous mon commandement de Caporal factice. Le temps de cette mission sur Inu Town, j’étais devenu le Caporal Blomberg dans la caserne de l’île, où régnaient insubordinations et zèle abusif. Je pensais que les premières étaient les réponses de ce second, mais la cause était bien plus profonde. En effet, la Révolution s’était infiltrée dans la base et influençait les jeunes recrues malléables et aux idéaux brisés par des supérieurs trop autoritaires et bêtement inflexibles. J’avais réussi à gagner la confiance de mon escouade à force, sauf celle de ce Carmin que je n’avais réussi qu’à gagner à moitié, de rester avec eux durant leurs punitions, sous un faux prétexte de responsabilités. Mais dans la caserne, tout ce qui n’était pas gradé était forcément corvéable, coupable et condamnable à volonté.

Ma mission ? Rapporter l’état et les activités de la Révolution sur Inu Town tout en calmant autant que faire se peut les tensions entre gardés et mousses, tensions qui gonflaient le flot des rapports du moment.
Et comme la Révolution savait se faire très discrète, j’avais dû me focaliser sur la seconde partie de ma mission, mais j’étais loin de croire que les deux étaient intimement liées.

Au final, je m’étais pris d’affection avec mon escouade, surtout à cause de la bête méchanceté de leurs supérieurs. Et puis c’était un réel plaisir de se sentir suivi et obéi au doigt et à l’oeil. Sauf par ce fameux Carmin, bien entendu, qui doutait de ses ambitions. Il hésitait entre me faire confiance quitte à se faire briser par les autres supérieurs, et leur faire un pied de nez en rejoignant la Révolution. Et bien sûr, comme il oscillait entre les deux, je ne savais vraiment pas si je devais m’y fier, ou si je devais me dévoiler au grand jour ...
Parce que si je lui avouais que j’étais un Agent du CP5, que je lui demandais de regagner les rangs calmement en attendant que je réglasse la situation, mais qu’il allait tout cafarder aux Gris, cela me mettait dans un crassier sans nom. Mais sans ça, il ne pouvait pas me faire pleinement confiance et ma mission était encore plus ardue puisque c’était ma seule piste, et le mousse n’est pas fiable.

Finalement j’optai pour la difficulté, donc la discrétion. Le risque d’échec était présent, mais moindre que pour la seconde option, et je préférais encore en être la cause.

Seulement, je ne pensais pas que les ennuis allaient se présenter aussi rapidement ...
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Eh mer...credi !

- Xars... Xarsas ! que je sifflai entre mes dents pour ne pas me faire entendre par tout le monde.

Alors que je me cachai sur le côté de la cantine pour ne pas me montrer aux yeux de tous, il s’approchait, un peu pataud, persuadé d’avoir entendu quelqu’un cracher son nom. Une fois à portée, je le tirai par le bras d’une main, tout en recouvrant sa bouche de l’autre. Une fois à mes côtés, je fis les gros yeux pour qu’il se taise.

- Xarsas, tu es peut être le seul en qui j’ai le plus confiance, et il FAUT que tu me viennes en aide !
- Bah euh ... tout dépend quoi ... me dit-il l’air hagard.
- Je sais que c’est nos deux jours de permission depuis longtemps, mais Carmin a encore fait des siennes ...
- Teh, l’abruti ...
- Je n’aurais pas mieux dit ! Surtout que Perkson lui même en a après sa peau ! Il est persuadé que c’est lui qui a fait la connerie !
- Et c’est pas lui ?
- Hmm ? Si ! Enfin non, je ne sais pas, mais j’aurais besoin que tu te fasses accuser à sa place ...


Parce que si Carmin se faisait attraper, il se serait fait sucrer sa permission. Donc mon éventuelle chance qu’il allât voir la Révolution et donc que je le suivisse.

- Quoi ?! Ca va pas la tête ? Je suis désolé Caporal, mais c’est non !
- Xarsas ! Je t’en supplie !
- Caporal ... Vous savez bien qu’en temps normal j’aurais accepté. Mais là, ça fait des semaines que je n’ai pas vu Chom autre que pour y patrouiller !


Rhaa ! Ce n’était pas le moment de me lâcher ! Je ne voulais pas lui dévoiler la vérité au risque d’au minimum d’ébrécher la confiance qu’il avait sû placer en moi, petit à petit, difficilement.

- Ecoute Xarsas. Quand tu es venu me voir pour me parler de Carmin l’autre soir, c’était bien pour que je fasse bouger les choses, non ?
- Oui mais ...
- Eh bien là je suis en train de le faire, mais en plein pétrin ! Il FAUT que Carmin ait sa permission pour que je puisse le suivre. Je sais des choses sur votre situation, et je sais que tu es quelqu’un de bien, Xarsas. Sinon tu ne serais pas venu me voir. Laisse-moi cette chance je t’en supplie !


Il se griffait le crâne à cause de ce dilemme qui le tiraillait, à faire les cent pas. Est-ce que la résolution des soucis valait-elle vraiment la saveur de sa permission ?

- Je te promets d’essayer de faire aussi rapidement que possible ! D-D... De te laisser au moins un jour de permission ! Laisse-moi tout résoudre aujourd’hui !
- Nan, je suis désolé Caporal, vous êtes peut-être le seul gradé que j’aime bien, mais je peux pas. Je peux pas vous laisser faire ça ... J’en ai vraiment besoin de cette perm’ ! Et vous le savez plus que moi.


Bon ... eh bien il me restait plus qu’à jouer mon va-tout, et contre lui, contre mon envie ... Contre le peu de temps qu’il me restait avant l’intervention de cet abruti de Colonel.

- Xarsas, je dois t’avouer quelque chose qui ne te fera pas forcément plaisir sur tous les plans mais ... en fait, je ne suis pas vraiment Caporal ...
- Hein ?
- Je travaille pour le Cipher Pol 5 et on m’a envoyé ici en mission. Je dois établir la présence de la Révolution et de ses activités tout en gérant les troubles internes de la caserne. Et tu m’as beaucoup aidé à comprendre ce qui se passe ici. Accepte, et je fais tout pour qu’on t’offre une permission après ça.
- Hm ! Vous savez que je vous déteste ?
- J’imagine. Et tu m’en vois désolé, mais je ne voulais pas en venir là ...
- Vous nous l’auriez appris, sans ça ?
- Je ne sais pas ... et le temps presse ...
- Est-ce que j’ai le choix du coup ?

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- Eh bien ... pas vraiment. Mais j’aurais aimé que l’initiative vienne de toi ...
- J’accepte si vous allez au diable, “Caporal”.
- On paie tous pour nos péchés. Même si c’est pour la bonne cause ! Mais pas un mot sur ma réelle identitée hein ! Je te fais confiance !
- Arrêtez de parler de confiance, ça me donne la nausée. Foncez plutôt !


Je lui tapotai la tête en témoignage de ma reconnaissance avant de détaler, suivi par Xarsas, direction notre dortoir.

- Carmin ! tonitrua la voix de Perkson au loin. Vous allez trop loin ! Ce sera au gnouf, et à vie !

Je déglutis péniblement. Je n’avais pas envisagé une telle durée ... Mais qu’est ce que diable avait-il pu faire ?! Xarsas me donna une tape sur l’épaule pour me demander des comptes, mais je haussai des épaules tout en continuant ma course ... qui se transformait lentement mais sûrement en chasse à l’homme ... Et je jouais la proie d’un Xarsas furieux !
Mais la proie savait parfois se faire prédatrice ! Et à l’entrée des dortoirs, j’attendis mon chasseur, feignant de continuer ma course à l’intérieur pour mieux l’intercepter en le plaquant sur le mur et le faisant valser sur une chaise juste à côté d’un lit ... celui de Carmin justement.

- Attenter à la vie de l'Adjudant Novic fut votre plus grosse erreur, mais aussi votre dernière ! résonna la voix de Perkson qui s’approchait irrémédiablement !

Carmin fit les yeux ronds, à moitié ensommeillé.

- Qu’est ce qu’il me veut encore Culbuto ?

Je le pointai immédiatement du doigt, l’air accusateur et pour une fois, réellement stressé et en colère. Je plaquais mon autre main sur la bouche d’un Xarsas qui se battait férocement pour ne pas être accusé à tort d’une faute aussi énorme.

- Toi, tu fermes ta gueule ! que je sifflai entre mes dents. C’est pour toi qu’on fait ça ! Xarsas, je sais ce que vous pensez, mais ne bougez pas ! Je vous promets de ... eh bien ... tenir promesse !

Je le savais ! Je le savais !
Je savais que ma phrase allait être idiote à peine formulée ! Mais le temps pressait, le stress m'envahissait et je lui fis mordre ma casquette de Caporal que je lui avais enfoncé dans la bouche sans lui demander son autorisation, avant de tirer ma rapière au clair et de lui faire une entaille au niveau de l’abdomen pour plus de véracité. Le coup lui arracha bien sûr un cri furieux de douleur, mais ma main toujours plaquée l’avait étouffé.
Aussitôt, je nettoyai ma lame dans son uniforme et plongea les mains de ma pauvre victime désignée dans le sang qui s’écoulait de sa blessure toute fraîche, tous trois transpirant à grosses gouttes mais restant complètement muets, pour différentes raisons d’ailleurs. Je n’étais même pas parvenu à ordonner à Xarsas et à Carmin de se taire sitôt ma main retirée du visage du premier, préférant sans vraiment le vouloir, leur faire comprendre du geste de mon index sur ma bouche. Je retirai ma main et Xarsas me siffla un :

- C’est MOI qui vais vous emporter au diable !
- Colonel ? Oh, vous tombez bien ! Regardez ce que j’ai trouv...
- Je m’en contrefous de votre trouvaille, Blomberg !
éructa-t-il dans une gerbe de venin corrosif autant que cet odieux personnage pouvait l’être. Allez vous faire voir, vous, votre incompétence à surveiller vos hommes, et même votre trouvaille avec ! J’ai des chats ô combien plus importants à fouetter jusqu’au sang que vous et votre petite trouvaille ! Ah ! Voilà cet imbécile de Carmin ! Vous me débecter ! Allez deb...

Il commençait à s’en prendre à lui manu militari dans une obsession complètement démesurée !

- COLONEL, tonnai-je.

Il s’arrêta immédiatement, les yeux toujours injectés de sang, les dents serrées. Il avait porté ses canons oculaires sur moi. J’étais devenu sa cible.

- Ah ... Blomberg ... Je savais que vous étiez de la mauvaise herbe que je vais me faire une joie d’arracher du le billard qu’est cette caserne. Vous savez ce que ça vous coûte de vous adresser ainsi à moi, le plus haut gradé de ces lieux ?

Je ne me démontai pas. Peut être à cause de la haine que je lui nourrissais. Mais désormais, il n’était plus le seul à avoir des fusils à la place des yeux.

- Et vous ? N’avez-vous donc aucun scrupule à vomir votre venin et à vous en prendre de cette façon à un soldat innocent ? Vous accusez sans preuve, et vous agissez sans réfléchir.

Il fulminait complètement mais pour autant, je ne lui laissais pas le temps de caser n’était-ce qu’un seul petit mot.

- Et quand bien même je vous présente le véritable coupable, vous foncez tête baissée sur un élément qui s’est, certes, avéré être perturbateur. Pourtant, nous avons discuté de son comportement toute la matinée durant, quand Xarsas est arrivé ensanglanté à l’instant même. Toute cette hémoglobine me paraît être une évidence même, n’est ce pas ?

Il braquait toujours son regard meurtrier sur moi, soufflant par le nez comme un buffle enragé qu’il était. J’avais sû rester calme contrairement à lui, et cela m’accordait une supériorité certaine.
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Alors il dévia ce regard hautain et fou sur un Xarsas à moitié conscient ...

- Alors soit, aboya Perkson, vexé.

Il l’embarqua brusquement en saisissant son bras, lui qui titubait en essayant de suivre le pas pressé de ce fichu Colonel.

- Et j’oubliais, Colonel. Assurez-vous qu’il reçoive des soins. Il a beau être un traître, ce n’est pas ainsi que nous traitons l’ennemi.
- Ce chien n’a que ce qu’il mérite, Blomberg. Et vous n’avez pas d’ordre à me donner, je vous rappelle. Petit caporal misérable que vous êtes.


Mais je n’eus cure de son verbe acide et me tournai vers Carmin, un demi-sourire à moitié assuré.

- Putain mais j’en reviens pas ! Vous êtes une vraie pourriture !
- Ce serait une grave erreur de me dénoncer, Carmin. Je te rappelle que tu vaux pas mieux que moi.


Il s’arrêta un instant, et me regarda. Mais ses yeux n’étaient pas remplis de rage, encore une fois il essayait de me juger.

- Perkson a raison, allez vous faire foutre ! Pis vous pouvez toujours attendre pour un “merci”. C’est Xarsas qu’a raqué pour moi !

Lui aussi était vexé mais j’étais à peu près sûr qu’il n’allait pas me dénoncer puisqu’il avait pris la tangente. J’attendis quelques instants avant de me lancer discrètement à sa poursuite. Si mes yeux et mon corps tout entier le prenait en chasse, mon cerveau trimait à deviner qui aurait pu vouloir s’en prendre à l’Adjudante Novic. Et pour moi, il n’y avait que deux solutions : soit elle en savait trop et gênait, soit on a voulu lui faire payer sa traîtrise sans avoir de preuves tangibles. Puis la seconde option me parut absurde : on ne tuait pas sur des suspicions, et son assassin était certain de lui, alors il l’aurait tout bonnement conduite en justice comme un homme du bon côté de la loi l’aurait fait.

Alors Novic était la victime d’un Révolutionnaire infiltré. La piste Carmin était repoussée d’entrée de jeu, il était dans son lit quand je suis parti au réfectoire. Un matelot ? Peut être. Et puis je me souviens de ce que j’avais dit Benett, que des gradés étaient impliqués mais il ne savait pas qui. Mais si elle n’avait pas pu donner l’alerte, alors deux hypothèses s’offraient à moi : soit l’assassin l’avait attaqué sans qu’elle ne s’en aperçût, soit elle le connaissait ... Mais si le meurtre avait été préparé, il ne l’aurait pas manqué, à attaquer depuis les ombres ... Donc peut-être que Novic connaissait l’assassin et qu’elle ne s’en était pas inquiétée, et dans ce cas, le plus probable aurait été un Sergent ou un Lieutenant donc un gradé juste en dessous ou au dessus qu’elle et qu’elle avait l’habitude de côtoyer, même si elle pouvait potentiellement deviner qu’on chercherait à l’éliminer à en trop savoir ... Mais pourquoi, et qui a accusé Carmin ?

Décidément, je n’arrivais à rien et surtout, cela faisait quelques heures que je tournais et retournais la question dans ma tête, pendant que le matelot se payait du bon temps dans une maison close ... Comme moi avant ... Un agréable souvenir de Lynbrook surgit dans ma tête mais je le chassai bien vite, regrettant à moitié de ne pas être resté à la caserne pour interroger Novic ...

... jusqu’à ce que Carmin daignât enfin sortir de cet endroit de luxure.

Ma filature reprit, et je n’allais pas être déçu puisqu’il me conduisit jusqu’au bâtiment où était logé le nid de la Révolution ! Un bâtiment délabré du quartier pauvre que j’avais vaguement pu visiter le jour de mon arrivée. Et pourtant, rien. Pas un seul guetteur ne surveillait les environs ...

C’était étrange, mais pour le moins efficace. Personne ne pouvait se douter que la Révolution était installée ici même ... Je suivis Carmin jusque dans un dédale d'escalier et d'étages, tout en essayant de faire le moins de bruits possible, que ce fût à cause des pas qui résonnaient ou de ma respiration qui se faisait haletante. Et puis presque arrivé au dernier étage, il jeta un oeil dans les alentours, ce qui m'obligea à me cacher d'urgence contre un mur, puis il frappa un coup, quatre autres, et enfin deux derniers avant d'ouvrir, toujours aussi méfiant.

Je pus enfin le rejoindre, gagnant cette même porte sur laquelle je collai mon oreille.
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Cela faisait dix minutes que j’écoutais à cette porte, tout en prenant le risque que n’importe qui pouvait me surprendre ....

- Oh, arrête d’être contrarié Phil ... Ca me pèse !
- Ouais, mais c’est encore la merde là haut ...
- Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
- Y’a en a qu’a essayé de buter une Adjudant, et ce connard de Colonel croit que c’est moi ...
- Tu vois ce que je te disais ...
- Nan, mais c’est pas ça le pire, c’est qu’y a aussi ce putain de Ca...



Toc. To-to-to toc. Toc-toc.


Un ange passa. J’avais coupé la conversation au bon moment, Carmin allait sûrement trop en dire.

- Hm ... eh bien ... entrez ...

Je m’excutai et poussai la porte, ce qui enflamma instantanément mon matelot.

- V-Vous ?! Putain mais à qu...
- Quoi ? Moi aussi j’en ai marre de ce vieux pourri de Perkson !
commençai-je à mentir, bien qu’une part de vraie se cachait derrière. Je veux bien filer droit, mais si je peux faire chier cette tête de con, je vais pas me gêner !
- Phil, tu me présentes ?

L’homme qui venait de prendre la parole et que je présumais être le chef de la Révolution était un jeune trentenaire, châtain, les cheveux mi-longs, yeux bleus. Il paraissait à la fois détendu et impeccable dans sa chemise et son vieux jean. Il était fièrement assis dans un divan face à la porte d’entrée. L’appartement était dans le même genre, classe mais pas trop. Tout me faisait penser à moi durant mon adolescence à Lynbrook, un pianiste du pauvre, avec un vieux smoking mal taillé.

Il me fixait droit dans les yeux, mais sans animosité, presque amusé et chaleureux. Mais quelque chose sonnait faux dans son regard. Comme s’il était faussement serein. Clairement je dérangeais.

- Blomberg, mon Caporal.
- Oh oh ! Voyez-vous ça ... J’ai l’insigne honneur de recevoir un jeune gradé aujourd’hui ...
dit-il le ton presque chantant.
- Je sais ce que je vous êtes, mais ça ne me dit à qui ai-je à faire. Les présentations doivent être mutuelles.

Carmin ouvrit la bouche, blasé, mais l’homme l’interrompit en prenant la parole, tonitruant.

- Mes excuses ! Sven Calstein, enchanté !

Hm. Il n’avait pas voulu que Carmin me révélât son nom, c’était donc qu’il me mentait lui aussi. Mais je cachai ma réflexion dans une courbette polie et surtout immédiate pour ne pas la lui montrer.

- Et donc ? Je suppose que j’ai le droit à une mission pour faire mes preuves et prouver ma fidélité ?

Il éclata franchement de rire.

- Non, pas tout de suite mon jeune ami ! Puisque vous savez qui nous sommes et ce nous pouvons alors, alors je vous laisse imaginer que la réciproque est tout aussi vraie. Continuez de mettre des bâtons dans les roues de ce Perkson, vous le faites si bien.

Quel pédant !

Depuis le départ de la caserne, j’avais songé à mon approche. Au début, je voulais le coffrer purement et simplement, sans même réfléchir. Et puis l’idée de jouer la comédie m’avait séduit, mais nous étions désormais pris dans un jeu de mauvais faux-semblants et de méfiances clairement palpables. Je n’avais fait que me compliquer la tâche, et ce “Calstein” avait une longueur d’avance ...

- Bien. Je vous laisse disposer, Phil m’a dit que vous avez votre permission, je m’en voudrais de la gâcher.
- Ouaip. Et on en a vraiment besoin ! Hein Carmin ?


Il me jeta un regard noir avant de prendre la porte, je le suivis donc sans un mot. Alors qu’il avançait à grandes enjambées, visiblement frustré, il me fallait presser le pas pour le rattraper. Et alors que j’allais pour engager la conversation, excentrés du centre-ville, il le fit à ma place.

- Mais vous êtes complètement con d’être venu ! Je leur ai parlé de vous quand vous avez commencé à me faire chier dès votre arrivée ! Ils se méfient encore plus de vous maintenant !

J’étais interloqué, puis doucement moqueur. Pas méchamment, son manque de sens me faisait juste sourire.

- Mais de nous deux, c’est toi l’abruti Carmin ! Tu ne comprends pas ? C’est un révolutionnaire qui a essayé de tuer Novic et c’est ce même Révolutionnaire qui a essayé de te faire porter le chapeau ! Ils doutent de toi, et pour éviter que tu ne parles, ils essaient de faire emprisonner ! Il aurait pu te buter quinze fois, ce “Calstein” !

Il avait commencé à être choqué par la vérité, jusqu’à ce que j’eus dit le nom du chef local, où il lâcha un rictus.

- Me prends pas pour une buse. Je sais que ce n’est pas son vrai nom. C’est quoi d’ailleurs ?
- Allez vous faire foutre.
- Fais bien gaffe Carmin, je reste ton Caporal. Et si tu continues à me scier les nerfs, c’est moi qui te fout à l’ombre. Je veux juste vous aider, encore une fois.


Il soupira, tête dans les mains, en faisant les cent pas, comme à son habitude. Ce n'était clairement pas un mauvais bougre, je le savais au fond de moi même.

- Rhaa ... Kralsson ! Voilà, content ?

Hm ! Quelque soit son nom, il avait déjà menti une fois, rien ne l’empêchait de recommencer.

- Merci Carmin. Tu vois quand tu veux ?! Bon, et tu veux pas m’aider à mettre un terme à tout ça ?
- Bien joué Caporal, mais je cracherai pas le nom de mes camarades !
- Camarades qui essaient de t’éliminer d’une façon ou d’une autre je te rappelle ...
- Ouais, mais ça, c’est pas vos oignons !


Cela m’allait qu’il fuyait. Éloigné du bâtiment de ce Kralsson ou de ce Calstein, ou quelque pouvait être son nom, et de la caserne de Chom, je pouvais contacter tranquillement mon coordinateur, William Clifton, un cinquantenaire ancien espion, très poli et très agréable, et qui connaissait presque par coeur tous les agents avec lesquels il traitait.
Je me mis donc à l’abri des regards et des oreilles, au creux de ces superbes briques brunes, et je m’y assurai personnellement avant de sortir un minuscule escagophone ridé de ma poche intérieure.

Puru puru puru ... Puru puru puru ... Puru puru puru ... Katcha !

- Allô ?
- Monsieur Clifton ? Ici l’agent Asturm ...
- Oh, Monsieur Asturm, quel plaisir d’entendre votre voix ! Mais je vous ai déjà dit de m’appeler William ...
- Ah ... C’est vrai, désolé ... Donc euh ... William ... j’aimerais vous que vous me dégotiez des informations sur un dénommé Sven Calstein ou ... ou Kralsson ...
- Vous n’arrivez pas à vous décidez ?
plaisanta-t-il.
- C’est surtout que le bonhomme a la fâcheuse tendance d’utiliser plusieurs pseudonymes alors j’ose espérer qu’il a déjà fait la bourde de se faire repérer avec de ces noms.
- Entendu, je vous cherche ça dès que je peux. Comment se passe votre mission ?
- Il me faudra un peu plus de temps que prévu ...
- C’est noté.
- Merci William, au revoir.


Je raccrochai et rangeai le Den den à sa place avant de prendre un peu de temps pour moi. C’allait être serré, et il allait me falloir la jouer fine ... Sans compter Perkson et Carmin ...
J’imaginais que ce type allait chercher à m’éliminer, tout comme il avait essayé avec Novic. Alors je me devais de trouver l’assassin, et cela commençait par aller voir la cible qui devait avoir des informations. Et vu son état actuel, il me fallait agir vite ... Il me fallait agir avant que l’assassin ne le refasse.
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