Posté Mar 11 Avr 2017 - 11:10 par Ragnar
« T’en fais pas, p’tit gars, je m’intéresse beaucoup à ce qu’il se passe au niveau de l’esclavage dans le monde. J’ai lu tes exploits sur l’île aux esclaves, c’est fascinant. J’aimerais pouvoir en faire autant, mais des responsabilités m’incombent ici. »
Bon, déjà, point positif : il n’est pas hostile à ce que je suis et à ce que je défends. Mais qu’en sera-t-il quand je lui annoncerais la raison de ma venue ? Pour tout leader, qu’un inconnu se ramène chez lui pour déballer des tas de pensées et d’idées d’action, c’est jamais bon signe. Alors je réfléchis quelques instants à comment amener ça, sous les regards très observateurs de mes deux confrères.
Comment lui dire que je suis ici pour effacer toute trace du gouvernement mondial sur cette île ? Parce que bien sûr, cela implique certaines choses, comme peut-être un retour de ces derniers s’ils tiennent à l’île. D’ailleurs, je réalise seulement maintenant la merde dans laquelle je me fourre. Si le gouvernement réagit, qu’il m’envoie toute une armada, je risque aussi d’y passer… Tant pis.
« Par où commencer…? Tu connais mon appartenance, tu te doutes que la raison de ma vue implique certaines choses… »
Je bafouille. Aller droit au but.
« Cette île doit retrouver son once révolutionnaire. » Ton de voix déterminé, c’est ainsi que je conclus.
Le maire se tient le menton et réfléchit.
« Tu ne le sais sans doute pas, mais nous sommes en train de nous remettre d’un terrible massacre. Le gouvernement a détruit cet endroit que nous tentons de reconstruire avec les ruines et la sueur de nos fronts. Les citadins ne voudront pas revivre ça, je suis désolé. » Dit-il en serrant son marteau. L’expression de son corps contredisent ses propos.
« Vous ne pouvez pas accepter cette situation. »
« La vie de ces gens est redevenue à peu près normale, je ne pense pas qu’ils veulent revivre ce désastre et c’est tout à fait légitime. »
« Laissez-moi leur parler ! » M’exclamé-je vivement.
« Fais donc, gamin. Ton optimiste me rappelle ma jeunesse. »
Sans un mot, je me retourne vers la sortie plus déterminé que jamais. Je n’ai pas réellement de plan d’action, mais j’imagine que ça me viendra dans la foulée.
« Je te conseille de te rendre vers l’entrée des égouts, à l’extrémité du port, ça pourrait t’intéresser. » M’interrompt-il.
Je me freine quelques instants, puis je réenclenche ma marche en levant le bras en guise de remerciement. Nous quittons l’atelier vers la destination indiquée. La marche se fait silencieuse. Je marche en tête, les deux autres derrière moi. Nous nous éloignons de la cité, on approche d’un espèce de terrain où l’on peut voir une grande sortie d’égout.
« Et donc… tu comptes réellement te fourrer dedans, sans rien savoir de plus ? » S’interroge Suelto.
« Avons-nous d’autre choix ? »
« J’en sais rien. Mais quoiqu’il en soit, s’enfoncer là-dedans ne me semble pas être une bonne idée. »
« Que proposes-tu comme alternative ? »
« C’est toi le boss, crétin. »
« Tu devrais donc obéir sans broncher. »
« Calmez-vous, connards… J’vous suis pas pour ce genre de conneries, compris ? » Tempère Maria, à sa manière. « Allons voir ce qu’il se trame là-dessous, nous ne sommes plus à ça près, le danger c’est notre drogue. »
« Parle pour vous, je n’aime pas ça… Mierda ! » Grogne Suelto avant de passer devant, barbotant quelques mots dans sa langue natale.
Il n’a pas aimé la remarque de Maria, c’est certain. Il va lui montrer qui est l’homme dans l’affaire. Suelto est quelqu’un de très brillant malgré son apparence de bad boy, c’est certainement la tête pensante du groupe. Il n’aime cependant pas diriger, estimant que c’est à moi de prévoir, d’élaborer des plans sûrs pour l’équipage. Là, je connais nos capacités à tous les trois, j’ai confiance en chacun de nous.
Il s’arrête à l’entrée de l’espèce de tunnel et nous y attend. Ce dernier me jette un regard signifiant probablement « t’es le leader, t’as ton foutu haki, alors passe devant et me fais pas chier ». Il dégage actuellement une telle animosité que je n’aimerais lui désobéir. Il m’est tellement utile que je ne voudrais trop le contrarier.
Comme convenu, je passe devant, inspire un bon coup et entame la marche en me concentrant essentiellement sur mes sens. Pour l’instant tout baigne dans ce foutu tunnel, on s’enfonce progressivement dans ces foutus égouts. Faut réellement que la révolution pense à se respecter un jour, j’en ai marre de croupir dans des endroits aussi dégueulasses.
« Vous sentez cette odeur nauséabonde ? » Demandé-je étonné.
« Celle des égouts, capitaine… » Me répond Maria avec lassitude.
« C’que tu peux être con. » Rajoute Suelto.
Nous sommes clairement désavantagé dans ce milieu obscure, nous ne voyons quasiment rien. Seule l’ouïe peut éventuellement nous guider et nous avertir d’un potentiel danger. D’ailleurs, nous entendons tous l’eau s’agiter, jusqu’au moment où on fini même par être légèrement éclaboussé par cette agitation. Maria a déjà dégainée sa lame, Suelto chargé son fusil, ils font preuve d’énormément de sang-froid.
Mais soudain, quelque chose surgit de l’eau, j’identifie une aura fine, longue et plutôt souple vue comment elle se tord dans tous les sens. Elle reste en hauteur de notre position, nous regarde de haut, alors j’en déduis qu’elle peut soit nous voir, soit nous sentir. Pour le moment, personne ne bouge, peut-être décidera-t-elle de s’en aller.
Il n’en est rien.
D’un seul coup, l’aura se projette vers nous à une vitesse assez conséquente. J’esquive la charge en me déplaçant d’un pas vers ma gauche, sauf que je ne l’arrête pas de suite, mes deux camarades recevront l’attaque de plein fouet. Je dégaine instantanément ma lame que j’enfonce à deux mètres de sa tête, puis j’allonge mon bras d’un petit mètre vers le ciel pour réduire la distance qui la sépare des deux camarades, immobiles, qui se seraient pris une charge avec surprise.
« Ah ! J’ai des allumettes dans ma poche ! » S’exclame Suelto.
Il allume une allumette et tombe nez à nez avec l’espèce de serpent énorme. L’expression de Maria ne change pas d’un poils, comme à son habitude, elle reste totalement indifférente face à la situation. Pour ce qui est de Suelto, après un léger sursaut au niveau des sourcils, son visage se crispe, finissant par se pincer le nez.
« C’était donc ça qui sentait le mort… Enlève-moi ça de là, por favor. » Lâche-t-il en détournant le regard de la chose.
Je m’attendais à des hurlements, mais que dalle, seulement un sourcillent. Je suis entouré de monstres ou quoi ? Une personne lambda aurait quitté le tunnel sans criant comme une tafiole. En même temps, j’imagine qu’ils ne sont pas mes plus fidèles compagnons pour rien. Je retire ma lame, et d’une rotation d’une corps, je balance un coup droit, à l’instar d’un joueur de tennis, qui tranche nette la partie haut du serpent.
Nous continuons la marche, toujours sous une extrême vigilance, discutant de tout et de rien, mais aussi en priant que le reste de l’équipage n’est pas provoqué de problème. La marche se résume à des récits, des injures, beaucoup d’injures parce qu’on aime ça, puis à quelques plaintes dû au manque de visibilité.
Nous tombons nez à nez face à trois entrées. Naturellement, il va falloir choisir laquelle prendre, sachant qu’une seule doit mener à l’endroit souhaité et que les deux autres… surtout sachant que c’est tenu par la révolution, je crois que l’envie de savoir me quitte. Suelto se creuse les méninges pour trouver une solution, Maria est toujours aussi peu expression, c’est d’ailleurs miraculeusement la première à s’exprimer.
« Il y a trois voies, nous sommes trois, chacun en choisit une. » Dit-elle naturellement.
« Ferme-la si c’est pour sortir des âneries, veux-tu ? » Rétorque Suelto agacé.
« Répète un peu pour voir, latino-roux de merde ? »
« J’ai certainement trouvé la voie. » Que j’affirme à haute voix pour calmer les tensions.
« Certainement ? C’est pas assez, grignon ! » S’excite le rouquin.
« La voie tout à droite et celle du milieu, j’entends des espèces de grognements pas du tout rassurants, tandis que tout à gauche, je crois percevoir des voix à peu près humaines. C’est très flou. De toute façon, je vais à gauche donc faites ce que vous voulez. »
J’entame la marche. Forcément, l’espace est plus réduit, le chemin plus étroit, c’est encore moins éclairé et rassurant. Les deux autres restent sur place quelques instants en se dévisageant du regard, puis ils finissent tout de même par me rattraper. Nous ne savons absolument pas ce qui nous attend au bout de chemin, mais nous ne pouvons plus faire demi-tour.