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Pour le bonheur de ces dames

- Sérieusement ? Tu veux me faire payer la discute ?! Et moi qui croyais que tu éprouvais un minimum d'affection pour moi !

   Ça, c'est quand même un sacré foutage de gueule ! Je viens au moins une fois par semaine, j'aide à faire tourner le commerce, en tant que client, je souris, je m'habille convenablement pour l'occasion, j'apporte même les quelques fleurs rescapées de ma terrasse pour lui faire plaisir et cette foutue catin ose me demander de sortir la bourse pour avoir bien voulu prendre la peine de parloter ?! Julia Carmin...

- Je suis profondément blessé. C'est pas comme ça que je t'imaginais, vilaine.
- Tu me dis vilaine et tu te prétends fidèle à ton "abonnement hebdomadaire" ?
- Tu es... aussi énervante que désirable.
- Les flatteries ne t'empêcheront pas de me payer.
- Ton décolleté ne me fera pas non plus changer d'avis. Négocier à la limite.
- Qu'as-tu à négocier ?
- Un paiement en nature.
- Je te pensais plus spirituel que ça !
- Oh allons ! Je suis certain d'être meilleur amant que la majorité de tes clients. Ne dit-on pas "dans l'effort le réconfort" ?
- Pas tout à fait... Et n'oublie pas que nourrir la confiance du client est la base du professionnalisme.
- Et c'est censé vouloir dire quoi ça ?
- Que tu me dois vingt-cinq mille berrys.

    Ce que j'aime chez Julia ? Elle est aussi perverse et sadique que moi. Mais ce qui me fascine, c'est surtout sa capacité à faire passer une menace pour une remarque taquine. Un jeu entre deux amants prêts à s'arracher la gorge pour montrer sa domination sur l'autre : voilà ce qui animait nos rencontres, au milieu de quelques étreintes fiévreuses et sauvages. Je crois d'ailleurs être le seul de ses habitués à ne pas faire partie des hautes personnalités rokadiennes. Sûrement dû à mon franc-parler, charmeur à souhait pour quiconque apprécie la défiance et l'estime de soi.
   La belle rousse est une perle rare que je regrette presque de savoir besognée par d'autres. Je suis ravi de l'avoir rencontrée, elle comme les autres. En particulier Mary Sunlight, la plus jeune et la plus... innocente d'entre elles. Ses talents sont réels ! Et c'est avec ce ravissement en tête que je me motive à faire de la Rainbow House, le lieu dans lequel je me trouve, la première de mes acquisitions.

   Maison colorée au milieu d'un quartier gris de Rokade, ce bordel est, à la manière d'une auberge, munie d'un accueil au rez-de-chaussée, ainsi que des bureaux du gardien, du propriétaire et de la salle à manger, tandis que l'étage est constitué d'une petite dizaine de chambres à lit double, personnalisées par chacune des employées, tamisées et emplies d'odeurs enivrantes, tels l'encens et le gingembre. Mais ne nous leurrons pas : les draps n'ont pas le temps d'être lavés entre chaque client.
   Seul bémol, le tenancier. Vairs Atyl, dit "le Gantelé". Une histoire de cœur arraché à mains pas tout à faits nues, enfin ça... Les rumeurs vous savez. Non pas que ce type me déplaise particulièrement, au contraire ! Si ça ne tenait qu'à moi j'en ferai un allié. Mais cet abruti de proxénète est trop fier et trop accroché à son affaire pour bien vouloir jouer les partenaires ! Alors bon, j'ai beau être patient, conciliant de temps en temps, tout ça, mais si j'ai décidé que la Rainbow House m'appartiendra, alors il en sera ainsi. Un point c'est tout. Et pour cela, rien de mieux qu'une attaque de l'intérieur : le fait est que le personnel ne porte pas Vairs dans son cœur.

- Ecoute Julia, que dirais-tu si j'avais un moyen de satisfaire ta demande... autrement que de la manière dont tu t'y attends ?
- Quoi ?! Tu nous joues quoi là ? N'essaie pas de m'entourlouper, Dorian.
- Mais non, mais non ! Tu m'prends pour une de tes crapules d'un soir ? Ce que j'veux dire c'est que... Admettons que ton patron décide, à tout hasard, de laisser tomber l'affaire...
- Oh là ! Ne parle pas de ça ! Encore moins ici !
- Tu m'laisses finir ?! Si ton patron se retrouve "contraint" de laisser son affaire. Pour n'importe quelle raison. Je pourrais, vraisemblablement, prendre en charge la chose, n'est-ce pas ?
- Ouais... Je vois où tu veux en venir et ça ne me plaît pas.
- Quoi ?! C'est qu'une supposition ! C'est pas forcément sérieux. Pour l'instant... Et puis tu vas pas me dire que vous l'aimez bien, ce Vairs, si ?!
- Ce n'est pas ce que je veux dire... Juste : tu veux te mettre à dos le Gantelé. Il rapporte aux Cinq, il a des hommes de main, dont Neville son second, il a parmi les clients des amis à lui. Un cercle de malfrats capables de tout ! Tu risques de te mettre sur le dos un sacré paquet d'ennuis !
- Tséhéhé... Tu me connais si mal que ça ? D'après toi, ça n'fait pas partie de mon travail, ce genre d'embrouilles ?
- Tu parles d'un travail !
- Rha tais-toi donc ! Je suis grand Julia, je sais me défendre. Et défendre mon image : qui dit que je vais m'impliquer moi-même ? Il existe des tas de façons différentes de nuire à autrui sans avoir à lever le petit doigt, ou sans avoir à y apposer sa signature. S'il n'y a pas de preuve de mon implication, tout va bien ! Ça m'aiderait même à récupérer le commerce ! Il existe des tas d'imbéciles en mal d'argent qui rêveraient de faire le sale boulot dans l'espoir d'une poignée de berrys. Tu pourrais me faire confiance, depuis le temps qu'on se connaît !

   Ses cheveux rouges couvrant à moitié son visage, que je devine sombre, elle prend le temps de réfléchir avant de répondre :

- Je n'aime pas ça.
- Personne n'aime le changement. Mais celui qui le propose doit savoir l'imposer convenablement.
- C'est ce que je dirais à Mary pour le jour où un client lui demandera son accord pour une s...
- N'implique pas Mary là-dedans ! Bordel de...

   Trop ingénue à mes yeux. Pourtant pas mon genre de faire dans la dentelle, mais la jeunette parait si sage qu'on en perd l'envie de lui nuire de quelque façon que ce soit.
   Nouveau temps de réflexion :

- Bon... Admettons que je sois d'accord avec ton idée. Qu'est-ce que ça change ? Pourquoi me le dire ?
- Tout simplement parce que tu travailles ici et que tu seras mon employée.
- Et à part ça ? Je me doute bien que tu as une idée derrière la tête...
- Ah ! Eh bien oui : je veux que tu me fournisses des informations. Parce que si tu veux être correctement entretenue...
- Charmant.
- ... Il faut commencer par m'y aider. Donc ne tournons pas autour du pot et dis-moi : y a-t-il des choses qui pourraient m'être utiles ? Des anecdotes ? Des plats favoris ? Des tocs ? Des secrets honteux peut-être ?
- Tu sais déjà tout ce qui a besoin d'être su. Vairs est violent, très protecteur concernant son commerce, fier, imbu de lui-même et surtout : il n'a peur de rien.
- Un bon point pour moi ça. Faut toujours se méfier des gens qu'on fréquente, même de loin. Autre chose ? Un événement par exemple ?
- Un événement... Oui ! Il se rend demain à un rendez-vous auprès de certains de ses amis. Des gens de ma connaissance. Tu veux que je te donne les noms ou...
- Non merci. Ce qui m'intéresse, c'est le fait qu'il soit absent. Pas qu'il soit entouré.
- Et bien... En parlant de ça : au même moment, son second sera aux quais, dans la zone B.
- Neville ? Pourquoi faire ?
- Une arrivée.
- Un bateau ? De la marchandise ?
- De la main d'oeuvre. Enfin...
- Pas besoin d'un dessin. C'est plutôt bon ça...

   En effet c'est très bon ! Et rapidement j'imagine le plan qui me permettra de mettre à mal l'affaire de ce cher monsieur Atyl. Les idées se mélangent aux révélations de la jolie rousse et je souris de plus en plus.
   Premier point : trouver un alibi. Humain de préférence.
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La plupart des gens qui mettent le pied sur Rokade savent à quoi s'attendre. On atterrit pas par hasard sur cet immense rocher.

On peut cependant y arriver à l'encontre de son plein gré, contraint et forcé.

Ou dans le cas de Sunbae des suites d'une certaine... naïveté, dirons-nous pour être gentils.

En effet, quelques jours plus tôt, sur une île de North Blue sans intérêt, il avait fait la rencontre du Capitaine Teyne. Un homme sympathique au rire contagieux et au verbe aisé qui lui avait proposé, je cite : "Un aller simple pour South Blue et une île exotique pour la modique somme de deux cents milles berrys, repas frugales offerts et cabine en option".
La conversation ayant eu lieu dans un bar à une heure tardive, notre cher balafré était un brin éméché et pas en pleine possession de ses capacités cognitives. Oubliant au passage qu'il avait mentionné avoir gagné à peu près cette somme en jouant au tripot du coin, un peu plus tôt dans la soirée, raison de sa gaieté actuelle..

Il se réveilla le lendemain, sur un navire inconnu avec une sacré gueule de bois en prime. Pas vraiment observateur pour le coup, et plutôt enclin à visiter une île des mers du Sud, il mit plus longtemps qu'il ne voudra jamais l'admettre à se rendre compte que ses hôtes étaient des contrebandiers. De sympathiques criminels certes, mais tout de même des criminels.
Craignant un possible guet-apens allant au delà de l'escroquerie, il décida de quitter le navire à la première escale venue.

Une décision qu'il regrettait amèrement.

Pressé de quitter ses compagnons de route, ce n'est qu'une fois enfoncé plus à l'intérieur de l'île accostée qu'il se rendit compte de ce qui l'entourait. Des gens au regard de prédateurs et le sentiment que tous le jugeaient pour déterminer s'il était bienvenue, ou non, de s'en prendre à lui. Chanceux, les dagues à sa ceinture et le fusil dans son dos avaient, pour l'instant, échaudé les ardeurs des voleurs et autres malandrins croisés.

Bref, il avait échangé un possible traquenard pour un véritable nid de guêpes. Définitivement pas un bon choix. Il avançait donc en restant sur ses gardes, méfiant de son environnement.

C'est ainsi, alors qu'il regardait tout autour de lui, que ses yeux croisèrent l'enseigne d'un petit casino. Qu'il reconsidéra comme une maison de jeux une fois le bâtiment observé de plus près. Puis comme un vulgaire tripot une fois les portes passées. Portes qu'il avait emprunté sans réellement sans rendre compte. Peut être rassuré à l'idée d'être dans un endroit aux mœurs familiers, un tripot reste un tripot peu importe où il se trouve, son instinct l'avait naturellement conduit à franchir l'entrée du lieu. Une fois à l'intérieur, sa conscience ne s'offusqua pas du geste et il alla s'installer à une table de jeu.

Il lui restait encore un peu d'argent et il comptait bien rentabiliser le voyage.

Et s'amuser un peu.

*
***
*

Le "Malheur du tricheur" était un petit établissement de jeux sans envergure, fréquenté en général par ceux s'étant fait virer des autres établissements de l'île, d'où le nom.

Véritable trou à rats dont la décoration reflétait parfaitement l'état d'esprit de ses clients: sombre et sommaire, avec une touche de désespoir. Clairement les propriétaires ne s'inquiétaient pas de la venue de nouveaux clients.
Assis à une table de poker, Sunbae s'était réellement imprégné de cette ambiance particulière alors qu'il regardait ses dernières économies changer de main. Il ne bougeait plus, choqué par les événements, en plein apitoiement sur lui-même.

Une main se posa sur son épaule et une voix, profonde et doucereuse, se fit entendre à ses oreilles.

_ Cher client, notre établissement propose des prêts à un taux très intéressant pour les joueurs souhaitant se refaire.

Cette fois-ci, le Roona, malgré le choc de ses pertes, n'eu aucun mal à identifier l'escroquerie qu'on lui proposait. Cependant, la main sur son épaule mettait une pression suffisamment forte pour qu'il ne puisse s'en dépêtrer discrètement. L'endroit lui paraissait mal choisit pour causer du grabuge. Il n'eu heureusement pas à vérifier sa théorie.

Derrière lui, une porte s'ouvrit à la volée, il ne l'avait pas remarquée plus tôt car elle était cachée par une tapisserie moche. Une femme sortie furibonde de la pièce, qui semblait être le bureau du patron.

_ Et si vous croyez m'avoir avec vos arnaques et vos belles paroles alors c'est que vous êtes encore plus con que vous en avez l'air! Ça m'étonne pas qu'il y ait que des losers dans votre boui-boui pourri!

Elle traversa la salle de jeux à vive allure sans laisser le temps au patron de réagir. Elle passa près de Sunbae et ouvrit la sortie d'un coup de pied plus qu'impressionnant. Le balafré profita de la confusion, ainsi que de la baisse de la pression sur son bras, pour s'engouffrer derrière la dame et loin des ennuis.

Il jeta un dernier coup d'œil derrière lui en passant les portes du tripot. Il buta alors contre la femme qui s'était retournée et lui faisait face, un air de défi sur le visage.

_ T'es qui toi!? Qu'est-ce t'as à me suivre!?

Sun' leva les mains en l'air pour se dédouaner de ces accusations et prit prudemment la parole.

_ Je ne vous suis pas madame...
_ Mademoiselle.
_ Mademoiselle, je profitais simplement de votre sortie fracassante pour m'échapper d'un guêpier.
_ Y t'ont fait un prêt?
_ Non, grâce à vous... Merci d'ailleurs.


Il tenta d'avoir l'air le plus sincère et avenant possible. Il savait que sa balafre avait tendance à mener les gens à se faire des idées à son sujet. Ce court moment de répit lui permit d'observer la femme pour la première fois alors qu'elle semblait le jauger.
De taille moyenne, elle était fine et élancée, malgré des hanches un peu larges. Ses cheveux blonds étaient coupés courts, ses tâches de rousseurs et ses yeux verts au regard malicieux lui donnaient moins que l'âge qu'elle devait avoir. Sunbae la supposait d'ailleurs plus vieille que lui. Bref, c'était un joli brin de fille dont le teint rosé par la colère et la perle de sueur au coin de lèvres ne faisaient que sublimer la beauté.

Voilà qu'il se sentait un peu timide.

Plongé dans son observation, il ne remarqua même pas qu'elle avait repris la parole avant de faire face à son regard inquisiteur.

_ Pardon?
_ T'es pas d'ici, non?
Répétât-elle après un long soupir.
_ Ah...euh, non. Effectivement, pu-t-il seulement dire, surpris.
_ Tu chercherais pas un endroit pour dormir par hasard?

Sunbae bloqua, la bouche entrouverte, et les paupières épileptiques. Avant de comprendre qu'il s'était emballé et d'aller jusqu'à se demander si ce n'était pas là qu'un nouveau traquenard. Il oublia cette dernière possibilité lorsque la jeune femme s'effondra.

*
***
*

Un peu plus tard, il était chez Clara, ainsi qu'elle s'était présenté, assis dans la salle à manger alors qu'elle revenait de la cuisine avec deux tasses de thé. Il l'avait aidé à rentrer chez elle alors qu'elle lui indiquait le chemin. Elle lui parla également un peu d'elle.

Clara était malade depuis quelques temps et n'avait pu travailler ces derniers jours. A court de solutions et tout juste capable de se déplacer, elle avait tenté de contracter un prêt auprès du patron du "Malheur du Tricheur" et avait brûlé ses dernières forces à s'offusquer de sa proposition déplorable.
Le balafré remarqua à quel point elle avait l'air fatigué et sur le point de s'effondrer de nouveau alors qu'elle s'asseyait pour finir son récit.

_ Et c'est pourquoi j't'ai proposé de t'héberger. Il m'faut d'l'argent et vite.
_ Et vous faites confiance à un étranger. Un mec que vous connaissez à peine. Comme ça
, lui fit-il remarquer sans être capable de passer au tutoiement. Ou remarquer qu'il se desservait lui même.
_ T'es pas d'ici. J'ai donc plus confiance en toi qu'en tout les gars que je connais.
_ Ça a vraiment l'air d'être un coin pourri c't'île.
_ Quoi?
_ Euh...par contre j'ai plus une thune.


Le visage de Clara se figea. Sunbae bu tranquillement sa tasse de thé. Il avait également plus confiance en elle qu'en tout les gus qu'il pourrait croiser ici. Mais il avait un plan. Un super plan.

_ Mais si vous avez besoin d'argent, voilà ce que je vous propose. Je vous remplace à votre boulot et vous m'accueillez gratos. Ça m'semble être un bon deal.
_ Euh...vous êtes sûr, j'veux dire
, commença t elle le regard mi-amusé, mi-inquiet.
_ Mais oui, y'a pas de problèmes. Ça me permettra de m'faire des relations sur l'île et d'en partir au plus vite. Tu bosses où? La coupa le Roona dont la confiance le fit abandonner le vouvoiement.
_ A la Rainbow House, mais...
_ Et bien j'y vais de ce pas.


Sans la laisser en dire plus, il avala d'un trait son thé, se brûla la gorge et sortit de la maison. Il partit avec entrain se disant qu'il n'aurait aucun problèmes à trouver un établissement au nom si coloré dans un endroit aussi...gris. Puis, elle était quand même mignonne la petite Clara.

Une Clara qui, de son côté, se disait qu'elle aurait du retenir le balafré avec plus de vigueur. Elle se rassura en pensant qu'il serait vite de retour une fois le quiproquo révélé.

*
***
*

Après une recherche bien plus longue qu'il ne l'avait imaginé au départ, Sunbae se retrouva devant la Rainbow House. Bâtiment sympathique et coloré.

Qui s'avérait être une maison de passe.

Après une longue réflexion, il décida d'entrer. Clara était peut être barmaid, qui sait?

Il fut vite réfuter dans sa supposition par l'absence de bar à l'intérieur. Simplement une salle d'attente similaire à ce qu'il se serait attendu à voir dans le lobby d'un hôtel. Le bar en moins. Un comptoir lui faisait face. De chaque côté de celui-ci, on pouvait voir des photos des filles du bordel au milieu desquelles il reconnut la jolie Clara. Une pointe de déception l'envahit. Il n'avait rien contre la prostitution en soit, tant que les femmes étaient consentantes, mais c'est toujours triste d'apprendre qu'une femme qui nous plait vend ce que l'on veut obtenir gratuitement.

Derrière le comptoir, un homme d'un âge avancé et à l'allure de lapin effrayé semblait tenir lieu d'accueil. Le jeune homme l'approcha et entama la discussion.

_ Hum...excusez-moi, je...je viens de la part de Clara et...euh...pour la remplacer. Voilà.

Le vieil homme fut d'abord surpris avant d'hésiter puis de s'excuser et de se rendre vers une porte dans le fond de la pièce. Le Roona patienta quelques minutes puis l'homme revint et lui demanda de le suivre. Il accepta et se retrouva dans un bureau, face à un homme de grande taille, à l'air hautain et assis dans un fauteuil qui semblait confortable. De toute évidence, le patron de la maison close, Vairs Atyl d'après la petite plaque dorée trônant devant lui. Il renvoya son employé d'un geste de la main et invita son invité à s'asseoir.

_ Monsieur Cloud m'a dit que vous souhaitez remplacer Clara?
_ Euh...ouais, enfin, si c'est pas possible c'est pas grave. Je lui dois un truc mais je suis sûr qu'on pourra s'arrangeait autrement, j'vous en voudrais pas si vous voulez pas.
_ Normalement nous ne proposons pas ce genre de service à la Rainbow House, c'est pas un repère d'astiqueurs de jonc...
_ D'astiqueurs de jonc?
_ ...On fait pas vraiment dans le frottage entre saucisses mais certains de nos clients nous ont fait part de certaines demandes ces derniers temps. Trav, trap et tout ça.
_ Ça veut dire non, c'est ça?
_ T'es un peu grand mais t'as une certaine allure.


Vairs Atyl se leva de sa chaise et commença à tourner autour de Sunbae tel un vautour.

_ Avec une tenue adaptée et un peu de maquillage. Même avec la cicatrice...
_ Whoa!! J'vous arrête tout d'suite, il est hors de question de je fasse quoi que ce soit avec qui que ce soit.
_ Pas besoin. Pas forcément. J'ai un client, Monsieur Hackman, qui serait prêt à payer plus de trente milles berrys pour une simple séance photo. C'est bien plus que prend Clara pour une passe. Tu pourrais garder une bonne partie de l'argent pour toi.
_ Juste des photos?
_ Juste des photos.


Un sourire carnassier que ne vit pas le balafré, apparut sur le visage du patron de la maison close. Il avait l'habitude de ce genre de négociations et savait quand il avait ferré une brebis égarée.

Sun' se demandait combien de photos il lui faudrait faire pour pouvoir quitter cette île.

*
***
*

Il avait passé un long moment avec différentes employées dans la chambre normalement réservée à Clara, discutant avec elles pendant que celles-ci "lui faisait une beauté". Toutes très sympathiques au demeurant, elles s'étaient beaucoup amusées à le travestir avant de lui dire à quel point son nouveau look lui sied à ravir.  

Un fois seul dans la chambre, et le sentiment de ridicule passé, le Roona ne pouvait qu'agréer. Elles avaient fait un travail formidable et il aurait presque trouvait le reflet du miroir "belle". Il avait une allure bien plus féminine et quelques mouvements suffisait à le rendre presque sensuel et sexy. D'une manière qui le troublait au plus haut point.
Les prostitués l'avaient habillé d'une jupe bleu lui remontant à mi-cuisse et d'une chemise à carreaux bien trop petite pour lui. Elles avaient complété sa tenue avec des talons, des bas blancs et une perruque à couettes de la même couleur que ses cheveux cendrés.

Il éprouvait une étrange fascination pour son reflet et commençait à trouver les bas agréables sur sa peau, voyait dans ses talons une merveilleuse mise en avant de ses jambes et pensait pouvoir améliorer sa posture, trop masculine. Il se cambra légèrement.

Il se prenait totalement au jeu.

Une trentaine de minutes après avoir oublié son sens de la décence, Sunbae commençait à beaucoup s'amuser à jouer le modèle pour Monsieur Hackman. Une homme de taille moyenne, rachitique et à l'allure sale et vicieuse.
Le balafré était à quatre pattes sur le sol, son "client" assis sur une chaise derrière lui, le dos cambré il tournait la tête pour le regardait avec un air ingénue. Cette séance photo se passait bien et, s'étant changé dans la chambre, il avait ses armes à portée de main et se sentait en sécurité. Il s'autorisa donc à penser à ce qu'il allait pouvoir faire de cet argent. Gagné, il faut bien l'admettre, en ne faisant pas grand chose.

Puis il sentit un contact.

Une légère touche sur sa fesse droite, tout juste le bout d'un doigt courant sur sa peau.

Sans qu'il n'ait à réfléchir, sa jambe droite se déplia et vint frapper l'homme au niveau du genou. Le faisant tomber de sa chaise. Sun' quitta sa position et redevint, en un instant, l'homme qui se cachait derrière la broderie. Il se saisit du pervers et le plaqua au mur avant de lui coller un violent coup de genou dans le ventre. L'homme s'effondra et le Roona reprit enfin ses esprits.

_ J'vais pas travailler dans une maison de passe, bordel! S'insurgea-t-il en revenant à la réalité et en jetant sa perruque au sol.

Il alla chercher ses armes, posées dans un coin de la chambre et sortit, furibond sur ses talons. En colère contre lui même et ses idées à la con. Il était tellement centré sur l'idée de partir qu'il ne se changea pas et embarqua ses affaires sous son bras.
Une fois dans le couloir, il se retrouva face à un grand type, mais moins que lui-même juché sur ses talons, aux cheveux et aux yeux noirs de jais et de Julia. L'une des prostitués ayant travaillé sur son maquillage et lui ayant conseillé la perruque à couettes.

_ C'est quoi c'délire?

Le regard de Sunbae devint noir et fusilla le mec. Littéralement. A l'exception des balles. Plutôt pacifiste de par son éducation monacale, il n'avait pas l'habitude de s'en prendre aux gens pour une broutille mais le regard de dégoût mêlé de pitié que lui lançait le type, ajouté à sa mauvaise humeur actuelle, lui fit changer ses habitudes.

_ Hoy! J'ai juste besoin d'argent, ça t'es jamais arrivé!?

En prononçant ces mots, il s'était saisi d'une de ses lames et l'avait collé sous le menton du malotru, histoire de lui signifier en toute diplomatie qu'il était l'heure de "fermer sa gueule". L'autre fut d'abord surpris, il n'avait été que rarement agressé par des travestis approchant les deux mètres, avant de se reprendre. Un sourire carnassier se forma sur son visage lorsqu'une idée traversa son esprit.

_ Si... et dans l'optique d'aider mon prochain j'aurais peut être un job à t'proposer. A moins que tu préfères rester ici à jouer les écolières...

Sunbae relâcha un peu la pression de sa lame. Il ne sentait absolument pas le type et ne l'aurait jamais laissé marcher dans son dos la nuit, mais il devait avouer que ses options étaient limitées. Et tant que ça n'impliquait pas de porter une jupe alors sa proposition ne pouvait qu'être intéressante. Il restait tout de même méfiant.

_ J'écoutes, lâcha-t-il finalement, toujours sur ses gardes.


Dernière édition par Sunbae Roona le Mer 10 Mai 2017 - 23:48, édité 1 fois
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En temps normal, je me serai carrément fendu la poire devant tel spectacle. Le bougre est affligeant, mais son apparition est, à mes yeux, semblable à celle du messie. Si tant est que les travelos aient une religion commune. Il suffit que je pense à me trouver un bouc émissaire pour que celui-ci me tombe dans les bras, épilé et sublimé par mes amies.

- Manque juste un petit ruban...
- Comment ça ?
- T'occupes, toi. J'me comprend.

    L'autre me toise avec son regard assassin. Qu'il fasse le fier s'il en a envie, en attendant il accepte de m'écouter. La fossette sur ma joue s'efface. Hypocrite reste à l'écart le temps que je parvienne à le convaincre de m'aider.
    C'est à ce moment-là que jaillit de la piaule de mon travesti un type maigre et moustachu en se massant l'estomac. Il se fige en nous voyant et commence à pointer un doigt accusateur sur l'autre et ose même menacer de dénoncer ses actions au patron. Et ça, c'est pas très bon pour moi, vous voyez ? Du coup je m'approche, je le domine de toute ma taille en lui jetant un regard noir et sa sale gueule de fouine commence à afficher un profond malaise. Je m'empare d'Argument, mon beau bâton d'argent, et l'assomme d'un coup sec sur la tempe :

- On va quand même pas se laisser emmerder... Vivement que j'prenne les choses en main, ça devient n'importe quoi cet endroit ! Julia : ramène ce gus auprès de monsieur Cloud et dis-lui qu'il a failli provoquer une bagarre vous mettant en danger, les filles et toi. Ça le fait pas si c'est moi qui vais lui annoncer que j'ai réglé le problème, t'comprends ? Et toi mon mignon : tu me suis. On va chez moi.

   J'avance dans le couloir pendant que la belle rousse soulève le corps inanimé du client et m'apprête à ouvrir la porte menant aux escaliers quand je me retourne et vois mon futur "partenaire" hésiter :

- Hé ! J'vais rien te faire, hein ! C'est purement professionnel ! C'est juste que c'est pas l'endroit idéal pour parler de mon travail. Alors à moins que tu préfères jouer les poupées zarbies pour tous les gros pervers du quartier, j'te conseille de me suivre.

   J'attend bien cinq secondes avant qu'il se décide à venir. Pas trop tôt ! Il se rend dans la chambre et récupère se rhabille de manière décente en essuyant du mieux qu'il peut le maquillage qui lui tartine la figure... Enfin j'imagine un peu qu'il ne le fait pas par gaieté de cœur. Je ne le connais pas, mais il n'a pas l'air du genre à vouloir jouer les gigolos par vocation. Et encore moins la tête d'un habitant de Rokade. Comment je le sais ? Parce que la plupart des crapules du coin ne se contentent pas simplement de menacer quelqu'un avec un coupe-chou : ici la règle est plus proche du "sitôt dit, sitôt fait" que du "qui vivra verra". Sûrement un nouvel arrivant, fauché et sans repère, capable de se faire entuber par des paroles rassurantes à défaut de l'être par un vieux dégueulasse. Bon sang que j'aime mon boulot ! On en voit des choses grâce à lui.
    Par principe plutôt que par politesse, je lui demande son nom. Non pas que je m'en souvienne hein, mais voilà. De toute manière j'ai déjà décidé de l'appeler Ma Biche.

    Nous arrivons finalement devant chez moi, à mon petit trois pièces avec terrasse. Va falloir que je rachète des fleurs d'ailleurs... Nous pénétrons à l'intérieur et je le fais installer en face de mon bureau, sur lequel je pose les pieds. Nous nous observons encore un moment, comme pour analyser l'autre, puis je me lance :

- Alors Ma Biche, t'es venu faire quoi sur Rokade ?
- En quoi ça te regarde ?
- Oh là ! Doucement ! Je ne t'ai pas amené là pour qu'on se mette sur la gueule ! J'sais bien que tu te méfies, et personnellement je serai dans le même esprit si un proxénète s'était foutu de ma gueule en me disant que jouer les transes ça rapportait avec zéro risque. Surtout si ce que je désire appartient à ce même proxénète... Mais c'que je vais te proposer est nettement plus honnête.

   Je marque une pause, le temps que son ardeur retombe et qu'il soit pleinement à mon écoute. Je sens qu'il se décrispe enfin et je souris, d'un air presque innocent. En le jaugeant de haut en bas, je me rends compte qu'il n'est pas juste bon à porter le jupon. Grand, élancé, des cheveux cendrés malgré son jeune âge... et cette sacrée balafre qui lui coupe la figure en deux. Je reconnais même quelque chose dans son regard. Ce même petit détail que j'affichais plus jeune en me regardant dans la glace, quand j'étais las de ma vie, que je trouvais bien vide.

- Vois-tu... Je recherche depuis aujourd'hui quelqu'un pour m'aider à accomplir une tache bien précise. Mais je te vois venir avec tes questions : qui suis-je ; quel est mon job ; que pourrais-tu faire pour moi... Je m'appelle Dorian. Je suis un auto-entrepreneur sur cette île. Je m'occupe de régler les problèmes de mes clients de... bien des manières. Espionnage, intimidation, récupération, livraison... un tas de petites actions faisant le bonheur des uns et le malheur des autres. Que veux-tu : on ne peut pas contenter tout le monde ! Mais comme n'importe qui, je vise l'élévation. Et pour ce faire, j'ai besoin d'étendre un peu mon commerce. Alors t'as pas l'air bête, tu te doutes que si je suis bien que si je me trouvais dans un bordel sans consommer, c'était pas juste pour causer fleurs et dentelles avec les filles. Je fais du business ! Il était normal que je m'entretienne avec mes futures employées.

   Dans la tête de Ma Biche, ça fait tilt. Toutes dents dehors, j'écarte les bras à la manière d'un politicien confiant et continue :

- Alors le problème, c'est que le bordel appartient toujours à ce Vairs Atyl, là. Un bel enfoiré avec une sinistre réputation... Bon je n'suis pas tout rose non plus mais au moins personne ne s'en plaint ! Là où il y a un hic c'est que je le vois mal m'offrir gentiment son affaire. Ni même partager. Alors... Je me suis dit que j'avais juste à prendre le tout. Et j'ai exactement le plan qui convient.

   L'autre n'a pas l'air très emballé. Faut dire que je lui envoie ça de but en blanc à la figure comme si c'était joué d'avance. Mais ça reste malhonnête. Il commence à effleurer le pommeau de l'une de ses armes de la main. Je retire mes jambes de la table, par prudence :

- Ecoute, on sait tous les deux que tu m'as suivi parce que tu as besoin d'argent. T'as été honnête là-dessus, alors j'ai fait pareil en te dévoilant mes intentions. T'as le droit de penser ce que tu veux, t'as le droit d'être en désaccord avec ce que je fais, mais nous sommes sur Rokade ici ! Je ne connais personne sur cette île qui mérite la médaille du bon petit samaritain. T'entends ? Personne. Si tu veux survivre parmi les loups, vis comme un loup. C'est la seule et unique loi de la nature qui soit respectée en ces lieux. Seulement il y a les louveteaux, les femelles et les membres de la meute. Puis il y a l'Alpha. Et pour mériter la place de chef, il faut savoir saisir la bonne occasion. Accepte et je t'explique ce qu'il en est du plan. Si tu me suis, tu seras récompensé. J'pourrais même parler de toi à Tomi Pika, le responsable des finances ! Il aura peut-être du travail pour toi, sur une durée plus longue. Si tu refuses il n'y a que deux solutions : soit je te fais taire pour ne pas que tu me dénonces, soit tu me fais taire et dans ce cas retour à la case départ pour toi : pas d'argent, pas de travail et pas de reconnaissance de la part de ce fumier de Vairs. A toi de voir...
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Y a pas à dire, Sunbae se sentait bien mieux dans ses vêtements habituels. Il avait finalement suivi l'homme nommé Dorian, plus par nécessité que véritable envie. Une fois à son domicile, il l'avait longuement écouté déblatérer son speech d'embauche et devait bien admettre qu'à défaut d'être particulièrement convaincant, le monologue visait juste.
Le balafré n'avait pas un rond et pas la moindre idée de comment changer cet état de fait. Surtout, il se trouvait sur une île où le crime faisait loi, ici, aucun moyen de gagner sa croute ne devait être totalement "propre". Il ne faisait pas confiance à son interlocuteur mais n'avait pas vraiment le choix et puis il semblait vraiment tenir à l'embaucher. Sachant qu'il n'avait pas d'argent et l'avait signifié à Silverbreath, la thèse d'une nouvelle escroquerie ne semblait pas tenir.

Il restait tout de même sur ses gardes, fini de faire n'importe quoi. Cette fois il était concentré.

_ Très bien, commença-t-il en adoptant une attitude plus détendue, je marche. Va pour l'OPA agressive sur le bordel. C'est quoi l'plan?
_ Ravi de l'entendre. Du coup, le plan...tout se jouera demain.
_ Demain!? T'as besoin de quelqu'un pour demain? J'croyais que t'étais un minimum préparé.


Dorian s'arrêta, surpris par la soudaine éloquence de Sunbae, plutôt passif jusque là. Un rictus passa sur son visage le temps qu'il réprime l'envie fugace de lui mettre un bon coup de bâton sur le coin du crâne. Il se retint difficilement de passer à l'acte.

_ Hey! On s'en branle de tes avis. Tu la fermes et t'écoutes.
_ Ok...super l'ambiance de travail...
_ Du coup. Y a que deux mecs dangereux à la Rainbow House, le patron et son bras droit. Or, demain les deux seront absents. Ce qui laisse que M. Cloud, la fiotte de l'accueil qui poserait pas de...j'devrais peut être pas dire fiotte devant toi, non?
_ Je suis pas gay.
_ Non mais je juge pas, tu fais c'que tu veux Ma Biche...
_ Ma Biche?
_ ...Quoiqu'il en soit, M. Cloud est pas vraiment un obstacle. Après je peux pas me débarrasser d'Atyl sans raisons. Il est sous la protection des cinq...
_ Les cinq?
_ Les patrons de l'île. Du coup, le premier truc à faire c'est de placer des preuves comme quoi il aurait essayer de la leur faire à l'envers, ou mieux, d'en trouver si elles existent. Ensuite faut se débarrasser de Courduot histoire qu'il soit pas un problème plus tard. Une fois ceci accompli, faudra trouver un moyen de foutre un peu le boxon au bordel histoire ue le patron revienne. On pourra alors s'occuper de lui tranquillement tout en ayant de quoi se couvrir face aux grands patrons du coin. Et voilà.
_ ...
_ ...
_ ...
_ Bon qu'est-ce t'en pense?
_ J'ai l'droit de l'ouvrir?
_ Ouais c'est un peu l'moment. Tu sais, l'échange d'idées, la coopération, tout ça.
_ Bon, d'abord, c'est plutôt simpliste comme plan.
_ Et alors, les plans les plus simples son souvent les meilleurs.
_ Ouais, j'critique pas, je note c'est tout. Ensuite, quand tu dis "éliminer" ou "se débarasser", tu veux dire ...?
_ Les buter.
_ Voilà. Ben , on va pas être d'accord. Faire des magouilles, trafiquer des comptes et autres escroqueries ça passe encore. C'est éthiquement discutable mais les gens peuvent toujours se refaire. Par contre le meurtre de sang froid, ça pue carrément.
_ Oh tu t'es cru où là? T'es sur Rokade mon gars! Ces mecs là c'est des enfoirés, et quand on la leur fera à l'envers crois-moi qu'eux hésiteront pas à te défoncer la gueule, ne serait-ce que pour la forme. Si tu veux pas te faire planter au coin d'une ruelle ici, t'as intérêt à te "débarrasser"  de quiconque ayant une raison de t'en vouloir. C'est comme ça qu'on règle ses différents sur cette île.
_ Mais...c'est pas viable démographiquement parlant. Dois y'avoir un taux de décès effarant et même si j'veux bien croire que l'immigration se porte bien, y a surement un paquet de criminels qui doivent venir se réfugier ici. Doit pas y'avoir assez de naissances pour compenser et même si c'est l'cas, j'vois pas comment un gosse peut grandir dans l'coin. Combien atteignent l'âge adulte dans ce genre d'environnement?


Dorian resta coi. Et il était rare de le voir privé de sa gouaille naturelle. Il avait d'abord cru que Sunbae se foutait de sa gueule mais non. Le balafré était sérieux, il se posait réellement la question. L'homme à tout faire se passa la main sur le visage.

_ Non mais on s'en branle de ça...
_ Moi j'trouve ça intéressant. Mais pour en revenir à notre histoire, même si j'comprend ton point d'vue, t'arrivera pas à m'faire changer d'avis. J'suis pas un assassin.
_ Putain mais t'as été élevé dans un monastère ou quoi?
_ Mais tout à fait.
_ Ca explique bien des choses....
_ Non mais c'est quoi ces préjugés pourri, tout d'suite. C'est comme si j'te sortais que , juste parce que t'as l'air d'être un sociopathe t'as buté tes parents. Ce serait quand même vachement réducteur, tu trouves pas?
_ Pas vraiment vu que c'est l'cas.
_ Que c'est le cas que quoi?
_ Que j'ai buté mes parents. Quoique c'était pas vraiment mes parents. Puis j'en ai buté qu'un, l'autre s'est très bien débrouiller tout seul. Du coup, ça compte ou pas?
_ Ah...d'accord...euh, je sais pas.


Sunbae s'était bien douté que son interlocuteur était pas net mais là il dépassait ses attentes. Il se demanda si tout le monde était comme ça sur cette foutue île et si c'était vraiment une bonne idée de s'associer avec ce type. Avant de se souvenir qu'il avait pas vraiment le choix. Ses options étaient limitées.
Face à ces quelques secondes de silence et de réflexion, Dorian se décida à lâcher du leste.

_ D'accord, t'as gagné. Je m'occuperais du sale boulot. J'peux pas te promettre que tu t'auras pas à  casser quelques gueules mais je me charge des "finitions". Ca te va comme ça?

Non, ca ne lui allait pas. Il participait toujours à une entreprise impliquant la mort de personnes inno...de personnes. Mais Silverbreath lui avait bien fait comprendre qu'en acceptant de l'écouter il aurait soit à participer, soit à lui faire face. Le balafré était d'ors et déjà engagé. De plus un plan commençait à germer dans son esprit. Il sourit.

_ Ca marche. Je m'occupe de "trouver" des éléments compromettants et de foutre le bordel. Par contre va me falloir plus qu'un petit salaire d'employé. J'veux une part du gâteau.
_ De la Rainbow House? C'est que la biche commencerait à prendre confiance.
_ Tu l'as dis toi-même. Il faut être un loup pour vivre parmi les loups. On est d'accord?
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- Tséhéhé...

   Mais c'est qu'il commence déjà à se montrer culotté ! Et l'affaire n'a même pas encore commencé ! Il me plaît. Une vraie sainte-nitouche par contre... Heureusement que l'appel de l'argent réveille en nous bien des ardeurs. Je me redresse sur ma chaise et approche mon visage du sien, les mains jointes, dents apparentes. Je suis content qu'il se montre raisonnable, mais je n'ai pas le droit de le lui montrer : mon sourire est celui d'un prédateur tenant sa proie entre ses griffes.
   Il veut sa part du gâteau hein ? Il va l'avoir. Oh que oui. A défaut d'être homme de parole, je reste un homme d'affaires :

- Fort bien. Si tu veux partager la Rainbow House, il faudra en faire part aux Cinq. Parce que bon, ça a beau être le paradis des crapules, il y a un minimum de règles de recensement à respecter ! On ne tient pas plusieurs milliers de hors-la-loi sur ce caillou sans vérifier les entrées et les sorties. Donc j'imagine que tu es prêt à subir l'inspection des différents représentants de Rokade, le regard envieux d'autres entrepreneurs malhonnêtes, la pression de devoir... "être au top" pour inspirer la confiance à nos employées.

    Je le fixe sans broncher. Lui non plus d'ailleurs, mais son expression m'empêche de savoir s'il réagit bien ou non à mes remarques. Je continue donc :

- Parlons-en d'ailleurs, des catins ! Elles vont changer de patron. Dis-toi que là, c'est comme changer de suppositoire : la taille est la même, la forme aussi. Il n'y a que l'emballage pour savoir de quoi il en retourne ! Alors si tu veux te les mettre dans la poche, t'as intérêt à faire bonne impression d'entrée de jeu ! Et j'peux te dire qu'avec les événements d'aujourd'hui, c'est pas gagné pour toi. T'comprends ?
- Euh...
- Oui ? Quoi ?
- Quand tu parles d'inspection... Tu veux dire... Des huissiers ? Ce genre de choses ?
- Des huissiers ? Pas vraiment non. Les gens d'ici n'font pas les choses à moitié : le responsable des finances viendra directement avec sa horde de gorilles pour nous rencontrer et faire l'état des lieux.
Tentative d'intimidation au départ, qui peut vite dégénérer si ce qu'ils voient ne leur plait pas. T'peux m'croire, c'est pas toujours du propre.


   Cette fois, le balafré ne cache pas son inquiétude. Ses sourcils sont froncés et ses yeux cherchent dans le vide je-ne-sais-quoi pouvant l'aider à trouver une solution. Je tiens le bon bout :

- Mais puisque tu as fait ton choix, eh bien soit ! Tu prendras ta part. Bien que cela soit très grossier, je trouve. Oser demander ça à ton bienfaiteur ! Et moi qui comptais te loger pour la nuit...Oh rassure-toi c'est toujours d'actualité ! Mais bon : un salaire ET des actions dans l'entreprise... C'est cher payé pour une aide humanitaire, je te l'dis ! Sans parler du fait que tu m'poses tes conditions de pacifiste avec les deux lames accrochées à ton poncho.

    Et voilà le travail : on fait la victime suffisamment gentille pour faire culpabiliser son pigeon et on le laisse mariner pour la nuit. Espérons juste qu'elle porte conseil maintenant.
    Je l'invite à prendre place sur le canapé et je rejoins mon lit. Une porte nous sépare l'un de l'autre, et deux mètres trente. Je regarde le plafond et je me répète intérieurement comment procéder lors de l'opération. Et avec Ma Biche qui refuse de tuer qui que ce soit... Bah ! Demain, elle fera moins sa mijaurée quand elle verra la complexité de la tâche qui l'attend. Dans le meilleur des cas, elle réussit à semer la pagaille et les preuves dans le bordel et s'en sort indemne, dans le pire eh bien... Elle fout la merde et meurt comme telle. Je n'aurais alors plus qu'à ramasser les miettes. Vivement que ce soit terminé.

- Tséhéhéhéhéhé !
- Oh ! Rigoler en pleine nuit, c'est malsain, et en plus ça empêche les autres de dormir !
- ...

   Putain. Là, j'ai vraiment envie que ça se termine.
   Puisqu'il veut être casse-couilles, alors moi aussi : faut dire que je ronfle sacrément fort quand je suis en forme.

[...]

    Il est presque midi quand nous arrivons ensemble devant la maison du bonheur. Celle que je convoite. A l'entrée discutent deux hommes de main de Vairs. Ses dames de compagnie sans doute, puisqu'il est censé quitter les lieux pour la journée. Il finit d'ailleurs par émerger, dans son costume noir impeccable, les cheveux gominés en arrière. Tous les trois quittent les lieux et en l'espace d'une minute, nous nous retrouvons seuls devant l'entrée.
   Je me tourne vers mon partenaire du jour :

- Bon. T'as compris ce que tu dois faire ? Tu rentres, tu vas prévenir monsieur Cloud que tu cherches à voir le responsable, il te dit que c'est impossible. Tu pètes un câble, mais pas trop parce qu'il est sensible, il te propose de te détendre, tu acceptes. Tu réclames Julia Carmin. Tu la rejoins, tu lui expliques que tu as besoin de Mary, la jeune du lot, pour qu'elle pose des questions sur les habitudes et les rumeurs sur Vairs aux autres filles, aux clients... Vous vous en acquittez également, la rousse fouille dans ses papiers. Si vous trouvez rien, vous inventez une histoire bidon avec toutes les filles, vous placez des preuves de ce que vous avancez un peu partout et tu commences à foutre le boxon, histoire de semer le désordre. Mais évite de tout casser : ça serait bête d'avoir plus de coûts de réparation que d'achat ! Répète maintenant.
- Je rentre, je vais voir le vieux Cloud, je demande à voir le patron. Je ne peux pas. Je me fâche. Il s'excuse. Je vais faire un tour à l'étage, Mary de préférence, je lui dis que je veux connaître l'humeur de Vairs. Ou Julia... Je me fâche encore, j'envoie tout valser et j'en profite pour mettre des preuves de la mauvaise foi de monsieur Atyl.
- ...
- ... Oui ? Ça me paraissait bien comme ça.
- Mouais. On a qu'à dire que tu fais comme tu veux. Tant que tu arrives à faire passer Vairs pour un connard aux yeux des Cinq. Ça te va ?
- Eh ben...
- Parfait ! Moi j'y vais : j'ai un rendez-vous à annuler.

    Et je me dirige vers la zone B des quais. Je regarde une dernière fois le grand balafré avec un air très sérieux, la main posée sur Argument. Toute cette histoire m'excite et mon besoin de faire sortir tout cet excédant de sensations commence à se faire sentir. Heureusement que Neville n'a plus de parents : pas certain qu'ils le reconnaîtraient une fois que je m'en serai occupé.
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Alors qu'il se tenait devant la Rainbow House et regardait partir son "associé", Sunbae sentit une pointe de culpabilité l'envahir. Ce n'était pas tant l'idée de participer à cette entreprise d'OPA agressive que celle de ne pas avoir tenu au courant Clara qui lui faisait ressentir ça.
La prostituée l'avait accueillie chez elle la veille et il lui avait promis de revenir. Avant de se retrouver dans cette histoire.

Il se rasséréna en se disant qu'il pourrait la rembourser plus tard et que ses projets actuels pourraient très bien lui rendre service à l'avenir. Il soupira un long moment avant d'entrer dans le bâtiment

Il ne se rappelait plus du plan de Dorian et il aurait de toute façon bien était incapable de le mettre en place tant il fut surprit par les événements une fois à l'intérieur. En effet, à peine eut-il le temps d'ouvrir les portes qu'il fut accueillit par Monsieur Cloud. Un Monsieur Cloud étonnamment heureux de voir le balafré, ou en tout cas très souriant.

_ Monsieur Roona, vous voilà. Le patron avait peur que vous ne reveniez pas. Julia nous a raconté l'incident avec M. Hackman. M. Atyl met un point d'honneur à prendre soin de ses filles, même si elles n'en sont pas m'a-t-il dit ce matin même.
_ Euh...Ok.


Confus, Sunbae ne put pousser plus loin sa réponse et l'employé put tranquillement continuer.

_ M. Atyl tient donc à vous présenter ses excuses ainsi qu'à renouveler, si vous le désirez, le contrat passé entre vous. La nouvelle de votre arrivée dans notre établissement à susciter l'intérêt de plusieurs de nos fidèles clients, tous prêts à débourser une coquette somme pour s'attacher vos services.

Un sourcil se leva chez Sunbae, surpris d'être toujours le bienvenue et, apparemment, en odeur de sainteté. Il continua cependant de se taire, une idée avait germé en lui la veille et ce pouvait être l'occasion inespérée de faire fleurir tout ça.

_ Si vous êtes d'accord je vais vous accompagner à votre chambre et faire venir les filles pour vous...préparer. Et M. Atyl a insisté pour que je vous remettes ceci, dit Cloud en tendant une enveloppe au Roona. Votre part sur la "transaction" d'hier.

Et le balafré accepta.

Tout ce qu'il voulait c'était parler aux filles.

*
***
*

Sun' était en position d'attente. Assis sur une chaise, en tenue de soubrette et le visage à moitié maquillé, il faisait face à un dizaine des employées de la Rainbow House occupaient à lui faire une beauté. Il n'arrivait pas à en placer une.

_ Mais si, regarde Candy, un peu de rose sous les yeux et hop! La profondeur du regard...sa sensualité.
_ Je reste persuadé que le noir lui va mieux. Avec ses yeux clairs, le contraste est magnifique.
_ Les filles...?
_ Au lieu de vous disputez vous pourriez m'aider, j'essaye d'adoucir sa cicatrice et c'est pas une mince affaire avec vous deux qui gigotaient comme des dindes.
_ Oh ça va, pour une fois qu'on s'amuse ici.
_ Justement, si vous voulez bien m'écoutez...
_ Par contre, t'as vu ses jambes. Elles sont à damnées.
_ De simples bas les habillent.


C'en était trop pour Sunbae. La pression de tout ces corps le pressant, ces mains le parcourant, ces poitrines se balançant devant ses yeux et surtout, surtout, ce sentiment de n'être qu'un objet. Une sensation désagréable qu'il ne put supporter plus longtemps. Il se releva brusquement, renversant les prostituées les plus proches, et prit la parole d'une voix forte, ne cachant nullement sa colère.

_ Oh!! J'suis pas un objet bordel!!!
_ ...
_ Ben, t'es quand même une pute
, lui fit alors remarquer une brune prénommée Polly.

La connexion se fit dans le cerveau du balafré, Polly venait de lui donner le meilleur angle d'attaque possible pour aborder son idée.

_ Justement Polly, tu trouves ça normal?

Lorsque Dorian lui avait parlé de son idée de s'emparer du bordel, le Roona avait pensé à la situation de l'île. Un endroit où régnaient des criminels mais surtout où vivaient des gens. Et les gens, dans leur majorité, ont les mêmes aspirations. Qu'ils soient honnêtes ou non, la majorité du monde souhaite pouvoir vivre en paix et assurer tranquillement l'avenir de sa famille. Un travail pas trop chiant, ni trop dur. Pouvoir s'acheter sa petite maison et vivre sa petite vie sans qu'on vienne les faire chier. Une philosophie qu'embrassait totalement Sunbae.

Selon cette logique, pourquoi des prostituées penseraient-elles différemment?

_ Moi je trouve pas...reprit-il sans attendre. Les filles, j'ai été dans vos bottes pendant grosso-merdo une heure. Et sans déconner, j'vous respecte. Se mettre à quatre pattes devant un type moche et chelou ça demande une sacré détermination.
_ Ouais, il a raison
, dirent doucement quelques filles.
_ Surtout quand on voit comment on vous traite.
_ Ben quoi, on nous traite plutôt pas mal ici
, lui fit remarquer Candy.
_ Ouais...tu veux juste dire qu'on vous tabasse pas en plus de vendre votre cul. Non, moi je pense aux à-côtés. Par exemple, si je suis ici c'est parce que je voulais rendre service à Clara. Elle est malade depuis deux semaines et n'a plus les moyens de s'occuper d'elle. Ça fait combien de temps qu'elle bosse ici?
_ Presque six ans
, intervint Julia, "l'amie" de Dorian, qui venait juste de rentrer et regardait la scène d'un œil curieux.
_ Six ans? Six ans et elle ne peut pas ne pas travailler plus de deux semaines sans que ce soit un problème. Est-ce qu'elle manquait de clients? Demanda de nouveau Sun' à la foule, remarquant que prendre les filles à parti semblait mieux capter leur attention.
_ Euh...non, je crois pas, lui répondit Polly.
_ Six ans, des clients en nombre suffisant et une maladie la fout dans la merde? Et vous? Combien de temps pouvez-vous vous permettre d'être malade? Et pour celle qui commencent à faire leur âge? Combien d'années avant de se retrouver à crever dans la rue? Oh, bien sûr, certaines s'en sortiront, d'une manière ou d'une autre, mais pour les autres? La majorité d'entre nous? Est-ce que c'est normal que vous vous usiez les genoux durant vos plus belles années sans avoir l'assurance de pouvoir vieillir en paix? C'est normal?
_ Non!


La réponse avait été donnée à l'unisson par la foule qui commençait à s'entasser dans la chambre alors que d'autres prostituées, attirées par le bruit; entraient dans la pièce. Galvanisé, Sunbae s'apprêta à continuer sur sa lancée mais fut stoppé par Julia.

_ Et tu comptes nous dire qu'en aidant Dorian à récupérer la Rainbow House c'est ce qu'on aura, c'est ça?

Il l'avait pas vu venir. Persuadé que la jeune femme aux cheveux rouges était de mèche avec son complice. Surtout son intervention fit douter le reste de l'assistance des intentions du balafré.

_ Personnellement j'veux bien l'aider, mais nous fait pas miroiter une vie meilleure et toutes ces conneries. C'est pas son genre de se montrer généreux sans raisons.

le Roona avait espéré pouvoir garder ses intentions pour lui encore un moment mais il était l'heure pour lui d'apprendre à ces donzelles les bases de l'économie moderne. Sujet qu'il avait lui même un peu étudié, sentant son utilité dans l'optique de s'en mettre plein les fouilles.

_ Premièrement, il est vrai que j'ai accepté d'assister Dorian Silverbreath dans son désir de s'emparer de cet établissement...
_ Ouais tu bosses pour lui, je viens de l'dire.
_ Cependant, les termes de notre contrat ont changé et nous sommes associés. La Rainbow House m'appartiendra donc en partie.
_ Et t'es le grand messie qui va toutes nous sauver, c'est ça?
Demanda Lolly, le jeune femme s'étant occupait de mettre son regard en valeur.
_ Ah, non. Je suis juste logique. Prenez les esclaves par exemple. C'est pas du tout rentable. Déjà ça coûte une blinde et après faut leur fournir le logement, la nourriture et tout ce qui est nécessaire pour qu'elles restent jolies et un minimum souriantes. Au final c'est plus rentable de les payer.
_ Vraiment?
_ Ben ouais. Pourquoi vous croyez que la plupart des pays du monde ne pratique plus l'esclavage? Par humanisme? C'est du business.
_ Ok, donc tu libèreras les esclaves. Très bien et pour les autres?
Demanda Julia qui s'était imposée comme la meneuse de ces dames.
_ Ben ce que j'ai dit plus tôt. Plan retraite, caisse maladie et tout ça. Je sais pas encore comment faire dans le détail mais ce que je sais c'est que des employés heureux sont des employés qui s'investissent plus dans l'entreprise. D'autant plus si on a un moyen de leur assurer un avenir et de les protéger financièrement parlant. Et puis ça donne une certaine attractivité sur le marché de l'emploi...

Il s'arrêta un instant, se rendant compte qu'il partait trop loin dans son explication. Il décida d'en revenir aux bases.

_ Quoiqu'il en soit, vous aurez de meilleurs conditions de travail qu'avec Vairs Atyl. Vous serez mieux traitées et mieux considérées.

Pas de réactions, il poussa encore un peu.

_ Car après tout comme l'a dit Polly: je ne suis qu'une pute moi aussi.
_ C'est vrai ça, c'est c'que j'ai dit!
_ Il a même une tenue de soubrette...
_ C'est pas nous qui l'avons habillé?

_ Alors j'ai une question pour vous. Devriez-vous avoir à vous casser la tête pour votre avenir alors que vous passer vos journées à vous casser l'cul?
_ NON!!!


Cette fois-ci la petite foule était conquise et Sunbae commençait à s’enivrer de la situation. Une quinzaine de femmes, au physique agréable et aux tenues aguicheuses, étaient en train de boire ses paroles alors qu'il entamait un discours sur la suprématie du patriarcat et l'oppression sociale.

*
***
*

Quelques minutes plus tard, les filles de la Rainbow House, assises sur le lit ou à même le sol, attendaient maintenant les explications du balafré sur la conduite à tenir.

_ Ce qu'il nous faut, c'est des informations sur Atyl, voir s'il magouillerait pas de son côté. Histoire de détourner l'attention des cinq.
_ Si c'est d'ordre financier, Monsieur Cloud devrait être au courant
, lui expliqua l'une des filles.
_ Et il serait enclin à nous aider?
_ Après la mort de sa femme, le patron lui a coupé tout ce qui dépassait sous la ceinture du coup...
_ Ouais, y'a moyen qu'il ait une dent contre lui...et s'il fait ça à côté?
_ Rien qui serait susceptible d'être découvert sans une longue enquête. Et si j'ai bien compris y'a pas vraiment l'temps
, lui dit Julia.
_ Du coup mieux vaut se concentrer sur le vieux. Le premier truc à faire est donc d'avoir son avis là-dessus.
_ On s'en occupe,
dirent en chœur quelques employées.
_ Les autres, retournez au travail le temps que les choses évoluent, s'exclama Julia à l'adresse des dernières filles encore présentes dans la chambre.

Une fois seule avec Sunbae, elle se tourna vers celui-ci, l'air menaçant. Elle le fixa longuement, yeux dans les yeux, avant de prendre la parole.

_ T'es plus retors que t'en a l'air...c'est quoi ton vrai objectif dans cette histoire?
_ Crois-le ou non, à la base je voulais juste me faire assez d'argent pour quitter Rokade.
_ Et maintenant?
_ Disons que je me lance dans l'expérimentation sociale. Je trouve ça étrange que cette île puisse fonctionner, à en croire ce que j'en ai vu et entendu, tout le monde est plus ou moins un criminel et on règle ses problèmes par la violence. Ca m'semble pas viable à long terme cette histoire. Du coup j'veux voir c'que ça donne si on amène un peu...d'humanité là dedans.
_ Tu comptes vraiment mettre en place ce que t'as dis?
_ Ouais...pourquoi pas? Y'a pas de raisons de pas essayer. Après, faudra peut-être faire ça au sein d'un collectif indépendant, puis développer le concept avant d'essayer de l'imposer sur le marché. Peut-être comme une marque de qualité, style : "Ici, nos putes sont traitées avec respect" ou "Ce commerce participe au futur de ses employé(e)s autant qu'au bonheur de ses clients". Hum...c'est pas top, puis ici je suis pas sûr que ça marchera, faut s'adapter à la population locale...


Julia laissa le balafré à ses réflexions. De son point vue c'était un homme étrange, toujours habillé en soubrette, mais qui semblait honnête par rapport à son projet. Elle-même était curieuse de ce qui pourrait découler de tout ça et sortit de la chambre, un sourire aux lèvres. Que pourrait bien donnaient les idées de ce grand travesti?

Sunbae, lui, cherchait un nom qui pourrait symboliser les idéaux de son initiative. Il fallait également qu'il soit clinquant, capable d'attirer l'œil et d'imposer le respect. Il s'amusa à penser qu'il se ferait peut-être appelé le "Macro Prolo". Comme ça. Pour le plaisir...


Dernière édition par Sunbae Roona le Mer 17 Mai 2017 - 21:32, édité 1 fois
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Je n'ai jamais eu confiance en qui que ce soit, et ce n'est pas maintenant que ça va commencer. L'autre n'a pas l'air d'être l'homme le plus fin du monde, mais c'est souvent par ce genre d'individus qu'on finit par se faire baiser. Comble du malheur, c'est aussi cette imprévisibilité dont j'ai besoin.
   De mon côté, j'approche petit à petit des quais. La superficie de l'île et ses pics rocheux sont deux avantages pour les habitants : les seuls endroits propices à l'accostage ont été façonnés par l'homme. Et l'homme a prévu de solides défenses pour conserver son territoire. Entre les falaises qui accueillent des canons et les remparts naturels et artificiels entourant Rokade, peu de chance pour un assaillant d'atteindre le sol indemne.

   J'arrive au lieu de la transaction, dans la zone B. Ici, peu de gens s'affairent, la majorité d'entre eux appartenant à une bande de marchands d'esclaves. Comment le sais-je ? Parce qu'ils amènent une cage de taille humaine recouverte d'un drap du navire marchand à voile rouge derrière eux, duquel descend également un type muni d'un turban. Le genre qu'on trouve sur Rhétalia.
   Et devinez qui se tient devant lui ? Mon petit Neville Courduot, accompagné de quatre sous-fifres. J'avance comme si de rien n'était puis me cache au plus près, derrière un amas de caisses. De ma position, j'ai une vue d'ensemble sur le quai et ses occupants. Six hommes au centre, dont Neville et l'homme au turban, deux sur le bateau, un près de la bitte d’amarrage et un autre qui vient dans ma direction. Sinon aucun civil aux alentours pour...

   Oh merde.
   Je regarde à droite, à gauche, je cherche un moyen de m'en sortir :

- Z'êtes pas bien nombreux aujourd'hui.
- Le patron n'est pas là. Pas la peine de sortir le grand jeu. Elle est là-dessous ?

   Et voilà qu'ils commencent ! Comme réponse, le marchand donne un coup sur la cage et une voix gémissante se fait entendre. Et l'autre qui se rapproche encore, pistolet à la ceinture et compagnie... Dans une dizaine de secondes il sera face à moi. Dix secondes ça va vite. Très vite.
   ...

   Oh et puis tant merde !
   Je sors mon couteau, chope le type au moment où sa tête apparaît et le plante à la gorge. Là, j'attrape son flingue et crie :

- ON PAIERA PAS !

   Et je tire sur le mec au bord de l'eau qui s'en va rejoindre les poissons. Ce coup de feu est l'élément déclencheur de la scène que je viens d'improviser : les rhétaliens me voient comme un homme de Vairs et dégainent leurs armes. Deux sbires du Collecteur de la Rainbow House tombent avant que les autres ne prennent conscience de ce qu'il se passe. Tout va très vite !
   Les trois survivants se couchent et abattent le marchand et son acolyte face à eux. Ne restent plus que les deux sur le navire, protégés par la rambarde du pont. Ceux-là enchaînent les salves de balles et seul Neville tient encore bon. De mon côté, j'attend juste le bon moment et...

   PAN !
   Ha ! Entre les deux yeux ! Un de moins. L'autre, furieux, me vise alors et je me réfugie de justesse derrière mon abri. Des copeaux de bois volent à côté de moi tandis que l'autre me braille dessus. Entre deux détonations, je crois entendre des trucs comme "Salaud... Mon frère... t'faire la peau..." et d'autres conneries du genre. Et ça continue jusqu'à ce que le second de Vairs parvienne à lui en loger une dans le gosier.

- Pas trop tôt  !
- Tss ! Fumier...

   J'ose sortir la tête juste le temps de le voir braquer son arme sur moi. J'esquive de justesse un projectile qui s'écrase comme les autres contre les caisses. Suivi de deux clic.
   Bonne nouvelle, il est à court de munitions, et il m'en reste au moins quatre. C'est la raison pour laquelle je sors et avance dans sa direction, jetant le flingue au passage.
   C'est beaucoup trop facile sinon. Et de toute manière il était moche. Le jour où j'en aurai un, le manche sera recouvert d'une jolie couche d'or avec mes initiales dessus. Mais pour l'instant, c'est avec mon bâton que je compte le pulvériser. Lui hésite un instant, range enfin son arme et tire de son ceinturon un fouet noir qu'il fait claquer juste devant moi. Nous nous retrouvons à deux mètres cinquante l'un de l'autre, à nous regarder dans le blanc des yeux. Il a l'air furax. Personnellement, je m'amuse. Voir que mon plan a fonctionné me fait oublier les quelques balles qui ont failli me trouer la peau :

- T'es qui toi, bordel ? Pourquoi tu viens nous faire chier au milieu d'un échange ?
- Vous échangiez quoi de si intéressant ?
- Ca t'regarde pas ! Attend... Tu viens foutre la merde et tu sais même pas pourquoi ?
- Les fêtes les plus réussies sont souvent imprévues.
- Tu t'fous de ma gueule ?!
- Bof... Un peu.

   Pas la peine de lui raconter ma vie. Puisque de toute manière, il allait perdre la sienne. C'est comme frapper dans un cochon éventré jusqu'à ce que les entrailles ressortent : c'est rigolo au début, intéressant vers le milieu, mais à la fin on se rend compte qu'on a perdu du temps.
   De rage, il envoie à nouveau la lanière de cuir battre l'air à l'endroit exact où se trouvait mon visage quelques instants plus tôt. Je fais un pas en arrière et continue de le narguer, un rictus recouvrant la moitié de mon visage. Je l'excède. Ses gestes sont brusques et sa respiration est forte. Je continue mon manège ainsi pendant bien trente secondes avant de comprendre sa manière de bouger, la vitesse de frappe de son fouet et la portée qu'il lui conférait. Lors d'un énième assaut, j'esquive sur la gauche et, Argument prêt, je l'envoie d'un coup sec dans un éclat d'argent percuter son genou. Celui-ci émet un craquement.

- AH !

   Bah oui, un peu que tu as mal ! J'aimerai pas être à ta place...

- Ouch !

   D'un geste instinctif, Neville m'a décoché un coup de poing dans l'estomac et je me retrouve penché à sa hauteur. En appui sur une jambe, il fait de nouveau claquer son fouet et l'extrémité cingle mon épaule, arrachant tissu et peau au passage.
   Je recule en grimaçant. Tant pis pour la provocation, je suis tout de même parvenu à l'effet escompté : il est fatigué et affaibli par ses mouvements hargneux et mon attaque. Je caresse la blessure et recueille quelques gouttes de sang chaud entre mes doigts. Je les lèche, presque avec délectation tandis qu'un nouveau gain d'adrénaline me fait tourner la tête. Le désir de lui faire mal m'excite de plus en plus.

- Attend un peu ma jolie...
   
   Et avant qu'il n'ait le temps de comprendre, je me rus sur lui, bâton d'un côté et couteau de l'autre. Par réflexe, il essaie de me bloquer en me fouettant à nouveau, mais je fais fi de la douleur et me jette sur lui de toute ma masse, lame en avant, que je lui plante dans l'avant-bras. Nous chutons tous les deux, moi sur lui. Je le vois remuer et je fais tourner l'acier dans sa chair pour l'arrêter. Voyant qu'il résiste, je le frappe de mon autre arme. Le choc le fait lâcher son fouet. Je retire mon couteau et admire ma proie ainsi maîtrisée, réfléchissant à la manière que j'aurai de le sublimer avant de le tuer. Mais sans crier gare, sa tête se soulève du sol et vient me mordre le poignet. Il sert de toutes ses forces et me fait même lâcher un hoquet de douleur.
   Je me ressaisis et le martèle de coups. Mon bâton percute son front, sa tempe, sa mâchoire... Qui se détend de plus en plus... Des dizaines de fois... Et il finit par lâcher prise, complètement sonné. Blessé et irrité, je continue de frapper le jeunot jusqu'à ce que je sois sûr qu'il soit hors d'état de nuire. Et que ses dents soient toutes tombées. Et que son nez soit écrasé. Et qu'il ne ressemble plus à rien en fait.

   Je me lève et admire mon oeuvre. Le pauvre bougre était pas vieux, c'est dommage. Mais il était fidèle à Vairs et de ce fait impossible à convaincre de travailler pour moi. Donc bon... Essayons au moins de laisser de lui une trace : je me penche et nettoie tout le sang sur son visage, à l'exception de celui coulant de ses narines, le tout en fredonnant :

- Cuir, cuir... Cuir et moustache !

  Et voilà, c'est devenu un homme, un vrai !

- Oh putain...

   Je me tourne et mes yeux rencontrent ceux de trois types alertés par les bruits du combat. Il est presque treize heures et il y a encore des gens qui se baladent près du port pendant la pause déjeuner ?! Doivent être payés aux heures supplémentaires, ceux-là...
   Enfin bref, je m'approche d'un cadavre et lui prend son pistolet. Voyant cela, le trio se retourne et commence à s'enfuir. Je vise et :

   PAN ! PAN ! PAN ! PAN ! PAN !
   Oui, parce que bon... de loin, avec le vent, l'épaule, tout ça... Mais au final je les ai eu ! Du coup pas de témoin. Ce serait embêtant que quelqu'un reconnaisse les corps et le responsable. J'ai pas envie que ce foutu Atyl soit au courant de ça maintenant. C'est trop tôt.
   Pour l'instant, ce qui compte, c'est la marchandise !
   Je m'approche de la cage, je retire le voile, je regarde à l'intérieur et...

   ...
   Une femme avec un cœur tatoué sur la joue. Et un trou tatoué sur le ventre. Je me rapproche encore et je constate que le trou n'a rien de fictif. Du sang coule de la plaie abondamment. Je vois également que la donzelle a deux articulations aux bras. Elle a dû se prendre une balle perdue la pauvre, c'est dommage...
   Je répète : la prostituée a deux putains d'articulations aux bras. Elle a deux avant-bras de chaque côté ! C'est moche ! Qui paierait pour avoir ça dans sa piaule ?! Ah non ! Non non non ! Ça c'est pas dans mes délires ! Elle est morte ? TANT MIEUX !

   Et moi qui venait pour me faire une nouvelle alliée et, surtout, une future employée. Bah résultat des courses : bon débarras les déchets, je me casse ! Pourvu que Ma Biche ait su se montrer plus efficace.
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_ Et vous êtes sûr qu'il magouille pas?
_ Sûr? Non, mais s'il le fait ce n'est pas au travers de la Rainbow House. Les comptes sont parfaits, j'y mettrais ma main à couper.


Sunbae observa Monsieur Cloud.

Celui-ci s'avérait tout à fait ouvert à un éventuel changement de direction au sein de la maison close. Il détestait son patron actuel qu'il ne servait que par crainte et souhaitait, depuis quelques temps, quitter l'île pour s'offrir une retraite bien méritée. Et si son envie de voyage arrangeait Sun', sa crainte envers Vairs Atyl pouvait s'avérer problématique.
Le gardien du bordel venait de lui révéler que son proprio n'avait rien à cacher. Rien de facilement découvrable en tout cas. Ce qui signifiait que des preuves allaient devoir être fabriquées. Cloud, l'homme le plus à même d'en créer, aurait-il le courage de falsifier les papiers? La suite des événements nécessiterait également son intervention pour aller prévenir Atyl du grabuge à venir. Serait-il capable de mentir face à l'homme qu'il craignait?

Ces deux questions qui courraient actuellement dans la tête de Sunbae, le dérangeaient. D'après ce qu'il avait compris, le pire qui pouvait arriver au plan de Dorian était que le patron de la Rainbow House le découvre. Mettre le vieux gardien, désormais au courant de l'affaire, face à lui pourrait donc s'avérer dérangeant.

Le balafré commençait à entrevoir une solution. Tout d'abord, il lui fallait des certitudes.

_ Atyl n'a donc rien à se reprocher. Si nous voulons nous emparer de cet endroit, il faut qu'on puisse penser le penser coupable. Seriez-vous prêts à falsifier quelques papiers?
_ Je...je le peux
, dit finalement le vieil homme après une longue hésitation.
_ Excellent, je vous en remercie. Comme vous le savez, je vais créer un peu d'agitation dans le coin, suffisamment pour que la présence d'Atyl soit nécessaire. Je préférerais que vous ne soyez pas celui qui aille le prévenir.
_ Vous doutez que je puisse lui cacher vos intentions?
_ Désolé pour le manque de confiance mais je veux éviter les éventuels problèmes.
_ Mais c'est mon rôle. Monsieur Atyl trouvera cela étrange si je ne suis pas celui qui vient le chercher. En cas de problèmes nous avons des hommes chargés de la sécurité.
_ Ne vous inquiétez pas pour ça, je compte créer une situation qui nécessitera votre présence pour être gérée. Allez vous occuper des comptes, prévenez moi lorsque c'est réglé et je m'occuperais de la suite.


Le ton employé par Sunbae était tellement empli de confiance qu'il ne laissait aucune place au doute et M. Cloud suivit donc ses ordres et sortit de la pièce. Désormais seul, le Roona réfléchissait à la suite des événements. Il était debout dans la chambre qui lui avait été attribué, toujours vêtu en soubrette, bien conscient que sa tenue participait à la confiance que lui accordaient les prostituées. Ainsi habillé, elles le voyaient comme "l'une des leurs". Il commençait à entrevoir le déroulement futur des événements. Il devait amener la violence et non pas la provoquer. Jouer les victimes et continuer sur la lancée de ce qu'il avait fait avec les filles. Prendre le bon rôle et s'attribuer le soutien des masses.

Il devait parler à Julia. Et aux filles.

*
***
*

Malgré ce que sa réputation laissait entendre, Vairs Atyl n'était pas homme à perdre son sang-froid sans raisons. S'il ne rechignait pas à faire preuve de violence, ce n'était que rarement dans la recherche d'une quelconque satisfaction personnelle. Pour lui, tout n'était que business. Et il ne supportait pas que l'on vienne s'immiscer dans celui-ci.
Or, on venait de lui signifiait un problème dans son bordel. Un problème qui justifiait que ce ne soit pas Monsieur Cloud qui vienne le chercher. Un problème qui concernait les filles. Il n'aimait pas ça.

Cependant, toute la tension qu'il avait accumulé sur le chemin s'évapora lorsqu'il arriva à la Rainbow House, pour être remplacée par la surprise.

Devant son établissement, sa fierté, se tenait une foule constituée d'hommes véhéments invectivant un second groupe, composé de ses propres employées. Entre eux, Monsieur Cloud tentait de calmer les esprits, entouré par deux gardes dépassés par les événements.
De cet amalgame d'êtres humains, une tête dépassait. Celle d'un grand travesti, à moitié maquillé, aux cheveux cendrés, habillé en soubrette et monté sur des chaussures à semelles compensées.

La grande idée de Sunbae avait simplement été de lancer une grève du sexe. Refusant les clients, ceux-ci s'étaient alors rassemblés pour protester contre ce mouvement. Les putes criaient leurs envies d'être respectées et mieux considérés, les clients leur envie d'être satisfaits. Et au milieu, le balafré discourait sur les bienfaits d'une économie plus sociale lorsqu'il remarqua l'arrivée d'Atyl. Il sourit, son plan marchait pour l'instant à la perfection. Il avait du soutien et des témoins, ne manquait plus que la violence.

Il interpella le patron de la Rainbow House.

_ Et regardez qui vient stopper notre cri à la justice! La voix du patriarcat va désormais essayer de nous faire taire à travers les actes de son serviteur.

Cette intervention quelque peu floue eu le mérite de calmer les différents groupes dont l'attention était maintenant rivée sur le porte-parole des prostituées et le nouvel arrivant. La colère refit vite surface dans l'esprit de Vairs Atyl et sa réponse ne se fit pas attendre.

_ Est-ce que quelqu'un pourrait m'expliquer ce qui se passe!?

Ouvrant la foule devant lui, le Roona s'offrit de répondre à la question. S'efforçant de prendre son air le plus dédaigneux et son ton le plus révolté.

_ C'est bien simple Monsieur Atyl. Ce qu'il se passe, c'est que les petites mains derrière moi en ont assez d'être inconsidérées et de n'avoir aucun avenir, peu importe à quel point elles s'investissent dans leur travail. Assez d'être exploitées par l'oligarchie dont vous n'êtes que le piètre représentant. Pour protester contre les conditions honteuses dans lesquelles ces femmes accomplissent leurs labeurs, une grève général a été décidé.
_ Une...grève?


Les mots avaient eu bien du mal à dépasser les lèvres de l'homme tant son visage était crispé. Il mettait un point d'honneur à ne jamais maltraiter ses filles et, techniquement, le grand type en face de lui était l'une d'entre elle. Il lui avait offert un moyen de s'en sortir alors qu'il était dans la merde et c'est ainsi qu'il était remercié.
Sunbae ne lui laissa pas le temps d'en dire plus et repris son discours.

_ Tout à fait: une grève. Et il en sera ainsi jusqu'à ce que toutes nos conditions soient respectées! Nous exigeons la création d'un plan d'épargne retraite et d'une caisse maladie. Aucune pute ne devrait avoir à craindre pour son avenir alors qu'elle use son corps pour le plaisir des autres. Condamnées à une carrière courte, dégradées par le regard et les actes des autres, elles sont vues comme une disgrâce. Alors même que nombre d'entre elles se sont vendues, sacrifiées, pour d'autres. Se cambrant pour prendre soin de leurs parents ou s'offrant pour l'avenir de leurs enfants. Enfants subissant les quolibets de leurs camarades à cause du travail de leurs mères. "Ta mère la pute" ne devrait jamais amené à la honte mais bien à la fierté car toutes nos mères auraient pu en arriver à de telles extrémités, y compris la votre M. Atyl.

Monsieur Cloud et Julia avaient prévenu Sunbae qu'Atyl était du genre à partir au quart de tour lorsque l'on mentionnait sa maman. Il n'aurait jamais cru qu'une simple mention des mots "pute" et "ta mère" auraient suffit à produire l'effet escompté: une agression en bonne et due forme.
Le balafré aurait intérieurement fêté sa victoire si les phalanges de son interlocuteur n'étaient pas venues se fracasser sur sa mâchoire. Accompagnées d'un "t'as dis quoi sur ma mère!?" des plus classique pour ce genre d'effusions de colère.

Suite au coup de poing, Sun' roula sur quelques mètre avant de retrouver ses appuis. La colère aveuglait son opposant qui l'avait suivit et s'apprêtait à le frapper de nouveau. Sans avoir le temps pour autre chose, le Roona esquiva l'assaut. Il parvint à se remettre debout pour faire face à la menace et contra un coup de pied avec ses avant-bras. Il sentit l'onde de choc se propager le long de ses membres. Il sauta en arrière, gagnant ainsi les quelques secondes nécessaire pour qu'il puisse se saisir de ses lames. Entourant sa taille, cachées par les froufrous de sa jolie jupe, il ne pouvait les atteindre sans offrir à tous une vue sur sa petite culotte en coton blanc.

C'est ce moment que choisi M. Hackman pour apparaitre fugacement dans cette histoire une seconde fois. Il s'extirpa de la foule en un instant et se jeta au sol, derrière Sunbae. Un appareil photo dans les mains, il parvint, comme au ralenti, à saisir l'instant parfait pour une photo qui aurait sa place dans les "Okamas Papers". Le tout en criant "Pantsu shuuto!!!" avant de disparaitre, après une roulade, dans une rue adjacente au bordel.

L'absurde de l'évènement sembla stopper le temps pendant quelques secondes avant que celui-ci ne reprenne son cours.

Enfin armé, Sunbae fit tourner l'une des ses dagues au bout de sa corde d'acier. L'action intrigua Atyl qui se calma pour observer la situation. La foule avait continué à les observer, tout le monde sur Rokade sachant apprécier la beauté d'un affrontement.

Dérangé par les talons qu'il portait, le balafré restait limité dans ses mouvement. Il lançait sa dague en direction de son adversaire lorsque celui-ci faisait mine d'approcher mais n'arrivait pas à se montrer réellement dangereux. Simplement lancer sa dague ne serait pas suffisant dans ce combat.
Jusque là, il avait adopté la position de base de l'art des Dagues Jumelles et il profita de quelques secondes de répit pour faire passer le lien d'acier reliant ses lames dans son dos. Il enroula ce lien autour de certaines de ses articulations d'un geste précis et prit de nouveau une position de combat.

_ Dis-moi, lança-t-il à son adversaire, tu as déjà vu des dagues vivantes?

Son opposant était puissant, il l'avait sentit avec les quelques coups qu'il avait reçu. Il ne se rappelait plus de la dernière fois qu'il avait affronté quelqu'un de réellement puissant et l'adrénaline qui coulait dans ses veines lui faisait ressentir une certaine ivresse. Il sourit. Il n'avait pas à gagner, simplement perdre du temps. Lorsque Dorian reviendrait après s'être occupé de sa partie du boulot, ils n'aurait aucun mal à se défaire de Vairs Atyl en associant leurs forces. Mais Sun' avait envie de se tester et, comme dit plus haut, étant plutôt pacifiste il n'avait que rarement l'occasion de se lancer dans de tels affrontements. Il était curieux de ce qui pouvait arriver.

Il lança l'une de ses dagues que son opposant cru aisément esquiver lorsque celle-ci, suite à un léger mouvement de Sunbae, changea de trajectoire. Une première estafilade apparut sur le visage du patron de la Rainbow House. Le balafré ne lui laissa pas le temps de comprendre et les attaques à distance s'enchainèrent. Il démontra toutes ses capacités dans la maitrise de son art martial en ne laissant pas le temps à son adversaire de respirer. Il lui infligea de nombreuses blessures mais aucune de réellement profondes.
L'affrontement semblait tourner au combat d'endurance jusqu'à ce qu'Atyl ne parvienne à passer au travers d'une salve d'attaques. Il parvint à se rapprocher au corps à corps mais fut accueilli par la deuxième dague du balafré qui s'enfonça dans son épaule droite. Le Roona cru avoir le temps de ramener son autre lame avant que le patron du bordel n'ai le temps de se remettre du coup reçu. Le poing qui s'enfonça dans sa cage thoracique lui prouva son erreur de jugement. Il crut qu'il allait déverser le contenu de son estomac sur le sol et sentit quelques une de ses côtes craquer sous la puissance de l'impact.

Il affrontait définitivement un bourrin. Jusque là il avait dominé le combat par sa technique et sa vitesse mais un seul coup avait suffit à changer la donne.

Il tomba à genoux. Il n'avait pas l'habitude d'encaisser et ressentait à l'instant toute l'importance de ce désavantage. D'un geste, dicté autant par la colère qu'à un sentiment d'impuissance, il planta la dague qu'il tenait de sa main gauche dans le pied de son opposant. La conséquence de cette action pour Sunbae fut un genou rencontrant son visage à haute vitesse.
Couché sur le dos, il se tourna et tenta de se relever en s'appuyant sur le mur derrière lui. Le poing de son adversaire vint détruire son support et il ne dut son salut qu'à la faiblesse de ses jambes qui le lâchèrent au même moment. Le coup passant à un souffle de son crâne.
Étendu sur le flanc, dominé par un opposant également mal en point, il vit une silhouette se dégager de la foule, relativement éloignée de l'affrontement. Puis une voix qu'il n'aurait jamais cru être un jour heureux d'entendre retentit au oreilles des deux combattants.

_ C'était pas mal ma Biche, j'ai beaucoup aimé l'esprit sur la fin...hey! Vairs! Je croyais que tu t'en prenais jamais à tes filles. Si tu veux, j'ai encore besoin de me défouler.

Un large sourire, qui n'avait rien d'amical, apparut sur le visage de Dorian. Sunbae profita de la diversion créée par l'intervention de son associé pour s'éloigner de la scène. Il espérait que Silverbreath était aussi costaud qu'il en avait l'air. Il n'avait aucune envie de se retrouver de nouveau entre les mains d'Atyl.

Il se saisit cependant du lien de ses dagues jumelles et ramena celles-ci vers lui. Il avait laissé son fusil dans la chambre, par commodité, ses lames étaient donc son seul moyen d'aider son compère si le besoin s'en faisait sentir.

Il sourit lorsque son regard se tourna vers la foule, son plan avait marché. Elle était tout entière contre le patron du bordel et ne voyait en Dorian qu'un passant venant au secours d'un pauvre travesti obligé de vendre son corps. Et aux capacités martiales surprenantes.
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- Tséhéhéhé... J'croyais que tu refusais d'te battre ? Regardez un peu dans quel état vous êtes, tous les deux !

   J'approche de Vairs Atyl. Quelques estafilades parcourent son corps mais elles ne semblent pas gêner ses mouvements. Ce sont les blessures à son épaule et à sa jambe qui le désavantagent grandement. De mon côté, les précédents coups de fouet me piquent et me brûlent au niveau des omoplates. Et mon haut est foutu...
   Autour de nous, la foule est divisée en deux : ceux qui soutiennent le mouvement gréviste et ceux qui encouragent le propriétaire à rétablir l'ordre. Celui-ci me fixe sans sourciller, l'air très sérieux. Il n'est pas idiot, il a remarqué de quelle route je venais d'arriver. Et ce mouvement en marche pendant son absence, ce travesti qui me parle comme s'il me connaissait... Il comprend que quelque chose de mauvais se trame le concernant. Il claque des doigts et fait un signe de tête aux deux hommes fondus dans la masse qui étaient revenus avec lui de son rendez-vous. Ceux-ci viennent à ma rencontre en faisant craquer leur phalanges. Joli cliché que voilà :

- Allez, venez mes mignonnes...

  L'un d'eux charge, plutôt vite malgré sa corpulence. Un beau sac de viande qui devait approcher du quintal. Mais l'ennui avec ce genre de grassouillets, c'est qu'ils ont du mal à freiner leur action une fois lancés. Je sors mon couteau et, voyant cela, l'autre tente de s'arrêter avant d'être à portée de frappe, en vain. Je le réceptionne de ma main libre au niveau du col et lui enfonce la lame dans le bide, la ressortant quelques fractions de seconde plus tard, lui faisant relâcher râle de douleur, sang et force. Il s'écroule en se tenant la gorge, seul endroit où mon attaque pouvait porter ses fruits : l'imposante couche de graisse sur son ventre m'aurait empêché de porter un coup fatal.
  Son compagnon, pendant ce temps, avait sorti son flingue. Le temps de me tourner vers lui que je le vois me mettre en joue. C'est sans compter sur mon "partenaire" qui s'approche de lui sans un bruit pour lui taillader la main, juste avant que le coup ne parte. Je profite de ce moment pour me ruer sur lui et lui décocher un TYRANT PUNCH ! en pleine poire, l'envoyant voler contre la façade avant du bordel.

   Ceci fait, je me tourne à nouveau vers le patron, lequel semble furieux, la mâchoire crispée. Il cherche quelque chose dans la poche arrière de son pantalon.

- Il faut vraiment tout faire soi-même, c'est... Exaspérant.
- Et tu dis ça dans ton état ? Un peu prétentieux je trouve.
- Parce que tu vois les travelos comme des menaces au premier abord, toi ?
- ... Pas faux.
- Hé ! Je vous entend !

  Vairs n'est pas appelé le Gantelé pour rien. Il sort une paire de mitaines de cuir noires, des plaques d'acier recouvrant la partie supérieure, et les enfile. Il a décidé de se la jouer sérieux et d'en finir rapidement. C'est aussi mon objectif. Je sors Argument.
   Et sans plus de cérémonie nous nous lançons l'un contre l'autre.

  Mon camarade en talons nous observe en compagnie des prostituées sur le trottoir. Les cris et les huées de notre entourage résonnent tout autour, comme une dysharmonie des plus chaotiques. Et nous échangeons coup sur coup avec Vairs : bottes, revers, directs, feintes, tourniquets, parades... Tout y passe. Et aucun de nous d'eux n'est parvenu à toucher l'autre. C'est qu'il se débrouille bien, malgré son épaule, le proxénète. Mes respects !
   Enfin du respect... Pour peu que je m'en souvienne, j'en ai à peu près autant que d'honneur, c'est à dire pas du tout : je profite d'un moment où il croit pouvoir se protéger une nouvelle fois de mon coup de bâton pour lui écraser le pied, celui que Ma Biche avait ouvert auparavant. Il crie et Argument termine sa course sur son épaule déjà endolorie, le faisant à tomber à genoux.

  Il est à ma merci... Du moins je le crois. Je lui attrape le cuir chevelu et me prépare à le frapper à nouveau lorsque je vois son bras se crisper puis fondre en direction de mon torse à la manière d'un serpent près à enfoncer ses crocs venimeux dans sa proie. Par réflexe, je le lâche et m'écarte. Une sensation étrange me fait regarder ma poitrine et je découvre avec surprise qu'il y manque un morceau de vêtement. Et de peau... Je regarde Vairs et découvre entre ses doigts l'épiderme manquant. Les rumeurs sont ainsi fondées : ce taré a tenté de m'arracher le cœur.

- Petit fumier...

  Plus question de jouer. Non seulement il fait obstacle à mon acquisition, mais en plus il tente de me tuer, de la même façon que l'on débourre une peluche. Il va voir que je ne suis pas le gentil petit ourson de son enfance.
  Je lève mon arme et l'abat d'un geste vif qu'il esquive de justesse, prenant de la distance. Je marche vers lui, d'un pas tranquille, le regard noir. Lui se mord la lèvre, concentré. J'attaque à nouveau, il se déplace sur le côté et cherche à m'enserrer de nouveau. Mais je lui présente un couteau, lame en l'air, contre lequel il vient se couper la paume de la main. Profitant de sa pause "J'ai mal !", je tourne l'arme blanche et la lui plante dans le bras, juste sous la plaie de son épaule. De mon autre bras armé, je le cogne au niveau de la joue et il tombe à la renverse, du sang plein la bouche. Un râle suivi de gargouillis, gueule ouverte, me font comprendre qu'il s'est presque coupé la langue en deux.

   Il cherche à se relever et parvient à m'attraper au niveau de la manche. Je l'aide à se redresser. Pour lui enfoncer mon couteau dans l'estomac et le repousser contre le mur de la Rainbow House.
   J'en ai terminé avec lui. Je me retourne et m'approche de la foule :

- Rokadiens, écoutez-moi... Vairs Atyl, l'homme que vous connaissez comme étant le patron de la maison de joie derrière moi, est un escroc de la pire espèce. Vous m'direz "la bonne blague !" ou encore "la majorité d'entre nous est dans le même cas." Eh bien non : il est pire, dans le sens où ses magouilles, où ses fraudes se font à notre encontre ! Depuis longtemps déjà, il abuse de la confiance des Cinq de Rokade. Ses activités frauduleuses devaient être révélées et pun...
- ATTENTION !

  Suivant la voix, je fais volte-face et vois le proxénète, mourant et debout, mon couteau à la main et courant dans ma direction avec toute l'énergie du désespoir. Toujours équipé d'Argument, je m'apprête à le réceptionner quand une femme de grande taille fonce sur lui et... lui tranche l'arrière des genoux. Je regarde mieux et reconnaît Ma Biche. Je l'interroge du regard :

- Tuer de sang-froid, non. Laisser quelqu'un agir avec lâcheté, encore moins.

  Décidément, il m'aura pas mal surpris depuis notre rencontre celui-là ! J'ai vraiment bien fait de l'embaucher... Je regrette un peu moins de devoir le payer pour la peine. Mais pour ça... Je m'excuserai auprès des filles, un jour peut-être, pour avoir dû alléger les fonds de caisse du bordel. De toute manière, les quelques ressources trouvées sur le navire des marchands d'esclaves devraient servir pour d'éventuels frais de réparation. Ou pour d'autres broutilles. Que voulez-vous ? Quand on est commercial, on l'est jusqu'au bout !
  Le travelo se redresse, enjambe le cadavre de Vairs qui a enfin rendu son dernier souffle, regarde les filles d'un air très sérieux et s'approche de la foule. Je me recule afin de lui laisser la place. Après tout, il est la personne qui a lancé le débat, et lui sait quelles "actions frauduleuses" Vairs a bien pu accomplir au détriment des Cinq. D'ailleurs :

- Fais vite, Ma Biche... Vu le grabuge et la proximité, on risque de se retrouver avec le responsable des finances plus vite qu'on ne le pense. J'espère que tout est prêt pour l'accueillir...
  • https://www.onepiece-requiem.net/t19663-etre-ou-ne-pas-etre-doria
  • https://www.onepiece-requiem.net/t19659-quand-dorian-souffle-de-l-argent-sort
Tomi Pika, assis dans le bureau de la Rainbow House était en train de se pincer l'arrête du nez en réfléchissant.

Un mercenaire, un travelot et un eunuque se tenaient devant lui. Cette situation, digne du début d'une blague nulle, le perturbait au plus haut point. Il n'arrivait plus à penser et savait pertinemment que se débarrasser des trois "hommes" était probablement la meilleure chose à faire. Cependant, son instinct financier, qui avait participer à son élévation sociale, lui criait que ces hommes pouvaient être profitables.
Le mercenaire, Dorian, lui avait déjà prouver sa valeur d'homme d'action et son esprit d'initiative. C'était un insoumis qui ne lui donnerait jamais une once de loyauté mais tant que leurs objectifs coïncidaient Pika supposait qu'il resterait un danger négligeable et un outil qu'il pouvait utiliser.
Monsieur Cloud savait tout ce qu'il y avait à savoir sur la maison de passe et, suite à la mort d'Atyl, était le plus à même de reprendre le business sans grandes conséquences.
Quand au dernier, le travesti nommait Sunbae, il ne le connaissait pas mais ce qu'il avait vu en arrivant sur les lieux l'avait convaincu de l'utilité que cet homme pouvait avoir.

En effet, un peu plus tôt alors que lui et ses hommes étaient venus disperser la foule, ils avaient pu observer une scène peu commune sur Rokade : un mouvement social.

Prostituées et clients avaient été rejoints par bien d'autres personnes et c'était désormais près d'une cinquantaine de personnes qui étaient rassemblées devant la Rainbow House. Aucune ne se souciait du corps de Vairs Atyl ou de ses hommes étendus sur le sol. Tous écoutaient le discours enflammé du grand type en tenue de soubrette prônant la justice sociale et la répartition plus équitable des profits dans "l'intérêt des employées comme des consommateurs".
Tomi Pika, lui, voyait un homme qui avait été capable de faire oublier à tout son auditoire les derniers événements. Un talent indéniable qu'il serait idiot de ne pas exploiter. Les mots étaient simples, bien choisis, captant l'attention sans pour autant attiser ce sentiment de foutage de gueule que les bons orateurs avaient tendance à transmettre sans le vouloir.
Il avait ordonné que la foule soit dispersée, la dépouille d'Atyl emmenée et avait convoqué les trois principaux acteurs de ce qu'il s'était passé. La première chose à faire était d'avoir leur vision des choses.

Mais le récit avait été très confus. Ou plutôt, le cheminement des actions menant à ce résultat semblait...improbable.

Le responsable des finances de Rokade décida de faire le point. Histoire de s'assurer de ce qu'il venait d'entendre. Il cessa de se pincer l'arrête du nez et leva les yeux vers ses interlocuteurs.

_ Bon, récapitulons. M. Cloud. L'homme a vos côtés a été engagé par M. Atyl comme "l'une de ses filles". Correct?
_ Tout à fait.
_ Suite à cela, M. Roona, déçu par les conditions de travail, vous avez décidé de mené cette "action sociale" qui a conduit aux événement de cet après-midi. J'ai toujours bon?
_ Oui m'sieur
, lui répondit Sunbae pensant que la question s'adressait à lui.
_ Quand a vous Dorian, vous cherchiez depuis un moment le moyen de prendre le contrôle de ce commerce et, voyant la situation, avez vu dans cette situation une opportunité de concrétiser vos envies, n'est-ce pas?
_ Pour être précis, je pensais que c'était une gonzesse et que j'aurais aussi droit à une passe gratuite au passage. Et vous oubliez mes soupçons sur les autres activités de Vairs.
_ Je n'oublie rien. Mes hommes sont en train de vérifier vos soupçons. Quoiqu'il en soit, ça me semble être une sacré coïncidence et plus j'entends cette histoire et plus j'ai l'impression que vous vous foutez de ma gueule. Je vais donc réiterer ma toute première question: qu'est-ce qu'il s'est putain de passé ici?


Face à Pika, les trois hommes n'en menaient pas long. Sunbae inspira un long moment et il sentait le regard de Dorian lui transperçait le crâne. Il espérait sincèrement ne pas s'être trompé sur le genre d'homme qu'était celui qui se trouvait à quelques mètres d'eux.

*
***
*

Juste après que Vairs Atyl ait rendu son dernier souffle Sunbae et Dorian s'étaient retrouvés en grande conversation. Et Silverbreath était à deux doigts d'ajouter une nouvelle victime à son compteur de la journée.

_ Dire la vérité? Pour sauver nos miches? D'après mon dico, il semblerait que t'essaies de me doubler alors dis-moi, qu'est-ce qui m'empêche de t'exploser le crâne à cet instant précis?
_ On va pas dire toute la vérité, juste ce qui ne peut être falsifier.
_ Et je dois porter le blâme pour la mort de l'autre enfoiré? Si tu veux m'buter y'a des moyens plus rapides et tu pourrais au moins avoir les couilles de le faire toi-même.
_ La seule chose qui ait réellement besoin d'être cachée c'est le fait que Cloud soit de notre côté et qu'il ait falsifié les papiers. Le reste n'est que détails.
_ Je sais que t'es pas vraiment au courant de comment ça se passe dans le coin mais...
_ Mais c'est dangereux, les gens sont fous tout ça. Tu peux me passer le refrain sur Rokade, je commence à en avoir assez qu'on me le répète. Tu te concentres pas sur ce qu'il faut. Le business c'est comme les gens. Peu importe si l'aspect extérieur, ici le système, change. L'intérieur reste le même.
_ Putain, mais qu'est-ce que te me chantes?
_ Ce que j'veux dire c'est que si ton Pika est un homme d'affaire un tant soit peu intelligent,  et d'après ce que tu m'as dis hier soir c'est pas le dernier des crétins. On peut donc supposer qu'à partir du moment où on lui présente quelque chose de plus rentable pour compenser la perte qu'on a occasionné alors on devrait s'en sortir sans trop de mal. De plus, il semble s'être prit d'affection pour toi donc tu prend le rôle le plus chiant.
_ Tomi Pika a de l'affection pour moi, mais bien sur...
_ Je vais être honnête. Si j'étais un dirigeant de cette île où les règles sont "floues", tu serais dans ma top liste des mecs à se débarrasser. T'as aucun scrupule, t'es ambitieux et on sent tout de suite que t'es pas le genre à se mettre au service de qui que ce soit. Pas le genre à accepter d'être un anonyme là où le crime paie. Tôt ou tard tu seras un problème, c'est une évidence. Si t'es encore vivant c'est sûrement parce qu'il doit avoir des plans pour toi. La mort d'un dirigeant de bordel ne devrait pas changer son point de vue.


Pas besoin d'être un observateur talentueux pour se rendre compte de toute la colère qui bouillonnait en Dorian. Sunbae savait qu'il poussait le bouchon très, très, loin mais ça lui semblait être le meilleur moyen disponible, il devait juste le faire comprendre à son associé.

_ Ecoute. Ce qu'il faut c'est lui faire baisser sa garde. Peu importe ce qu'on lui racontera en premier, il n'y croira pas. Faut réussir à lui faire croire qu'il nous a coincé et détourner son attention de Cloud et des papiers pour qu'au moment où il les examine il ne puisse pas douter de leurs véracité. S'il croit les papiers faux alors on est bons, non?
_ Mouais...je comprends l'idée. J'apprécie pas mais j'comprend. On lui raconte d'abord les faits en tentant de lui faire croire à une coïncidence avant d'en dire plus...
_ Le truc c'est que je sais pas encore comment faire passer le changement d'histoire de manière subtile et c'est un peu là que tout se jouera.
_ Hahaha...j'ai justement une super idée pour ça.


Le regard que lui lança l'homme à tout faire n'avait rien de rassurant. L'idée qui le suivit n'aida pas.

*
***
*

Le moment était venu. Tout ce qui s'était passé aujourd'hui n'aurait aucun intérêt s'ils se rataient maintenant. Sunbae expira et se lança.

Il tomba au sol, genoux collés sur le plancher et prit une position de parfaite soumission. Il tenta d'accorder son ton à son discours.

_ Vous avez raison M. Pika ce n'est pas une coïncidence. M. Silverbreath m'a engagé dans l'optique de s'accaparer cet endroit.

Sans qu'il ait le temps d'en dire plus, le pied de Dorian lui rentra dans les côtes tout en simulant un accès de rage intense. C'était la partie du plan que Sunbae aurait souhaiter éviter. Les hommes de Pika se saisirent du mercenaire qui s'empressa de justifier son geste.

_ Je l'avais seulement engagé pour espionner Vairs. Il devait confirmer mes soupçons mais quand je les ai vu s'affronter j'ai pensé que c'était chose faite. Je pensais vous rendre service en le dézinguant. Promis.

Durant sa tirade, il fut mis au sol par les gardes alors que Pika s'approchait de lui.

_ Je vous ai déjà averti Dorian. Rokade a des règles et si vous souhaitez prospérer ici, vous devez les suivre. M. Roona, vous avez donc la vie de cet homme entre vos mains. Ce qu'il vient de dire est-il vrai?

Sun' se relevait difficilement. Le pied de Dorian l'avait frappé dans ses côtes déjà endolories et il supposait que le Silverbreath n'avait pas fait ça par hasard. Il le trouvait mesquin pour le coup. Il resta cependant dans son rôle, le plan avant tout. Sa vie avant sa cage thoracique.

_ C'est la vérité M. Pika.
_ Êtes-vous en train de me dire que vous êtes responsable de ce qu'il s'est passé aujourd'hui M. Roona?
_ Les choses ont dégénérées. Vous avez déjà été une pute Monsieur? Ben laissez-moi vous dire que c'est pas fun. Je me suis rendu compte qu'au final, je faisais ça pour la même raison que ces filles: l'argent. Alors j'ai voulu les aider un peu. En plus c'est géré n'importe comment cet endroit.
_ Et vous vous y connaissez en gestion de bordel?
_ Pas du tout mais y'a des trucs qui me semblent évident. Déjà y'a pas de bars. Si toutes les filles sont prises le mec en manque doit attendre comme un con que y'en ai une qui se libère? Ils ont des esclaves, c'est clairement une idée à la con, il en faut des passes pour rentabiliser l'achat puis...bon, après je me suis un peu laissé emporté.
_ C'est le moins qu'on puisse dire...


C'était l'instant fatidique Si Pika ne les tuait pas maintenant alors c'était réglé et ils auraient une chance de sortir gagnant de toute cette histoire. Sunbae commençait à se souvenir de bien des prières et à espérer l'aide d'une présence divine. Ce serait pas de trop.

_ Pour l'instant je vais vous laisser le bénéfice du doute. Je déciderais de votre sort en fonction de ce que les comptes de cet endroit révéleront. Dorian, j'espère pour vous que vos soupçons sur cet endroit sont fondés...

D'un geste de la main, les hommes de Pika laissèrent Dorian se relever. Lui-même se leva du fauteuil dans lequel il était assis et contourna le bureau pour quitter la pièce. Il s'arrêta devant la porte.

_ ...s'ils le sont, vous pourrez demander l'acquisition de cet endroit. Messieurs, sachez pour votre sécurité que, jusqu'à nouvel ordre, vous serez sous la surveillance des Cinq. N'espérez pas quitter l'île si vous m'avez menti. Et Monsieur Roona, j'espère pour elles que votre empathie pour ces prostituées est réelle car cet endroit est fermé jusqu'à nouvelle ordre.

Sur ces paroles, les responsable des finances quitta la pièce et la Rainbow House. Un sourire passa fugacement sur son visage. Roona et Silverbreath étaient en torts mais ils lui avaient donné suffisamment de mou pour qu'il puisse fermer les yeux. Les idées du premier l'intriguaient et le second avait déjà prouvé sa valeur, en plus de tenter de mettre les formes dans ces opérations à défaut de respecter complètement les règles. Ce qui était déjà un progrès dans son cas. Quoiqu'il en soit, ils seraient toujours plus profitables qu'Atyl. L'homme gérait ses affaires comme un mafieux, un système efficace mais allant à l'encontre de la construction d'une société économiquement stable. Il se serait probablement débarrassé de l'homme, tôt ou tard.

*
***
*

Après quelques secondes, Dorian, Sunbae et Monsieur Cloud respirèrent d'un même souffle.

_ C'est passé, murmura le balafré.
_ J'espère pour toi que Monsieur Cloud a bien fait son job. Sinon Pika aura pas à chercher pour trouver ton bourreau.
_ M. Silverbreath, je ne vous permets pas de mettre en doute mes compétences de comptables.
_ Stresse pas Dorian. J'crois qu'on est bon. Tu l'as entendu, il nous a presque donner sa bénédiction. S'il avait voulu se débarrasser de nous, ce serait déjà fait. A moins que la présomption d'innocence soit d'usage dans l'coin.
_ Putain, je jure qu'un jour je vais t'buter. Dans un sens t'es encore plus taré que moi.


Pour la première fois depuis qu'ils s'étaient rencontrés, les deux hommes rirent ensemble. Le plan avait fonctionné, dans le sens où ils étaient encore en vie, et Pika semblaient les avoir à la bonne.
Sunbae commençait à penser que c'était peut être une bonne chose d'être venu ici. A défaut d'être sympathique, Rokade paraissait pleine d'opportunités pour qui savait les saisir. En parlant d'opportunités, Dorian venait de se relever et alla se poser devant Monsieur Cloud.

_ Bon, maintenant il serait temps de rentabiliser un peu c't'histoire. Il est où l'pognon?

La réponse du gardien de la Rainbow House ne se fit pas attendre et, bientôt, tout ce petit monde pu admirer la bonne tenue des affaires du bordel.

Non, vraiment, Sun' allait rester un peu plus longtemps sur cette île.
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