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Le funeste destin de La Motte

S’il fallut un jour insuffler en un individu, en un seul, la bêtise et l’idiotie, sûr que sur l’île toute entière l’on aurait choisi Alexandre du Bosquet-Vert. Eugénie, pourtant mère déjà trois fois, eu tant de mal à mettre au monde son poupon qu’on entendit le cri de sa délivrance de Belmer Korp à Arlong Parc. L’enfant, trahissant l’opulence dans laquelle la famille se mouvait, était gras et vigoureux. Peser ses cinq livres en naissant méritait bien un sobriquet. Dès lors Alexandre fut surnommé La Motte. Mais, si beurre fond comme neige au soleil, Alexandre, lui, s’endurcissait d’année en année.

Il devint bien vite comme ces capitaines de frégates de la marine, suffisant, dédaigneux, et persuadé de sa supériorité. Il n’eut qu’un seul comparse et non ami, l’amitié ne pouvant se résumer à la fidélité et la soumission. L’infortuné se prénommait Gaston et était le fils d’un riche propriétaire voisin. Les deux enfants terribles prirent très tôt l’habitude d’importuner tout le village. Ce qui était, dans leur prime jeunesse, des blagues de très mauvais gout devint très rapidement quelque chose de plus malicieux. Ces deux êtres vulgaires devinrent violents et dangereux. Profitant de l’asservissement de Gaston et de sa force physique, La Motte était devenu la terreur de l’endroit. Ayant atteint la vingtaine, il rançonnait déjà les commerçants, frappait gratuitement quiconque osait croiser son regard et parfois même celui qui ne le croisait pas du tout. Gaston ne pouvant plus se résoudre à de pareilles démonstrations de violence se désolidarisa de la Motte. Cela provoqua des accès de rage formidables de la part de La Motte qui devenait de jours en jours un Tyran de première catégorie.

C’est à cette période que Benjamin Landstorm accosta non loin de Cocoyashi. Il venait de quitter le service d’un navire de frères de la côte qui était dans le négoce de tabac. Après plusieurs mois en mer, il décida donc d’opter pour une retraite de quelques jours. Il faut dire qu’il appréciait particulièrement les agrumes produits sur l’île. Le Landstorm les aimait d’autant plus que le scorbut fuie ces soleils orange à toute allure. Comme d’accoutumée, il se rendit donc au premier tripot du coin.

- Le Landstorm !
- En personne ! Rhum et mandarines !

Et le solide marin balança quelques pièces d’or au visage du tavernier. Celui-ci les attrapa au vol et s’empressa d’apporter sa commande à son client. Benjamin avait prit place devant la table la plus proche de la fenêtre, là où il pouvait voir la mer. Son attention fut détournée lorsque la bouteille de rhum rencontra le bois de sa table, puis vint le tour d’un large bol en céramique agrémenté de trois fruits bien avancés.

- Mordiou ! Pas capable de vendre du frais alors que cette île regorge de mandarines ? S’rez pas devenu un peu pingre tavernier !? Ou c’est le nouveau traitement réservé aux frères de la côte ?

Le tavernier afficha une mine dépitée et commença à frapper ses index l’un contre l’autre.
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- C’est à dire que l’approvisionnement en orange de Belmer Korp est retardé depuis quelques jours.
- Par quel miracle a-t-on du mal à s’approvisionner lorsqu’on n’est pas à trois lieues de distance !? F’rez de très mauvais marins vous autres, foi de Landstorm…
- C’est qu’un drame s’est déroulé il y a peu…
- PALSAMBLEU ! Vas-tu donc cesser de tourner autour du grand-mât et en venir aux faits ?
- C’est que… Je ne peux…
- Sacrédiou, les manières de ces gens de la terre…
- Il y a histoire d’assassinat !

Landstorm recracha presque son rhum et frappa du poing sur la table.

- Parleras-tu à la fin !?

Mais malgré les pressions incessantes de Benjamin, le tavernier ne desserra pas les dents d’un pouce. Il se renferma plutôt progressivement dans un mutisme bien funeste. Repoussant le bol de la main, le marin se leva et prit la direction de la sortie. Avant de refermer la porte, il lança tout de même un dernier regard impérieux à son hôte.

- M’en vais découvrir le fin fond de cette histoire ! Et foi de Landstorm, il y plutôt intérêt à ce que je trouve des mandarines premier choix sur ma tablée la prochaine fois que je repasse les épaules par cet embrasement de porte !

Et l’on vit ainsi sortir le bougon marin qui galopa vers le village. Là-bas, le silence semblait d’or et il avait peine à reconnaître ces villageois qu’il n’avait pourtant pas revu que depuis quelques années. De sa main large comme une chaloupe, Le Landstorm attrapa au collet un de ces jeunes godelureaux qui galopent toujours l’on ne sait où. Soulevé de terre, le jeune homme ballota bien quelques instants les pieds avant de se raidir devant le regard furibond d’un Benjamin en grande forme.

- Msieur !?
- Y’a pas de m’sieur qui tienne. SACROUBOUDIOU ! Le Landstorm pour toi !

Le garçon faisait les yeux ronds à cette force de la nature qui tranchait tant d’avec la nature calme de la majorité des hommes de l’endroit. Il fut secoué une nouvelle fois, signe que le marin espérait bien le voir rectifier sa formule.

- Le Landstorm !

Le marin reposa le gamin avec une forme de délicatesse.

- Bien gamin ! Maintenant que j’ai ton attention ! Si tu racontais à ce vieux Landstorm ce que tu sais sur cette histoire d’assassinat ? Hm ? Hmmm ?

Le teint du mousse passa couleur voile et il s’élança vers les champs sans demander son reste. Resté sur place, se frottant la barbe, médusé, Landstorm se retourna pour chercher un autre individu à portée de pogne. Mais tous semblaient s’être volatisés en l’espace d’un instant.

- CAP DE DIOU ! Auraient-ils vu un lapin ??
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Et le marin soudainement fiévreux jeta une œillade aux alentours. Ne voyant rien, il souffla un bon coup et prit la direction de Belmer Korp, bien décidé à remonter l’histoire à sa source. Il lui fallut quelques dizaines de minutes pour rallier l’endroit. Sur la route, il croisa le chemin d’un certain La Motte. Le gros gaillard fut interpellé comme tous les autres avant lui.

- Ola mon gaillard !
- Hm ?
- Ah bien ! En v’la enfin un qui prend pas ses jambes à son cou !
- Pas vraiment de raison de s’enfuir…
- Bien, bien !

Pour une fois qu’il tombait sur un gars suffisamment solide pour faire la causette, Benjamin se fit caressant au possible.

- L’aurait pas entendu parler d’une histoire d’assassinat le villageois ?
- Qui t’as parlé de ça l’étranger ? Pis t’es qui d’abord ?
- J’ai eu vent de l’histoire. Et j’suis le Landstorm, pour sûr mon gars !
- Connais pas.
- Ah… Bon… Alors cette histoire d’assassinat ?
- Non j’ai rien entendu, et tu ferais mieux de pas t’mêler de ça l’étranger. Les curieux on les pend ici !

Et sans attendre, La Motte reprit sa route non sans balancer un glaviot sur la chaussée.

- BARF ! Sont soit couillons, soit effrontés les natifs sur cette île ! A bien changé ici !

Et Landstorm reprit sa route. Il parvint chez les vendeurs de fruit où il trouva une vieille dame aux joues humides et aux yeux rougis.

- J’sais bien que je suis pas bien beau M’dame, y’a pas pour autant lieu de pleurer.

La vieille laissa apparaître quelques dents qu’elle avait encore belles.

- Benjamin Landstorm !
- Lui-même ! Enfin quelqu’un qui me reconnaît dans ce patelin !
- Oui, oui, je t’ai connu tu n’avais pas encore de poils aux fesses.
- Moi qui croyais en avoir toujours eu…

Benjamin attrapa une mandarine juchée sur un arbre et commença à la décortiquer à l’aide d’un couteau de voile particulièrement tranchant.

- Paraît qu’on a plus de mandarines au village. Pourtant j’en vois des pleines caisses.

Et il croqua dans la mandarine qui rendit un jus sucré.

- M’ont l’air bien bonnes ces mandarines pour pourrir ici.
- Ô, nous n’avons plus le goût de la vente.
- Rapport à l’assassinat ?

Benjamin venait d’y aller, comme on dit dans le milieu maritime « toutes voiles dehors ».
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La vielle fut surprise, manqua d’avoir un nouvel accès de larme, mais finit par causer.

- Oui. Nous avons été victime d’une réelle tragédie. Mais tu vas quand même payer cette mandarine que tu manges !

Benjamin s’exécuta et posa une pièce dans la paume de la vieille. Elle en vérifia la qualité en la mordant puis attrapa une petite photographie qu’elle avait usé à force de pleurer dessus et de la triturer en tous sens. Sur celle-ci se trouvait une jeune femme rousse, la vingtaine, les yeux rieurs, des tâches de rousseurs agrémentant son joli visage. Elle souriait à pleines dents tout en tenant montrant au photographe des mandarines magnifiques.

- Beau brin de fille, foi de Landstorm !
- Ma petite fille.
- Bon racontez-moi cette histoire…

Et les heures défilèrent devant le porche de la Belmer Korp. La vieille vida littéralement son sac.

Elle vint à parler de La Motte, de son tempérament bagarreur et de son vice pour l’extorsion. Elle raconta comment il était passé d’une gamin insupportable à un homme terrible pour les locaux. La Motte était devenu si dangereux qu’il était parvenu à soumettre la majorité des coopératives de l’île. Mais pas la Belmer Korp. La raison en était simple, la jeune fille de la photo, Margaret, n’était pas du genre à se faire dicter son comportement. Elle avait donc refusé de céder aux menaces de La Motte. Pire, elle avait même décidé un jour, n’y tenant plus, de se rendre chez lui pour le sommer d’arrêter ses exactions.

C’est ainsi que contre l’avis de sa grand-mère, Margaret était partie lors d’un après-midi ensoleillé. La jeune fille n’est jamais revenue de cette escapade. Elle fut finalement retrouvée, quelques jours plus tard, dans un petit lac qui bordait la propriété de la famille de La Motte. Tous savaient pertinemment ce qu’il en était, mais personne n’osait se dresser devant le jeune homme.

Benjamin écoutait avec attention. Plus le récit avançait et plus il devenait grave. Lorsqu’il apprit le décès de la petite, il en cassa sa pipe qu’il jeta au loin dans un juron dont il a le secret. La vieille continua à parler de sa petite fille pendant de nombreuses heures et jamais elle ne fut interrompue par le marin. La nuit fut fort avancée lorsqu’elle se tourna finalement vers le solide frère de la côte.

- Voilà pourquoi nous n’avons plus le cœur à la production…
- Très bien…

Et il se leva, sans piper mot. Alors qu’il allait sortir de la propriété, la vieille dame le héla.

- Où allez-vous donc !?
- J’ai besoin de voir la mer après une histoire pareille !

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Plusieurs jours s’écoulèrent sans que personne n’entende parler de Benjamin. Beaucoup pensèrent que le gaillard avait fuit, lui qui le pouvait. La vieille aussi n’avait plus de nouvelles. Pourtant, un jour, le jeune godelureau de notre histoire arriva en âge devant la Belmer Korp où il trouva la vieille grand-mère là où l’avait trouvé Landstorm.

- MAMIE ! MAMIE !
- Qui a-t-il voyons ? Je ne suis pas totalement sourde, inutile de hurler !

Le jeune homme raconta alors à la vieille l’histoire la plus heureuse qu’elle ait entendu depuis le décès de sa fille. Alors que La Motte venait de faire sa tournée de rançons de la semaine, il reprit la route de la propriété de sa famille. Mais lorsque le lendemain, personne ne l’avait vu revenir chez lui, son père commença à s’inquiéter. Il faut dire que La Motte était du genre à ne pas louper un repas, surtout après s’être copieusement rempli les poches avec l’argent des villageois.

Une battue fut donc organisée. On retrouva finalement La Motte près du petit lac où l’infortunée Margaret s’était éteinte. Il était raide mort, les yeux écarquillés. On tenta bien d’appeler le médecin mais il ne put que constater que le gaillard avait rendu tout son sang. Sa gorge avait été tranchée nette et l’on avait retrouvé, planté dans son torse, un couteau de voile au manche immaculé.

- Un couteau de voile dis-tu ?
- Oui mamie ! Enfoncé jusqu’à la garde !
- Ce bougre d’âne… Murmura-t-elle souriante.
- Quoi ?
- Rien, rien… Finalement justice est rendue…

La vieille pleura toujours sa tendre Margaret mais elle reprit le commerce. Une année défila, puis une seconde. Le village avait reprit vie, tous semblaient finalement revigorés par la disparition de la Motte.

Et finalement, un jour, la massive silhouette de Benjamin se dessina à l’entrée de la Belmer Korp. La vieille l’accueillit en silence, affairée qu’elle était à tricoter une sorte d’écharpe. Landstorm s’installa à ses côtés et alluma sa pipe.

La vieille fut la première à rompre le silence, après plusieurs minutes.

- Y’a des mandarines pour toi dans ce bol.
- Ah, bien !

Et comme il l’avait fait il y a deux ans, benjamin mit la main à la poche. Il en ressortir une pièce qu’il tendit à la vieille. Elle lui adressa alors un regard malicieux et posa délicatement sa main sur la sienne.

- Allons bon. Tu sais bien que pour toi c’est gratuit…
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