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L'Émérite avait fait bonne route depuis Refuge jusqu'à son lieu d'affectation, le Quartier Général. Les matelots n'avaient pu que difficilement effectué des rondes aussi ils avaient pris leur temps pour rentrer à la maison. La Division Sozen, qui avait été nommée ainsi en leur absence, ne pouvait être qu'épuisée après une telle mission. Une cinquantaine des leurs avaient trépassés et le même nombre avaient été blessés pendant la bataille. Ces pertes avaient affecté le moral des soldats qui rentrèrent dans la base en traînant des pieds, le lieutenant-colonel à leur tête. Tenko portait tout le poids de cet échec sur ses épaules. Il le devait, sans quoi il ne pourrait diriger ses hommes efficacement la fois suivante. Mais il savait au fond de lui qu'il n'aurait pu prédire le plan d'Henry Vonoghan, qui s'était révélé particulièrement vicieux dans cette affaire. Il était la cause principale des décès dont l'administration se chargeait. Ses attaques avaient visé les troupes et anéanti des escouades entières. Ceux qui avaient survécu avaient été particulièrement marqués. Mais ils n'avaient pas démissionné, ils avaient retroussé leurs manches et s'étaient préparés à la suite, quoi qu'elle fusse. Le gratin de l'endroit s'était réuni pour observer les bras cassés qui débarquaient. En tête de file, le sous-amiral Niromoto observait les mouettes qui s'activaient de transporter ceux qui étaient toujours en convalescence vers l'infirmerie. Juste à côté de lui, un homme de haute stature se tenait droit, le regard fixé sur Tenko. Cet homme, le jeune soldat l'avait rencontré bien des années plus tôt, sur Kage Berg. Il était venu le féliciter pour sa dévotion à la cause et avait prédit sa montée en grade. Il s'était ensuite retiré en laissant entendre qu'il reviendrait. Ce temps était à présent venu et le lieutenant-colonel était loin de s'en douter. Portant une lourde caisse remplie d'armes endommagée, il aidait ses hommes à décharger la cargaison. Il se refusait à rester passif malgré son grade, c'était selon lui un devoir. Néanmoins il fut bien obliger de laisser ses subordonnés gérer la situation quand un lieutenant vint le chercher.

- Lieutenant-colonel Sozen! Le sous-amiral Niromoto m'a chargé de vous dire que quelqu'un vous attend dans votre bureau!
- Merci lieutenant, dites à cette personne que je vais finir ça avant de me déplacer.
- Le sous-amiral a précisé que c'était urgent.
- Très bien...

Tenko réprima un soupir, posa sa charge et emboîta le pas à l'officier subalterne qui tenait à l'escorter jusqu'au bureau. La situation était vraiment étrange mais le jeune homme ne pouvait dire ce qu'il se passait, l'hypothèse la plus probable étant qu'il n'aurait pas à attendre avant de se prendre un savon de la part d'un hypothétique supérieur. Il s'en fichait complètement. Les reproches n'étaient rien comparé au deuil que la division portait actuellement. Ils traversèrent le port fortifié et le bloc central avant de bifurquer vers l'aile ouest de la base. C'était là-bas que lui et ses hommes avaient leurs quartiers et donc naturellement leurs bureaux. Ils mirent environ dix minutes à parcourir la distance qui les séparait de la pièce de travail du lieutenant-colonel. Le lieutenant anonyme laissa le jeune homme à l'entrée du bâtiment et retourna à ses occupations principales. L'officier supérieur termina le trajet seul et passa enfin la porte. Un grand homme vêtu d'un manteau impeccable qui affichait le grade de contre-amiral se tenait debout devant le bureau du jeune homme, tournant le dos à l'entrée. Il portait une sorte de béret et des cheveux longs qui tombaient au milieu de son dos. Il pivota quand le jeune militaire eut passé le seuil. Tenko eut alors l'occasion de reconnaître celui qui avait été le lieutenant-colonel Poronas et qui avait visiblement pris du grade depuis 1622. L'officier général invita le jeune homme à prendre place sur son siège habituel. Une fois qu'ils furent tout deux assis, il brisa le silence.

- Je crois que vous m'avez reconnu, lieutenant-colonel.
- Je n'oublie que rarement les visages, contre-amiral.

L'officier général lui offrit un léger sourire avant de continuer. Il semblait tout à fait à l'aise, ce qui n'était pas le cas de son interlocuteur. Athanos Poronas étaient le genre d'hommes mystérieux qui entraînaient toujours des problèmes derrière eux pour ceux qui ne suivaient pas leurs consignes. C'était probablement la dernière personne que Tenko eut souhaité voir dans son bureau ce matin-là.

- Très bien. Je constate que j'avais vu juste, vous n'avez pas tarder à vous hisser à la place que j'occupais quand je vous ai rencontré.
- Disons que les circonstances m'ont poussé jusqu'ici.
- Il n'y a rien de mieux que l'expérience pour faire avancer un homme, Sozen. En parlant de ça, avez-vous une idée de ce qui m'emmène ici?

Le lieutenant-colonel n'en avait aucune idée. L'angoisse commença à monter dans son esprit malgré le ton avenant de l'officier qui lui faisait face. Tenko ne pouvait pas imaginer autre chose qu'une punition après l'échec cuisant qu'avait été l'invasion de Refuge. La sanction risquait d'être lourde, aussi il lui fallait prendre ses responsabilités.

- Je n'en ai aucune idée pour être honnête. Toutes mes pensées sont encore tournées vers l'échec de notre mission et je ne pense à rien d'autre qu'une punition actuellement.
- Arrêtez de vous blâmer, ça en deviendrait presque gênant. Comme si vous cherchiez la rédemption.

Le ton avait été sec et les propos avaient été durs. Mais Athanos Poronas savait que c'était ce que son jeune interlocuteur avait besoin d'entendre. Il avait parcouru son dossier et n'avait pu s'empêcher de remarquer que les docteurs qui l'avaient soigné après ses différentes blessures avaient tous remarqué cette culpabilité qui contrastait pourtant avec ses succès. Les résultats n'étaient pas parfaits mais toutes les batailles comptent leur nombres de pertes. C'était quelque chose que ce jeune officier devait comprendre avant de finir à la rue, déprimé et brisé par le remord.

- Je suis là pour vous donner les moyens de vous émanciper de cette culpabilité que vous portez. Depuis ma promotion, je parcours les mers pour former des officiers dans votre genre, ceux qui ont les moyens de progresser plus haut encore. Considérez ça comme un cadeau de bienvenue dans le monde des responsables.

De toutes les choses auxquelles il avait pu s'attendre, la perspective d'une formation n'en faisait pas partie. Il dévisagea le contre-amiral un petit moment avant de pouvoir lui donner une réponse. Il devait déjà encaisser les propos de son supérieur qui lui reprochait implicitement son état d'esprit. Était-ce mauvais de porter autant de poids sur ses épaules? Très certainement. Alors pourquoi s'obstinait-il, de quoi avait-il peur en laissant ce poids s'évacuer? De ne plus rien ressentir. La vie du jeune homme était plutôt vide, il ne vivait que pour son travail et c'était la seule chose qui occupait son esprit, en toutes circonstances. Ce n'était probablement pas sain. Il chassa ces pensées de son esprit dans l'optique de les approfondir plus tard. Pour le moment, il devait se concentrer sur ce que Poronas pouvait lui apporter.

- Ce serait un honneur. Mais en quoi est-ce que cela consisterait?

Le contre-amiral ne se fit pas attendre. Il se leva et disparut soudain du champ de vision du lieutenant-colonel qui écarquilla les yeux comme jamais avant de sentir le canon d'un pistolet appuyé contre son crâne. Un soupir près de son oreille lui révéla ce qui venait de se passer.

- Il est temps pour vous d'apprendre le Rokushiki.
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L'officier se retira après ses propos, donnant rendez-vous au jeune homme dans la salle d'entraînement C du complexe, le lendemain. Tenko passa sa soirée puis sa nuit à réfléchir sur son état d'esprit. Cela faisait un moment déjà qu'il sentait que quelque chose clochait mais il n'avait jamais mis les mots dessus. Son obstination pour le travail et pour la défense de ses idéaux occupaient tellement son esprit que celui-ci n'avait plus le temps de souffler. Depuis quand avait-il pu faire une pause? A quand remontaient ses derniers congés? En avait-il jamais pris depuis son entrée dans la Marine? Il ne lui semblait pas que ce soit le cas. Il se posa la question du pourquoi. Il n'avait rien d'autre dans la vie en dehors de sa profession. Pas de famille, pas de foyer. Rien à quoi se rattacher en dehors de son statut de gardien de la paix.  Alors il n'avait jamais le temps de souffler, de se préoccuper d'autre chose. Il se promit d'essayer de trouver quelque chose en dehors de sa vie professionnelle. Sans quoi il finirai par craquer. Car il ne se focaliserai que sur ses échecs pour les corriger, et comme il ne viendrait jamais à bout de tous, il en perdrai la raison. Il ne voulais pas d'un avenir aussi gris, personne ne pouvait souhaiter quelque chose comme cela. Alors il décida de changer, petit à petit, sa manière d'aborder le monde. La nuit passa et il n'eut pas le sommeil agité, contrairement à d'autres soirs. Il se réveilla en bonne forme le lendemain et s'apprêta pour rejoindre Athanos Poronas. Il ne pouvait s'empêcher de se questionner sur ce qu'il allait bien pouvoir apprendre mais aucune idée ne lui venait. Il se dirigea vers la cantine déjà ouverte et mangea deux tartines avant de reprendre la route de la salle d'entraînement. Le contre-amiral se trouvait déjà à l'attendre. Il avait enfilé un uniforme classique et avait laissé son manteau d'officier général de côté. Il hocha la tête pour saluer le lieutenant-colonel qui se prépara rapidement. Tenko s'approcha enfin de son supérieur qui prît la parole.

- Bonjour. Vous semblez être en forme.
- C'est le cas.
- Bien, nous allons pouvoir commencer dans ce cas.

Il prit une grande inspiration et demanda au jeune homme de le frapper de toutes ses forces. La réticence de la jeune mouette laissa le temps au contre-amiral de déployer sa technique. Le poing du marin se décrocha de son corps avant d'aller percuter le torse de l'officier général, en plein dans le plexus. Un léger craquement se fit entendre et Tenko passa les cinq minutes qui suivirent à masser machinalement les jointures de ses doigts. Le corps de Poronas s'était durci comme de l'acier en un seul instant, empêchant le coup de son opposant de faire de quelconques dégâts. L'explication ne tarda pas à suivre.

- Je viens de vous faire la démonstration d'un Tekkaï, une des six techniques du Rokushiki. Elle permet, en contractant tout les muscles de son corps en même temps, d'amplifier les capacités défensives de ce dernier.
- C'est impressionant...
- Maintenant, c'est à votre tour. Développez votre Tekkaï pour arrêter mes coups. Vous aurez droit à trois tentatives par jour face à moi.

Avant même que le jeune homme n'ait le temps d'objecter, le contre-amiral avait lancé sa paume en avant, visant un poing entre l'épaule et le cœur de son disciple. Le lieutenant-colonel ferma les yeux et se crispa. Mais il n'avait aucune chance de parvenir à quoi que ce soit de cette manière. Il fut projeté au travers de la salle et s'écrasa contre les amortis fixés au mur pour ce genre d'entraînements. Il se redressa et commença à retourner vers son professeur. Mais celui-ci, usant de la technique qu'il avait utilisé la veille dans le bureau de Tenko, se rapprocha à nouveau et relança son attaque. Cette fois-ci, le jeune marin contracta les muscles de son torse mais rien ne se passa vraiment. Il fut jeté contre la paroi une fois de plus. Quelques minutes plus tard, la troisième tentative échouait à nouveau.

- Vous êtes libre d'agir à votre guise pour aujourd'hui, Tenko. Vous permettez que je vous appelle comme ça?
- Bien entendu, monsieur.
- Vous pouvez aussi m'appeler Poe.

Il gratifia le jeune officier d'un sourire avant de quitter la pièce en jetant son manteau par dessus ses épaules. Il n'avait pas une trace de transpiration dans son corps et ne semblait pas même essoufflé. Tenko massa son épaule et sortît, allant vaquer à ses occupations. Cependant, il ne pût s’empêcher pendant la journée à essayer de contracter l’entièreté de son corps. Il lui fallait généralement une dizaine de secondes avant de sentir que la plupart de ses muscles s'étaient contractés. C'était un délai trop long, qui devait se réduire à celui d'une fraction de seconde. Il perpétua ses efforts, attirant des regards étranges alors qu'il s'arrêtait parfois de bouger pendant un court instant. Ses hommes le raillèrent et il ne pu s'empêcher de rire avec eux. Il passa une journée agréable, ce qui le changeait de la morosité qui avait régné ces derniers temps. Il se coucha le soir et s'endormit presque aussitôt. La matinée suivante, il se retrouva une fois de plus impuissants devant les coups de son adversaire, même s'il contractait son corps bien plus vite. Il continua son entraînement comme la veille et se retrouva face au contre-amiral le troisième matin plus confiant que les deux précédents jours. Quand les deux hommes se placèrent dans la pièce, une tension s'installa. Le premier se lança sur l'autre qui banda les muscles de son torse. Poe lança son coup de paume qui toucha le buste de Tenko. Il ne ressentit aucune douleur, seulement une pression qui l'envoya soudain valser. Le contre-amiral s'arrêta quelques instants.

- On dirait que ça commence à rentrer. Mais tant que votre corps entier n'est pas durci, la technique demeure peu efficace.
- Oui, je comprends...

Malgré sa volonté, le jeune homme ne put dépasser le stade qu'il avait atteint et dut reporter un éventuel succès au lendemain. Mais même à ce moment-là, les deux premières tentatives échouèrent. Fatigué, à bout de nerfs à force d'échouer, le lieutenant-colonel mit toute sa rage dans sa protection au moment du quatrième assaut. La main du contre-amiral se figea contre le jeune-homme qui ne recula pas d'un cil. Les yeux grands ouverts, il relâcha sa concentration au moment où le second coup arrivait. Une fois de plus il fut propulsé. Mais cette fois-ci il avait le sourire en se relevant.

- On dirait que tu as finalement réussi à le maîtriser... Mais maintenant il va falloir le maintenir!
- Continuons alors!
- Non, tu n'es pas prêt. Tu le seras demain si tout se passe bien.

Tenko passa le reste de la journée à ronger son frein. La nuit arrivée, il s'entraîna dans sa chambre pour atteindre l'état qu'il avait déclenché le matin. Étrangement, depuis qu'il avait accompli son premier développement de la protection, la chose était devenue presque naturelle. Il ne lui fallait qu'une seconde pour passer d'un état de relâchement à son état de contraction optimal. Il était ensuite capable de le maintenir pendant une vingtaine de secondes environ. Quand le matin pointa le bout de son nez, les deux hommes se trouvaient déjà dans la salle de combat. Athanos se tenait face au jeune soldat qui se préparait à encaisser les attaques de son supérieur. Le contre-amiral disparut de la vision du jeune officier et quand il se matérialisa de nouveau devant lui, il lança une demi-douzaine de coups qui firent à peine reculer le jeune homme qui encaissait sans broncher. Le dernier en revanche, brisa la défense d'acier et le lieutenant-colonel se retrouva sur ses genoux à se tenir la poitrine.

- Ne t'inquiète pas, le dernier était à pleine puissance. Tu ne pouvais pas le bloquer avec ta faible expérience de la technique. On va pouvoir passer à la suite.
- Maintenant?
- La seconde est la plus complexe, Tenko. Relève toi!
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Le jeune homme s'exécuta et se remit sur ses jambes. Son souffle n'était toujours pas rétabli après l'attaque qui avait précédé mais il semblait qu'il devrait s'en accommoder. Poe continua ses explications après s'être écarté vers l'arrière avec la fameuse technique. Tenko ne comprenait toujours pas comment son supérieur pouvait atteindre une telle vitesse de déplacement.

- Cette technique est appelée Soru. C'est la base des techniques de déplacement au sein du Rokushiki. Les membres du Cipher Pol la maîtrisent presque tous. Et pour l'apprendre, il n'y a rien de mieux que de comprendre par soi-même comment elle fonctionne. Tu as dû la voir à l'oeuvre seulement une demi-douzaine de fois depuis le début de la semaine. A partir de demain, je me déplacerai en continu devant toi pendant que tu maintiendra ton Tekkai pour te concentrer sur mes mouvements. Compris?

Le lieutenant-colonel acquiesça en silence et sortit de la pièce comme le lui indiquait le contre-amiral. Il passa la journée à essayer de décrypter les mouvements successifs qui emmenaient à cette sorte de déplacement véloce. Mais rien n'y faisait. Il avait compris qu'il ne pourrait disséquer la séquence qu'en se trouvant devant. C'est ainsi ce qu'il s'évertua à faire pendant les jours qui suivirent. L'entraînement ne sembla pas si différent de ce qu'il avait été. Le jeune soldat maintenait sa protection tandis que son supérieur usait de sa technique pour se déplacer vers lui et l'attaquer ou se retirer. Mais malgré tout les efforts qu'il y mettait, Tenko ne parvenait pas à percer les secrets du Soru. Il se focalisait sur le corps entier de Poe pour ne rien manquer, mais visiblement sa tactique comportait un défaut qui, par voie de conséquence, faussait son analyse. Si les trois sessions ne lui apprirent rien, il ne se rendait pas compte qu'il assimilait petit à petit le mouvement à force de le voir répété. Son regard s'affinait et il captait de plus en plus de mouvements rapides. Jusqu'à ce que le quatrième jour lui offre la révélation. Comme à leur habitude, les deux hommes s'étaient réunis dans la salle d'entraînement au plus tôt et avaient commencé sans tarder.

- J'ai compris!

Le jeune homme encaissa le coup de son adversaire en s'exclamant de la sorte. Surpris, Poe ne comprit pas de quoi parlait son disciple quand il l'entendit exprimer sa joie. Puis il réalisa qu'il ne pouvait parler que d'une seule chose.

- Alors, qu'as-tu compris?
- Le Soru, tu l'effectue en frappant dix fois le sol avec ton pied à une vitesse déroutante, ce qui te propulse si vite qu'on croirait à une téléportation.

Le contre-amiral ne put s'empêcher de sourire. S'il avait décidé de laisser le jeune découvrir par lui-même le procédé, c'était pour deux raisons bien précise. La première, c'était pour qu'il réalise que même une chose aussi anodine que battre le sol pouvait engendrer ce genre de techniques. S'il lui avait annoncé de but en blanc, il serait parti avec une opinion sceptique de la chose. La deuxième raison, c'était l'imprégnation de son esprit de la méthode qui sous-tendais le fonctionnement du déplacement. Après l'avoir vu être exécuté des dizaines de fois devant ses yeux, et même sans qu'il s'en rende compte, il avait acquis tout ce dont il avait besoin pour mettre à exécution la technique. Il expliqua alors les nouvelles conditions de l'entraînement.

- Maintenant je veux que tu continues à te concentrer sur mes mouvements pendant l'entraînement. Tu maintiens le Tekkaï comme maintenant, pour te protéger, et tu ne t'essaye pas au Soru.

Le jeune homme fut perturbé par cette condition qui ne lui semblait pas vraiment logique. Pourquoi n'aurait-il pas la possibilité de s'exercer à cette technique dont il comprenait maintenant le fonctionnement? Il n'hésita pas à demander la raison à celui qui était autant un maître qu'un ami pour lui à présent. La réponse ne tarda pas.

- Je veux que tu réussisse à ta première tentative en combat. Tu pourras t'entraîner en dehors de nos sessions à le maîtriser, mais tu devras l'observer jusqu'à être capable de l'utiliser aussi bien que moi. D'accord?
- Compris.

Ils se séparèrent après cela et le jeune homme rejoignit son bureau après cela. Il était censé remplir de la paperasse, lire les rapports de ses subordonnés et effectuer les tâches classiques auxquelles étaient confrontés les marins de la Régulière. La motivation ordinairement présente pour ce genre de choses avait été complètement battue en brèche par l'excitation que lui provoquait la sensation de toucher au but. Il passa son après-midi à essayer de dupliquer ce qu'il avait vu. Mais chaque fois qu'il se lançait, ses coups étaient soit trop lents, soit trop faibles. Au bout de quelques heures, il avait fait des progrès mais ne pouvait se déplacer rapidement que sur une portée de trois mètres. Il décida de rejoindre la salle d'entraînement mais des nouvelles recrues s'y entraînaient ardemment. Il rejoignit la session et forma les jeunes mouettes en aidant ses subordonnés. La matinée suivante, la routine reprit avec un nouvel entraînement. Tenko était maintenant capable d’apercevoir les mouvements de son professeur et il passa le temps en les décortiquant minutieusement. Mais il savait qu'il n'était pas encore prêt à se lancer.

- Ta capacité d'apprentissage est plutôt impressionnante. Cela peut prendre des mois entiers pour certaines personnes mais il ne t'aura pas fallu plus d'une semaine et demi pour comprendre les rouages de ces techniques.
- Disons que je donne mon maximum. J'ai toujours eu cette disposition d'esprit, de me mettre à la tâche avec une ferveur et une volonté inégalable. Mais ça m'a mené au surmenage donc est-ce une si bonne chose?
[color=#00008B]- Tu dois trouver le juste milieu, c'est tout. Même si tu n'en a aucune idée, tu disposes d'une grande empathie. Et c'est pour ça que tu absorbe toute la douleur psychique de tes hommes. Et tu vas devoir trouver un moyen d'y remédier.
- Oui, j'imagine...

Il avaient eu cette discussion alors qu'un deuxième jour avait passé depuis que le soldat avait compris le principe du Soru. Durant ces quelques jours d'entraînement, son corps avait repris les commandes et ça lui avait permis de complètement oxygéner son esprit. Assez spontanément, il avait procédé à une introspection quotidienne, s'efforçant de chasser la morosité qui occupait son esprit. Assurément, Athanos avait contribué à changer la mentalité du jeune homme. Et il continua de travailler dur pour le remercier comme il se devait de le faire. Une autre session pris place et les deux hommes se placèrent face à face. Ce jour-là, des cernes courraient sous les yeux de Tenko, qui avait un air de confiance sur son visage. Poe se dématérialisa et reparut derrière le jeune homme qui avait fait volte-face. Il mima l'enclenchement du Tekkaï en positionnant ses bras comme il le faisait d'ordinaire... avant de frapper le sol si rapidement que le contre-amiral fut pris de court. C'était lui qui tournait maintenant le dos à son adversaire. Il fut projeté vers l'avant avant que la jeune mouette n'use à nouveau du Soru pour l'arrêter dans son élan. L'officier général avait accompli sa mission.
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