Durant ma vie de frère de la côte, j’ai toujours eu tendance à éviter les emmerdes. La mafia ça a jamais été mon truc : trop d’emmerdes. Puis j’ai toujours cru que les mecs qui participaient à ce genre de forfanteries finissaient au fond d’une baie, les chevilles accrochées à un parpaing. Non, la piraterie, la contrebande, ça a toujours été mon truc. Alors forcément je suis pas le plus heureux à me lancer à la recherche d’un informateur qui peut m’indiquer la position de Brixius. Ce bestioulet de Brixius qui pense avec ses nerfs qu’il a toujours a vif. Mais l’indication provenait de King Bradley, le chef de la pègre locale dont je m’étais fait un ami en jouant du gouvernail. Pendant ce temps cet infortuné baronnet était probablement perdu dans un égout à bouffer des rats entre deux assassinats.
PALSAMBLEU ! Il était encore temps de faire demi-tour, rejoindre le premier navire en partance en se faisant passer pour un marin que j’suis et VOILA ! Mais non ! Pas question d’abandonner Balthazar. Je dois admettre… Au fond de moi… Très au fond… Je l’aime bien ce violent porcin. Je pense pouvoir en faire un vrai marin ! S’il devient un jour un frère de la côte, un pur, on pourra dire que j’aurai abattu un vrai travail pour la fraternité ! En attendant ! Il fallait déjà remettre la main dessus.
On m’avait indiqué des ruelles peu empruntées par la marine de telle sorte que je sois en mesure de me déplacer en relative tranquillité. King Bradley m’avait aussi fait remarquer que Balthazar et moi, on était que de petites préoccupations sur l’échiquier Kikai No Shima. Que lui, Môsieur Bradley était probablement plus recherchés qu’eux qui, en définitive, restaient insignifiants. HMPF. Insignifiants. Quel cornichon ce Bradley !
- Hey !
Tiens… Ruelles tranquilles qu’il disait.
En me retournant je tombe sur deux malabars. La bonne chose c’est que ce ne sont pas des marines. La mauvaise c’est qu’ils n’ont pas l’air d’être là pour partager une bouteille de rhum. Souvent ma sale trogne de marin décourage les tire-laines mais pas là. Du coup mon menton se relève et je sens déjà l’odeur des emmerdes. Alors je mets la main rapidement sur mon sabre, histoire de faire bonne figure.
- Ta bourse et pas d’histoire.
BOUDIOU ! Y m’semblait bien pourtant que ce sabre dans ma main parlait pour moi. Mais les deux alguazils n’ont pas l’air de maitriser la notion de dangerosité. Ou ma parole, Landstorm, tu te ramollis pour ne même plus faire peur à deux terriens !
- Vous êtes aussi beaux que deux fonds d’geôles mais j’ai pas bien l’intention de donner.
- Des vieux pécores comme toi on en mange tous les jours.
- Zagahahahahaha !
Pas de Boyle
Je prends même pas la peine de répondre. Je plante mon sabre droit dans la gorge du premier imbécile et je saute sur le deuxième, et hop un canon de pistolet qui brille dans l’allée.
PAN !
Deux imbéciles de moins sur terre.
Je presse quand même le pas, il serait question de ne pas se faire remarquer davantage. Finalement, j’arrive face à ma destination principale. Un troquet de mauvaise qualité à en juger par la devanture à la peinture écaillée. Mais on distingue encore la calligraphie qui annonce le très alléchant « Bar du pendu », y’a pas à dire, les mecs de Kikai No Shima sont de vrais drôles. M’rappelle l’histoire de ce vieux Jacques La Déveine, qui avait parié un sac de berry et deux rations de rhum qu’il pouvait escalader n’importe quelle muraille, aussi hautes soient-elles. Du coup, le soir même, il s’était mis à exécution et avait effectivement escaladé une très grande muraille à Saint-Urea. Bon, en retombant de l’autre côté de la muraille, il a donné du fondement directement dans la trogne d’un garde du corps de la Dame de Pierre. Et voilà, pendu.
Je pousse la porte en faisant grincer les gonds et j’repense encore à ce sacré Jacques.
La salle est proprette pour un bar situé dans un pareil coupe-gorge. Y’a pas plus de quatre gaillards en incluant le tenancier. On lève à peine la tête pour m’dévisager, j’aime bien, ça sent la camaraderie. Arrivé à hauteur du tenancier il me lève un œil intrigué. Il s’évertue à rendre un verre sa transparence mais d’toute évidence la lumière n’y traversera plus jamais. Sans cérémonie il m’verse un verre de rhum dans ce même verre dégueulasse. Je m’enfile le tord-boyau sans moufter.
- Pas trop mal ce breuvage.
Tu parles ! J’ai goûté du meilleur tafia sur le navire de Bonnet et il le coupait à la pisse de rat. Un sacré farceur ce Bonnet. On l’a pendu aussi lui tiens’…
- La petite sœur ?
- Et ma foi !
Je m’enfile le deuxième, l’avantage c’est qu’avec ça je suis sûr de m’être purgé de toutes les saloperies que j’ai pu respirer dans les égouts de Kikai lors de mon évasion. Puis il est question de faire bonne figure, je suis là pour des informations. En parlant d’figure, ce con de tenancier a la moitié de la face ouverte. La plaie est encore vive et il semblerait qu’il ait appliqué une sorte de pommade verdâtre.
- Il manque un peu de moelleux, ça doit être un coupage. Mais, il est tonique, on l’sent descendre.
- Encore un ?
- Ouais, non, on va en laisser pour les autres.
Encore un verre de ce truc et j’aurai probablement plus besoin de m’inquiéter du sort de Brixius, ni de rien du tout. Je sens déjà que mes boyaux dansent.
- Je recherche quelqu’un. King Bradley m’a dit de venir ici.
- Si on parle de Bradley, je suis à ton service.
- J’recherche un ami. Balthazar Brixius. Parfois il se présente comme un baron. Un petit maigrelet avec les cheveux gras et noirs.
CAP DE DIOU ! Voilà que le tenancier change de couleur, plusieurs fois. J’imagine que la grande barre de fer qu’il vient de sortir de sous le comptoir indique qu’il n’est pas très ravi d’entendre parler de Brixius. Et comme d’habitude, cet écervelé a encore dû jouer du couteau dans ce bar au lieu de rester bien prostré dans un coin à attendre que la flibuste n’arrive en renfort !
- On se calme.
A priori, on ne pas se calmer puisque le tenancier à déjà donner un grand coup dans le vide et qu’il fait maintenant des moulinets au dessus de ça tête. Derrière moi les trois pauvres buveurs se lèvent aussi. Je dégaine encore une fois mon flingue, histoire de régler le problème du tenancier déjà.
CLIC ! Clic ! Clic !
PAR LA SAINTE GRAISSE DE CAMBESTAN ! J’ai oublié de recharger.
- C’est ce Brixius qui m’a ouvert la gueule, y’a pas deux heures !
- Si tu lui as offert ce rhum infâme, je me demande même pourquoi il ne t’a pas tout bonnement tranché la gorge !
C’est le moment de faire briller les sabres. Un grand coup de latte dans la cheville du premier client et il valse dans les airs avant de s’effondrer sur une table. Le tenancier s’approche et se prend ma lame sur l’autre joue, aussitôt il effectue un mouvement de recul. Pas l’temps de niaiser, j’ai déjà les deux autres clients sur le râble. Heureusement, le barman a décidé de rejoindre l’arrière de son comptoir, manifestement convaincu que ce combat est pas pour lui.
J’expédie le deuxième client d’un revers d’épée et il s’affaisse directement sur son premier collègue.
Quatrième, au dernier des bons !
Holà ! Holà…
A y regarder de plus prêt, ce mec là est d’une toute autre carrure. Du genre extrêmement balèze.
Il a la face si violacée qu’il doit pas être à sa première pinte. Mais ses bras sont encore plus épais que les miens, ce qui est souvent un signe qu’il faut bien fermer sa gueule. Il envoie une première droite que j’esquive. Mais SANGDIOU ! Rien que le vent occasionné par ce coup semble m’avoir étourdi !? C’est possible de frapper avec une telle force là ?
BOYLE, Dorikis xXx
- Ouais, j’sais, tu crois qu’c’est pas naturel.
Effectivement, vla qui bande un muscle et ça m’a l’air tout sauf naturel d’avoir un biceps si imposant. Il en abattrai du boulot sur un navire de frères de la côte un animal comme celui là !
Une deuxième droite vient me cueillir dans le bas ventre sans que je n’aie réellement l’occasion de réagir. Et Vlan crochet du droit en pleine mâchoire, rideau. Heureusement je n’ai pas encore perdu de chicots dans la bataille mais ça tient plus du miracle qu’autre chose. Le sol est bien poussiéreux lorsqu’on à la gueule dessus.
- Tu t’relèves où j’viens t’chercher ?
J’pensais pouvoir faire l’étourdi et rester sur le sol moi.
Aïe ! Aller debout Landstorm ! Si Brixius te voyait ! Puis pas question de crever ici, loin de cette mer que j’aimerais bien rejoindre. Foi de Benjamin, dès que je mets la main sur ce farfadet de malheur, on filoche directement vers le port et salut île de dégénérés !
J’ai toujours mon sabre en main alors j’ai l’occasion de balancer une belle attaque de taille, le genre fourbe qui passe toujours bien. Mais là le mec fait à peine un pas de côté pour esquiver la lame d’un cheveu. Et dernière droite, fermeture définitive, merci d’être venu.
****
Le gaillard du nom de Boyle se retrouve dans une taverne bien silencieuse. Le tenancier a quitté les lieux depuis longtemps. Il a donc l’opportunité de se verser un verre, en toute tranquillité. Son regard de pose sur Landstorm qui, assommé, a connu des jours meilleurs. Il faut dire que Boyle n’est pas le genre de garçon avec qui on joue longtemps. Mais il avait quand même cru déceler en Benjamin un adversaire susceptible de rivaliser avec lui. Finalement, c’était une grave erreur car le massif marin n’avait pas même l’étoffe d’un challenger, c’était juste une grosse barrique qui gesticulait avec une épée, comme tant d’autres.
Boyle prit tout de même le temps de rédiger une petite missive à l’attention de son ridicule adversaire. Entre deux lignes, il s’envoyait une lampée de rhum dont la moitié dégoulinait sur sa large poitrine.
Bradley m’a demandé de te donner la localisation de ton ami Brixius. Il est à l’hôtel de la Princesse, probablement a cherché des ennuis. Je pensais que t’étais un dur à cuire mon gars mais en fait tu vaux pas l’air que j’respire. T’as intérêt à travailler un peu ses bras si tu veux survivre sur Grand Line. En tous cas pour l’instant… Evite les emmerdes parce que j’connais pas grand monde plus faible que toi.
Sans rancune l’perdant’.
BOYLE
****
Merci le mal de crâne... Et c'est quoi ce papelard là ? Et il est où l'autre malade mental ?...
...
- L'hôtel de la princesse !? Cet imbécile est parti s'installer à l'hôtel !?
Aïe ma tête... "Boyle" hein... Pas assez fort hein ? Pour l'instant, pour l'instant...