West Blue.
Mer d'origine de l'Armure, revenir sur ces eaux pour marin d'eau douce aurait pu être insultant. Mais Izumi ne l'est pas, elle ne peut pas l'être son niveau ne lui permet de faire autre chose que de cravacher. De cravacher et de rattraper le temps perdu. Elle n'a pas fait voyage, machine arrière pour se faire arrêter sur Las Camp, au delà du message qu'une arrestation laisserait entendre c'est l'égo de la fausse blonde qui l'aveugle.
L'aveugle au point de lui faire prendre des risques, comme par exemple de débarquer sur cette île perdue dans l'Océan sans raison apparentes. Des batailles navales? Traquer la marine? Trop commun, et ce n'est pas la leçon du jour. Car, son plan elle est entrain de le concevoir et à aucun instant ils ne devront suivre les frégates de la marine. Les mouettes n'auront pas l'occasion de prendre la mer, ce qu'elle prépare c'est un massacre en ordre. C'est un message qu'elle veut envoyer aux différents camps en présence dans le coin. Elle n'est pas dupe, si la marine est à l'origine de la débâcle de ses alliés sur Las Camp c'est aussi parce que quelqu'un, ou quelque chose, un groupe a mit son nez dans les affaires des usuriers. Qui ce soit, les fauteurs de troubles ont réussit à mener la marine droit vers les véritables cerveaux de l'île. Alaba devait servir de bouclier et encaisser les attaques de la marine, mais la vérité c'est que Izumi aurait du massacrer les marines avant de partir de l'île.
Non, c'était impossible. Elle n'avait pas le niveau, ni les moyens de le faire. Son poing clouté percute la mâchoire du bûcheron trapu qui sort du rang. L'occasion est trop belle, elle l'attrape par le col et le traîne à l'écart. Les supplications de sa femme n'y feront rien, elle lève sa main droite. Ferme son poing, et entre les côtes du malheureux déploie sa vengeance et sa colère. Cela ne lui ressemble pas, de se laisser déborder par la haine, d'attaquer des civils innocents. Et pourtant, pourtant aujourd'hui à l'aube de son retour elle laisse ses émotions ressortirent. Plus besoin d'Armure pour affronter le monde, non elle a ce qui lui faut. Un équipage fiable, et une force qu'elle se doit d'acquérir au risque de se voir sacrifier sur l'autel de ses ambitions.
Claquant le briquet entre ses mains, elle allume la cigarette entre ses lèvres, tire par le bras le bûcheron qui depuis s'est évanouis. Elle le dépose devant sa femme, la réaction de cette dernière lui procure un plaisir malsain. Malsain mais terriblement gratifiant, de voir la colère et la peur danser dans les yeux de la pauvresse. Si on lui donnait un couteau, sauterait-elle sur l'occasion pour venger son époux? La peur l'empêcherait-elle de bouger? Visiblement elle n'hésiterait pas, car la gueuse déjà se lève malgré les menaces des pirates.
La capitaine lève néanmoins sa main droite, laissant la femme avancer vers elle. Tremblante comme une feuille à l'automne, l'épouse ne se débine pas pour autant. Puis alors qu'elle est à portée d'asséner une attaque à Izumi, elle s'effondre, elle s'effondre et fond en larmes. Alors le visage de la pirate change, et c'est le dégoût qui s'installe comme émotion principale.
Attirant la pleureuse à elle, Izumi l'attrape par les cheveux. La soulevant aisément, plongeant son regard dédaigneux dans ceux de la pauvresse qui continue de pleurer. De pleurer plutôt que de tenter le tout pour le tout, c'est ça la résignation? Se faire à l'idée que tout ce qu'on va tenter va échouer? D'accepter sagement mais surement son sort?
La gifle propulse la femme au sol, Izumi la surplombe et ne lui jette déjà plus aucun regard. Elle retourne auprès des siens jetant son mégot au sol. C'est décidé elles resteront ici un moment, le temps de se préparer. De se préparer à l'attaque massive qui aura lieu très prochainement. Un entraînement grandeur nature, avec de la chance une caravelle de la marine passera de quoi faire de l'exercice pratique après la théorie.
Elles passèrent à tabac la moitié des hommes de l'île, épargnant enfants et vieillards. Les femmes les plus aptes furent emmenés dans les quartiers de l'équipage, mais ces actions sans morale Izumi s'en moquait. Ses filles avaient quartiers libres, il fallait parfois déchaîner les pires vices pour obtenir la confiance et un dévouement hors du commun.
Ici et là
Le temps est une notion abstraite, il l'est encore plus quand vous perdez le compte des heures, des jours tant l'objectif vous demande concentration.
L'objectif du jour c'était de prendre cette foutue colline, au dessus du village. La partie hausse du bled, le quartier riche de l'île si on pouvait appeler la maison du maire et des deux nobles locaux, comme constituant un quartier. Les villageois s'y étaient retranchés depuis maintenant facilement deux lunes, sans chercher à les déloger les pirates utilisaient l'occasion pour apprendre une nouvelle tactique.
Izumi faisait office de stratège, et déployait ses ressources avec parcimonie. Comment les villageois, qui étaient pourtant ficelés et sous contrôle, avaient réussis à prendre le contrôle de cette zone? Les ordres de la capitaine pirate étaient simples, les habitants seraient libérés et habiteraient dans cette partie de l'île jusqu'à nouvel ordre. En échange? Ils vivraient tous, et les pirates ne casseraient rien. Tout ce que souhaitait Izumi c'était de pouvoir entraîner ses filles avec un semblant de réalisme, et il fallait qu'elle calme ses accès de colère sous peine de provoquer un regrettable incident.
D'après les habitants, la marine passait tous les mois. Deux caravelles, ils restaient sur place deux semaines. S'occupant des problèmes des locaux, depuis peu ils construisaient un petit fort en dehors du village. L'île allait visiblement avoir de nouveaux habitants, bien que pas franchement anti-gouvernementaux les habitants de l'île s'opposaient en revanche à ce que pratiquait quasiment chaque jeune matelot une fois sur l'île et sans surveillance. Du racket, des tirs sur le bétail et on passe sur le reste.
Il fallait donc s'exercer rapidement, la marine ne tarderait pas à arriver. Ne doutant aucunement de sa capacité à vaincre des mouettes des blues Izumi souhaitait néanmoins, que les dernières recrues et même les plus anciennes de ses filles reprennent un semblant de discipline. Discipline qu'elle avait du mal à faire régner, tant les pirates avaient l'impression d'être en vacances. Elle avait beau crier et punir, rien n'y faisait.
Il fallait donc qu'elles risquent leurs vies pour prendre au sérieux cette mise en scène?
Deux d'entre elles avançaient d'ailleurs sans autorisation en direction de l'objectif. La lame de vent qui passa à quelques centimètres de leurs têtes provoqua la réaction escompté. La première se jeta au sol, la seconde resta de marbre. Jusqu'à ce qu'elle retourne lentement son corps et que son visage ayant blêmit lui donne l'impression d'être déjà morte.
Elles revinrent sans se faire prier et passèrent le reste de la journée à récurer les toilettes du navire en guise de punition.
C'est ainsi qu'elle reprit le dessus sur ses filles, en s'imposant et en n'hésitant pas à envoyer deux ou trois à l'infirmerie. Il fallait savoir montrer qui méritait le respect, et qui commandait dans ce bouzin. C'était Izumi la capitaine et en tant que tel, le reste devait obéir et suivre les ordres qu'elle donnait. Sinon les malheureuses s'exposaient à des châtiments, des privations et une semaine au trou! La piraterie mais pas l'anarchie!
Le lendemain matin, après trois tentatives se soldant par une retraite des pirates la colline fut prise. Les erreurs des premiers essaies furent d'attaquer sur les côtés forts des civils. De leur position ils pouvaient anticiper les attaques des forbans, ils mettaient ainsi autant d'hommes pour bloquer l'avancée des colonnes pirates.
En prenant directement la tête de la colonne exposé, celle du centre Izumi avait réussit à prendre possession de la position. Il fallait une présence sur le champs de bataille, pas besoin qu'elle soit charismatique pourvu qu'elle renvoie une image adéquate. En tant que capitaine, en tant que leader Izumi ne pouvait se permettre de craquer. Le temps de cacher les blessures était de retour, jusqu'à ce qu'elles terminent Las Camp au moins. La masse, la chair à canon et même les vétérans ne pouvaient combattre sans dirigeant. Il fallait cette aura, il fallait cette fille aux formes avantageuses abattant son sabre sur les impudents. Il fallait cette folie, cette envie de meurtre, ce carnage et l'inconscience temporaire.
Le temps de redescendre, l'heure du dîner et de se coucher que déjà c'était le jour ou la marine devait se pointer. Cela n'empêcha pas Izumi de s'endormir comme un bébé, entourée de jolies succubes et de se lever clope au bec en se grattant le bas du dos. Et au moment de réaliser, de réaliser qu'aujourd'hui elle se battrait d'afficher un grand et vilain sourire et d'empoigner Menteuse. D'empoigner le meitou et de se balader sur le pont du navire en beuglant.
Une heure plus tard, l'équipage était paré à combattre.
Ils débarquèrent, sur les rivages de la petite île. Les informations des habitants étaient juste, les deux navires accostèrent. Deux cent hommes et femmes, débarquant sur cette île paumée avec autant d'attirail que possible pour construire ce fameux fort. Mais la joie qui se lisait sur chacun des visages se transforma bientôt en tension. Le spectacle qu'ils avaient sous leurs yeux était tout sauf synonyme de vacances, et de flegme.
Le village était désert, pas totalement ci et là des femmes pleuraient des morts qu'elles collaient contre elles. Des charrettes macabres, des linges sales recouvrant des corps, des portes enfoncés et au bout la bâtisse du mer semblait prendre feu. Un épais nuage de fumée s'en échappait, la maladie, des pirates ou autre chose était vraisemblablement venu s'abattre contre ces malheureux.
Le Lieutenant obligea ses soldats à lui faire place, cigare en bouche dont il mâchouillait le bout. Il jaugea la scène d'un regard inquisiteur, puis envoya une première colonne dans les rues du village. Il s'agissait de fouiller la zone, de voir ces veuves et d'avoir des réponses. Il leva sa main droite et installa un périmètre de sécurité autour de lui et de ses sergents.
Soudain une explosion résonna, sur le qui-vive chaque marin porta aussi vite que possible main à l'arme. Le bruit venait du manoir du maire, on voyait une forme en sortir titubant. Mais elle était trop loin, les marins dans le village revinrent rapidement auprès de l'officier. Visiblement le village avait été victime d'une attaque pirate et le capitaine avait prit possession de la maison du maire.
-NI RÉDEMPTION NI SOUMISSION!
Hurla la morbide figure qui se rapprochait en descendant la rue. Les plus nerveux des soldats la mirent en joue, mais le Lieutenant ordonna de baisser les fusils. Décidé à prendre soin de ce pirate, qui devait forcément être primé. Un peu d'argent de poche ne faisait jamais de mal, et puis il devait surement avoir des copains dans le coin. Il envoya deux contingents dans le village encercler la cible.
-AUCUNE REDDITION SEULEMENT LA DAMNATION!
Un fou en plus, ou une folle visiblement. Les blues étaient parfois peuplés de personnages bien étrange. Il s'avança, ses sergents sur les talons. Derrière lui le reste de ses troupes, entouré par des mouettes l'homme au cigare s'avança assez près pour donner un visage à cette drôle de femme. Une Armure? Il chercha rapidement dans ses souvenirs et il posa la main sur son sabre. L'Armure alias Izumi pirate ayant attaqué Navaronne, et ayant été aperçus avant cela à Las Camp. Une prime correct, de quoi prendre quelques congés.
Perdu dans ses pensées il ne remarqua pas que les veuves avaient mystérieusement disparus. Et maintenant dans les artères du village il se sentait nettement moins confiant, parce qu'il y avait aucune trace des villageois. Et puis ils n'étaient pas si nombreux dans ses souvenirs...
-Pirate toujours vous épates Lieutenant.
Murmura presque la femme en armure. Et subitement le décors changea, les murs des maisons explosant pour révéler des rangées de pirates attendant la bonne occasion. Ils se jetèrent sur les marines les plus proches, et les bâches furent soulevés et les fusils instantanément se mirent à tirer. Une minute plus tard, le quart des marins était déjà six pieds sous terre. Le nombre, la force et la préparation, tout donnait Izumi gagnante. La lame d'air qu'elle envoya sur les officiers envoya au tapis un sergent grièvement blessé et désormais manchot. La seconde fut esquivée mais donna l'occasion à la capitaine de se projeter sur ses adversaires.
Et le massacre reprit, les marines furent traqués comme du gibier dans tout le village. Jeunes, vieux, beaux ou moches rien ne pouvait les épargner. Les femmes en revanche furent sauvegardés autant que possible, tué lorsque c'était nécessaire mais furent faites prisonnières dans la majorité des cas. Et la retraite des marins néanmoins eu le mérite de réussir. Du moins jusqu'à ce qu'ils arrivent devant leurs navires en proies aux flammes. Et derrière l'étendard de l'Iron Fleet flottant sur le navire des flibustiers. Prit dans un piège sans pitié, ils passèrent leurs derniers instants en vendant leurs peaux, en se démenant ou en suppliant les femmes pirates.
Le Lieutenant combattu avec un de ses sergents Izumi pendant un bon moment, même lorsque tous les autres marins étaient morts. Même lorsque les prisonnières furent forcées à contempler l'affrontement de leurs supérieurs, même lorsque Izumi semblait enfin prendre le dessus. Jamais il n'abandonna, son compagnon plus faible trouva la mort dans une parade d'Izumi qui se fendit d'un coup d'estoc sur la droite du sergent.
Elle se servit de lui comme bouclier et l'envoya sur son supérieur, ce dernier sauta pour esquiver la lâche attaque. A la retombée l'attendait Izumi sourire aux lèvres, et Menteuse qui s’apprêtait une fois de plus à se repaître de sang.
Embroché au bout d'une lame, misérable fin.
Mais ce n'était pas un réel affrontement, tout juste une mise en bouche. La facilité avait quelque chose de frustrant, mais qui fut vite dissipé par le sentiment de victoire général. Les villageois furent dédommagés avec l'argent et le matériel des marins, les prisonnières furent assignés aux rames du navire et l'équipage se mit en mouvement pour préparer le départ du navire.
Et Izumi avait déjà de nouveau le regard vide, le visage incliné vers l'horizon une clope en bouche. Ce qui attendait l'Iron Fleet n'avait rien à voir avec ce simili de bataille. Mais pourtant elle se sentait confiante.
Et pour une fois elle ne le cacherait pas.