« - Allez, du nerf ! »
Ultime destination des vacances des deux jeunes femmes, Ohara n’arrivait décidément pas à séduire la directrice qui avançait à reculons en direction de la gigantesque bibliothèque en son centre. Pas une île très grande, infiniment plus petite que Parisse ou Arcadia, c’était certain. Plus petite même que Lone Down, malgré sa végétation luxuriante.
Ici plus qu’ailleurs, Annabella devait opérer sous couverture. Après tout, la révolution connaissait son visage désormais. Elizabeth était donc une piste… mais elle l’avait déjà bien trop sortie ces derniers temps et se sentait d’humeur à sonder un peu les tavernes, savoir ce que les badauds pouvaient dire. Enfin, si tant était qu’il y avait des tavernes dans ce trou à rats de bibliothèque.
« - Doucement, je cherche un nom… »
Tout était bon pour gagner du temps à vrai dire. Au moins l’air marin était vivifiant, contrairement à celui des librairies où seule l’odeur des livres semblait fournir une fragrance remarquable, lorsqu’ils n’étaient pas moisis.
De toute manière, Annabella n’aimait pas lire et l’avait déjà fait comprendre maintes fois à sa subalterne, laquelle avait réussi à marchander un bref passage par la Nouvelle Ohara dans un échange qui, désormais, semblait bien lointain à la blonde. Celle-ci ne se souvenait même pas de la façon dont Angelica l’avait floutée, mais il y avait sûrement une sombre histoire de rhum là-dessous.
« - Je ne comprends pas pourquoi vous ne pouvez tout simplement pas apparaître en tant que Butterfly. Et qu’est-ce que c’est que cet accoutrement. »
- Accoutrement. » ricana la jeune femme tout en époussetant sa chemise blanche et en redéfinissant du bout des doigts les bords de son large chapeau rouge. C’était un plaisir d’avoir à nouveau ses deux yeux apparents ; dans l’une de ses poches gisait encore le bandeau qui était censé lui recouvrir l’œil gauche. « J’ai eu envie de changer un peu. Il me faut être sur mon trente-et-un si je souhaite glaner des informations sur les rookies qui se préparent à envahir les mers supérieures. »
Visible depuis le lointain, la jeune femme ressemblait toutefois plus à une jeune fille mondaine qu’à une accoutumée des tavernes et de la boisson. Mais les apparences étaient bien souvent trompeuses : Annabella était un agent sous couverture, elle-même sous couverture et elle-même sous couverture. Elle ne pouvait pas simplement être un seul et même personnage, c’était trop difficile.
« - J’espère que ça sera efficace… » darda sa compagne avec la moue d’un enfant peu convaincu de l’existence du père noël après avoir tiré la fausse barbe qui recouvrait le visage de son père et découvert la vérité. « Il me semble qu’il y a un village pas trop loin d’ici, mais nos routes vont devoir se séparer.
- A la bonne heure, vous ne croyiez tout de même pas que je comptais vous amener avec moi ? Mon infiltration serait un véritable échec… »
Si ça ne l’avait pas déjà été jusqu’à présent. L’endroit n’était pas désert au sens propre du terme, mais n’amassait pas foule. Concrètement, Ohara était une île tranquille, bardée de forêts et de grands chemins amenant çà et là, où l’on croisait peu de gens. A vrai dire, une île de littéraires, ça n’intéressait pas grand monde et l’intérêt d’Annabella pour la taverne constituait un véritable coup de poker.
Elle avait à peu près autant de chances de trouver un pirate ici qu’une aiguille dans une botte de foin, mais Angelica n’osa pas lui briser ses doux rêves. Le temps que l’albinos s’en rendît compte, elle pouvait bouquiner tranquille.
« - On se retrouve cette nuit au village donc ? Il ne doit pas y avoir beaucoup de lieux où dormir ; mettez une bougie à votre fenêtre, je viendrai toquer à votre porte.
- On se croirait dans un conte pour enfants, mais soit. » termina la directrice, déjà sur le départ, dos tourné à son interlocutrice. A vrai dire, elle ne l’avait même pas écoutée et marchait déjà vers la petite agglomération située à plus d’un mile de là.
Continuant en direction du grand arbre, immense, dont l’épaisseur des feuillages et des branches semblait n’avoir dans sa mémoire aucun concurrent. Pourquoi n’était-elle jamais venue ici ? Pour les mêmes raisons qui avaient fait qu’elle avait postulé pour être agente au CP9 : la soif d’aventure et de découvertes. Cette ambroisie qui la vivifiait et dont elle avait dû se priver pendant tant d’années, passées à suivre des ordres. Au moins, de ce côté-là, elle n’avait pas à se plaindre de sa supérieure : celle-ci lui laissait souvent le champ libre pour vaquer à ses occupations.
Alors quand l’autre folle faisait signe de se « débarrasser d’elle », Angelica soupirait car leur relation s’était bâtie de cette drôle de façon : pour s’apprécier, elles se faisaient mutuellement chier.
De son côté, Anna continuait à battre le sentier, dans son drôle de costume : son large chapeau rond complété par une petite chemise blanche au-dessus d’un haut rouge et d’un tailleur rouge lui-aussi. Les pensées claires grâce à un effort mental constant, elle chassait les réflexions de ses récents échanges avec l’administrateur. Elle ne pouvait pas continuer à être un pion et devait endosser son rôle de directrice, même si ça n’était pas gagné. Mais, pour la première fois dans sa vie, une part d’Anna avait son mot à dire : celle qui lui disait de fuir ses responsabilités et laisser le contrôle à O’Murphy. Elle pouvait continuer à être une simple agente, à effectuer ses petites missions de routine…
Et inventer des excuses pour finalement se rendre à la taverne la plus proche avec le curieux besoin de boire un verre. Ou deux. Ou trois. Ecouter aussi. Mais surtout boire pour oublier son cruel dilemme et ses obligations.
« - Merry Reed, j’aime bien. » marmonna la jeune femme, alors qu’elle s’approchait finalement d’une petite baraque au style rudimentaire, en bordure d’un village de quelques pâtés de maisons, de chaumières.
Devant Merry Reed se présentait le panneau indiquant qu’il s’agissait d’une taverne. Dedans la taverne se présenta Merry Read, une jeune femme coquète loin d’avoir des allures de pirate, mais des oreilles grandes ouvertes et un foie à toute épreuve.
On put retenir au sein du Nain Chapardeur, ce soir-là, que l’habit ne faisait pas le moine, même si le moine n’en était pas vraiment un, de toute manière.
Ultime destination des vacances des deux jeunes femmes, Ohara n’arrivait décidément pas à séduire la directrice qui avançait à reculons en direction de la gigantesque bibliothèque en son centre. Pas une île très grande, infiniment plus petite que Parisse ou Arcadia, c’était certain. Plus petite même que Lone Down, malgré sa végétation luxuriante.
Ici plus qu’ailleurs, Annabella devait opérer sous couverture. Après tout, la révolution connaissait son visage désormais. Elizabeth était donc une piste… mais elle l’avait déjà bien trop sortie ces derniers temps et se sentait d’humeur à sonder un peu les tavernes, savoir ce que les badauds pouvaient dire. Enfin, si tant était qu’il y avait des tavernes dans ce trou à rats de bibliothèque.
« - Doucement, je cherche un nom… »
Tout était bon pour gagner du temps à vrai dire. Au moins l’air marin était vivifiant, contrairement à celui des librairies où seule l’odeur des livres semblait fournir une fragrance remarquable, lorsqu’ils n’étaient pas moisis.
De toute manière, Annabella n’aimait pas lire et l’avait déjà fait comprendre maintes fois à sa subalterne, laquelle avait réussi à marchander un bref passage par la Nouvelle Ohara dans un échange qui, désormais, semblait bien lointain à la blonde. Celle-ci ne se souvenait même pas de la façon dont Angelica l’avait floutée, mais il y avait sûrement une sombre histoire de rhum là-dessous.
« - Je ne comprends pas pourquoi vous ne pouvez tout simplement pas apparaître en tant que Butterfly. Et qu’est-ce que c’est que cet accoutrement. »
- Accoutrement. » ricana la jeune femme tout en époussetant sa chemise blanche et en redéfinissant du bout des doigts les bords de son large chapeau rouge. C’était un plaisir d’avoir à nouveau ses deux yeux apparents ; dans l’une de ses poches gisait encore le bandeau qui était censé lui recouvrir l’œil gauche. « J’ai eu envie de changer un peu. Il me faut être sur mon trente-et-un si je souhaite glaner des informations sur les rookies qui se préparent à envahir les mers supérieures. »
Visible depuis le lointain, la jeune femme ressemblait toutefois plus à une jeune fille mondaine qu’à une accoutumée des tavernes et de la boisson. Mais les apparences étaient bien souvent trompeuses : Annabella était un agent sous couverture, elle-même sous couverture et elle-même sous couverture. Elle ne pouvait pas simplement être un seul et même personnage, c’était trop difficile.
« - J’espère que ça sera efficace… » darda sa compagne avec la moue d’un enfant peu convaincu de l’existence du père noël après avoir tiré la fausse barbe qui recouvrait le visage de son père et découvert la vérité. « Il me semble qu’il y a un village pas trop loin d’ici, mais nos routes vont devoir se séparer.
- A la bonne heure, vous ne croyiez tout de même pas que je comptais vous amener avec moi ? Mon infiltration serait un véritable échec… »
Si ça ne l’avait pas déjà été jusqu’à présent. L’endroit n’était pas désert au sens propre du terme, mais n’amassait pas foule. Concrètement, Ohara était une île tranquille, bardée de forêts et de grands chemins amenant çà et là, où l’on croisait peu de gens. A vrai dire, une île de littéraires, ça n’intéressait pas grand monde et l’intérêt d’Annabella pour la taverne constituait un véritable coup de poker.
Elle avait à peu près autant de chances de trouver un pirate ici qu’une aiguille dans une botte de foin, mais Angelica n’osa pas lui briser ses doux rêves. Le temps que l’albinos s’en rendît compte, elle pouvait bouquiner tranquille.
« - On se retrouve cette nuit au village donc ? Il ne doit pas y avoir beaucoup de lieux où dormir ; mettez une bougie à votre fenêtre, je viendrai toquer à votre porte.
- On se croirait dans un conte pour enfants, mais soit. » termina la directrice, déjà sur le départ, dos tourné à son interlocutrice. A vrai dire, elle ne l’avait même pas écoutée et marchait déjà vers la petite agglomération située à plus d’un mile de là.
Continuant en direction du grand arbre, immense, dont l’épaisseur des feuillages et des branches semblait n’avoir dans sa mémoire aucun concurrent. Pourquoi n’était-elle jamais venue ici ? Pour les mêmes raisons qui avaient fait qu’elle avait postulé pour être agente au CP9 : la soif d’aventure et de découvertes. Cette ambroisie qui la vivifiait et dont elle avait dû se priver pendant tant d’années, passées à suivre des ordres. Au moins, de ce côté-là, elle n’avait pas à se plaindre de sa supérieure : celle-ci lui laissait souvent le champ libre pour vaquer à ses occupations.
Alors quand l’autre folle faisait signe de se « débarrasser d’elle », Angelica soupirait car leur relation s’était bâtie de cette drôle de façon : pour s’apprécier, elles se faisaient mutuellement chier.
De son côté, Anna continuait à battre le sentier, dans son drôle de costume : son large chapeau rond complété par une petite chemise blanche au-dessus d’un haut rouge et d’un tailleur rouge lui-aussi. Les pensées claires grâce à un effort mental constant, elle chassait les réflexions de ses récents échanges avec l’administrateur. Elle ne pouvait pas continuer à être un pion et devait endosser son rôle de directrice, même si ça n’était pas gagné. Mais, pour la première fois dans sa vie, une part d’Anna avait son mot à dire : celle qui lui disait de fuir ses responsabilités et laisser le contrôle à O’Murphy. Elle pouvait continuer à être une simple agente, à effectuer ses petites missions de routine…
Et inventer des excuses pour finalement se rendre à la taverne la plus proche avec le curieux besoin de boire un verre. Ou deux. Ou trois. Ecouter aussi. Mais surtout boire pour oublier son cruel dilemme et ses obligations.
« - Merry Reed, j’aime bien. » marmonna la jeune femme, alors qu’elle s’approchait finalement d’une petite baraque au style rudimentaire, en bordure d’un village de quelques pâtés de maisons, de chaumières.
Devant Merry Reed se présentait le panneau indiquant qu’il s’agissait d’une taverne. Dedans la taverne se présenta Merry Read, une jeune femme coquète loin d’avoir des allures de pirate, mais des oreilles grandes ouvertes et un foie à toute épreuve.
On put retenir au sein du Nain Chapardeur, ce soir-là, que l’habit ne faisait pas le moine, même si le moine n’en était pas vraiment un, de toute manière.