Royaume de Bliss.
Léger contre-temps, le séjour se rallonge de quelques jours. Suite aux évènements criminels, je désirais partir au plus vite mais je vais devoir prendre mon mal en patience. Qu’est-ce que je pouvais faire ici maintenant ? Je n’ai même pas envie de picoler pour dire à quel point cet endroit m’est désagréable. Les bûcherons avec lesquels je voyage ne semblent pas mécontents de profiter quelques temps de la ville. Le voyage touche bientôt à sa fin et ils désirent en profiter avant de retrouver leur famille.
Puis en réfléchissant à une activité qui pourrait m’occuper, je réalise que nous sommes au plus grand chantier naval de la marine. Habituellement, nous sommes les seuls fournisseurs lorsque nous arrivons sur île, mais là le nombre de navires de bûcherons est incroyable. Je n’avais jusqu’à présent jamais rien vu de tel. Allez, je décide de m’y rendre pour voir ce que ça donne. Actuellement sur le navire, j’ai au moins l’avantage d’être à proximité de ma destination.
Plus je m’en rapproche, plus le bruit des marteaux et autres instruments qui frappent le bois se font entendre. C’est pas spécialement dérangeant, on s’y fait rapidement. À moins que ce soit moi qui apprécie ces sons. C’est assez énorme comme complexe. Un espèce de parc où l’on se sent minuscule. Des navires de la marine assez immenses. Ils le sont déjà en mer mais c’est nettement plus impressionnant de les voir sur la terre ferme.
Fasciné par les constructions, je me retrouve rapidement au milieu du chantier. Il y a constamment du mouvement. Des hommes qui transportent des bouts de bois, ici et là, tandis que ça gueule de partout pour trouver l’ingénieur en charge des plans. Ça se rapproche de ce que je vis sur le navire des bûcherons et ça me plaît plutôt bien. Lorsque j’étais encore sur Endaur, j’ai pu lire quelques livres sur les constructions de navire. En même temps, Endaur, à part le bois, il n'y a pas grand chose d'intéressant sur l'île. J’ai également pu observer mon père adoptif rafistoler quelques barques… Rien à voir avec ces monstres.
Je suis totalement émerveillé. La bouche grande ouverte, les yeux ébahis, je regarde tout et à la fois rien du tout. Je réalise alors que c’est aussi un lieu de travail assez dangereux et que la vigilance est primordiale. En effet, un jeune homme gringalet peine à porter des planches de bois. Sa marche n’est pas stable, il tournoie un peu sur lui-même et s’approche dangereusement de ma position. Les anciens, plus avertis, voient ce qu’il se passe et crient pour que je me couche.
Je passe alors en-dessous des planches qui manquent de peu de cogner ma tête, puis je me redresse en stoppant leur trajectoire. Le jeune homme est terrorisé. Il avait peur de porter ses planches en sachant qu’elles seraient trop lourdes pour lui. Des charpentiers accourent vers nous, je les rassure en disant que je n’avais rien à faire au milieu du chantier. D’ailleurs, pour me faire pardonner et parce que je n’ai rien de mieux à faire, je propose mon aide à la jeune recrue. J’installe les planches de bois sur mon épaule, je les bloque avec mon biceps, puis j’attends les directives.
« - Où dois-je déposer ces planches ?
- Euh… Tout-tout droit ! dit-il timidement. M-Mais je peux les porter !
- T’en fais pas, vas. J’ai seulement besoin de me dégourdir un peu, rétorqué-je comme pour le rassurer. »
En arrivant au dock de construction, je constate que son équipe entame seulement la conception d’un navire. Seule la coque est en ordre. Pour être certain de replacer les éléments au bon endroit, je demande confirmation à mon nouvel ami. Si je me souviens bien, nous avons l’étrave à l’avant du navire, l’étambot et le tableau à l’arrière du navire, avec une quille qui se prolonge sur toute la longueur. Dire que tous les voyages ne tiennent que sur quelques bouts de bois et de ferrailles.
« - Tu sembles t’y connaître, gamin, constate l’un des charpentiers.
- Deux fois rien, vous savez. C’est juste ma curiosité qui m’a poussé à lire quelques trucs là-dessus.
- Héhé. Et t’as l’air d’avoir d’la patate aussi. Il nous faut des types forts dans c’métier. N’est-ce pas, Mattew ? dit-il en se retournant vers mon nouvel ami gringalet. »
Après quelques fous rires, le charpentier reprend la parole.
« Ça t’dira pas d’être charpentier ? »
Suis-je réellement fait pour cela ? Mon voyage avec les bûcherons doit-il s’arrêter ici ? Tant de questions pour si peu de choses. C'est pas comme s'il me proposait un contrat, c'est seulement une période d'essai.
Dernière édition par Alma Ora le Sam 2 Juin 2018 - 14:32, édité 1 fois