Dérider la pierre

Le soleil trônait haut dans ce magnifique ciel bleu parfaitement dégagé des lieues à la ronde, et parfois une brise permettait de rafraîchir.
Les gens grouillaient, s’animaient, la vie était en pleine effervescence ! La journée était belle, et la semaine avait bien commencé pour Apollon !

Mais ici résidait la Haute, alors quand on lui jetait des regards, ils étaient souvent moqueurs ou dédaigneux. Cependant, une jeune femme osa l’approcher alors qu’il lui tournait le dos.

- Vous êtes puni ?
- Absolument pas, comme je suis un éternel curieux, j’ai demandé à la Reine de me coincer dans ce superbe carcan. Je n’en pouvais plus de donner de la tête partout. Là, au moins, je me cantonne à un seul panorama. Je vais peut-être lui demander de rester un jour de plus, il y a tellement de choses à voir !


Le ton était sec et plein d’amertume. Il faut dire qu’Apollon avait vu sa joie de vivre habituelle se faire saper en un rien de temps par ce lourd collier de bois et de métal. En temps normal, il aurait adoré courtiser cette demoiselle mais aujourd’hui, dans ces conditions, il n’en avait pas l’humeur. Alors il l’avait gentiment envoyé sur les roses avec une ironie particulièrement acide. Néanmoins, il était fort probable que la féminité de la voix eût adouci son sarcasme. Il n’avait pas vu cette jeune femme, mais il imaginait beaucoup de la gente féminine avec très peu d’éléments. Alors coincé et courbé qu’il était, c’était la seule chose qu’il pouvait faire pour passer le temps et deviner le physique de son interlocutrice venue dans son dos aurait pu devenir un jeu.

- Oh, ça va ! Je voulais juste savoir pourquoi vous étiez prisonnier ! Mais je vois que vous aimez l’humiliation publique : vous semblez l’acceptez agréablement bien. Alors je vous laisse profiter de votre petit plaisir.
- Non, attendez !


Il n’avait pas attendu que les premiers pas de la donzelle ne claquassent sur le pavé de la place toute grise de pierre pavée pour la retenir. Après tout, elle était la première personne à oser l’aborder -la plupart ayant trop d’estime d’eux-même pour oser s’approcher d’un brigand- et ... c’était une femme. Non seulement il avait enfin de la compagnie, mais en plus, elle était charmante. Enfin, il l’imaginait et en était persuadé. Le réconfort était donc double.
Elle s’arrêta, mais ne se montra pas. Elle ne parla même pas d’ailleurs, elle attendait de savoir ce qu’il lui voulait réellement

- Pardonnez ma rustrerie, vous ne me voyez pas dans mes meilleurs jours. Me feriez-vous l’insigne honneur de vous approcher de moi ? Montrez-vous, et je vous dirais tout, je vous le promets !

Il ne le voyait pas, mais ses lèvres à elle affichaient un petit sourire espiègle, doucement victorieux mais très complice. Elle avait totalement cerné le personnage.
Ses pas se rapprochaient, la tension et l’excitation montaient chez le bateleur, il en arrivait même à oublier son mal de dos. Ses lèvres à lui s’animèrent également, d’un sourire ravi.
Ce qu’il vit d’abord, fut ses bottes. Des bottines en feutrine violet de parme, avec un haut talon pour ravir ces longues jambes couvertes d’un fin collant noir qui appuyait le galbe et  les sublimait. Il s’en damnait ! A mi-cuisse ondulait une robe en velour pourpre, unie mais quelques trous brodés laissaient apparaître ça et là et un bustier d’un blanc éclatant. La robe était également ornée d’une ceinture en cuir de bonne facture, lâchement portée. Aussi, les froufrous de son chemisier dépassaient des manches longues de sa robe, et aboutissaient sur deux petites mains fines fermées en poings posés sur les hanches. Certains de ses doigts étaient annelés d’or.
De ses yeux, il remontait son corps avec délice, s’attachant à chaque détail. Arrivé en dessous de la poitrine, il dut davantage plier son cou, il se cogna alors l’arrière du crâne dans le bois du carcan et son cou lui fit un mal de chien.

Il expira un râle de douleur, ce qui tira un petit rire à la demoiselle.

- Vous ... hm. Vous pourriez vous baisser à mon niveau s’il vous plaît ? Déjà pour que je voie votre joli minois et ensuite, pour que nous puissions parler face à face ...

Pour toute réponse, elle soupira, non sans un sourire amusé, piquée par la curiosité qu’était ce drôle d’oiseau. Habituellement, les détenus n’ont ni ce tact maladroit des amourettes, ni ces tenues aux couleurs chamarrées. Mais elle se mit accroupie, toujours aussi souriante.

Alors très vite, le bas de la robe commençait à descendre et à devenir un décolleté plongeant par lequel ressortaient les mêmes froufrous du chemisier à jabot. Puis apparurent un cou cerclé d’un collier de perles noires et des anglaises dans le même ton. Et enfin, une délicatesse et fine bouche rosée et pulpeuse, surmontée d’un petit nez et de deux beaux yeux verts, presque couverts par une frange toute aussi brune que les mèches bouclées qui tombaient auparavant le long de ses joues, jusqu’au ras du cou. Elle avait dans la vingtaine et faisait indubitablement partie de la noblesse.
Les yeux, les pupilles et la bouche d’Apollon s’agrandirent soudainement pendant un instant avant de se refermer aussi sec pendant un autre instant, le temps de se reprendre.

- Enchanté, je m’appelle Apollon de Linciel, pour vous servir ... normalement ...
- Enchantée, Léah
, lui répondit-elle dans un sourire amusé.
- Léah ... comment ? Si je puis me permettre !
- Vous allez devoir vous contenter de mon prénom, vil voyou ! Alors, dites-moi tout, qu’avez-vous fait de mal ?


Apollon prit une longue inspiration, ainsi qu’un air triste, presque abattu.

- Eh bien ... voyez-vous ... la vie s’est jouée de moi ! Je ne suis que la malheureuse victime d’un terrible malentendu !
- Oh, mon pauvre !
le plaignit-elle ironiquement.
- Ne riez pas ! Des marins m’ont parlé de cette île, il paraît que les gens d’ici ne se dérident que très rarement, un peu comme la pierre. Alors votre humble serviteur, moi, Apollon de Linciel, me suis lancé le défi de rompre la pétrification de ses bonnes gens avec mon charme naturel et mes talents durement acquis !
- Voyez-vous ça ! Et, qui êtes-vous ? A part un détenu je veux dire ...
- Un bateleur itinérant à tout faire ! Vous voulez de la comédie ou du drame ? Du chant peut-être ? Alors je suis l’homme qu’il vous faut ! Vous voulez des prestations aussi aériennes qu’ahurissantes ? Alors donnez-moi une torche et des couteaux, et je suis l’homme de la situation ! Vous préférez discuter sérieusement de sujets complexes et compliqués ? Mais je suis là, vous dis-je !
- Et donc ?! Venez en aux faits !
- Eh bien je suis venu proposer mes services à votre reine, et après moult péripéties ...
- Oui ?
- Elle a accepté ! Elle a voulu voir l’étendu de mes talents de barde pour le repas du soir, donc elle m’a demandé de lui donner un aperçu dans l’après-midi, afin de me laisser le temps de me préparer. Alors je me suis installé en hauteur, sur les murailles, en contemplant la mer pour trouver l’inspiration. Mais la vue de ces gardes à tête de chien et de cette triste pierre érodée par les embruns ne m’inspirait que des textes cocasses. Quand j’ai commencé à chanter -n’importe quoi pourvu que l’inspiration ne vienne, un de ces gardes m’a entendu et m’a fait livrer à la reine ...
- Hahaha ! Et qu’avez-vous chanté ?
- “Votre majesté, ma Dame de Pierre / Prenez garde à ce que cette île / De roc et de sel que renferme cet enfer / Ne devienne votre chenil”. Et pourtant, je ne comprends pas ! Ce sont des rimes croisées, et non embrassées, donc point d’amour ici mais de l’attachement ! Un rappel de l’attachement qui lie la reine à son île ! C’était parfait, mademoiselle ! La construction et sa symbolique étaient parfaites ! Des rimes pauvres, certes, mais ce n’était qu’un échauffement ! Une mise en jambe !


A ces paroles sorties avec plein de bonne volonté et de peine, Léah se courba encore plus que lui pour exploser de rire. Apollon fut vexé.

- Mais voyons ! A travailler davantage la forme que le fond, vous en avez oublié l’importance du sens !
- Certes
, claqua-t-il séchement, toujours aussi piqué dans son amour. Mais il n’empêche ! M’humilier publiquement est honteux !
- Oh, mon pauvre Apollon ! Ne le prenez pas comme cela ! Excusez-moi, c’était vraiment très drôle, et certainement pas à vos dépends !


Quand elle étouffa à nouveau un rire, il tourna la tête autant que le carcan le lui permettait, pour tenter de feindre qu’il était au dessus de tout cela. En vain, naturellement.

- Mais il faut bien avouer que vous réussissez à le faire tout seul ! Vous ridiculiser publiquement !

A nouveau, elle fut prise d’un fou rire sauf qu’elle prit tout de même le temps de l’embrasser sur la joue avant de disparaître de son champ de vision.
Mais même ce baiser ne put lui rendre des forces. A nouveau humilié par une femme, désirable qui plus est, il était abattu. Il se laissait choir sous son propre poids, pendouillant lourdement de son carcan.

- Comment ... Mais comment en suis-je arrivé ici ?!
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Cela faisait déjà quelques jours qu’il avait posé le pied sur la Frange de Saint-Uréa. L’équipage de marins qui l’avait emmené ici n’étaient constitué que d’hommes, des hommes qui étaient subitement partis en vacances de leur femme. Alors mettre enfin le pied sur la terre ferme signifiait deux choses : il avait un nouvel horizon à explorer, et des femmes à courtiser. Et cela tombait plutôt bien, puisque pour servir la reine, il devait traverser la ville en même temps que les échelons de la société, la bourgeoisie ne se mêlant pas au bas peuple. Il allait donc allier l’utile à l’agréable.

La première des femmes fut Bérangère, une fille de paysan qui avait elle-même embrassé la condition de ses parents. Elle était également la première qu’il vit, et heureusement pour lui, la donzelle était plutôt jolie. Malgré ses vêtements qui tenaient davantage des haillons, son chapeau en paille tressée lui donnait une charme rustique tout à fait raccord mais néanmoins ravissant.
Après l’avoir rapidement abordée pour lui demander son prénom, il se dit soudainement inspiré.

- Bérangère, ah ! Bérangère !
Cruelle est la vie de me faire de vous une étrangère !
Bérangère, oh Bérangère !
Peu me chaut que vous soyez une bergère !
Bérangère, ouh ! Bérangère !
Laissez-moi vous placer ... hm ...

- Dans mon coeur ?
- Non, ça ne rime pas !
- Sur une étagère ?
- Non ! Dans mon coeur fier !

La potiche des prés se mit immédiatement à rougir et à plaquer ses mains sur ses joues.

- Oh, c’que c’est beau !

Pour toute réponse à ces flatteries faciles, il fit une courbette bien basse. Durant celle-ci, il avait gardé les yeux ouverts et vit alors qu’un dindon de la fermière lui passait entre les pattes pour venir lui picorer le nez s’il ne se relevait pas assez vite.
Tout citadin aurait pu s’affoler mais Apollon ne manquait pas de ressources. Aussi rapide que l’éclair, il s’en empara, ne laissant aucune chance au volatile de se débattre, et le tendit à sa belle du moment après s’être relevé.

- Tenez, ma douce ! Considérez-le comme l’enfant que nous n’aurons jamais ! Attendez que la nuit tombe et je reviendrais prendre de vos nouvelles à tous les deux !

En réalité, il avait même la suite de sa phrase, mais il préféra la taire. En effet, dire à une jeune femme “Comme vos champs mûrs, je viendrais vous déflorer” n’était pas de bon goût, aussi poétique cela pouvait-il être.

Mais elle accepta, cajolant le pauvre dindon comme s’il était réellement son propre enfant. L’animal n’était pas serein, se demandant pourquoi il recevait autant d’amour d’un coup, et Apollon partit l’esprit léger.
Si son esprit l’était, ce n’était pas le cas de sa malle qui recelait tous ses costumes, ses livres et ses biens en général. Etant donné sa dernière parade, il pensa que c’était déplacé d’affirmer qu’elle pesait un âne mort, mais qu’il serait tout de même approprié de s’arrêter dans une auberge ou taverne. Il commençait à faire faim, tant pour lui que pour son porte-monnaie.

Il entra donc dans une auberge, où il proposa ses services contre les frais de son court séjour. Le tenancier refusa tout net sa proposition, vociférant qu’il ne voulait pas de “guignol” dans son établissement. Apollon s’y arrêta tout de même pour se désaltérer. Bien sûr, il allait payer cette pinte, et cette pinte uniquement, puisqu’il n’avait pas assez de Berries pour quoi que ce soit d’autre.
Sauf que la chance lui sourit une nouvelle fois, puisque ce grossier personnage avait une adorable fille, du moins aussi adorable qu’on pouvait l’être quand on allait servir ses manigances. Et bizarrement, dans ces cas là, les critères s’élargissaient volontiers.
Oh, bien sûr, il se sentait désolé d’avance pour elle, mais un estomac vide n’ayant pas d’oreille, les amourettes passèrent donc au second plan.

Tel un chasseur traquant sa proie, il l’avait approché farouchement. La fille tournait autour de l’hameçon, se laissant charmer tout en se méfiant. Mais Apollon était un séducteur invétéré alors il jouait avec elle. Tantôt il remuait légèrement l’hameçon, tantôt il ne le bougeait pas d’un pouce. Et quand le poisson commençait à le mordre doucement, il ne le ferra pas de suite. Thon ou morue, il s’en fichait pourvu qu’il se remplisse l’estomac. Il apprendra plus tard qu’elle tenait davantage du barracuda.
Mais quand elle finit par se blottir dans le creux de son épaule pour rire à une de ses plaisanterie, il savait qu’elle était sienne. Il l’avait ferrée en douceur, avec la même douceur dont elle avait fait usage pour l’approcher. Mais il ne s’agissait pas de méfiance chez lui, au contraire ! Il ne lui avait même pas montrer de la confiance, signe bien trop peu trompeur pour le poisson avisé ! La confiance abondante cachait souvent de mauvaises choses, et elle le savait. Non, il l’avait laissée s’approcher, reculant légèrement à chaque fois, imperceptiblement.

Une fois sienne, il lui proposa d’aller se cacher dans une chambre. Elle hésita à cause de son père mais l’interdit est toujours plus attirant et enivrant quand on incite à le braver.
Bien entendu, ils chafouinèrent ensemble mais Apollon fit durer le jeu pour garder la chambre toute la nuit durant. Alors Tabatha, puisque c’était son nom, alla voir son paternel pour lui proposer gentiment -trop gentiment peut-être, il aurait dû se douter- de prendre la relève le soir et le lendemain matin pour secrètement assurer à son bel amant une nuit gratuite sans éveiller soupçon ni lui réserver de mauvaises surprises. Harassé de sa journée, le père accepta et partit dans son logement mitoyen.

Bien sûr, Apollon profita de cette soirée sans le propriétaire pour abuser de la gentillesse de son hôte quelques peux forcée, en prétextant que le coîte lui avait ouvert l’appétit. Tabatha lui apporta donc un menu du jour dont il se fit un régal.
La nuit fut bonne et au petit matin, avant l’aube, il avait demandé à sa belle qui l’avait rejoint une fois le soleil couché et l’auberge fermée, de lui préparer un petit-déjeuner avec ses douces mains, petit-déjeuner qu’ils prendraient plaisir à partager ensemble. A nouveau, la belle tomba bêtement dans le piège, l’amour la rendant complètement naïve.

Mais encore une fois, Apollon était loin de se douter de son réel caractère. Il se sépara de son étreinte avant même l’ouverture de l’établissement, prétextant qu’il avait des affaires importantes et urgentes en ville. Elle s’en attrista, mais il la rassura en lui mentant qu’il allait revenir une fois sa tâche accomplie.

S’il était déjà un mauvais mari car infidèle, il était également un mauvais père. Bérangère et son dindon de fils l’avaient attendu toute la soirée et elle n’était rentrée que très tardivement chez elle.
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Frais et reposé, matinal et de bonne humeur, il pouvait désormais gagner les strates les plus hautes de la ville. Mais comme un chien s’arrête à chaque arbre pour uriner, Apollon s’arrêtait  à chaque personnes dotées de généreuses courbes féminines pour les séduire.

Tout d’abord, il vit une jeune femme de dos, assise sur un banc, en train de lire le journal du matin. Il prit une posture héroïque, le pied sur le banc d’à côté, et tint, claironnant, ce discours :

- Pourquoi diable existe-il des canons de beauté alors que la beauté est parfaitement subjective ? Tenez, un exemple ! Prenez cette jeune femme. Je n’ai pas encore vu son doux minois et pourtant ! Je dois déjà me conformer à ces canons, mais également à MES canons ! Eh bien oui ! Je me dois déjà de juger cette silhouette gracile et gracieuse !

Son interlocutrice se redressa, apostrophée puisqu’elle savait pertinemment que c’était d’elle que ce vil flatteur parlait, mais elle ne se retourna pas. Elle faisait clairement durer le plaisir.

- C’est tout de même quelque chose de terriblement atroce et injuste mais néanmoins charmant ! Je ne l’ai même pas abordée, je ne connais même pas son prénom mais je dois déjà la juger sur le peu d’informations que j’ai !

Elle ne tournait pas encore, mais ouvrit la bouche. La voix qui en sortit fut ... un peu trop masculine pour une personne féminine mais trop peu pour être celle d’un homme.

- Vous voulez connaître mon prénom, heuheuheu ? ~♥️

Le doute s’instillait doucement chez Apollon, mais son aplomb ne faiblissait que rarement.

- Je ... Euh ... Bien sûr !
- Morgane ! ~♥️
- Eh bien Morgane, je ...


A cet instant, elle se retourna.

- Morgan mais sans “e”, heuheuheu ! ~♥️

GARG ! Kesseucé ?!”, pensa-t-il en peinant à garder son assurance sur son visage, les yeux rivés sur le menton carré de celui qui l’avait dupé, car Morgan était un okama !

- Eh bien Morgan, disais-je, je vous ai aimé avec un “e”, alors je vous aimerai sans ! mentit-il maladroitement.

Morgan s’en fichait, c’était même un jeu pour lui. Et ce fut ainsi qu’il décida d’enfoncer davantage le bellâtre qui ne méritait que la monnaie de sa pièce. Sans compter que tout ceci n’était qu’un début.

- Tant mieux, bel homme ! Puisque j’attends une amie et qu’elle sera ravie que vous la flattiez ! Heuheuheu ! ~♥️
- Et c’est bien normal ! Hahaha !


Sa réponse et son rire était maladroits, gênés. Il savait qu’il s’enlisait dangereusement, mais ignorait qu’il n’était plus cru.

- Quel est ton doux nom, mon tout beau ? ~♥️
- A-Apo ... Apollon, m’si... m’da... Apollon de Linciel !


Il tenta une courbette bien basse pour renforcer son jeu de dupe, ce qui tira un fou rire à l’okama qui l’étouffa aussi sec.

- Ah bah tiens, la voilà ! YOUHOU ! SASHA ! JE SUIS LA ! ~♥️

Cette Sasha prit ses chaussures à talons dans une main et se mit à courir avant de faire la bise à Morgan. Devant tant de volupté, Apollon se dit que sa chance venait enfin de tourner. Il se mit à rêver de tendres moments avec elle, jusqu’à ce qu’elle ouvre la bouche.

- Ah, ma chérie ! Tu m’excuseras du retard, j’ai dû briser la nuque à un mendiant qui en avait après moi ! Et euh ... C’est qui lui ?

Sa voix oscillait joyeusement entre les aigus et les graves. Sasha était aussi un homme. Enfin, un okama, du fait. Apollon devint blême, figé.

- Sasha, je te présente ce cher Apollon qui a commencé à me conter fleurette ! Il m’a même promis de le faire pour toi aussi ! ~♥️
- Voilà qui me fera le plus grand bien ! Je suis toute ouïe, mon brave !


Il esquissa un sourire qui ressemblait davantage à une grimace de détresse.

- Eh bien je ...

Il balaya l’horizon pour trouver une source d’inspiration, et pour éviter de les regarder droit dans les yeux. Ou de les regarder, tout court. Il posa alors les yeux sur une charcuterie dont le tenant était en train de remplir son étal et de suspendre diverses pièces de viandes. Un costaud gaillard, glabre et chauve, peu commode, tenant davantage du porcin enragé que de l’homme.

- Ma ... douce ? ... Sasha, vos ... hm ... jamb...onneaux s...
- COMMENT ?
- Relax, trésor !
s’en amusa Morgan. Laisse-le terminer, heuheuheu ! ~♥️
- Vosjambonneauxsontbienplusravissantsqueceuxdececharcutier, voilà !
- DE QUOI ?
beugla l’offensé. T’OSES DIRE QU’CETTE TARLOUZE VAUT MIEUX QU’MA BONNE VIANDE PRÉPARÉE AVEC AMOUR ?
- Non ! Pas du tout !
Elleesttrèsbonnevotreviandeçasevoitmêmesij’aipasgoûtéetpuisjedoisyallerj’ailaReineàdivertir !


Il prit donc la fuite à toute jambe, en oubliant pas d’emporter avec lui sa valise. Sasha n’avait même plus la force de le poursuivre et préféra s’effondrer en larmes. Morgan, lui, riait bêtement.

Et clou du spectacle, il n’avait même pas vu Tabatha, la fille de l’aubergiste, qui l’avait guetté plus loin, en train d’amadouer, elle en était persuadée à cette distance, ces dames.
La vengeance allait être terrible !
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Des pas résonnèrent sur la petite placette pavée quelques peux en retrait sur l’esplanade. Se reprochant, ils réveillèrent Apollon qui s’était perdu dans ses pensées. Allongé autant qu’il le pouvait, se laissant totalement choir de son carcan par dépit et pour au mieux toucher le sol, son corps tout entier était endolori. A être resté ainsi depuis il ne savait quand, chaque mouvement qu’il faisait pour se redresser était aussi douloureux qu’incertain. Quand il finit par y parvenir, il s’aperçut que le soleil était en train de se coucher, et qu’une silhouette en contre-jour de l’astre s’approchait. Une silhouette à tête de chien.

S’étant tû durant cette même période, et sa pomme d’adam s’étant longuement appuyé sur le bois de sa prison, sa voix était éraillée, et il ne pouvait rien y faire, lui qui aimait jouer de son timbre mélodieux. Pourtant, son aplomb était intact, et il ne manquait pas de mordant, comme à son habitude.

- Alors ça y est ? Il est temps pour moi de rentrer à la niche ? A moins que ce ne soit le chenil qui m’attende, auquel cas je me ferai dévorer tout cru ...

Le garde royal ne broncha pas. Pour toute réponse, affirmative de surcroît,  il déverrouilla la planche de sa prison non sans s’assurer qu’il avait bien empoigné la chaîne de son prisonnier. Mais lent et endolori qu’il était, il fut rapidement doublé par l’homme à la tête de chien qui tirait vivement sur celle-ci pour presser le pas du bateleur à tout faire. Son cou et ses poignets étant brusquement entraînés en avant, ses pas hésitants, fébriles et lancinants se devaient irrémédiablement de suivre le rythme au risque de tomber et de s’égratigner. Mais à ses yeux, l’humiliation n’avait que trop duré. La marche se révéla donc pénible et difficile.

Et elle se termina devant le trône de la Dame de Pierre. Elle le regardait sévèrement, son expression était hautaine et fermée. Toujours vexée, elle ne s’était pas remise de l’injure. Et la vue de cet énergumène ne l’aidait pas à se calmer.
Ses coudes étaient rivés sur les accoudoirs et elle papotait nerveusement sa longue pipe. Elle le toisa un moment, toujours retenu en laisse par l’homme-chien devenu limier avant qu’elle n’ouvrît la bouche. Sa voix était rauque comme si l’embrun l’avait érodée tout autant que la pierre. Mais chez elle, c’était naturel.

- Libérez-le.

Le limier s’accomplissait pendant qu’Apollon se redressait. Il avait adopté -plutôt de force que de gré- une posture voûtée, à mi-chemin entre celle qu’il avait gardé toute la journée et l’acceptation douce-amère. Même à ces mots, la joie et la surprise n’arrivèrent que peu à illuminer ce pantin désarticulé et à bout de force.

- M-Mais pourquoi, majesté ? Loin de moi l’idée de me plaindre m... mais j’aimerais comprendre !

Elle changea de position en maugréant. Comme si son trône n’était pas confortable ... ou plutôt, comme si avouer la vérité la dérangeait ou lui écorcherait la bouche. Mais elle parla. Du moins, elle grogna en pinçant des lèvres à plusieurs reprises, très succinctes. Son agacement était manifeste. C’était une mimique que faisaient tous les gens de son âge. Puis elle regarda une femme de son petit personnel qui accourut à petites foulées. Celle-ci portait un mince plateau d’argent orné de gravures spiralées dans lequel se trouvait divers objets. D’un coup sec, elle vida le fourneau de sa pipe dans un petit cendrier en cristal avant de saisir le cure-pipe et de se mettre à l’ouvrage. Une fois ceci fait, elle ouvrit une boîte cerclée de fer, patinée et très bien entretenue, et se servit une pincée de son contenu qu’elle fourra immédiatement dans sa chibouque avant de l’allumer à l’aide du briquet à silex posé sur ce même plateau.

Elle tira une longue bouffée, ce qui, il en était persuadé, avait apaisé ne serait-ce qu’un peu son aigreur, puis elle se mit enfin à parler.

- Ma petite-fille m’a appris l...
- L-Léah ! Mais oui ! Léah Stanhope !


Le reine s’éclaircit la voix pour le faire taire. Apollon s’en étrangla presque en lui obéissant aussitôt.

- Hm, en effet. Elle m’a appris, disais-je donc, la vérité à propos de votre ... inspiration insolente. Je voulais vous enfermer pendant trois jours pour vous apprendre la politesse, après humiliation publique bien entendu ... mais je dois bien avouer que la petite diablesse sait comment m’amadouer.
- Merci, votre majesté !
- Ce n’est pas moi qu’il faut remercier, encore que. Je me trouve bien magnanime, sachant que d’autres vous auraient coupé la langue pour moins que ça. Mais vous n’aurez pas le temps de le faire. Je vous somme de quitter mon royaume. Et n’y remettez plus jamais les pieds.
- Entendu ! Encore merci ! Et je vous présente mes plus plates exc...
- Déguerpissez ! Avant que je ne change d’avis ...
- Mille mercis !


Alors qu’Apollon détalait sans demander son reste -ayant soudainement et mystérieusement retrouvé toute ses capacités physiques, la reine s’enfonça davantage dans son trône, en se rabougrissant et se flétrissant autant qu’elle s’enfonçait dans les remords et l’impuissance dont elle avait été victime. Et malgré son âge, sa moue avait tout de celle d’un enfant.

- Il faudrait que je veille à mieux cacher mon coffret de tabac ... Ca se paiera, Léah, sois en certaine ! siffla-t-elle un rictus complice niché dans la commissure de ses lèvres.

La jeune femme apostrophée et cachée derrière un pilier étouffa un petit rire.

On rendit ses affaires au bateleur et ce dernier continua de tracer son chemin qui le menait loin des hautes sphères de la société de ce royaume. Mais une fois franchies les immenses portes qui le séparaient du reste de la ville, la vie le rappela une fois encore à la réalité. Ici, il avait laissé des coeurs vides. Des coeurs vides avides de vengeance même. Plus que lors de son départ, à en croire cette foule massée dans laquelle il avait reconnu quelques têtes.

Celle de Bérangère, voire celles de parents proches, celle de son coq, celle de Tabatha, mais aussi celle de Sasha, barbue, et de son charcutier qui avait fini de se chamailler pour mieux s’unir. Tous passaient outre la rivalité qui aurait pu et dû les opposer. Au moins momentanément. Même si ce n’était pas constant.
Parce qu’au final, tous avaient un ennemi commun : lui.
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Après quelques déboires bien sentis et mérités*, Apollon avait vivement consenti à quitter cette île de malheur, anéanti. S’il avait commencé par s’offusquer de la rusticité des gens de cette île, il se rappela bien vite qu’il ne récoltait que ce qu’il avait semé. Il s’était plaint du manque flagrant de bon sens des habitants, pour oser déchirer sans vergogne des vêtements tissés avec des étoffes de qualité, dont le bouffant ne se perdait jamais malgré les années. Mais il accepta un peu la défaite -parce qu’avec cette excuse, il s’en sortait à moitié vainqueur si tant était qu’on ne connût pas la vérité. Alors ce fut résigné qu’il gagna le port. Résigné, et le visage éteint, tout comme sa verve.

Mais du raffut en provenance des docks, mêlé à de la musique, ravivèrent immédiatement les braises de son aplomb ! Et la flammèche qui en jaillit n’était que curiosité et amusement, elle avait tout pour grandir et emplir son coeur. Là où il pensait irradier les autres de sa bonne humeur dans de tels moments, c’était pour certains une véritable géhenne. Mais pas cette fois-ci, il le savait. Non, il allait parfaitement s’inclure dans ce petit groupe, et le suivre jusqu’au bout du monde.




Pressant le pas pour ne pas les rater, il essayait de deviner les instruments : de la musette, un ukulélé, des percussions improvisées, un tambour, peut-être un banjo ... Il ne savait pas trop, l’excitation et la curiosité l’emportaient sur sa concentration. En tout cas, le chanteur avait la voix enrouée, encore un, qui avait été abîmée par l’âge mais surtout par l’alcool et le tabac. Bas de gamme, bien entendu.

Une fois arrivé sur les pontons, il poussait les badauds pour arriver à temps, guidé par l’intensité de la musique, puis, des râleries et des rires. Il ne savait pourquoi le tout arrivait parfaitement à se mêler mais c’était précisément cela qui l'intéressait encore plus.
Il ne lui fallut guère plus de temps pour tomber nez à nez avec une caravelle dont le jolly roger donnait d'emblée le ton de l’équipage qui la hantait.


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Puis vinrent à ses oreilles ces quelques mots, crachés par la même voix que celle qui chantait plus tôt :

- Par les Sept Mers -ouais j’compte aussi les deux bandes de Calm Belt, z’allez pas faire ça aux Rock Pirates ! On est pas méchants, j’vous jure ! Oh, j’vois qu’z’êtes durs en affaire, D’ACCORD ! Allez, t’nez, c’est d’mon rhum personnel mais écoutez, tant pis ! J’vous promets qu’on fout l’camp d’ici à c’qu’on ait terminé !

Apollon ne perdait pas une miette de cette petite scène. Le capitaine, celui qui portait le tricorne, était en prise avec quelques soldats qui avaient certainement dû leur demander d’arrêter ce brouhaha. S’il avait un sourire malin sur les lèvres, ses matelots se marraient ouvertement, soit de lui, soit des Marines, ce qui avait le don d’agacer davantage ces derniers. Les derniers membres, à bord, jouaient de la musique ou empilaient les caisses dans la cale. La plupart étaient rond comme des queues de pelle.
Quand l’un des pantins du Gouvernement Mondial arracha sèchement la bouteille de la main du capitaine des Rock Pirates, lui affichait un large sourire satisfait. Et alors que les détenteurs de l’ordre s’en allaient, il ne put s’empêcher de siffler d’entre ses dents.

- Putain d’foies jaunes !
- Pardon ?!
- J’ai dit : “Putain, j’vois jaune !” ! A cause d’l’alcool frelaté qu’j’vais d’voir m’taper ! Faut ouvrir vos esgourdes les gars !


Les Marines le fusillèrent du regard avant de partir pour de bon en dépassant ce cher bateleur à tout faire. Celui qui tenait la bouteille s’empressa de la jeter dans une poubelle un peu plus loin, pour ne prendre aucun risque, étant donné les dires de cette canaille.

Ce fut avec des étoiles dans les yeux qu’Apollon aborda ce vulgaire personnage.

- Bien le bonjour ! Je vous ai entendu à une lieue de là et ...
- Oh, mais c’est qu’il est poli et délicat c’lui-ci !



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De son seul oeil valide, le capitaine examinait son interlocuteur avec un amusement dont il se délectait. Ce n’était pas méchant, simplement taquin comme tout bon pirate qui se respectait pouvait l’être. Son sourire moqueur dévoilait toutes ses dents, mêmes celles manquantes ou pourries. Son haleine se mêla donc aux relents d’alcool qui imprégnaient ses habits de pirate traditionnel, mais Apollon n’en avait cure.

- Ecoutez, je suis moi-même musicien et je voudrais quitter cette île de malheur au plus vite ! Et j’ai ouï dire que vous alliez faire de même ! Alors je me demandais ...
- Mais sûr, l’aminche !
tonna-t-il en lui décollant une tape amicale dans le dos qui avait failli lui arracher l’omoplate. Plus on est d’fous, moins y’a d’alcool de riz mais c’pas grave ça, l’aminche ! Y’a ben aut’ chose ! Kestu préfères ? Rhum ? Bière ?
- Je m’en fiche, tout ce que je veux, c’est partir loin d’ici, m’amuser, vous suivre, et écrire votre histoire !
- Boarf, t’oublieras tout ça quand tu s’ras à bord ! Tu picol’ras, comme tous les aut’ ! Y’a qu’nos gus qui nous à la navigation et à la manoeuvre -’fin, certains, pour ceux là, pas tous-  qui boivent pas, parce qu’on veut arriver à bon port et en bon état, tu comprends ?
- Bien sûr ! Par contre, je ne peux pas vous payer mais je peux ...
- Te bile pas, l’blanc bec ! On s’fait assez d’oseille comme ça pour raquer un frère ! Tu joues d’quoi d’ailleurs ?
- Du luth, essentiellement, mais je chante aussi. Je peux narrer des contes, vivre des fables, ou ...
- Teh, c’est d’jà ben assez ! Allez, grimpe là haut ... euh ... ?
- Apollon de Linciel !
- Enchanté, Apo’ ! Moi c’est Bidouille John !
- Enchanté, John ! Et ... si je puis me permettre ... qu’est ce que vous faites pour aussi bien gagner votre vie, d’après vos dires ? Ne me dites pas que c’est grâce à la musique !
- Nan, nan ! Ca c’est pour not’ plaisir qu’on fait ça ! Nan, de vrai, on a un p’tit partenariat avec un gros bonnet d’Zaun, trois fois rien. Mais ça rapporte un max ! L’boss il est pas trop r’gardant et il a l’bras long, alors tu comprends ... I’ va au moins cher et i’ nous rince bien.
- Mais c’est complètement absurde ! Il doit perdre de la marge, de ce fait ...
- Olala ! T’bourres pas l’mou pour lui ! S’il le fait, c’est qu’i’ peut et qu’ça reste rentab’ ! J’te dis, quand on croule sous l’or comme lui, vaut mieux avoir l’bras long ! D’jà, ça permet d’avoir pied quand t’as une piscine remplie d’Berries comme lui, et pis des fois tu fais des p’tits signes de vie, comme ça on sait qu’t’es toujours là ! ‘Fin bon, si tu veux bien, monte vite à bord, on va décoller dans pas long et j’aim’rais pas donner d’mauvaises idées à un connard à l’oreille un peu trop tendue ! L’pauvre zig s’rait bien déçu : y’a plus rien d’sonnant ou d’trébuchant à bord ! Bwahaha !


Il n’y avait que sa candeur pour lui faire oser nouer de telles amitiés. Apollon s’engagea volontiers et il ne lui fallut pas très longtemps pour qu’il se fît une petite place provisoire au sein de cet équipage de pirates grossiers et alcooliques, mais néanmoins sympathiques. Sa joie de vivre avait retrouvé toute sa superbe et flamboyait joyeusement parmi ces Rock Pirates qui ne se lassaient pas de ses petits tours. Et lui, quand il y avait un bon public, il s’en donnait à coeur joie.

Mais il était loin de penser qu’ils n’allaient pas se lâcher de sitôt, tant et si bien qu’ils seraient liés par un événement qui aller les marquer au fer rouge. Il allait connaître ce qu’était la vie de pirate, leur quotidien animé tout comme leur désillusion.
* : Voire test RP
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