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    Il faisait noir et humide. Le vent balayait la plaine avec véhémence. On entendait la petite habitation dans laquelle Canaille avait trouvé refuge craquer et siffler à chaque expiration de la météo. C'était petit, vétuste et vérolé par la pourriture. Dehors, même les herbes folles étaient prises dans leur prison de gel, le vent ne pouvait rien contre eux dans cet état. Rien ne bougeait, si ce n'était la maison dans laquelle Canaille avait trouvé refuge quelques heures plus tôt, agacée de ne dénicher aucun échappatoire à la météo dégradée de ce mois d'hiver bien entamé. Si l'on pouvait appeler ça une maison. Quatre murs aussi fins que les hanches de la demoiselle, et un toit en taule défoncé par le temps et les intempéries. Il y'avait même un bout de toit qui était si défoncé qu'il laissait entrapercevoir une lune pleine et brillante parmi les nuages noirs de la nuit. Canaille avait toujours aimé vivre dangereusement, c'était connu. Et ce n'était pas une bicoque en coque de noix qui allait lui faire peur, surtout en cette soirée si particulière.

    Aujourd'hui, on ne fêtait rien. C'était le jour de sa séparation avec sa sœur de cœur. Pour l'instant la douleur était éteinte par un sommeil de plomb, que pas même les éléments n'arrivaient à gêner. Canaille dormait à poings fermés du sommeil du juste. Sa conscience tranquille dérivant dans les vagues de souvenirs qui lui restait, elle pêchait les poisson d'or de la mémoire dans les mondes immergés de Morphée. Cela faisait un petit moment que la révolution ne lui donnait plus de missions, et elle ne pouvait faire autrement que de se souvenir, gamberger, et laisser aller la morosité naturelle de son comportement délétère. Il fallait qu'elle s'occupe, alors elle avait choisit la nuit comme refuge, et après quelques coups à boire dans un vieux café du coin, elle soupait à la table de la nuitée. Tombée comme une masse après des heures de recherche, la crasseuse était presque mignonne quand elle n'était plus animée que par le souffle du sommeil. On aurait dit un ange perdu au milieu des hommes, une petite chose fragile qu'il fallait protéger ; D'elle même ou des autres, on ne le saurait jamais.

    La scène était trouble. Ils étaient tous attablés pour le déjeuner froid que l'on servait aux esclaves ce midi là. Tous sauf Canaille, qui pourrissait dans un trou creusé dans le sol ; Encore punie pour avoir répondu au domestique qui lui cassait les oreilles d'ordres et de mauvais sentiments. Elle pouvait néanmoins sentir que ce jour là, les patrons étaient clément avec les petites mains du domaine, peut-être pour contrebalancer la dureté des travaux en cette semaine particulièrement froide. Un repas froid pour tous n'était pas pour ainsi dire de la charité. Grattant la terre de ses petites mains, la Canaille qui n'avait que six ans espérait y trouver un ver ou deux pour se sustenter à son tour. Elle était prête à tout pour remplir le trou qui se formait lentement dans son ventre, creusant et pulsant même à travers ses côtes. Elle aurait tout donné pour un quignon de pain et pour qu'on la prive de cette volonté de rébellion qui l'animait encore maintenant ; Elle voulait être sage, et récompensée.
    Elle voulait qu'on lui prouve que la vie valait le coup d'être vécu. Cependant, elle n'y arrivait pas. A chaque fois que l'injustice de sa situation la sortait de sa torpeur mollassonne de la captivité, elle se retrouvait à dire et à faire des choses qui mettait en péril son existence même au sein des esclaves du Dragon. Elle n'y pouvait presque rien, c'était ainsi qu'elle était faite, ainsi que dieu avait sculpté son bois pour en faire un gourdin solide et solitaire. Solitaire ? Pas tant que ça. Elle sentait que ça s'agitait au tour de son trou, et elle leva naturellement la tête quand elle entendit un "Psssht Canaille". C'était Naomita. Elle fit glisser dans le trou quelques morceaux de pain et du jambon, que Canaille s'empressa de dévorer sans demander son reste. Elle ne la remerçia pas, c'était inutile. La gentillesse de sa sœur était une bonté d'âme qui ne nécessitait aucune forme de politesse, c'était comme ça qu'elles avaient toujours fonctionné, ce serrant les coudes dans les difficultés. Sauf que sa soeur était beaucoup plus calme qu'elle, et qu'elle faisait toujours bien attention à tout faire dans l'ordre et la propreté, ce qui l'avait conduite à servir dans la maison même du Dragon céleste.

    ***


    - J'veux m'enfuir d'ici.
    Il faisait nuit noire, et sur le camps des esclaves, tout le monde dormait.
    - Arrête tu sais bien qu'on ne peut sortir d'ici que les pieds devants, Canaille.
    Il faisait nuit noire, et seul deux petites de onze ans discutait dans l'anonymat de la nuitée.
    - Alors peut-être que j'devrais mourir. Ce serait mieux comme ça, pour tout le monde.
    Deux âmes torturées qui échangeaient leur point de vue sur la fange qu'elle fréquentait tout les jours.
    - Ne dis pas ça, qu'est-ce que je ferais sans toi, moi ? Tu y a pensé à moi avant de dire des conneries ?
    Une petite lueur brillait encore au fond de Naomita, qui, pareille aux roseaux, ployait sous le travail sans jamais rompre.
    - Oui, désolé Naomita, c'est que je suis fatigué de cette vie, c'est tout. J'te quitterai jamais !
    Elle savait comment lui redonner du baume au cœur cette petite. Une embrassade plus tard, les deux petites tombèrent comme des mouches dans du vinaigre, la journée avait été difficile pour tous. Comme tout les jours que dieu faisait dans ce monde infernal. Ce n'était pas la première fois qu'elle pensait à se suicider, plutôt que de subir cette humiliation constante que l'on appelait 'l'esclavage'. Elle n'avait jamais trouver comment, c'était tout. Et puis sa sœur ne la laisserait jamais sur le carreau, elle le savait bien. C'était son opposé et son absolu à la fois. Alors, tout près de son cœur qui battait à intervalle lent et régulier, elle se sentait en sécurité et capable de tout endurer. Même ce monde de fou.

    ***

    - Non, vous ne pouvez pas faire ça ! Cria Naomita pour la première fois depuis des années. Ne me l'enlevez pas ! Elle s'accrocha à Canaille comme si c'était son seul repère dans la tempête qui venait de s’abattre sur elles. Canaille aussi. Je veux pas la quitter, laissez moi ici s'il vous plait !
    - Soit raisonnable Canaille, il est l'heure d'y aller. Fit le domestique intraitable qui la tenait par le bras. Ne m'oblige pas à appeler la garde.
    - J'ai jamais été raisonnable vieux schnock, je vais pas commencer maintenant. Lâche moi bordel, laissez moi tranquille. Tout plutôt que d'être séparé de sa soeur, elle était son petit tout dans un grand rien. Tout mais pas ça !
    - Bon et bien tant pis, si la méthode douce ne fonctionne pas, on va passer à autre chose.
    - Punissez moi, punissez moi mais pas ça.
    - Les coups de fouets n'ont pas d'emprise sur toi, tu es la seule fautive Canaille. Maintenant on n'a plus d'autre choix que de se séparer de toi. Il n'y a pas de place pour toi dans notre monde. GARDES, venez ici !
    - Non pas ça !

    Le monde est impitoyable pour les esclaves. L’accalmie était terminée, maintenant elle partait dans son chariot bardé de métal vers le marché aux esclaves. C'était sans doute la dernière fois qu'elle voyait Naomita de toute sa vie. Aussi, grava-t-elle dans sa mémoire ses traits décomposés et couvert de tristesse pour ne jamais l'oublier ; C'était une promesse.
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    Elle se réveilla trempée et en sursaut. Le rêve l'avait secoué jusqu'au fondement. Tout les détails étaient gommés par le temps et la boisson, mais l'essentiel était remonté à la surface. Elle ne pouvait plus faire comme si cela n'avait jamais existé. Il était trois heures du matin, et elle n'avait plus sommeil. Les douloureux souvenirs avaient comme coupé toute envie de replonger dans les bras de Morphée. Elle ne pouvait pas échapper à ce qui la hantait. Il n'y avait qu'un seul moyen en faite. Botter quelques culs lui redonnerait du courage, peut être.
    Elle sortit dans le froid de l'hiver, ne prenant pas la peine de refermer derrière elle. De toute façon il n'y avait rien d’intéressant pour personne dans ce vieux local plein de crasse. Il n'y avait qu'elle pour lui trouver un quelconque intérêt. Elle avait toujours su voir au delà des apparences et faire fit des conventions pour arriver à ses objectifs. Un peu comme quand elle avait infiltré ce groupe d'esclave à Goa. Au premier abords ils semblaient tous ployer l’échine de bon grès devant la tyrannie de leurs maîtres. Mais au fond il y'avait un vent de révolte qui tonnait fort, et qui avait emporté toutes les barrières pour en faire un groupe hostile aux intérêts du gouvernement mondiale et de tout ceux qui permettait une telle infamie.
    Elle n'avait jamais abandonné l'idée de retrouver un jour sa sœur. Aussi, s'arma-t-elle d'un bout de papier et d'un stylo pour dessiner ses traits. Elle ne voulait pas oublier ce visage. Elle voulait se souvenir à jamais de sa sœur dont on l'avait privé. C'était le foyer de sa rage la plus viscérale, contre ce destin qui l'avait faite d'un bois différent que les autres, contre ces maîtres qui l'avaient séparé de la seule qui pouvait la comprendre ne serait-ce qu'un petit peu. Coincée sur le papier, celle là ne pourrait jamais être loin d'elle. Et elle avait l'utilité de pouvoir représenter sa sœur du mieux qu'elle pouvait. Canaille avait un don pour le dessin, c'était l'un de ses nombreux talents cachés par la crasse et la violence. On pouvait tout à fait reconnaître la petite fille. Elle ne semblait pas comprendre la vacuité de sa tentative, si bien qu'elle en oublia que Naomita avait dû grandir depuis le temps, et qu'elle ne pourrait jamais la retrouver ainsi, en battant le pavé et les bars les plus glauques à sa recherche.

    L'auberge du Trait était l'un de ses nombreux bars dont elle visita l'endroit, comme l'envers malheureusement. C'était un vieux bâtiment de bric et de broc, fait de pierre et de bois, battît sur la discrétion de ses propriétaires à l'égard de leur client, comme sur l'emplacement central qu'il occupait dans la ville. On était sur North Blue à cette époque. Manshon plus précisément. Et le froid n'épargnait personne, ce qui faisait les affaires de cette institution, connue pour ne jamais avoir porte close, que pour ses tarifs bon marché. A ce prix là, on ne nettoyait pas les verres et il fallait faire avec les puces et autres parasites qui infestait les banquettes. Au moins, il y'avait de l'ambiance. Et un feu brûlait toujours dans l'âtre. C'était presque attrayant pour la jeune femme, qui ne faisait pas gaffe au détail d'hygiène comme ses contemporains. Elle était à elle seule porteuse de plus de parasites que tout le bar dans son ensemble, pour sûr. Elle n'était pas là pour s'amuser cependant. Elle avait une mission, une de ses missions que l'on se donne sans avoir besoin d'aide extérieur. Une dictée par l'amour et non la hiérarchie. Elle devait retrouver sa sœur. Et pour ça, elle n’épargnait aucune piste. Elle commencerait par Manshon et terminerait à Marie-Joa si cela s'avérait nécessaire. Elle n'avait pas froid au yeux, et elle était prête à tout pour la revoir. L'amour vous disais-je, est un moteur plus puissant que n'importe lequel, il vous fait faire le pire comme le meilleur en son nom.
    Elle se dirigea vers le comptoir en prenant son dessin en mains. Elle commanda un double whysky, et questionna l'homme sur une possibles assez tirée par les cheveux. Elle était bien décidée à balayer tout le spectre des possibles.
    - Cette fille, vous l'avez déjà vu dans le coin ?
    - Nope ma p'tite dame. Ça fera cent berrys pour la boisson. Rétorqua le petit homme qui se tenait derrière le comptoir, avec ses petites binocles et son air d'aristo', on se demandait bien ce qu'un mec pareil faisait dans une maison aussi malfamé. M'enfin, ainsi va la vie. Elle est faite de bons et de mauvais choix, peut importe la tête que l'on a.
    Elle ne se laissa pas démonter pour autant. Elle avait la caboche dur comme l'acier le plus solide au monde, et rien ne lui importait plus que de retrouver Naomita. Peut-être avait-elle été vendue un peu plus tard, dans un recoin du monde qu'elle ne connaissait pas. Tout était possible. Aussi, fit-elle le tour des tables pour en savoir un peu plus long sur le monde qu'elle fréquentait tout les jours depuis quelques temps. Elle ne s'attendait pas vraiment à des réponses concrètes auprès d'alcoolique invétéré, mais elle se devait d'essayer.

    - Non mais toi je veux bien te connaître un peu plus ma mignonne que lui répondit Hassam, un mec de south blue qui avait assez roulé sa bosse pour se croire tout permis, même mettre une mains au fesse de la jeune révolutionnaire, qui bondit sur l'occasion pour passer ses nerfs sur cet énergumène. Elle n'eut le temps que d'un coup de poing dans la gueule du dit client, avant qu'intervienne la cavalerie en la personne du barman, qui déclara tout de go : Eh ho ! On se bat pas ici, si vous avez des différents, allez le régler dans la cage.
    La cage était une tradition de Manshon un peu particulière, qui datait de long. On réglait ses différent dans la cage. On perdait du sang et de la sueur, mais on y gagnait parfois un peu d'argent. C'était un des trucs de la pègre pour tenir les habitants si particuliers à cette île.
    - Arrête un peu Bo', la pauvre va pas s'en remettre après ça ... Qu'il fanfaronna le Hassam, pas du tout impressionné par la carrure de la révolutionnaire, ni par sa droite, apparemment, elle aurait dût frapper plus fort.
    - Si y'a que ça pour vous faire plaisir, j'en suis bande de gougnaffiers !

    La salle alors bien silencieusement explosa en une gerbe d'applaudissement et de hourra. Cela faisait longtemps qu'ils n'avaient pas eut de divertissement à l'auberge du Trait.

    Ils étaient semblable aux requins. L'odeur du sang les excitait.
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    Le barman désigna du pouce un petit escalier poussiéreux en colimaçon, qui s'enfonçait dans le sol vers une salle plus glauque encore que la principale. C'était une pièce aveugle où l'on sentait les relents de crasse, de sueur, de sang et de vomis qui avaient pu couler là par hectolitre. Au centre se trouvait La Cage, un rectangle de six pas de côté pour une douzaine de long faite d'acier et trouée d'une porte aux gonds rouillés ; On eut dit qu'elle s'étendait là depuis des éons, et que personne ne l'avait utiliser depuis longtemps. Les vrais savaient bien, ce n'était pas courant qu'un pignouf' acceptait de régler son différent là dedans, les rumeurs les plus folles coulaient à propos de cette cage, personne n'était assez fou pour risquer sa vie là dedans, simplement sur un coup de tête.
    Personne sauf Canaille. Et Hassam, qui était sûr de gagner et paradait déjà comme un paon parmi les hommes qui le suivirent dans un concert de brouhaha et de paris sur le gagnant de ce jour. Personne n'osait croire qu'un homme pouvait perdre devant une jeune fille comme notre révolutionnaire. Il mesurait près d'un mètre quatre vingt dix pour une centaine de kilos, un beau bébé qui avait des paluches comme des porte de prison et un vieux air de grigou' mal léché. Il n'était pas beau, mais alors pas beau du tout. On voyait poindre les os sur son visage, conséquence d'une vie de débauches et d'excès. Il avait de gros favoris le long d'un visage asymétrique et un rictus qui agitait souvent ses lèvres charnue. Le pauvre type se léchait les babines d'avance, mais malheureusement pour lui Canaille n'était pas d'humeur à laisser passer la moindre incartade.  
    Ils se pressèrent tout deux devant la porte, tandis que le barman devenait une sorte d'arbitre pas du tout réglementaire : Messieur, Dame, entrez donc sur le ring s'il vous plait. Je vous rappelle les règles, tous les coups sont permis, le premier à finir dans les choux ou à mourir perd le combat ! En scelle mauvaises graines ! Hassam se présenta le premier, enlevant son t-shirt en le déchirant avec les dents, montrant sa force devant tout ceux présent, les paris se faisant en catimini pendant ce temps là.
    Il espérait faire monter sa côte, juste pour le plaisir de battre à plat de couture et dans tous les domaines la petite Canaille qui entra à son tour par le côté de la cage. Tu peux encore abandonner, j'aime pas frapper les gonzesses.
    - Frappe donc au lieu de parler, vieux con à la sauce berbère ! fusèrent dans les airs qui séparaient les deux candidats à la violence de ce soir là. Il lui fit signe d'avancer, mais pas folle, elle resta sur ses gardes et lui annonça tout de go : Allez, c'est mon jour de bonté bordel de dieu, je te laisse un coup d'avance vieux ! Qui le fit bien rire, et le conforta intérieurement dans l'idée que cette nana était complètement folle ; Un coup d'avance vraiment ? Était-ce un stratagème pour le faire se découvrir et le contrer dès qu'elle le pourrait ? Non, elle n'était pas assez intelligente pour jouer à ses jeux là. Elle avait accepté un combat perdu d'avance pour une main au fesse, cela l'aurait étonné qu'elle soit capable de faire pareille facétie. Il prit donc son temps, sous les hués du publique qui voulait que ça "commence enfin".
    Il prit son temps et visa juste. Un belle droite en cloche direct au menton, qui secoua Canaille dans ses fondations, jusqu'au fondement même de son anatomie qui trembla et se contracta derechef. C'était qu'il avait une bonne droite celui-là ! Peut-être ne s’ennuierait-elle pas pour une fois. Par terre, elle se mit à rire tandis que du sang reflua dans sa bouche, qu'elle cracha par terre sans une once de féminité ni de grâce. C'était à son tour de montrer ce qu'elle valait.
    Elle se releva d'un bond contrôlé à la perfection, feinta un coup de poing direct pour mieux frapper du pied en plein dans le genoux de son adversaire. Il ploya quelques peu sous l'impact, mais pas autant qu'elle ne l'aurait espéré, elle devrait peut-être frapper plus fort pour blesser un homme pareil. Cela la rassurait un peu, on ne trouvait pas que des lopettes à traîner dans les bars louches de Manshon. Elle enchaîna avec un coup de pied fouetté au visage, usant de sa main droite pour rester bien équilibrée, sauf qu'Hassam n'était pas né de la dernière pluie, et qu'il avait prévu le coup, gardant pour mieux résister à l'impact, le coup de pied termina dans son avant bras gauche, qui se leva au contact. Il voulut porté un coup de poing mais Canaille glissa sous ce dernier, et lui fit un atémi au côte en passant, ce qui fragilisa sa garde suffisamment pour qu'elle y glisse un bras rageur, qui frappa contre son menton. Retour à l'envoyeur.
    Il essaya de l'attraper pour mieux la projeter, mais elle se défit de son manteau en route, le laissant sur sa faim. Elle profita de l'instant pour lui envoyer une pépite dans le nez, qui grinça comme une carrosserie sous un coup de marteau. La douleur le fit grogner, et il envoya au loin le cuir de la donzelle. Piqué au vif, il tenta une nouvelle fois de l'aborder, d'une manière peu conventionnelle cette fois-ci. Taclant au niveau des jambes, il la fit tomber au sol et tenta de la soumettre de tout son poids.
    Malheureusement il n'était pas assez fort ni lourd pour la jeune révolutionnaire : Elle se défit de l'emprise en forçant sur son bras droit, et se souleva assez pour le faire rouler sur le côté. Ils ne faisaient presque plus qu'un. Une façon de s'unir dans l'absolue violence qui, pourtant, ne plaisait guère à Hassam. Il sentait bien qu'il était entrain de se faire plumer.
    Il se dégagea de l'emprise de Canaille d'un coup d'épaule, et essaya de l'atteindre au ventre avec son pied, qui termina dans une poigne sévère de la révo' survoltée, qui le fit pivoter sur lui même et retourner au sol fissa.
    Dehors on se bousculait pour mieux voir, on criait sur l'un ou l'autre de ses poulains pour le motiver, on faisait la fête également, un petit bar traînait au fond de la salle. Toujours prêt pour faire du benef'.
    Celui qui prenait tarif maintenant, c'était Hassam. Après les échanges consensuels venait l'échange à sens unique, Canaille prenant largement le pas sur sa personne.
    Un jab du droit, un uppercut du gauche, quelques coups de pieds bien placés mirent fin aux velléités de son adversaire, qui, timidement, occupait le coin droit de la cage, se faisant littéralement explosé à coups de poings et de pieds. Le monde est sombre et plein de gens compliqués, une leçon qu'il retiendrait dans l'hémoglobine.

    Elle allait s’éclipser quand soudain ...

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    ALORS COMME CA ON S'AMUSE SANS M'INVITER !!!? Tonna un type depuis les escaliers. Le silence se fit dans l'assemblé, on aurait dit une messe religieuse qui venait de commencer.
    Tous connaissaient le type qui avait gueulé ça, et personne n'avait envie de se le mettre à dos : Ray "Badass" était de sortis et il valait mieux numéroter ses abattis en sa présence. Il avait une réputation à tenir le gars, et même si Canaille ne le connaissait pas, elle avait vu assez de mauvais garçons pour en reconnaître un rien qu'à l'odeur.
    C'était un créteux, comme elle, et il avait du style avec ses piercings, comme elle. Sa musculature était bien dessiné sans pour autant être outrageante, et il portait des bandes de cuir tissées autours de ses mains comme la toile d'une araignée. Il aurait pû être beau-gosse, mais au lieu de ça, il était bad-ass. Il descendit de son perchoir pour arrivé au milieu de la foule qui se poussa littéralement sur son passage, ne souhaitant pas embêter le roi de l'underground et des combats en cage. Lui, il goûtait le plaisir que la peur peut laisser parfois en arrière goût, à celui qui la pratique bien. Et dans le bon sens.
    Encore un client ? Se dit-elle, la main vissé sur le crâne à se faire reluire les plumes qui y étaient accrochées ce jour là. Elle avait encore assez de punch pour un deuxième, le premier n'avait pas été très endurant, au final. Elle était un peu déçu donc un peu d'action supplémentaire ne lui aurait fait que du grand bien. Elle fit craquer sa nuque et ses doigts de concert, et elle était déjà prête à relever le défi qui ne tarderait pas de poindre son nez. Elle avait de l'instinct, la petite. Et elle sentait viscéralement la violence qui animait le corps de Ray. A chaque pas, il enfonçait sa botte dans le sol poussiéreux et laissait une marque sans équivoque sur sa puissance. A chaque pas on sentait vibrer l'air et tonner la douce musique du combat ensanglanté. La tension fut à son comble quand il passa la porte en annonçant :Toi, oui, toi petite. Je te défis dans la cage pour l'avoir pratiqué sans m'avertir avant ! Pointant un index accusateur contre la révolutionnaire, qui se curait les dents pendant ce temps là. C'était du spectacle pour épater la galerie. Elle en avait horreur.
    Elle était en débardeur qui aurait pû être blanc mais qui tirait plus vers le jaunâtre vu l'hygiène de vie de la jeune femme. On voyait ses bras musclés et forgés par le combat et la violence quotidienne. On voyait ses veines ressortir et on y voyait presque pulser le sang à travers. L'adrénaline au top, elle affichait un sourire rouge mais confiant.
    - Encore un flagorneur, qu'est-ce que vous avez tous avec vos effets d'annonce, y'a pas de vrais mecs qui tapent avant de parler à Manshon ou quoi ?[/b] Lâcha-t-elle pour bien lui faire comprendre qu'elle n'avait pas peur.
    Elle venait de s'en taper un, et elle ne voyait pas ce qui pouvait l'empêcher d'aller vers une seconde victime. Elle allait le malmener, lui mener la vie dure, lui faire ravaler les dents et sa fierté mal placée. Oh oui, et elle allait en prendre beaucoup de plaisir. Un plaisir quasi-orgasmique. Elle frappa une main contre l'autre, mais sa provocation avait fait mouche, avant de pouvoir faire quoi que ce soit, elle se retrouva ceinturée par le Ray, qui tenta un german souplex dont elle évita presque la secousse en utilisant ses bras comme couverture. Le combat était lancé.
    Elle se mit debout aussi vite que possible, et se mit en garde comme à l’accoutumé, un bras devant l'autre, dans une pose plus agile que protectrice. C'était le moment de montrer sa science du combat, mais elle avait déjà pu goûter à celui de son adversaire, qui n'était pas mauvaise non plus, ça s'annonçait marrant.
    [b]- Bah voilà c'est bien mieux comme ça, dansons ensemble !
    Qu'elle fit en crachant par terre un autre glaviot plein de sang.
    A peine terminé, déjà commencé. Elle aimait le flux tendu la petite, elle aimait qu'on la pousse dans ses retranchement et qu'on la fasse vibrer. Et Ray semblait être du genre à réussir là où Hassam avait échoué : Lui offrir un vrai combat digne de ce nom. Elle ne vivait presque que pour le combat et la bataille. C'était une aspirante à la guerre, qu'elle soit pure et dure, ou bien sournoise et intestine. Pas pour rien qu'elle s'appelait Canaille ; Elle aimait s’encanailler le plus possible avec autant d'homme que nécessaire. Que ce soit sur le ring ou bien dans son lit.
    Bizarrement malgré sa crasse elle arrivait toujours à ses fins avec les hommes. Il était si facile de les manipuler. Si facile que ça en devenait ennuyeux au bout d'un moment, alors elle en arrivait à ses vieilles amours, le combat poing contre poing.
    Il attaqua une nouvelle fois, essayant de la prendre dans un étaux sournois. Elle recula et fouetta l'air d'un coup de pied, qui rata de peu sa victime. Il avait des réflexes, c'était certain. Il tenta de l'accrocher, mais elle ne se laissa pas faire, et ils passèrent plusieurs minutes à lutter l'un contre l'autre, scotchés comme une paire de burne sur un marin mal embouché. Il se détachèrent très vite de cette étreinte, ou, l'un comme l'autre, avait pu comprendre qu'ils étaient d'une puissance équivalente.
    Le combat se ralentit alors, comme si le temps et le publique n'existait plus. C'était feinte sur feinte, et testage de combo qui rataient inlassablement leurs adversaires. Ils étaient tout deux vifs, et dans la fleur de l'âge. On aurait dit qu'il faisait plus l'amour que la baston, mais tout deux s'en fichait. C'était leur moment. Le moment ou la gloire disparaissait au profit du plaisir.
    Tout deux étaient fait pour se battre depuis leur naissance.

    Echange de coups ; Quand tu zig, elle zag, et vice versa. Ils étaient sur la même longueur d'onde, ne rien lâcher, toujours plus et toujours plus fort surtout. Il frappa du droit, elle contra du gauche et tenta une prise, la clef de bras capable d'ouvrir ce match à sa dominance. Il se dégagea sans demander son reste, conscient du danger qu'elle représentait. Il revint à la charge néanmoins, tenta un coup de pied sur son genoux, qu'elle amortit du tibia, ravalant la douleur pour mieux dégainer son poing dans sa face. Il encaissa ; Il rendait même le coup du coude dans une arcade qui explosa au contact et salit le visage de Canaille d'un filet d'hémoglobine. Cela l’électrisa encore plus, réveillant son ego, elle monta au contact d'un coup de genoux rageur dans le menton de son adversaire. Il faillit se mordre la langue mais tint bon la barre et le vent.
    C'était une bataille à armes égales, elle le savait bien, elle avait cinquante pour cent de chance de gagner ce soir là. Que la balance penche d'un côté ou de l'autre ne voulait rien dire au stade auquel ils étaient. Ils commençaient à peine à s'apprivoiser. Elle attendit le coup suivant en mettant ses bras perpendiculaire au sol, dans une garde solide pour tout ce qui touchait le visage. Il visa les côtes mais s'heurta à des abdominaux serrés en rangs impénétrables. Elle rendit d'un coup de pied dans le tête, il continua son œuvre de destruction des abdos'.
    C'était coup sur coup qu'il se rendait là, chacun mettant le maximum de puissance dans chacun d'entre eux. La sueur commençait à couler sur les tempes de Canaille, faisant presque glisser les coups de son adversaire, tandis que ses coups à elle portaient durs. Cela faisait une petite différence, mais quand on était a ce point semblable l'un à l'autre, les petits détails pouvaient tout changer. Crac. Schlonk. Zbaff. Re-Crac, schlonk, zbaff. Une valse des coups les plus sordides de tout les temps, en passant par les coups au menton jusqu'à ceux, plus vicieux, des coups au foie.
    On essayait de s'affaiblir l'un l'autre au maximum, ils étaient comme des boucher voulant attendrir une viande nerveuse. Les coups pleuvaient par dizaine, et aucun des deux ne voulaient lâcher le morceau. C'était de vrais Pit bull, une fois les crocs plantés dans une cible, ils ne lâchaient plus. La fatigue gagna rapidement Canaille, qui avait déjà un combat dans les pattes et dont l'endurance était peut être moindre que celle de son adversaire du jour. Elle se décida pour un petit changement des règles du jeu.
    Elle frappa le genou de son adversaire, prit appuis sur sa cuisse, et percuta du coude le haut de son crâne en redescendant. Elle enchaîna d'un coup de genoux dans son nez, qui se brisa sous l'impact et saigna abondamment. Elle le travailla ensuite au corps, attrapant sa nuque avec les mains, elle usa toujours de son genou pour faire s'écrouler son adversaire le plus rapidement possible. Il était étourdit, elle en profita pour prendre trois pas d'élan, et l'assommer définitivement d'un uppercut du droit en plein dans sa mâchoire. Ray s'écroula dans un gargouillis sanglant et le tour fut joué. Elle avait gagné son duel mais pas qu'à la régulière, aussi, elle sortit de la cage sous les huées du publique, qui avait tous misé sur la victoire du Bad-ass. Dommage pour eux, Canaille avait eut l'ascendant et en avait profité comme il le fallait. Prenant appuis sur le rebords de la cage, elle savourait l’adrénaline que cela avait créer dans ses veines en riant à gorge déployée.

    ***
    Pourquoi tu te bats, Canaille ? Pourquoi tu n'abandonnes pas ?
    - Parce que j'peux le faire.
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