- Daemon ! C'est quand tu veux...
BANG ! BANG !
- Daemon ! Moka ! Matt...
- Matt... Attention à...
- Arhye ?
J'entends une voix à mon oreille. Une voix familière. C'est une sensation étrange car j'ai l'impression de l'avoir entendue il y a peu... Alors que j'émerge petit à petit d'un sommeil que je devine très long. Les derniers souvenirs que j'ai se mélangent aux sons et aux odeurs qui me parviennent. Mes sens me reviennent... Je reprends peu à peu conscience et chaque parcelle de mon corps se réveille.
Et ça fait mal...
Je grimace avant même de pouvoir ouvrir les yeux. J'ai la tête en feu, et même l'extrémité de mes orteils est douloureux. Mes doigts sont engourdis, j'ai des fourmis qui me grimpent le long des jambes et des frissons qui me parcourent l'échine. J'ose entrouvrir une paupière et la lumière au dessus de moi jaillit brutalement, désagréable au possible. Les larmes montent.
Une silhouette se dessine sur ma droite, rendue floue par l'écran aqueux sur ma rétine. Je reconnais pourtant les cheveux blonds de mon ami :
- Matt !
Je savais au moment où j'ai ouvert la bouche que le geste instinctif exécuté dans la foulée allait me calmer. En souhaitant me redresser, une raideur a de suite empêché mon buste de se redresser et mes bras de se plier. Je suis allongé, incapable de bouger le moindre muscle au risque de me blesser davantage.
- Vaut mieux pour toi que tu restes tranquille encore un moment mon vieux. Tu risquerais de vexer le médecin.
- Le médecin ? Léonardo... Il est là ? Et les autres ?
Je distingue enfin le visage de Matt. Celui-ci arbore un air triste et se met à faire "non" de la tête :
- Désolé... Il n'y a que nous deux.
Avant que je ne puisse répondre quoi que ce soit, une porte s'ouvre dans le fond de la pièce. Une femme entre alors dans mon champ de vision. Une belle femme aux cheveux noirs attachés en un chignon complexe, vêtue d'un kimono et tenant dans ses mains une bassine de laquelle s'échappe des fumerolles. Son regard est... Incroyablement doux. Si doux que j'en oublie presque ce que vient de dire Matt.
Elle sourit en me voyant et approche sa main de mon visage :
- Ah, le voilà revenu à lui. J'en suis heureuse.
Même sa voix est empreinte de tendresse. Un peu comme une mère s'adressant à son petit... Sauf que...
- Reuh ! Teuh !
Je me mets à tousser. De nouveau les larmes me montent aux yeux : les fumerolles sont parvenues jusqu'à mon nez et leur parfum puissant embaume mes narines tout en se mélangeant aux odeurs alentours. J'en reconnais certaines. Toutes des plantes aromatiques !
La femme en kimono pose aussitôt la bassine sur une table à côté d'elle et pose sa main sur mon front :
- Désolé pour ça... Hmm... La température est bonne. Voyons par là... Tu permets que je vérifie ? Alors... Le pouls... Régulier. Parfait. Tout semble aller pour le mieux. Je vais pouvoir retirer les aiguilles.
- Keuh ! Les... Quoi ?
- Les aiguilles.
Je la regarde d'un air étonné, cligne des yeux, tourne la tête vers Matt, lequel hausse les épaules avant de me pointer quelque chose du menton :
- Les aiguilles Arhye.
Je suis son mouvement. Je baisse le regard du mieux que je peux et je les vois : des dizaines et des dizaines d'aiguille plantées ça et là sur mon torse, sur mes bras et sur mes jambes. Aussitôt je comprends d'où viennent les raideurs....
Un nouveau frisson me traverse et, dans la seconde qui suit, je sens mon esprit s'envoler une nouvelle fois alors que le monde s'assombrit à nouveau...
- Hé ... Hé ! HÉ ! Arhye !
- Oh... Il est du genre sensible, n'est-ce pas ?
- Comment te sens-tu ? Tu as froid ? Tu veux que je te réchauffe ?
- Hum ! Non merci ! Je vais bien. Cette femme a fait des merveilles...
- Oh ça c'est sûr ! Parce que tu peux me croire : au début j'ai vraiment cru que c'en était fini de toi...
- ... Explique-moi Matt. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
Et Matt se met à tout m'expliquer : comment l'assaut du glacier de Jotunheim s'était passé au moment où j'ai demandé à Daemon de foncer ; comment nous nous étions fait épingler par les forces de défense ennemies ; comment nous avions été bombardé par la Marine ; comment j'avais fini par tomber à l'eau, au milieu des débris et des stalactites, le front en sang et l'avant-bras disloqué ; comment il était venu à mon aide, effrayé... Il avait nagé, avec moi inconscient sur son dos, le plus loin qu'il a pu du combat, jusqu'à se laisser dériver, épuisé, sur une planche flottant par là. Il n'avait pas compté le temps passé, mais au bout d'un moment, un navire était apparu. Il s'était époumoné en l'appelant à l'aide jusqu'à ce qu'on vienne nous repêcher. Et nous avions fini par atteindre cette île, Drum, où Chunyu Yi s'est occupée de nous jusqu'alors.
Chunyu Yi fait partie des Toubib 20, le cercle des meilleurs médecins du royaume. Etant l'une des rares à vivre de son côté sans dépendre entièrement de son souverain, elle nous avait pris en charge par pur altruisme. Philanthrope de nature, la belle étrangère souhaite simplement sauver des vies, parce qu'elle le peut.
- Ça me fait penser qu'il y a un moment qu'ils ne se sont pas montrés...
- Qui donc ?
- Ceux qui nous ont amené sur l'île. Leur bateau est amarré au port, près d'ici. Leur capitaine venait régulièrement prendre de tes nouvelles... Même si je ne saurai pas dire s'il en avait vraiment quelque chose à faire.
- Comment ça ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Oh tu comprendras vite en le voyant.
- ... Au fait. J'ai envie...
- Envie ?
- Ouais... Envie de...
- Moi ?
- NAN ! D'une cigarette. Ça fait un moment. Je crois pas avoir eu l'occasion de fumer pendant l'assaut d'ailleurs.
- Oh ça non, tu peux me croire... Mais je pensais qu'avec toute la fumée qu'elle te faisait inhaler ces derniers jours ça allait te sevrer. La moxibustion, c'est quelque chose...
- La moxi... Hein ?
- Disons que tu ne faisais pas que ressembler à un porc-epic : il y a des fois où tu ressemblais à un début de feu de camp. Tiens regarde là.
Je regarde l'endroit que pointe Matt du doigt : mon avant bras droit. Je le soulève doucement, le tourne et constate avec horreur le cercle de peau rougeâtre qui le décore.
Je me remets à trembler.
- Matt... Dis-moi que j'en ai pas d'autre.
- ...
- Matt.
- ... Tu l'as dis toi-même Arhye : cette femme a fait des merveilles et...
- Oh putain.
Chunyu Yi. Je commence à avoir peur de sa douceur apparente désormais.
BANG ! BANG !
- Daemon ! Moka ! Matt...
[...]
- Matt... Attention à...
- Arhye ?
J'entends une voix à mon oreille. Une voix familière. C'est une sensation étrange car j'ai l'impression de l'avoir entendue il y a peu... Alors que j'émerge petit à petit d'un sommeil que je devine très long. Les derniers souvenirs que j'ai se mélangent aux sons et aux odeurs qui me parviennent. Mes sens me reviennent... Je reprends peu à peu conscience et chaque parcelle de mon corps se réveille.
Et ça fait mal...
Je grimace avant même de pouvoir ouvrir les yeux. J'ai la tête en feu, et même l'extrémité de mes orteils est douloureux. Mes doigts sont engourdis, j'ai des fourmis qui me grimpent le long des jambes et des frissons qui me parcourent l'échine. J'ose entrouvrir une paupière et la lumière au dessus de moi jaillit brutalement, désagréable au possible. Les larmes montent.
Une silhouette se dessine sur ma droite, rendue floue par l'écran aqueux sur ma rétine. Je reconnais pourtant les cheveux blonds de mon ami :
- Matt !
Je savais au moment où j'ai ouvert la bouche que le geste instinctif exécuté dans la foulée allait me calmer. En souhaitant me redresser, une raideur a de suite empêché mon buste de se redresser et mes bras de se plier. Je suis allongé, incapable de bouger le moindre muscle au risque de me blesser davantage.
- Vaut mieux pour toi que tu restes tranquille encore un moment mon vieux. Tu risquerais de vexer le médecin.
- Le médecin ? Léonardo... Il est là ? Et les autres ?
Je distingue enfin le visage de Matt. Celui-ci arbore un air triste et se met à faire "non" de la tête :
- Désolé... Il n'y a que nous deux.
Avant que je ne puisse répondre quoi que ce soit, une porte s'ouvre dans le fond de la pièce. Une femme entre alors dans mon champ de vision. Une belle femme aux cheveux noirs attachés en un chignon complexe, vêtue d'un kimono et tenant dans ses mains une bassine de laquelle s'échappe des fumerolles. Son regard est... Incroyablement doux. Si doux que j'en oublie presque ce que vient de dire Matt.
Elle sourit en me voyant et approche sa main de mon visage :
- Ah, le voilà revenu à lui. J'en suis heureuse.
Même sa voix est empreinte de tendresse. Un peu comme une mère s'adressant à son petit... Sauf que...
- Reuh ! Teuh !
Je me mets à tousser. De nouveau les larmes me montent aux yeux : les fumerolles sont parvenues jusqu'à mon nez et leur parfum puissant embaume mes narines tout en se mélangeant aux odeurs alentours. J'en reconnais certaines. Toutes des plantes aromatiques !
La femme en kimono pose aussitôt la bassine sur une table à côté d'elle et pose sa main sur mon front :
- Désolé pour ça... Hmm... La température est bonne. Voyons par là... Tu permets que je vérifie ? Alors... Le pouls... Régulier. Parfait. Tout semble aller pour le mieux. Je vais pouvoir retirer les aiguilles.
- Keuh ! Les... Quoi ?
- Les aiguilles.
Je la regarde d'un air étonné, cligne des yeux, tourne la tête vers Matt, lequel hausse les épaules avant de me pointer quelque chose du menton :
- Les aiguilles Arhye.
Je suis son mouvement. Je baisse le regard du mieux que je peux et je les vois : des dizaines et des dizaines d'aiguille plantées ça et là sur mon torse, sur mes bras et sur mes jambes. Aussitôt je comprends d'où viennent les raideurs....
Un nouveau frisson me traverse et, dans la seconde qui suit, je sens mon esprit s'envoler une nouvelle fois alors que le monde s'assombrit à nouveau...
- Hé ... Hé ! HÉ ! Arhye !
- Oh... Il est du genre sensible, n'est-ce pas ?
[...]
- Comment te sens-tu ? Tu as froid ? Tu veux que je te réchauffe ?
- Hum ! Non merci ! Je vais bien. Cette femme a fait des merveilles...
- Oh ça c'est sûr ! Parce que tu peux me croire : au début j'ai vraiment cru que c'en était fini de toi...
- ... Explique-moi Matt. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
Et Matt se met à tout m'expliquer : comment l'assaut du glacier de Jotunheim s'était passé au moment où j'ai demandé à Daemon de foncer ; comment nous nous étions fait épingler par les forces de défense ennemies ; comment nous avions été bombardé par la Marine ; comment j'avais fini par tomber à l'eau, au milieu des débris et des stalactites, le front en sang et l'avant-bras disloqué ; comment il était venu à mon aide, effrayé... Il avait nagé, avec moi inconscient sur son dos, le plus loin qu'il a pu du combat, jusqu'à se laisser dériver, épuisé, sur une planche flottant par là. Il n'avait pas compté le temps passé, mais au bout d'un moment, un navire était apparu. Il s'était époumoné en l'appelant à l'aide jusqu'à ce qu'on vienne nous repêcher. Et nous avions fini par atteindre cette île, Drum, où Chunyu Yi s'est occupée de nous jusqu'alors.
Chunyu Yi fait partie des Toubib 20, le cercle des meilleurs médecins du royaume. Etant l'une des rares à vivre de son côté sans dépendre entièrement de son souverain, elle nous avait pris en charge par pur altruisme. Philanthrope de nature, la belle étrangère souhaite simplement sauver des vies, parce qu'elle le peut.
- Ça me fait penser qu'il y a un moment qu'ils ne se sont pas montrés...
- Qui donc ?
- Ceux qui nous ont amené sur l'île. Leur bateau est amarré au port, près d'ici. Leur capitaine venait régulièrement prendre de tes nouvelles... Même si je ne saurai pas dire s'il en avait vraiment quelque chose à faire.
- Comment ça ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Oh tu comprendras vite en le voyant.
- ... Au fait. J'ai envie...
- Envie ?
- Ouais... Envie de...
- Moi ?
- NAN ! D'une cigarette. Ça fait un moment. Je crois pas avoir eu l'occasion de fumer pendant l'assaut d'ailleurs.
- Oh ça non, tu peux me croire... Mais je pensais qu'avec toute la fumée qu'elle te faisait inhaler ces derniers jours ça allait te sevrer. La moxibustion, c'est quelque chose...
- La moxi... Hein ?
- Disons que tu ne faisais pas que ressembler à un porc-epic : il y a des fois où tu ressemblais à un début de feu de camp. Tiens regarde là.
Je regarde l'endroit que pointe Matt du doigt : mon avant bras droit. Je le soulève doucement, le tourne et constate avec horreur le cercle de peau rougeâtre qui le décore.
Je me remets à trembler.
- Matt... Dis-moi que j'en ai pas d'autre.
- ...
- Matt.
- ... Tu l'as dis toi-même Arhye : cette femme a fait des merveilles et...
- Oh putain.
Chunyu Yi. Je commence à avoir peur de sa douceur apparente désormais.