La porte de l'auberge de nulle part s'ouvre avec fracas sous la pression de ma papatte un poil trop impatiente de rencontrer le chaud d'un âtre réconfortant. Les gueules des environs feraient sursauter des gargouilles, et c'est plus le vent frais que j'apporte que ma carrure qui les fait river leur attention dans ma direction; sans parler du rennes lourd comme un âne mort que je trimballe dans ma hotte et dépose dans les premières planches éclairées par la danse des sages flammes.
La porte !
Qu'ils m'accueillent, sympas comme des consanguins que je dérange en plein anniv du petit dernier. Je m'engouffre entièrement dans l'auberge et referme derrière moi. Enfin, j'essaye. Me semble avoir pété le verrou avec ma caresse de semelle. Hmm, pas bon ça. S'ils me demandent de payer je vais devoir trouver une combine. A défaut de m'excuser, erreur fatale, je les gratifie d'un sourire et repousse la porte du talon. J'attrape une table que personne n'alourdit de ses coudes et la cale pour faire taire une bonne fois pour toutes les protestations du blizzard. Le relatif silence a repris ses droits, personne ne mourra gelé ce soir. C'est moi qui le brise, en me présentant à ce beau monde:
Je m'appelle Minos, Roi d'un endroit si beau et si loin que vous ne pouvez en rêver que sur carte postale. Je trimballe un butin, Pranker, Renne du padre de noël. J'ai pour objectif de le rendre à son proprio en échange d'une prime. Est-ce que quelqu'un souhaite s'y opposer ?
Silence, que je passe à dévisager chaque trombine. Y en a qui s'en foutent, y en a qui font mine de s'en foutre. Tout le monde a l'air affairé à sa petite vie comme des boules d'un sapin destinée sà ne jamais se croiser. Peu de chances que ça s'enguirlande, très bien.
Bon. Va te réchauffer Pranker. Y a du fourrage ici ?
Dans l'étable, me précise un type sur le ton du reproche.
Bon, ben qu'est-ce que t'attends pour aller m'en chercher ? que je sympathise.
Va t'faire, t'as vu le temps qu'il fait dehors ? Je vois pas ce que j'y gagnerais à part la crève.
D'où tu crois que je viens, connard ? Evidemment que je sais que ça caille dehors. Seulement voilà, hors de question de vous laisser seuls avec ma prise. Je connais pas vos moeurs, faut que je surveille ce truc en permanence. Par contre, y a bien un truc à gagner. Ca.
J'extrais de ma poche un collier en or avec une incrustation de qualité médiocre. Pour quelques pas dans la neige, ça fait un sacré salaire quand même. Le type récalcitrant jure, maudit son avarice et accepte la quête. L'assemblée contient ses protestations quand le froid repasse une tête le temps qu'il disparaisse dans la nuit. Moi, je m'installe et me sers un vin chaud. Pas rat, je tape aussi une pièce de viande salée sur la table en invitant qui veut à détourner quelques tranchettes. Y a deux gars qui se pointent, dont un qui cause. Il remercie, commente la barbaque et voit que j'attends qu'il lâche le pourquoi d'une si naturelle sympathie.
Ce renne, il ne ressemble pas à ceux de la région. Comment s'est-il égaré dans nos contrées ?
T'as l'air de t'y connaître. Trapeur ?
Oui. Je traque et chasse un tas de proies. Bob A. Fête, qu'il fait en tendant la pogne pas grasse.
Enchanté Bobby. Ben je suis ravi que tu poses la question, parce que c'est une affaire. une putain d'affaire cette histoire. Je te raconte. Tout a commencé quand j'ai rejoint la bande d'un révolutionnaire. Butch K Silly. Le type gentilhomme, poli et sociable. Mais aussi un indécrottable fouteur de merde lorsqu'il s'agit de pognon. Bref, après quelques cavales, la bande me recrute pour un coup qui nécessite une force supplémentaire. J'avais déjà un cheval, des antécédents judiciaires, j'étais la bonne recrue pour cette affaire. On s'est retrouvés là, dans la neige, à attendre l'arrivée du Snowpiercer. Et le Butch, il croyait que se chauffer les cordes vocales nous ferait oublier à tous les rafales de glace qu'on se prenait sur la coin de la gueule...
Ecoutez tous une minute. Ces derniers jours on été difficiles. J'adorais Davy, Ed, Jack. Mais on a perdu du monde. Si je pouvais m'allonger six pieds sous terre à leur place, je le ferais. Nous allons réussir ce dernier coup et nous remplir les poches d'or, suffisamment d'or pour pouvoir acheter de la terre. Et ensuite, nous cultiverons les mandarines à Cocoyashi jusqu'à la fin de nos jours. On s'est déjà sortis de situations bien pires. Restez forts, ne me lâchez pas. On va s'en sortir.
Mika tastrov, Sad I. Sterrick, Arthub R. Cullos, Ils mettent tous leur foulard. Du coup, moi aussi, parce que j'ai beaucoup de personnalité. Un coup d'éperons plus tard, nous dévalons la colline enneigée, à la poursuite du Snowpiercer que vient de régurgiter la montagne. Sur le chemin qui sépare l'embuscade des rails, Arthub et Butch se disputent, comme toujours.
Je ne suis vraiment pas sûr que ce soit le moment d'attaquer ce train, Butch.
Arthub, mon fils, nous avons besoin d'argent pour nous retirer. Encore un dernier coup et nous pourrons nous détendre au soleil des mandariniers.
Tu l'as déjà dit la fois précédente Butch. On a besoin de se mettre au vert le temps que la situation se calme.
Tout ce dont on a besoin, c'est un plan !
Mais quel plan, à la fin ? Tu manigances un tas de missions périlleuses, nous perdons des hommes et tu ne nous dis rien.
Je commence à en avoir assez d'être sans cesse remis en question, Arthub ! Je dépense toute mon énergie à garantir notre survie, à me battre pour que nous nous en sortions et toi, tu mets tout en doute et mets en péril notre réussite parce que tu es en proie aux doutes et insistes pour en savoir plus. Tu insistes ! Le plan, c'est que j'ai un plan. Et maintenant j'aimerais qu'on arrête de mettre systématiquement toutes mes décisions en doute.
Tu devrais la fermer et te concentrer sur ton rôle, péquenaud. Toi et Minos, devrez forcer un max de coffre pendant que Sad et moi ferons les poches des voyageurs. Si Butch n'arrête pas la locomotive à temps, nous n'aurons que quelques minutes d'ici l'arrivée à Jalabert et ses tapettes de philosophes.
L'odeur des livres te donne des allergies hein Mika ? Pour toi le papier ne sert qu'à alimenter les feux.
C'est le cas. Et je prendrais plaisir à me réchauffer avec les dessins de couilles de chevaux de ton journal intime.
Ca suffit, vous deux. Gardez votre énergie pour la mission. Minos, saute sur le train dès que tu peux. Les soutes arrières devraient compter deux gardes. Evitez les coups de feu autant que possible. Le son circule très bien dans la région.
Je profite du calibre de ma monture pour avaler trois pas quand les autres galèrent à suivre mon allure. J'avais proposé d'arrêter la loco moi-même, mais Butch préférais s'en occuper seul. Son choix. Après m'être mis en danseur sur la selle, je pousse du pied sur...
...la porte !
Côté neige, on tambourine contre l'entrée bloquée d'une table. Le zig envoyé au fourrage hurle, jure qu'il va mourir de froid et nous lance moultes damnations. J'interromps mon récit, me lève et retire le meuble pour laisser le maugréant apporter le foin.
La porte !
Qu'ils m'accueillent, sympas comme des consanguins que je dérange en plein anniv du petit dernier. Je m'engouffre entièrement dans l'auberge et referme derrière moi. Enfin, j'essaye. Me semble avoir pété le verrou avec ma caresse de semelle. Hmm, pas bon ça. S'ils me demandent de payer je vais devoir trouver une combine. A défaut de m'excuser, erreur fatale, je les gratifie d'un sourire et repousse la porte du talon. J'attrape une table que personne n'alourdit de ses coudes et la cale pour faire taire une bonne fois pour toutes les protestations du blizzard. Le relatif silence a repris ses droits, personne ne mourra gelé ce soir. C'est moi qui le brise, en me présentant à ce beau monde:
Je m'appelle Minos, Roi d'un endroit si beau et si loin que vous ne pouvez en rêver que sur carte postale. Je trimballe un butin, Pranker, Renne du padre de noël. J'ai pour objectif de le rendre à son proprio en échange d'une prime. Est-ce que quelqu'un souhaite s'y opposer ?
Silence, que je passe à dévisager chaque trombine. Y en a qui s'en foutent, y en a qui font mine de s'en foutre. Tout le monde a l'air affairé à sa petite vie comme des boules d'un sapin destinée sà ne jamais se croiser. Peu de chances que ça s'enguirlande, très bien.
Bon. Va te réchauffer Pranker. Y a du fourrage ici ?
Dans l'étable, me précise un type sur le ton du reproche.
Bon, ben qu'est-ce que t'attends pour aller m'en chercher ? que je sympathise.
Va t'faire, t'as vu le temps qu'il fait dehors ? Je vois pas ce que j'y gagnerais à part la crève.
D'où tu crois que je viens, connard ? Evidemment que je sais que ça caille dehors. Seulement voilà, hors de question de vous laisser seuls avec ma prise. Je connais pas vos moeurs, faut que je surveille ce truc en permanence. Par contre, y a bien un truc à gagner. Ca.
J'extrais de ma poche un collier en or avec une incrustation de qualité médiocre. Pour quelques pas dans la neige, ça fait un sacré salaire quand même. Le type récalcitrant jure, maudit son avarice et accepte la quête. L'assemblée contient ses protestations quand le froid repasse une tête le temps qu'il disparaisse dans la nuit. Moi, je m'installe et me sers un vin chaud. Pas rat, je tape aussi une pièce de viande salée sur la table en invitant qui veut à détourner quelques tranchettes. Y a deux gars qui se pointent, dont un qui cause. Il remercie, commente la barbaque et voit que j'attends qu'il lâche le pourquoi d'une si naturelle sympathie.
Ce renne, il ne ressemble pas à ceux de la région. Comment s'est-il égaré dans nos contrées ?
T'as l'air de t'y connaître. Trapeur ?
Oui. Je traque et chasse un tas de proies. Bob A. Fête, qu'il fait en tendant la pogne pas grasse.
Enchanté Bobby. Ben je suis ravi que tu poses la question, parce que c'est une affaire. une putain d'affaire cette histoire. Je te raconte. Tout a commencé quand j'ai rejoint la bande d'un révolutionnaire. Butch K Silly. Le type gentilhomme, poli et sociable. Mais aussi un indécrottable fouteur de merde lorsqu'il s'agit de pognon. Bref, après quelques cavales, la bande me recrute pour un coup qui nécessite une force supplémentaire. J'avais déjà un cheval, des antécédents judiciaires, j'étais la bonne recrue pour cette affaire. On s'est retrouvés là, dans la neige, à attendre l'arrivée du Snowpiercer. Et le Butch, il croyait que se chauffer les cordes vocales nous ferait oublier à tous les rafales de glace qu'on se prenait sur la coin de la gueule...
Ecoutez tous une minute. Ces derniers jours on été difficiles. J'adorais Davy, Ed, Jack. Mais on a perdu du monde. Si je pouvais m'allonger six pieds sous terre à leur place, je le ferais. Nous allons réussir ce dernier coup et nous remplir les poches d'or, suffisamment d'or pour pouvoir acheter de la terre. Et ensuite, nous cultiverons les mandarines à Cocoyashi jusqu'à la fin de nos jours. On s'est déjà sortis de situations bien pires. Restez forts, ne me lâchez pas. On va s'en sortir.
Mika tastrov, Sad I. Sterrick, Arthub R. Cullos, Ils mettent tous leur foulard. Du coup, moi aussi, parce que j'ai beaucoup de personnalité. Un coup d'éperons plus tard, nous dévalons la colline enneigée, à la poursuite du Snowpiercer que vient de régurgiter la montagne. Sur le chemin qui sépare l'embuscade des rails, Arthub et Butch se disputent, comme toujours.
Je ne suis vraiment pas sûr que ce soit le moment d'attaquer ce train, Butch.
Arthub, mon fils, nous avons besoin d'argent pour nous retirer. Encore un dernier coup et nous pourrons nous détendre au soleil des mandariniers.
Tu l'as déjà dit la fois précédente Butch. On a besoin de se mettre au vert le temps que la situation se calme.
Tout ce dont on a besoin, c'est un plan !
Mais quel plan, à la fin ? Tu manigances un tas de missions périlleuses, nous perdons des hommes et tu ne nous dis rien.
Je commence à en avoir assez d'être sans cesse remis en question, Arthub ! Je dépense toute mon énergie à garantir notre survie, à me battre pour que nous nous en sortions et toi, tu mets tout en doute et mets en péril notre réussite parce que tu es en proie aux doutes et insistes pour en savoir plus. Tu insistes ! Le plan, c'est que j'ai un plan. Et maintenant j'aimerais qu'on arrête de mettre systématiquement toutes mes décisions en doute.
Tu devrais la fermer et te concentrer sur ton rôle, péquenaud. Toi et Minos, devrez forcer un max de coffre pendant que Sad et moi ferons les poches des voyageurs. Si Butch n'arrête pas la locomotive à temps, nous n'aurons que quelques minutes d'ici l'arrivée à Jalabert et ses tapettes de philosophes.
L'odeur des livres te donne des allergies hein Mika ? Pour toi le papier ne sert qu'à alimenter les feux.
C'est le cas. Et je prendrais plaisir à me réchauffer avec les dessins de couilles de chevaux de ton journal intime.
Ca suffit, vous deux. Gardez votre énergie pour la mission. Minos, saute sur le train dès que tu peux. Les soutes arrières devraient compter deux gardes. Evitez les coups de feu autant que possible. Le son circule très bien dans la région.
Je profite du calibre de ma monture pour avaler trois pas quand les autres galèrent à suivre mon allure. J'avais proposé d'arrêter la loco moi-même, mais Butch préférais s'en occuper seul. Son choix. Après m'être mis en danseur sur la selle, je pousse du pied sur...
...la porte !
Côté neige, on tambourine contre l'entrée bloquée d'une table. Le zig envoyé au fourrage hurle, jure qu'il va mourir de froid et nous lance moultes damnations. J'interromps mon récit, me lève et retire le meuble pour laisser le maugréant apporter le foin.
Dernière édition par Minos le Sam 29 Déc 2018 - 22:33, édité 2 fois