Le voyage de retour fut long et douloureux pour ma part. Rester immobile, allongé dans un lit de camp, le corps couvert de bandages, c'est une vraie torture pour moi.
Après l'évasion mouvementée de la prison de Jotunheim, j'avais été transféré sur un navire en surface, aux bons soins d'Hachiro, le médecin de mon équipage, que j'avais pu constituer peu de temps avant l'opération à la prison de glace.
Selon les dires de mon médecin, j'ai frôlé la mort au moins quatre fois, mais je survivrai après quelques jours de repos, sans forcer sur mes blessures et mes efforts physiques. Dans ma tête, ça sonne surtout comme une pause prononcée dans mes missions de révolutionnaire... Bah, j'imagine que laisser les choses se tasser, après avoir "explosé" une prison gouvernementale, ça peut être une bonne chose...
Durant le voyage de retour, je passe donc la majeure partie de mon temps au lit, les yeux rivés au plafond, ayant parfois l'occasion de me changer les idées en discutant avec Mibu ou Hachiro.
Sinon, je prends aussi des moments pour observer mécaniquement mon "butin de guerre", à savoir un Meitou, qui s’appellerait "Menteuse" d'après un épéiste Révolutionnaire. Sur le coup, je ne comprenais pas vraiment pourquoi cette épée porte un tel nom et je m'en moque pas mal à vrai dire. Le fait est que cette épée m'a semblé très "efficace" (j'imagine que me faire transpercer à gauche à droite par sa lame aide à se faire une idée de sa force) et que je pense que ce serait une bonne chose que je diversifie mon style de combat.
Un artiste martial contre un épéiste, il y a trop de risques que je me fasse trancher un membre et j'ai du mal à me considérer "efficace au combat", après ma performance à la prison...
Oui, autant que le corps, l'esprit est aussi pas mal amoché... D'infiltrée, je suis passée à "princesse en détresse" et j'ai failli mourir dans cette mission: ça m'apprendra à agir sans plan d'action. Heureusement que j'avais Mibu à mes cotés, sinon je n'aurai sans doute pas survécu.
Arf, c'est usant pour l'esprit de devoir souffrir la comparaison avec mes "aînés révolutionnaires" comme Ragnar; j'ai beau m'acharner à l'entraînement, j'ai l'impression de faire du surplace...
Arrivé à Union John, après quelques jours de navigation, mon moral est à peu-près revenu à la normale, après avoir broyé du noir tout du long du trajet. Bon, dans mon cas, "moral normal" rime avec "expression neutre et rester professionnelle", alors bon, il n'y a pas beaucoup de changements, mais bref.
J'ai à peine mis pied-à-terre qu'une petite forme floue bondit sur moi, manquant de me faire tomber en arrière sous le choc:
Skela: CAPITAINE!!!
Ma seconde et navigatrice, la Tontata Skela, se blottissait tout contre moi, comme si elle avait peur que je disparaisse.
Au loin, je vois arriver le reste de mon équipage, la cuisinière femme-poisson Segawa et le charpentier Gaho... qui se prend un violent coup de palme à l'arrière de la nuque par la cuisinière:
Segawa: Espèce d'abruti vas... Désolée Capitaine, mais ce con a rien trouvé de mieux à faire que de raconter toute sorte d'histoires de monstres marins à Skela. Alors, lorsque le journal de ce matin a parlé de prison explosée et coulée, la naine nous a fait une crise de panique.
Réceptionnant ma seconde dans mes mains, je la place au niveau de mon visage, lui adressant un petit sourire que je veux rassurant:
-Ne t'en fais pas Skela; je suis juste blessée, pas dans le ventre d'un monstre marin ou je ne sais quoi.
Les journaux n'ont pas perdu de temps à relayer l'information... Qu'ont-ils dit sur l'opération?
Grommelant et redressant la tête, une grosse bosse à l'arrière du crâne, Gaho s'époussette les vêtements.
Gaho: Roh, ça va, j'y peux rien s'il traîne des monstres de la taille d'une île... m'enfin bon...
Ben rien de neuf concernant la prison; la langue de bois gouvernementale habituelle... mais tous les acteurs de l'opération ont eus droit à une prime, y compris vous, Capitaine.
Le charpentier me tend une affiche froissée sortie de sa poche. Je déplie le papier... pour tomber sur ma photo, avec... 28 millions de prime?!?
Je reste muette de stupeur... J'ai opéré des années durant pour la Révolution, infiltré des organisations, tué des dizaines de personnes plus ou moins importantes... et c'est le fait d'infiltrer une prison gouvernementale et de manquer d'y passer qui me vaut une prime?
Je réfléchis un moment, essayant de comprendre la situation:
-Mibu, il ne me semble pas avoir laissé échapper de gardes durant notre infiltration... Comment ont-ils eus mon signalement?
Le jeune musicien lève les yeux au ciel, songeur:
Mibu: Hum... On a évité les caméras tout a début de l'infiltration, mais on a tellement couru dans tous les sens, après l'attaque en masse des Greygoriis et l'arrivée de notre Capitaine Ragnar... On n'a pas vraiment fait attention à éviter d'être filmé après ça...
-Ah... Je crois me rappeler que j'avais déjà attiré l'attention du Gouvernement Mondial, au moins du Cipher Pol, avec l'opération de Parisse... Ils attendaient peut-être plus d'informations pour me mettre cette prime...
De toute façon, je ne peux pas faire grand chose: ce qui est fait est fait...
Clairement, je ne sais guère comment réagir à ma toute première prime, mais je m'attendais depuis quelque temps déjà à en recevoir une...
Depuis l'opération à Parisse, j'avais conscience de me mettre "plus en avant" dans mes opérations, qui commençaient doucement à sortir de la simple opération sous couverture, avec infiltration et assassinat "basiques".
Je réfléchis un moment, essayant de me concentrer sur l'avenir, observant mon petit équipage:
-Bon... le navire va repartir d'ici trois quatre jours, après un semblant d'entretien et de ravitaillement. Tâchons d'être discrets sur cette petit île et on tâchera de retourner ensuite sur les Blues.
On a un problème de bateau à régler et je ne veux pas prendre de risques stupides à traîner sur Grand Line avec notre embarcation actuelle.
Effectivement, mon bateau laissé sur East Blue commençait à devenir très étroit et surtout fragile, pour la suite des événements. Les dernières opérations m'avaient emmenés très loin sur les mers et je commence à me lasser de devoir "squatter" des navires alliés, sous prétexte que ma "coque de noix" pourrait se faire désintégrer dès Reverse Moutain.
Il faudrait que je vérifie mes finances cependant... Je n'ai pas envie d'attirer d'avantage l’attention sur moi, en me retrouvant à devoir voler un navire, ne serait-ce que pour satisfaire mon amour-propre.
Mon petit équipage s'éparpille, alors que je vais pour faire un tour de l'île, histoire de me dégourdir les jambes:
Hachiro: Allez-y mollo Cap'taine.
La voix de mon médecin résonnant dans mon dos, je me contente d'un signe de la main entendu, avant d'entamer ma petite promenade, réajustant quelque peu Menteuse à ma hanche droite. Je suis resté allongée des jours durant, j'ai bien le droit de marcher pour me changer les idées et me dégourdir les jambes!
Durant une demi-heure, j'erre comme un fantôme, sans but précis, sur les plages de la petit île; mine de rien, on peut rapidement en faire le tour.
En y repensant, une prime de 28 000 000 juste en "échouant" une mission... J'aurai eu une prime de combien, si j'avais réussi à libérer la pirate Izya? Les choses auraient-elles été différentes, si j'avais réussi ma mission, à la place de Ragnar? Je suppose que ma fierté n'aurait déjà été pas aussi atteinte que ça, allant même au fin-fond des abysses de mon esprit...
Soupirant, je tourne le regard sur le coté, interloquée par un mouvement près d'un mas de débris agglutiné sur la plage. Sans doute des morceaux d’épave charriés par la marée... attendez un peu...
-Monsieur Barret?!?
Reconnaissant la longue chevelure rousse avant le reste, je me précipite au pas de course vers lui, sortant mon Den-Den Mushi de ma poche interne de veste:
-Hachiro! Viens de suite à la plage située à l'Est des mines! J'ai besoin de toi hier!
M'agenouillant près de mon partenaire de mission à Jotunheim, avant de le perdre de vue, j'observe ses nombreuses blessures... Bordel, il a l'air bien plus amoché que moi...
Je n'attends guère longtemps pour saisir monsieur Barret et l'installer tant bien que mal sur mon dos. Mes blessures récentes commencent déjà à faire leur crise de jalousie, me rappelant qu'elles sont toujours là, mais je m'en fiche complètement!
Grinçant des dents, je retourne vers le port où j'ai accosté, histoire d'épargner quelques minutes de trajet au voyage de retour.
Vingt minutes de trajet éprouvant plus tard, je vois arriver Skela sous sa forme hybride, au pas de course, Hachiro courant plus loin derrière elle.
Skela: Capitaine! Tout va bien? Qui est cet homme?
-Un compagnon de mission: il m'a aidé pour la prison de Jotunheim!
HACHIRO! Occupes-toi d'abord de sauver cet homme; tu me disputeras après si ça te chante!
Le souffle court, le médecin arrive pour repartir en sens inverse, transportant le rouquin sur son dos sans trop de mal, alors que je prends le temps de m'ausculter moi-même sur le chemin du retour. Comme Hachiro me l'avait répété à plusieurs reprises, mes blessures se sont quelque peu rouvertes et mes bandages sont teintés de rouge.
Skela file comme une flèche vers le village, après qu'Hachiro lui ait demandé de préparer un lit pour le blessé, avec tout son matériel de prêt.
Une fois au village, monsieur Barret est installé sur un lit et Hachiro envoie bouler tout le monde de la chambre, pour s'occuper de son patient.
Pas mal stressée sur l'instant, j'allume une cigarette, en tremblotant, attendant patiemment la fin des soins, juste en face de la porte de la chambre...