Mais bon dieu de merde, qu'est-ce que je fous là ?!
Qu'un de mes camarades à ma droite lâche alors qu'il vient de s'éclater la gueule à terre, les pieds pris dans la boue, les racines des arbres poussant dans le coin et l'eau. Une plongée forcée dans un bon demi-mètre de flotte, la gueule trempée et crasseuse, comme tout le reste de son corps et de ses fringues, il râle. Et qui irait en vouloir à Tod d'en avoir plein le cul de patauger dans de la merde pour une raison à la con qui nous échappe à tous ? Certainement pas moi. Ni-même les autres gars du groupe, de notre unité toute entière ou encore des autres sections. Parce qu'en réalité, sur la centaine d'enfoirés de militaires bazardé dans ce trou isolé de toute civilisation, y'en a aucun qui est content d'être là. Enfin, je m'emballe un peu. T'as toujours un ou deux connards qui aiment partir faire de fausses guerres pour des terrains de manœuvre à la con.
Raaah ! Il me casse les couilles ce terrain pourri ! Tout ça pour faire semblant d'être opérationnel ! Commandant de merde !
Tod est vraiment en train de vriller, et moi je peux pas m'empêcher de me foutre de lui, il me fait rire. La vérité c'est que j'en ai autant ma claque de cet exercice, foutu stage de survie en milieu hostile. Mais comme je suis un connard, quand les autres pètent un plomb, ça me redonne le moral. C'est toujours plus fendard quand c'est les autres. Mine de rien, je me retiens sévère depuis deux bonnes heures aussi. Nous envoyer sur cet îlot flottant pour des semaines d'entraînement histoire de s'aguérrir, de développer ses capacités physiques et morales et de s'approprier l'environnement. Des fois qu'un jour on soit amené à ratiboiser une île sauvage pour le plaisir, ça nous servira tout ça. Je crache un glaviot, redresse mon fusil et avance, aussi désespéré que frustré.
Payé de la merde pour aller jouer les soldats de l'apocalypse au milieu de nulle part, ils y ont réfléchi longtemps à celle-là ?! Engagez-vous qu'ils disaient !
Smith, ferme-là un peu et avance tête de mort !
Reçu Sergent !
Je ricane, le Matelot de Première Classe Toddy Smith me claque un doigt de loin, avant de poursuivre son effort et continuer de pester à voix basse. J'aime bien ce gars, et pourtant c'était pas gagné d'avance vu nos caractères respectifs. Je suis aux portes de la vingtaine, lui les as franchies depuis quelques années déjà et pourtant, il est plus immature. Il est surtout très nerveux, franc et déteste se sentir rabaissé. Un peu comme moi. Quand je suis arrivé dans la section, on a eu un peu de mal à s'accorder. Depuis, ça va plutôt pas mal. 'Faut dire qu'on peut pas détester ce type, le genre bien sympa mais sur qui la chance déjette des tonnes de merde tous les jours. Sportif comme pas deux, il passe son temps à s'endurcir le corps, le seul soucis c'est qu'il a oublié d'embarquer son cerveau avec lui lors de son engagement, du coup niveau intelligence ça pèche un peu.
Volontaire et motivé, il l'était autrefois, c'est déjà de l'histoire ancienne. Il a eu quelques problèmes dans son parcours qui lui ont plombé le moral et ses ambitions ont pris un grand coup de frein. Maintenant, il préfère critiquer la hiérarchie qui le lui rend bien. Qu'il se fasse remettre à sa place par le Sergent Delouimons n'a rien d'étonnant, c'est plutôt banal même. Pour cette fois, je crois que le Sergent en pouvait plus de l'entendre chialer. C'est que ça durait depuis longtemps. Deux semaines ? Depuis qu'on a posé les rangers ici qu'il l'ouvre pour se plaindre. Aujourd'hui il y a mis les bouchées double, avec cette fausse mission d'infiltration qui nous as été inventé pour l'occasion. Une opération d'envergure, pas un truc de tafiole comme on dit ici. Les officiers, ces braves types adeptes de la branlette intellectuelle et des actions chocs pour se faire bien voir par l'échelon supérieur, c'est à eux qu'on la doit.
Mon avis qu'ils ont dû avoir l'idée entre deux pintes de bière, après le service, ils réfléchissent toujours mieux le cerveau imbibé de gnôle. De sacrés poivrots ces enculés. Et ça vient te donner des leçons quand t'as un petit coup dans le nez au rassemblement du matin.
C'est quand même dingue de pouvoir faire autant de merde en si peu de temps. A croire qu'ils se font chier à la caserne sans ce genre de plan foireux.
Bah ouais ! Leur petite vie minable ! Passe leur temps à picoler, à s'inventer des missions de merde, tout ça parce qu'ils ont pas de vie ou pour lécher les couilles du Colonel !
A en gober les roustons avec.
Et en avaler le bon sirop de corps d'homme !
On éclate de rires, ça fait du bien de déconner, ça permet de relâcher un peu la pression. Le Sergent le sait bien, pour ça qu'il évite de trop nous couper. On continue de progresser. Un groupe constitué de deux trinômes, chacun de ces derniers regroupant trois soldats. Un chef d'équipe et les deux troufions. Plusieurs dizaines de mètres plus loin, on a notre tireur d'élite, notre éclaireur. On lui a filé carte blanche, comme bien souvent. Il progresse, renseigne sur les couilles qu'on pourrait avoir en chemin et traite l'ennemi si besoin et possibilité. Je me perds un instant à zyeuter le décors...
Je voulais tellement pas venir ici...
Une jungle, foutue jungle. Ici, même un moustique peut te buter d'une piqûre sournoise qui te filera une merde cancéreuse qui te feras caner en plusieurs semaines dans d'atroces souffrances. Sans compter le nombre de maladies qui grouillent ici, que ton système immunitaire a pas l'habitude de croiser dans des milieux civilisés, si je sors vivant de ce stage merdique, ce sera un miracle. Oh, on a bien eu la pelle de vaccins pour lutter, mais j'y crois moyen à ces trucs qu'ils t'injectent à coup de quatre à la fois. Un à chaque épaule, les deux derniers sur les cuisses. Carton plein, quatre vaccins pour un passage éclair à l'infirmerie, de quoi te laisser pas bien pour le reste de la journée.
Z'imaginez si on tombe sur un crocodile ? C'est pas avec des balles à blanc qu'on va faire quelque chose...
Oh oui, y'a de ça aussi. Viendez sur l’îlot Flottant, la terre pour petits et grands, garanti grand frisson et paysages déroutants.
Qu'un de mes camarades à ma droite lâche alors qu'il vient de s'éclater la gueule à terre, les pieds pris dans la boue, les racines des arbres poussant dans le coin et l'eau. Une plongée forcée dans un bon demi-mètre de flotte, la gueule trempée et crasseuse, comme tout le reste de son corps et de ses fringues, il râle. Et qui irait en vouloir à Tod d'en avoir plein le cul de patauger dans de la merde pour une raison à la con qui nous échappe à tous ? Certainement pas moi. Ni-même les autres gars du groupe, de notre unité toute entière ou encore des autres sections. Parce qu'en réalité, sur la centaine d'enfoirés de militaires bazardé dans ce trou isolé de toute civilisation, y'en a aucun qui est content d'être là. Enfin, je m'emballe un peu. T'as toujours un ou deux connards qui aiment partir faire de fausses guerres pour des terrains de manœuvre à la con.
Raaah ! Il me casse les couilles ce terrain pourri ! Tout ça pour faire semblant d'être opérationnel ! Commandant de merde !
Tod est vraiment en train de vriller, et moi je peux pas m'empêcher de me foutre de lui, il me fait rire. La vérité c'est que j'en ai autant ma claque de cet exercice, foutu stage de survie en milieu hostile. Mais comme je suis un connard, quand les autres pètent un plomb, ça me redonne le moral. C'est toujours plus fendard quand c'est les autres. Mine de rien, je me retiens sévère depuis deux bonnes heures aussi. Nous envoyer sur cet îlot flottant pour des semaines d'entraînement histoire de s'aguérrir, de développer ses capacités physiques et morales et de s'approprier l'environnement. Des fois qu'un jour on soit amené à ratiboiser une île sauvage pour le plaisir, ça nous servira tout ça. Je crache un glaviot, redresse mon fusil et avance, aussi désespéré que frustré.
Payé de la merde pour aller jouer les soldats de l'apocalypse au milieu de nulle part, ils y ont réfléchi longtemps à celle-là ?! Engagez-vous qu'ils disaient !
Smith, ferme-là un peu et avance tête de mort !
Reçu Sergent !
Je ricane, le Matelot de Première Classe Toddy Smith me claque un doigt de loin, avant de poursuivre son effort et continuer de pester à voix basse. J'aime bien ce gars, et pourtant c'était pas gagné d'avance vu nos caractères respectifs. Je suis aux portes de la vingtaine, lui les as franchies depuis quelques années déjà et pourtant, il est plus immature. Il est surtout très nerveux, franc et déteste se sentir rabaissé. Un peu comme moi. Quand je suis arrivé dans la section, on a eu un peu de mal à s'accorder. Depuis, ça va plutôt pas mal. 'Faut dire qu'on peut pas détester ce type, le genre bien sympa mais sur qui la chance déjette des tonnes de merde tous les jours. Sportif comme pas deux, il passe son temps à s'endurcir le corps, le seul soucis c'est qu'il a oublié d'embarquer son cerveau avec lui lors de son engagement, du coup niveau intelligence ça pèche un peu.
Volontaire et motivé, il l'était autrefois, c'est déjà de l'histoire ancienne. Il a eu quelques problèmes dans son parcours qui lui ont plombé le moral et ses ambitions ont pris un grand coup de frein. Maintenant, il préfère critiquer la hiérarchie qui le lui rend bien. Qu'il se fasse remettre à sa place par le Sergent Delouimons n'a rien d'étonnant, c'est plutôt banal même. Pour cette fois, je crois que le Sergent en pouvait plus de l'entendre chialer. C'est que ça durait depuis longtemps. Deux semaines ? Depuis qu'on a posé les rangers ici qu'il l'ouvre pour se plaindre. Aujourd'hui il y a mis les bouchées double, avec cette fausse mission d'infiltration qui nous as été inventé pour l'occasion. Une opération d'envergure, pas un truc de tafiole comme on dit ici. Les officiers, ces braves types adeptes de la branlette intellectuelle et des actions chocs pour se faire bien voir par l'échelon supérieur, c'est à eux qu'on la doit.
Mon avis qu'ils ont dû avoir l'idée entre deux pintes de bière, après le service, ils réfléchissent toujours mieux le cerveau imbibé de gnôle. De sacrés poivrots ces enculés. Et ça vient te donner des leçons quand t'as un petit coup dans le nez au rassemblement du matin.
C'est quand même dingue de pouvoir faire autant de merde en si peu de temps. A croire qu'ils se font chier à la caserne sans ce genre de plan foireux.
Bah ouais ! Leur petite vie minable ! Passe leur temps à picoler, à s'inventer des missions de merde, tout ça parce qu'ils ont pas de vie ou pour lécher les couilles du Colonel !
A en gober les roustons avec.
Et en avaler le bon sirop de corps d'homme !
On éclate de rires, ça fait du bien de déconner, ça permet de relâcher un peu la pression. Le Sergent le sait bien, pour ça qu'il évite de trop nous couper. On continue de progresser. Un groupe constitué de deux trinômes, chacun de ces derniers regroupant trois soldats. Un chef d'équipe et les deux troufions. Plusieurs dizaines de mètres plus loin, on a notre tireur d'élite, notre éclaireur. On lui a filé carte blanche, comme bien souvent. Il progresse, renseigne sur les couilles qu'on pourrait avoir en chemin et traite l'ennemi si besoin et possibilité. Je me perds un instant à zyeuter le décors...
Je voulais tellement pas venir ici...
Une jungle, foutue jungle. Ici, même un moustique peut te buter d'une piqûre sournoise qui te filera une merde cancéreuse qui te feras caner en plusieurs semaines dans d'atroces souffrances. Sans compter le nombre de maladies qui grouillent ici, que ton système immunitaire a pas l'habitude de croiser dans des milieux civilisés, si je sors vivant de ce stage merdique, ce sera un miracle. Oh, on a bien eu la pelle de vaccins pour lutter, mais j'y crois moyen à ces trucs qu'ils t'injectent à coup de quatre à la fois. Un à chaque épaule, les deux derniers sur les cuisses. Carton plein, quatre vaccins pour un passage éclair à l'infirmerie, de quoi te laisser pas bien pour le reste de la journée.
Z'imaginez si on tombe sur un crocodile ? C'est pas avec des balles à blanc qu'on va faire quelque chose...
Oh oui, y'a de ça aussi. Viendez sur l’îlot Flottant, la terre pour petits et grands, garanti grand frisson et paysages déroutants.