UN GAMIN QUI A DU CHIEN
Plus d’une semaine que le navire de croisière avait quitté le Baratie. Farros avait eu le temps de se remettre de ses émotions, à présent. Cela dit, il n’était pas près d’oublier ce qu’il avait ressenti en goutant le plat de ce fameux restaurant. Il lui fallait progresser, et ça, à tous les points de vue, pas seulement en cuisine.
Le jeune homme avait été assez silencieux ces derniers temps, s’abstenant de participer aux beuveries auxquelles l’équipage pouvait s’adonner. Tout paraissait flou dans la tête de Farros. Tout paraissait pourtant si limpide pour lui : il allait quitter son île natale, découvrir le monde et progresser en cuisine pour, un jour, ouvrir le plus grand restaurant des mers. Il devait cependant se rendre à l’évidence, il avait peu progressé en deux ans. Qu’est-ce qui n’allait pas ? Qu’est-ce qu’il avait fait de travers ? Ce n’était pas une question de détermination, ça non, il se retrouvait chaque jour plus motivé. « Ouaif, faut être honnête avec toi-même Farros, ton rêve d’aventure s’est transformé en deux ans de travail dans un restaurant de second rang… » pensa le jeune cuisinier.
Un homme longiligne vint l’arracher à ses pensées, c’était M. Beaumoulin, le responsable de la croisière :
- Bonjour, cher ami. Vous permettez ? demanda le romanesque personnage, s’asseyant à côté de Farros qui reposait sur une marche.
- Ouaif, bien sûr patron.
- Arrêtez avec ça, M. Papriko, dans quelques jours vous nous quitterez, et j’espère bien que vous vous souviendrez de moi en tant qu’ami, et pas en tant que « patron ».
- B-bien-sûr, désolé. Faut croire que c’est une mauvaise habitude chez moi, répondit Farros, se remémorant ses conversations avec le capitaine Campscotch.
- Vous avez été bien silencieux ces derniers jours, mon ami.
- Ouaif, désolé, c’est que je pensais à pas mal de choses ces derniers temps et… ‘Fin bref, vous tracassez pas pour moi.
M. Beaumoulin marqua un temps de pause. Le responsable de la croisière semblait chercher ses mots. Farros l’appréciait : il avait su lui faire confiance pendant les derniers jours, et s’était toujours montré plus que juste avec lui. Le soleil se couchait une fois de plus sur une mer calme, ce soir. Le jeune homme appréciait tout particulièrement l’atmosphère du crépuscule marin. Cela semblait être un appel au rêve, à l’aventure : il se remémorait alors souvent les histoires qu’on lui contait alors qu’il était jeune enfant. Cela lui fit penser à sa famille qui devait également penser à lui, à Shell Town. Il était hors de question que Farros revienne leur rendre visite sans avoir fait plus de progrès.
- Vous savez, reprit M. Beaumoulin, vous nous avez rendu une fière chandelle quand vous vous êtes proposé pour remplacer le chef qui nous avait quitté.
- Boarf, vous m’avez permis de manger au Baratie, comme convenu. C’est moi qui devrait vous remercier.
- Ne soyez pas ridicule, cher ami. Vous nous avez offert beaucoup plus que ce que nous vous avons rendu. Si cela ne tenait qu’à moi, je vous proposerais de rester parmi nous, mais je suppose que…
- Vous supposez bien, herf herf. Faut qu’je bouge, vous comprenez.
- Bien sûr, bien sûr. Vous savez… Vous avez assez réfléchi la semaine passée, je crois que vous devriez passer un peu de bon temps avec le reste de l’équipage ce soir, vous n’êtes pas d’accord ?
Il avait peut-être raison. A force de cogiter, Farros allait finir par devenir fou. Sans s’en rendre compte, l’ambiance générale à bord du navire s’était ternie avec l’humeur habituellement si joyeuse du jeune homme. Il réalisa alors que M. Beaumoulin ne s’inquiétait pas seulement pour lui, mais pour l’équipage tout entier. Décidément, c’était un homme bon. Après tout, Farros savait choisir ses amis ! Il se leva alors, brusquement, s’adressant à l’homme à la silhouette longiligne : « Vous avez raison, herf herf ! J’espère que les autres ont déjà sorti les tonnelets de bière ! ». Beaumoulin lui sourit légèrement en retour, comme s’il s’en faisait toujours pour le jeune homme, alors que celui-ci se dirigeait vers un groupe de marins au centre du navire.
La fête était plus posée que d’habitude. L’alcool coulait toujours à flot, certes, mais les membres de l’équipage semblaient tous profiter de l’ambiance calme qui régnait sur East Blue cette nuit. Avec l’aide de quelques autres moussaillons, Farros avait traîné jusqu’au pont un four amovible qu’ils alimentèrent afin de mieux supporter le froid nocturne.
Le groupe papotait alors que la lune était de plus en plus haute dans le ciel étoilé. Pas un nuage. Les cieux étaient aussi paisibles que la mer et les voyageurs, cette nuit. Chacun racontait son parcours, les choses qu’il avait eu à traverser : on riait et parfois, on pleurait. Farros se rendit compte de sa jeunesse.
Vint son tour de raconter son histoire à ses camarades. Il leur raconta son enfance à Shell Town, comment il avait grandi. Une journée en particulier lui revint à l’esprit.
Plus d’une semaine que le navire de croisière avait quitté le Baratie. Farros avait eu le temps de se remettre de ses émotions, à présent. Cela dit, il n’était pas près d’oublier ce qu’il avait ressenti en goutant le plat de ce fameux restaurant. Il lui fallait progresser, et ça, à tous les points de vue, pas seulement en cuisine.
Le jeune homme avait été assez silencieux ces derniers temps, s’abstenant de participer aux beuveries auxquelles l’équipage pouvait s’adonner. Tout paraissait flou dans la tête de Farros. Tout paraissait pourtant si limpide pour lui : il allait quitter son île natale, découvrir le monde et progresser en cuisine pour, un jour, ouvrir le plus grand restaurant des mers. Il devait cependant se rendre à l’évidence, il avait peu progressé en deux ans. Qu’est-ce qui n’allait pas ? Qu’est-ce qu’il avait fait de travers ? Ce n’était pas une question de détermination, ça non, il se retrouvait chaque jour plus motivé. « Ouaif, faut être honnête avec toi-même Farros, ton rêve d’aventure s’est transformé en deux ans de travail dans un restaurant de second rang… » pensa le jeune cuisinier.
Un homme longiligne vint l’arracher à ses pensées, c’était M. Beaumoulin, le responsable de la croisière :
- Bonjour, cher ami. Vous permettez ? demanda le romanesque personnage, s’asseyant à côté de Farros qui reposait sur une marche.
- Ouaif, bien sûr patron.
- Arrêtez avec ça, M. Papriko, dans quelques jours vous nous quitterez, et j’espère bien que vous vous souviendrez de moi en tant qu’ami, et pas en tant que « patron ».
- B-bien-sûr, désolé. Faut croire que c’est une mauvaise habitude chez moi, répondit Farros, se remémorant ses conversations avec le capitaine Campscotch.
- Vous avez été bien silencieux ces derniers jours, mon ami.
- Ouaif, désolé, c’est que je pensais à pas mal de choses ces derniers temps et… ‘Fin bref, vous tracassez pas pour moi.
M. Beaumoulin marqua un temps de pause. Le responsable de la croisière semblait chercher ses mots. Farros l’appréciait : il avait su lui faire confiance pendant les derniers jours, et s’était toujours montré plus que juste avec lui. Le soleil se couchait une fois de plus sur une mer calme, ce soir. Le jeune homme appréciait tout particulièrement l’atmosphère du crépuscule marin. Cela semblait être un appel au rêve, à l’aventure : il se remémorait alors souvent les histoires qu’on lui contait alors qu’il était jeune enfant. Cela lui fit penser à sa famille qui devait également penser à lui, à Shell Town. Il était hors de question que Farros revienne leur rendre visite sans avoir fait plus de progrès.
- Vous savez, reprit M. Beaumoulin, vous nous avez rendu une fière chandelle quand vous vous êtes proposé pour remplacer le chef qui nous avait quitté.
- Boarf, vous m’avez permis de manger au Baratie, comme convenu. C’est moi qui devrait vous remercier.
- Ne soyez pas ridicule, cher ami. Vous nous avez offert beaucoup plus que ce que nous vous avons rendu. Si cela ne tenait qu’à moi, je vous proposerais de rester parmi nous, mais je suppose que…
- Vous supposez bien, herf herf. Faut qu’je bouge, vous comprenez.
- Bien sûr, bien sûr. Vous savez… Vous avez assez réfléchi la semaine passée, je crois que vous devriez passer un peu de bon temps avec le reste de l’équipage ce soir, vous n’êtes pas d’accord ?
Il avait peut-être raison. A force de cogiter, Farros allait finir par devenir fou. Sans s’en rendre compte, l’ambiance générale à bord du navire s’était ternie avec l’humeur habituellement si joyeuse du jeune homme. Il réalisa alors que M. Beaumoulin ne s’inquiétait pas seulement pour lui, mais pour l’équipage tout entier. Décidément, c’était un homme bon. Après tout, Farros savait choisir ses amis ! Il se leva alors, brusquement, s’adressant à l’homme à la silhouette longiligne : « Vous avez raison, herf herf ! J’espère que les autres ont déjà sorti les tonnelets de bière ! ». Beaumoulin lui sourit légèrement en retour, comme s’il s’en faisait toujours pour le jeune homme, alors que celui-ci se dirigeait vers un groupe de marins au centre du navire.
La fête était plus posée que d’habitude. L’alcool coulait toujours à flot, certes, mais les membres de l’équipage semblaient tous profiter de l’ambiance calme qui régnait sur East Blue cette nuit. Avec l’aide de quelques autres moussaillons, Farros avait traîné jusqu’au pont un four amovible qu’ils alimentèrent afin de mieux supporter le froid nocturne.
Le groupe papotait alors que la lune était de plus en plus haute dans le ciel étoilé. Pas un nuage. Les cieux étaient aussi paisibles que la mer et les voyageurs, cette nuit. Chacun racontait son parcours, les choses qu’il avait eu à traverser : on riait et parfois, on pleurait. Farros se rendit compte de sa jeunesse.
Vint son tour de raconter son histoire à ses camarades. Il leur raconta son enfance à Shell Town, comment il avait grandi. Une journée en particulier lui revint à l’esprit.