Nuit. Noire. Totale, parfaite. Propre, épurée. Aucune lune, si peu d'étoiles. Cristaux gelés, points de repère égarés, ils subliment les variétés de sombre qui dansent et ondulent, du marine à l'aile de corbeau. La beauté par la simplicité. La perfection dans les nuances. Une douce harmonie flotte dans les notes d'obscurité, une plénitude caresse qui sait l'aimer. Elle et son équilibre délicat, sa tendresse par l'inaltérable, sa bienveillance derrière l'omnipotence. Elle et sa chorégraphie figée, un océan serein que rien ne vient perturber.
Pas même le marcheur. Un intrus, vraiment ? Il n'a aucune identité dans la sorgue. Il est un élément de décor que l'on devine en mouvement parce qu'il le faut. On lui invente une enveloppe, lui offre une substance pour réfuter l'hypothèse d'une absence de tout, d'un parfait agencement de néant. Alors, on le devine et se présente à nous son empreinte. Sa cadence fluide, son pas léger pour supporter une carcasse pourtant massive, hargneuse. Si on lit plus attentivement, on distingue des crocs invisibles, on devine des douleurs camouflées, des morsures indélébiles sous une peau d'écaille. Tout ça derrière un torse quelconque. Il se dégage une anomalie de son galbe. Une incompatibilité physique. Pourtant, l'incohérence épouse son environnement dans une parfaite union. Ses foulées ne bousculent pas le voile de charbon, elles l'accompagnent. Ses épaules cassantes ne transgressent pas l'univers qui l'héberge. Il le respecte. Le vénère. Il n'est pas perdu. Il n'est pas inquiet. Il n'est pas un étranger en ces lieux. Il est là où il doit être, exactement. Au milieu de nulle part et c'est très bien. Ainsi va l'ordre des choses pour lui. Lui, seul. Lui, dépouillé, démuni. Tout l'a abandonné jusqu'à son ombre. Il n'y a rien que le voile d'encre insaisissable pour le tolérer, le recueillir. Il est une touche de fantaisie, ce zeste acide, ce détail farfelu comme en recèlent les mythes bien protégés de la lumière. Et lui, la silhouette sans relief, la souffrance anonyme, il accepte l'hospitalité du vide avec gratitude et dignité. Dans une sensibilité qu'on ne lui accorderait pas. Ce domaine du silence et lui sont identiques. Ils sont en symbiose.
Son chemin le conduit à gravir une colline, qui surplombe la vallée. Au creux de son lit, le village des hommes, en contrebas. Quelques rares tâches brûlantes y bousculent l'unité des ténèbres. En dévisageant les billes chatoyantes, la forme réprime un tremblement. Répugné, farouche, portant sur l'appréhension. Une brume troublée auréole ses contours. Ces cartouches incandescentes dans le lointain l'agressent au plus profond de sa chair. Une réaction épidermique, mais qui jaillit pourtant des entrailles. Elles le dérangent. La nuit froide dans sa chaleur vient l'envelopper, le réconforter, maternelle. Elle devine sans peine la nature de sa douleur et lui prodigue bonté, protection, confiance. De l'œil rassuré mais résigné transpire un désarroi gelé. Il le sait. Il est l'heure des adieux.
Lentement, sa main danse dans les ondulations de la nuit, en quête de souvenirs, d'un état d'esprit. La substance même de ce royaume secret glisse entre ses doigts et pour lui, cela s'apparente à une étreinte bien réelle, terriblement tangible. Il hume le parfum de paix, s'enivre de cette quiétude dont il conservera précieusement une mèche au plus profond de son âme. Son gabarit crépite d'émotions tumultueuses et colorées qui jaillissent de son être. Des éclaboussures de sentiments, un tachisme nourri d'ardoise, cassis ou pétrole, sur fond noir endeuillé. Elles communiquent peine, soutien, fatalité, gratitude, désolation et affection. Une cacophonie brouillonne, une symphonie confuse et silencieuse. C'est l'hymne de leur lien.
Et soudain, en point d'orgue de ce feu d'artifice, un éclair jaillit, rouge vif, menaçant depuis les tréfonds de son être. Transperçant la toile, il illumine le spectre des couleurs de la nuit et bouscule la sérénade des adieux. Une aura agressive englobe un court instant l'inconnu, embrase les particules d'obscurité. Avant de se résorber, engloutie bien vite par la silhouette vigilante. Comme réprimé. Le corps s'ébroue, renâcle et s'apaise. L'alerte est digérée. La nuit rassurée vient se blottir contre lui, l'enlace une dernière fois. Déjà, derrière l'horizon, le soleil sonne la charge. Un incendie de couleurs ravagera bientôt la plaine sans indulgence pour leur séparation. A contrecœur, il tourne le dos aux volutes bienveillantes de la nuit pour prendre le sentier menant aux habitations. Il abandonne son refuge pour retourner dans le monde des hommes.
Ainsi se meurt la paix d'Elvis. Ainsi revient Trinita.
Pas même le marcheur. Un intrus, vraiment ? Il n'a aucune identité dans la sorgue. Il est un élément de décor que l'on devine en mouvement parce qu'il le faut. On lui invente une enveloppe, lui offre une substance pour réfuter l'hypothèse d'une absence de tout, d'un parfait agencement de néant. Alors, on le devine et se présente à nous son empreinte. Sa cadence fluide, son pas léger pour supporter une carcasse pourtant massive, hargneuse. Si on lit plus attentivement, on distingue des crocs invisibles, on devine des douleurs camouflées, des morsures indélébiles sous une peau d'écaille. Tout ça derrière un torse quelconque. Il se dégage une anomalie de son galbe. Une incompatibilité physique. Pourtant, l'incohérence épouse son environnement dans une parfaite union. Ses foulées ne bousculent pas le voile de charbon, elles l'accompagnent. Ses épaules cassantes ne transgressent pas l'univers qui l'héberge. Il le respecte. Le vénère. Il n'est pas perdu. Il n'est pas inquiet. Il n'est pas un étranger en ces lieux. Il est là où il doit être, exactement. Au milieu de nulle part et c'est très bien. Ainsi va l'ordre des choses pour lui. Lui, seul. Lui, dépouillé, démuni. Tout l'a abandonné jusqu'à son ombre. Il n'y a rien que le voile d'encre insaisissable pour le tolérer, le recueillir. Il est une touche de fantaisie, ce zeste acide, ce détail farfelu comme en recèlent les mythes bien protégés de la lumière. Et lui, la silhouette sans relief, la souffrance anonyme, il accepte l'hospitalité du vide avec gratitude et dignité. Dans une sensibilité qu'on ne lui accorderait pas. Ce domaine du silence et lui sont identiques. Ils sont en symbiose.
Son chemin le conduit à gravir une colline, qui surplombe la vallée. Au creux de son lit, le village des hommes, en contrebas. Quelques rares tâches brûlantes y bousculent l'unité des ténèbres. En dévisageant les billes chatoyantes, la forme réprime un tremblement. Répugné, farouche, portant sur l'appréhension. Une brume troublée auréole ses contours. Ces cartouches incandescentes dans le lointain l'agressent au plus profond de sa chair. Une réaction épidermique, mais qui jaillit pourtant des entrailles. Elles le dérangent. La nuit froide dans sa chaleur vient l'envelopper, le réconforter, maternelle. Elle devine sans peine la nature de sa douleur et lui prodigue bonté, protection, confiance. De l'œil rassuré mais résigné transpire un désarroi gelé. Il le sait. Il est l'heure des adieux.
Lentement, sa main danse dans les ondulations de la nuit, en quête de souvenirs, d'un état d'esprit. La substance même de ce royaume secret glisse entre ses doigts et pour lui, cela s'apparente à une étreinte bien réelle, terriblement tangible. Il hume le parfum de paix, s'enivre de cette quiétude dont il conservera précieusement une mèche au plus profond de son âme. Son gabarit crépite d'émotions tumultueuses et colorées qui jaillissent de son être. Des éclaboussures de sentiments, un tachisme nourri d'ardoise, cassis ou pétrole, sur fond noir endeuillé. Elles communiquent peine, soutien, fatalité, gratitude, désolation et affection. Une cacophonie brouillonne, une symphonie confuse et silencieuse. C'est l'hymne de leur lien.
Et soudain, en point d'orgue de ce feu d'artifice, un éclair jaillit, rouge vif, menaçant depuis les tréfonds de son être. Transperçant la toile, il illumine le spectre des couleurs de la nuit et bouscule la sérénade des adieux. Une aura agressive englobe un court instant l'inconnu, embrase les particules d'obscurité. Avant de se résorber, engloutie bien vite par la silhouette vigilante. Comme réprimé. Le corps s'ébroue, renâcle et s'apaise. L'alerte est digérée. La nuit rassurée vient se blottir contre lui, l'enlace une dernière fois. Déjà, derrière l'horizon, le soleil sonne la charge. Un incendie de couleurs ravagera bientôt la plaine sans indulgence pour leur séparation. A contrecœur, il tourne le dos aux volutes bienveillantes de la nuit pour prendre le sentier menant aux habitations. Il abandonne son refuge pour retourner dans le monde des hommes.
Ainsi se meurt la paix d'Elvis. Ainsi revient Trinita.