Tribulations de feux et d'acier

Une montagne parait toujours plus grande lorsqu'on est à ses pieds, alors un volcan... C'était stupide, elle-même s'en rendait compte, mais Laïra se sentait défiée, provoquée par l'intimidante présence minérale. Gigantesque, de sombres pierres dans son partiel habit vert et au chef couronné de nuages blancs, le mont trônait sur l'étendue bleue parmi une cour d'îlots déchiquetés, sans rival. Du port, les bâtiments nichés sur ces reliefs escarpés avaient des airs de bernacles accrochés aux protubérances de quelque monstre marin, minuscules parasites. *Bon allez !* Claquant nerveusement du talon par terre, la jeune femme se reprit.

Sur le bateau marchand qui l'avait amené jusque Koneashima, les marins s'activaient déjà à décharger leur cargaison - laine de Tanuki et poudres minérales d'Inu Town - sous la bruyante direction des contremaîtres. Une flopée de visages que la petite blonde avait vu défiler pendant des semaines, sans pour autant les retenir. Ou presque. Arrosant copieusement ses matelots d'invectives plus fleuries les unes que les autres, l'un des petits chefs se tenait déjà sur les quais, debout pour une caisse pour mieux voir ce qu'il se passait. Celui-là, elle le remettait. *Erik, hein...* Jusque là campée sur le pont comme un piquet mal dégauchi, Laïra, ignorant les passerelles surchargées, se faufila jusqu'au bastingage et passa par dessus pour gagner du temps. Les travailleurs auraient de toute façon eu tôt fait de dégager la cornue du passage, occupés qu'ils étaient.

Elle aurait pu user du contremaître familier. Cet Erik, c'était grâce à lui qu'elle avait pu embarquer, et il n'avait pas arrêté de lui rendre service depuis. Mais la jeune femme préférait l'éviter, histoire d'être sûre qu'il la lâche. Aussi gentil puisse-t-il être, presque attendrissant dans sa rudesse masquant mal un cœur d'artichaut prêt à s'enticher du premier vilain petit canard venu, il ne lui revenait pas. C'était à croire qu'il avait une sale idée derrière la tête à être aussi bienveillant. Mais ce n'était pas pour ça, plutôt à cause de sa trogne et le minable bout de tissu noué autour de son cou, qui lui rappelait l'escogriffe à qui elle*Aïe !*... Son atterrissage sur le débarcadère, malgré une souple réception, s'accompagna d'un brusque éclair de douleur au flanc qui la fit grimacer.

- Enfant de putain de Jacob de...

En s'éloignant du navire, Laïra pesta toute seule une bonne minute. Le souvenir de ses déboires à Manshon était encore diablement vif, ne serait-ce que grâce aux blessures qui n'avaient pas tout à fait fini de cicatriser. Elle avait eu la brillante idée de fricoter avec la pègre locale, pour remplir ses poches un peu trop vides et, évidemment, s'était débrouillée pour que tout dérape jusqu'à des extrêmes absurdes. En une journée d'enfer, la cornue avait failli brûler vive deux fois, s'était faite plomber de toute part, la cervelle mise à part... Et, entichée de deux larrons - révolutionnaires, lui avaient-ils dit une fois échappés - plus tordus qu'elle encore, avait ravagé un entrepôt et décimé les rangs d'une Famille de la mafia de North Blue.

Difficile pour la jeune femme de trancher sur ce qui l'avait le plus marqué. Les flammes et les tirs, ou la pile de cadavres sur le pont du navire volé qui leur avait servi d'échappatoire. Tous ces visages exsangues, bleus et aux yeux vitreux, passait encore, mais l'odeur... Il n'avaient pas commencé à pourrir, mais les morts avaient... pris leurs aises, disons. Balancer tous les corps à la mer fut une tâche particulièrement infâme. Pas sans les dépouiller de tout objet de valeur, bien sûr, tant qu'il n'était pas maculé de fluides divers... Alors la fusillade, les balles dans le corps, les flammes menaçantes... C'était tout sauf glorieux ou romanesque, mais le plus affreux avait bel et bien été l'après, un après synonyme de douleur, de fatigue et de crasse. Heureusement, et mieux valait tard que jamais, la petite blonde s'était bien gardée de suivre Jacob et Canaille - les deux insurgés - jusque chez leurs petits copains séditieux à Luvneelpraad.

Laïra était étrangère à la gratitude et tant mieux, car on lui avait rendu un sacré service en l'amenant pour trois fois rien jusque Koneashima. Fausser compagnie aux révolutionnaires timbrés n'avait pas été particulièrement difficile, mais la bougresse s'était retrouvée à son point de départ, à savoir sur une île qu'elle ne connaissait pas et pas grand-chose en poche. Un éternel recommencement, vu sa situation présente... Ou presque. Cette fois au moins elle avait un objectif plus précis.


Quelques heures plus tard...


Dans cette ville à flanc de montagne, au moins y avait-il toujours à proximité un escalier ou une marche où l'on pouvait s'asseoir, pour peu qu'on ne craigne pas de se salir. Avec sur le dos un long trench de cuir tout élimé, récupéré sur un macchabée, la jeune femme ne s'en souciait absolument pas. Installée à la diable, le vêtement coincé sous ses fesses, elle ruminait à grand renfort d'expressions faciales et de petits gigotements. C'était tout bête, si évident qu'elle n'y avait pas pensé.

- Fait chier...

Cela ne portait guère à conséquence, mais Laïra n'en pestait pas moins. Non loin d'elle, d'imposants bâtiments s'élevaient, richement décoré dans le style local, bien qu'un symbole bien visible fasse un petit peu tache. Ce symbole, c'était celui de la Marine Mondiale, accompagné des trois engrenages imbriqués de la Brigade Scientifique. L'Université Figura étendait son campus dans la périphérie de la ville de Koneashima, et il aurait été impossible à la jeune femme de dire précisément jusqu'où ses annexes allaient. Elle soupçonnait l'endroit d'avoir, tel les icebergs du nord de North Blue, la majeure partie de son infrastructure invisible, cachée sous la surface. Nul doute que le flanc du volcan se trouvait aménagé par d’innombrables et téméraires excavations. Mais pour le moment... C'était le congé hebdomadaire, et l'entrée était totalement fermée.

Toute notion de semaine, sans parler de mois ou d'année avaient quitté la cornue, dans ses errances sans but. Elle savait à peu près la saison, s'il faisait jour ou nuit, et cela lui suffisait amplement. Restait qu'elle se retrouvait à devoir attendre jusqu'au lendemain. Pragmatique dans son accès colérique, la bougresse préférait attendre de se s'être calmée avant de retourner en ville. Vu son état, elle ne donnait pas cher de la peau du premier inconscient qui l'irriterait. Comme pour lui donner raison, ses paumes la démangeaient furieusement, alors que bouillonnait dans ses membres une agitation de mauvaise augure. Errance sans but, pas tout à fait. Laïra se calma, non sans difficulté. Pour une fois, elle était sur une île avec un objectif bien précis. Objectif qu'elle ne pourrait mener à bien si elle se mettait à dérailler. En quelques minutes la jeune femme était opérationnelle.

- Bon... Plus qu'à trouver où crécher...

Retourner au centre-ville ne lui lui aurait pas pris très longtemps, mais elle s'arrêta à mi-chemin. Le bruit caractéristique d'un fourneau à charbon avait attiré son attention. Enfin, ça et le martèlement vigoureux du métal, le tout provenant d'une arrière-cour ombragée. Sans gêne aucune, la petite blonde s'avança, curieuse.

- Hé, y a quelqu'un ? Vous auriez pas à boire ?

Curieuse et la gorge un peu sèche.


Dernière édition par Laïra Estum le Jeu 26 Sep 2019 - 14:30, édité 1 fois
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"Je ne suis pas assez qualifié. Vous êtes sûr qu'il n'y a pas une erreur ?"

~ J'ai vérifié et absolument aucune. Ces deux agents en formation sont sous ta responsabilité et t'attendent devant la cabine. ~

L'escargophone miniature dans sa main gauche, Uzi soupira et se passa l'autre main sur le visage.

~ L'affaire Manshon est quelque chose de plus sérieux que le gouvernement ne le croit. Si j'étais eux, je l'aurais confié à un agent de catégorie I au moins. Mais on dirait que c'est le cadet de leurs soucis. ~

Comme il partageait l'avis du coordinateur, le tatoué ne réagit pas à la remarque sur son grade. Il continua d'écouter les instructions la tête baissée, ses dreadlocks cachant sa vue.

~ On sait que les Révolutionnaires ont incendié cette usine à poudre et que la famille Bambana a perdu beaucoup d'hommes dans l'histoire. On sait également que deux d'entre eux ont embarqué cette gamine après l'incident, que leurs chemins se sont séparés et qu'elle s'est retrouvée sur Koneashima. ~

L'agent prit une inspiration d'air et releva la tête. Il se souvint qu'il était seul dans la cabine et réalisa l'absurdité de son geste.

"La cornue sait où sont repartis les Révolutionnaires."

~ On n'en a aucune certitude. Mais le nombre d'informations qu'elle a aussi bien concernant l'Armée Révolutionnaire que les Bambana est potentiellement immense. ~

Le sniper se racla la gorge et posa la question cruciale.

"Couverture ?"

~ Vous êtes trois esclaves récemment affranchis. Vous cherchez simplement un endroit où être à l'abri pour quelques heures. Prends le strict minimum en armes, l'idée n'est pas de la combattre et encore moins de la blesser. Tentez juste de gagner sa confiance et recueillez quelques informations. Les deux recrues ont enfilé leurs costumes, le tien t'attend à l'intérieur du coffre qui est en face de toi. ~

Ce fameux coffre qu'il avait repéré dans la cabine et n'avait pas osé ouvrir avant d'en recevoir la consigne. Il s'exécuta et, gardant l'appareil dans le creux de sa main, ouvrit le coffre. Une interrogation lui vint.

"Et si des soldats du G-1 nous repèrent habillés en esclaves et tentent de nous arrêter ?"

~ Si l'information est passée comme il le fallait, le G-1 est prévenu. En cas d'altercation, il vous suffira de dire le mot suivant : strapontin. ~

Uzi observa avec une légère curiosité sa tenue. Il s'agissait d'une tenue d'esclave classique, accompagnée de bouts de chaînes brisés, de sandales et d'une immense cape d'un violet extrêmement foncé. Il rapprocha son visage du mini-escargophone.

"Merci bien."

~ Bonne chance. Gatcha. ~

Le tatoué posa l'escargophone miniature sur un coin de table et commença à se changer. Comme à chaque instant où il ne jouait pas du barillet, il ne put empêcher ses pensées de partir librement dans toutes les directions possibles.
Bon, déjà il y avait cette île. Koneashima, anciennement Mirador, l'île volcanique où l'on racontait que les pluies de cendres étaient fréquentes et ordinaires pour les habitants. Comme si ses supérieurs prenaient toujours un malin plaisir à l'envoyer aux îles les plus brûlantes des quatre mers... Tandis qu'il enfilait sa combinaison beige, il observa longuement la cape qui lui servirait probablement plus de pare-cendres que de couverture.
Et puis ces deux agents en formation qui l'attendaient dehors. Allaient-il être capables de tenir leur langue et d'agir avec professionnalisme ? Et s'ils parlaient, allait-il être capable de les gérer ? Il noua soigneusement les manches du haut de sa tenue autour de sa taille afin de rester torse nu sous la cape, et remplaça ses claquettes neuves par les sandales qui complétaient sa couverture. Enfin, il enfila la cape pourpre et en releva d'un geste la large capuche en tissu. Il était désormais couvert de la tête aux chevilles.
Après avoir rapidement rangé le mini-escargophone dans la poche spécifique de son sac, il en sortit les trois armes les plus en piteux état du lot : un duo de revolvers miteux de type remington et une grande épée bâtarde à la lame épaisse et longue dont la pointe avait déjà commencé à rouiller. Il enfila la lame dans sa ceinture-fourreau et régla celle-ci autour de son torse, lui permettant de porter l'épée sur son dos. Il ramassa les deux armes à feu et sortit enfin de la cabine.

Cette sensation, c'était comme si le soleil lui explosait au visage. L'agent n'eut d'autre choix que de plisser légèrement les yeux. Le ciel était pourtant relativement noir, du moins il le devenait au fur et à mesure que le navire avançait. Le sniper à la peau brûlante s'avança vers ses deux futurs collègues, eux aussi en tenue, et leur serra la main l'un après l'autre.

"Enchanté."

"Enchanté, m'sieur Uzi ! On m'a parlé de vous super souvent depuis que j'suis arrivé au CP5. C'est trop cool de vous rencontrer et de travailler avec vous sur cette mission ! On commence par quoi, dites ?"

Sans difficulté, Uzi repéra celui des deux qui allait avoir le plus de mal à tenir sa langue. Ils ne s'étaient d'ailleurs pas présentés, ou peut-être l'avaient-ils fait mais le flot de pensées qui continuait à s'écouler dans son esprit l'empêchait de s'en soucier réellement. Le tatoué chargea les deux remingtons et interrompit le moulin à paroles dans son discours pour lui donner le premier, avant de s'avancer vers la recrue la plus calme et lui confier le second.

"Gardez-les sur vous et ne vous en servez qu'en cas de légitime défense. La mission n'est pas de blesser qui que ce soit. Si je vous les réclame, redonnez-les-moi."

La recrue bavarde grimaça.

"Beurk, qu'est-ce que c'est que ces pistolets tout pourris ? On peut pas avoir ceux qu'on utilise en cours de tir ?"

"Nous sommes d'anciens esclaves. C'est mieux si nos armes sont de piètre qualité."

Il se retint de lui expliquer la différence fondamentale entre pistolet et revolver, et préféra demander à ce qu'on leur mette une barque à disposition. Chose faite, les trois agents descendirent dans la barque et le tatoué prit les deux rames afin de finir le trajet jusqu'à l'île. L'agent n'écoutait déjà plus les questions du bleu, et pour cause, il avait peine à s'imaginer expliquer à un membre du Cipher Pol qu'accoster sur une île au bord d'un bateau de la Marine les chaînes brisées ne faisait pas partie du quotidien d'un esclave.

Après deux ou trois minutes intensives à ramer pour atteindre la rive la plus proche de ce qui ressemblait à un centre-ville, les trois hommes capuchonnés purent descendre de la petite barque en bois et la nouer à l'un des poteaux en bois qui, à vue d’œil humain, semblait flotter paisiblement sur la rive. Le ciel avait beau laisser apparaître quelques traces de l'activité pyrotechnique locale et le volcan au milieu de l'archipel intimider les nouveaux arrivants par sa taille et la vue en perspective qu'il leur offrait, l'atmosphère était globalement assez agréable. Uzi eut notamment la bonne surprise de constater que le temps ne s'était pas réchauffé outre-mesure, et, après s'être passé la main sur le visage, réalisé qu'il ne s'était en effet pas affaibli. Sa volonté de mener la mission à bien n'en était que plus forte maintenant qu'il n'avait plus d'excuse. Sans surprise, le bruit que faisait leurs bouts de chaînes attira directement l'oreille des soldats du G-1 qui surveillaient le port, qui pointèrent immédiatement leurs armes sur les trois esclaves. Celui d'entre eux qui avait le visage le plus dur et le plus marqué, probablement le plus haut-gradé, s'avança près eux et prit la parole.

"Les chaînes n'ont pas fait long feu, à ce que je vois."

Uzi se prit le bras droit avec la main gauche et leva le regard.

"Auriez-vous un strapontin à nous dépanner ?"

L'officier acquiesça, puis fit signe aux soldats de baisser leurs armes. Il baissa le ton de sorte à n'être audible que par les trois agents.

"Je vais prévenir mes supérieurs que vous êtes arrivés. Bonne chance pour votre mission."

Uzi acquiesça à son tour, rassuré que l'information aie circulé correctement, et regarda rapidement les deux agents en formation. Pendant que l'officier s'éloignait, il désigna le plus silencieux du doigt.

"Tu seras Hedo."

Il se tourna ensuite vers la recrue bavarde.

"Tu seras Reiosu. Je serais Yasuke. Allons-y."

Les trois vagabonds se mirent en route, une série de bruits métalliques guidant toujours leurs pas. Si la plupart des habitants étaient étonnés de voir ce spectacle, aucun d'entre eux n'osait signaler la présence de ces trois esclaves aux autorités. Le moulin à paroles reprit du service.

"C'est trooop cool Reiosu comme nom ! Au fait m'sieur Uzi, chez nous dans la base du G-3, on raconte que vous avez sauvé la vie à m'sieur Hogan face à un malade mental ! C'est vrai ça ?"

Voilà qu'il connaissait le type qui l'avait recruté, maintenant. Le tatoué espérait fort que Hogan n'avait pas inscrit ce type au Cipher Pol, et étrangement se faire cette réflexion ne le rassurait pas sur sa légitimité à en faire partie lui-même. Il se contenta d'une réponse froide.

"Fais attention, les gens nous entendent."

Une chose était certaine : si ce gamin répétait une seule fois son prénom, il allait goûter aux Yeux du Diable.
Le tatoué, qui n'avait pas lâché son bras gauche depuis l'altercation avec la Marine, avança vers une vieille femme, leva le regard vers elle, se remémora rapidement le portrait-robot qu'on lui avait fait de la jeune fille et prit la parole.

"Bonjour, madame... Il paraît qu'une jeune fille dans le coin héberge des gens dans le besoin. Blonde, pâle de peau et cornue, à priori."

"Oh, euh... Je ne la connais pas personnellement, mais je crois bien que je l'ai vue dans la journée. Blessée, au ventre ?"

Uzi ne laissa rien transparaître sur son visage, bien qu'il intégrait l'information.

"Oui, madame."

"Oh, oui, je l'ai croisée. Elle grommelait quelque chose à propos de l'Université Figura. Vous savez, l'université ? Là où vous êtes, c'est juste à l'est, puis la prochaine à gauche, puis tout droit. Une petite trotte mais vous ne serez pas déçu, le bâtiment est très joli !"

La pitié dans le regard de la femme âgée et le ton discret et délicat qu'elle adoptait le rassura quant à la crédibilité de leur couverture.

"Merci, madame."

La femme pencha la tête et lui sourit.

"Il n'y a pas de quoi. Vous savez, il ne faut pas trop le répéter aux soldats qui sont ici, mais je suis ravie que vous ayez pu vous en sortir."

En voilà, une bonne phrase parfaite pour faire culpabiliser Uzi quant à sa condition d'allié du Gouvernement Mondial. Il se retint de lâcher un soupir et fit signe à ses deux acolytes de se diriger vers l'Université.

La marche dura une heure au moins, et le tatoué faisait de nouveau face au flot de paroles de Reiosu, nom de code de l'une des deux recrues qu'il avait décidé d'associer à elle faute d'avoir retenu son véritable nom. L'avantage, maintenant, c'était qu'il s'était décidé à rentrer dans son personnage, et que son discours incessant était cette fois bien celui du supposé Reiosu, pas de l'agent en formation fatiguant qu'il y avait derrière. Comme il n'avait jusqu'à présent fait aucune gaffe et prononcé aucune fois le nom 'Uzi', le sniper le laissait parler. Il se préparait cependant à l'interrompre et à lui ordonner de ne plus dire un mot une fois la cible en visu.

Et quelques mètres plus loin, alors qu'ils n'avaient pas atteint la destination que la vieille femme leur avait indiqué, la cible se retrouva justement dans leur champ de vision. Les longues cornes arborées par son crâne étaient le premier détail remarquable, mais ses cheveux, son teint pâle, son grand front dégarni et ses yeux rougeâtres indiquèrent clairement à Uzi qu'ils tenaient leur femme. Alors que les deux recrues commençaient à courir vers la cornue, le tatoué écarta ses deux bras et les stoppa net.

"Hors de question de l'effrayer. Allons-y en marchant. Ayez l'air fatigués. Je lui parle, contentez-vous de bien cacher les revolvers sous votre cape."

Les deux agents en formation acquiescèrent et le suivirent plus calmement, traînant légèrement du pied. Au fond de lui, le jeune homme à la peau brûlante priait surtout pour que la grande épée qu'il portait sur son dos n'intimide pas la cible, bien qu'il était évident qu'elle n'était plus toute jeune - l'épée, pas Laïra. Voyant qu'elle s'apprêtait à entrer dans le bâtiment à sa droite, il accéléra le pas. Après une marche rapide et de moins en moins naturelle, il parvint à se retrouver près d'elle. Il feignit un essoufflement, qui était en vérité presque réel, fit baissa au maximum la tête et ouvrit la bouche pour prendre la parole.

"On est désolés, mademoiselle. L'endroit où vous vous apprêtez à rentrer, vous savez s'ils peuvent nous accueillir juste pour la nuit ? Ça fait plusieurs heures qu'on cherche un coin où boire un verre d'eau."
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