- Arhye...
- Quoi ?
- J'ai chaud.
Cela fait plusieurs jours que nous traînons au Royaume d'Alabasta maintenant. Nous sommes arrivés à Alubarna, la capitale, il y a un moment déjà. Nous avons eu l'occasion de faire le tour de la ville et de collecter des informations par-ci par-là mais nous en sommes toujours au point mort. Il faut dire que l'endroit est mal choisi : malgré ses relations avec le Gouvernement Mondial, l'endroit ne comporte aucune garnison de la Marine, ni avant-poste ni rien. Il existe bien une ambassade, pour la forme, mais son utilité est négligeable.
- C'est normal, c'est le début de l'après-midi.
- ... T'as pas chaud toi ?
- Nan ça va.
J'espérais sincèrement en apprendre plus sur le lieu où ont été emmenés mes parents. Etant soupçonnés - à tort - d'avoir pactisé avec la Révolution, et appartenant à la Marine pour l'un, j'imagine qu'ils ont dû passer devant le tribunal d'Enies Lobby. D'après le journal, il y a eu pas mal de procès au cours de ces derniers mois impliquant des révolutionnaires et leurs alliés. Si mes parents ont été reconnus coupables, il y a de fortes chances pour qu'ils aient été exécutés...
Mais mon père possède son lot de victoires. Il est reconnu par ses pairs. Ses faits d'arme devraient lui servir, ainsi qu'à ma mère. Tant que leur mort n'est pas confirmée, je dois continuer de chercher.
- T'as bien de la chance... Si seulement je pouvais me rafraîchir, là, tout de suite... Rien que par la force de ma volonté...
- Ouais, ce serait l'idéal.
- ...
- ...
- Tu voudrais pas...
- Non, stop !
- Oh allez ! Rien qu'un glaçon ! Sur la langue !
- NON ! Je ne suis pas une machine !
- Pfeuh ! Radin...
Et voilà. Matt Denis se remet à bouder. Tout ça parce qu'il fait quarante à l'ombre et que notre dernière pause date d'il y a deux heures, au moment du dîner. Du coup il grommelle tout seul dans son coin - la partie gauche de notre banc, sous un palmier - tout en enfonçant ses mains dans ses poches... Jusqu'à ce que la chaleur l'oblige à les ressortir, moites et collantes. Cela fait bien longtemps qu'il n'a pas remis ses gants noirs d'ailleurs.
Je soupire et replonge dans mes pensées. En cas d'emprisonnement, Jotunheim était le choix premier : prison réputée ; résidents célèbres ; sans distinction d'affiliation. Mais les récents événements ont permis d'exclure cette possibilité. Pour le reste, ce ne sont que des suppositions : Le trou, Mile High Purgatory, le Kapharnaum... Autant de noms entendus ça et là, au travers d'une discussion, d'une rubrique ou d'une annonce gouvernementale. Quoi que Mile High soit censé être un lieu très secret : il est difficile d'accès, ce qui s'y passe n'arrive jamais aux oreilles des curieux et personne n'en ressort pour témoigner de ce qu'il y a vécu.
Je remercie mon compagnon pour ses talents de furetage. Il n'empêche que même avec ça, impossible de savoir où chercher. De toute manière, on ne pourrait pas faire grand chose à deux.
- Je pensais à un truc.
- Mmh ?
- T'aurais pas entendu des rumeurs sur une île pas loin d'ici ?
- Une île ? Quel genre ?
- Un "royaume aussi grand qu'Alabasta"...
- Imashung ? Et alors ?
- Eh ben... Tu sais...
- ... Oh je vois où tu veux en venir. Je te connais.
- Et donc ?
- Je pense que t'es sacrément con.
Je me tourne vers Matt, cachant mal mon étonnement : c'est bien la première fois que je l'entends jurer aussi franchement, surtout à mon égard. Sans doute que sa mauvaise humeur passagère y est pour quelque chose, mais tout de même ! Il ne sourit pas du tout. Il a même l'air particulièrement sérieux.
- Tu penses à Lust, c'est ça ?
- ...
- C'est un Corsaire, Arhye. Une des femmes les plus dangereuses au monde qui plus est. Tu ne peux pas lui demander quelque chose sans t'attendre à en payer le prix. Et nous savons tous les deux que ce ne sera pas du gagnant-gagnant.
- Quand bien même, elle pourrait au moins savoir si...
- Quand bien même ! Soit elle nous réduit en esclavage, soit elle découvre tes pouvoirs et décide de te prendre comme larbin à vie. Sois raisonnable, bon sang ! Si tu veux les retrouver, c'est pas comme ça que tu dois t'y prendre.
- ET COMMENT ALORS ?
J'ai crié. Le voleur a sursauté, tout comme les quelques passants qui marchaient par là. Mais pour l'instant, je m'en contrefiche :
- Qu'est-ce que tu proposes ?! Hein ? Qu'on retrouve les autres ? Moka a disparu ! J'ai laissé Daemon derrière moi par pur égoïsme ! Les seules personnes qui m'ont aidé jusqu'à présent l'ont fait parce que la situation l'exigeait ! Depuis qu'on se connait, on a pas cessé de se faire utiliser, Matt. J'en suis conscient ! Mais tu vois... J'en ai plus rien à faire. Si ça peut me permettre de me rapprocher ne serait-ce QU'UN PEU de mes parents, alors soit ! Qu'on m'utilise ! Alors oui c'est désagréable, oui ça m'emmerde ! Mais est-ce que j'vaux mieux que ça ? Et même si c'était le cas, est-ce que je ne devrai pas tout faire pour les rejoindre au plus vite ? Est-ce qu'au moins ils sont encore en vie ?! PERSONNE NE LE SAIT ! MOI j'en sais rien et ça me tue ! Tu comprends ça ?!
Plus personne n'ose bouger autour de nous. Même les rares enfants du quartier ont cessé de rire et de pleurer, comme pour respecter la non-intimité du moment. J'ai relâché la pression. Pas toute, mais une bonne partie. J'en ai presque les larmes aux yeux... Ce qui pourrait être comique dans d'autres circonstances, vu ma peau sèche. Ma respiration est forte, mon coeur bat vite. Inconsciemment, je souffle de la vapeur d'eau froide.
Si je laissais libre court à mes pulsions, je gèlerai l'entièreté de la place, d'un revers de la main. Mais je n'ai ni la force ni l'assurance de me sentir mieux après ça. Et mes problèmes ne regardent que moi. Je n'en suis pas encore au point d'impliquer des innocents dans mes crises existentielles.
Je ne suis pas un monstre.
... Au final, cette humeur passagère est la preuve que tout est calme. Cela fait un moment que nous n'avons pas eu d'ennuis.
C'en est presque étrange.
- Quoi ?
- J'ai chaud.
Cela fait plusieurs jours que nous traînons au Royaume d'Alabasta maintenant. Nous sommes arrivés à Alubarna, la capitale, il y a un moment déjà. Nous avons eu l'occasion de faire le tour de la ville et de collecter des informations par-ci par-là mais nous en sommes toujours au point mort. Il faut dire que l'endroit est mal choisi : malgré ses relations avec le Gouvernement Mondial, l'endroit ne comporte aucune garnison de la Marine, ni avant-poste ni rien. Il existe bien une ambassade, pour la forme, mais son utilité est négligeable.
- C'est normal, c'est le début de l'après-midi.
- ... T'as pas chaud toi ?
- Nan ça va.
J'espérais sincèrement en apprendre plus sur le lieu où ont été emmenés mes parents. Etant soupçonnés - à tort - d'avoir pactisé avec la Révolution, et appartenant à la Marine pour l'un, j'imagine qu'ils ont dû passer devant le tribunal d'Enies Lobby. D'après le journal, il y a eu pas mal de procès au cours de ces derniers mois impliquant des révolutionnaires et leurs alliés. Si mes parents ont été reconnus coupables, il y a de fortes chances pour qu'ils aient été exécutés...
Mais mon père possède son lot de victoires. Il est reconnu par ses pairs. Ses faits d'arme devraient lui servir, ainsi qu'à ma mère. Tant que leur mort n'est pas confirmée, je dois continuer de chercher.
- T'as bien de la chance... Si seulement je pouvais me rafraîchir, là, tout de suite... Rien que par la force de ma volonté...
- Ouais, ce serait l'idéal.
- ...
- ...
- Tu voudrais pas...
- Non, stop !
- Oh allez ! Rien qu'un glaçon ! Sur la langue !
- NON ! Je ne suis pas une machine !
- Pfeuh ! Radin...
Et voilà. Matt Denis se remet à bouder. Tout ça parce qu'il fait quarante à l'ombre et que notre dernière pause date d'il y a deux heures, au moment du dîner. Du coup il grommelle tout seul dans son coin - la partie gauche de notre banc, sous un palmier - tout en enfonçant ses mains dans ses poches... Jusqu'à ce que la chaleur l'oblige à les ressortir, moites et collantes. Cela fait bien longtemps qu'il n'a pas remis ses gants noirs d'ailleurs.
Je soupire et replonge dans mes pensées. En cas d'emprisonnement, Jotunheim était le choix premier : prison réputée ; résidents célèbres ; sans distinction d'affiliation. Mais les récents événements ont permis d'exclure cette possibilité. Pour le reste, ce ne sont que des suppositions : Le trou, Mile High Purgatory, le Kapharnaum... Autant de noms entendus ça et là, au travers d'une discussion, d'une rubrique ou d'une annonce gouvernementale. Quoi que Mile High soit censé être un lieu très secret : il est difficile d'accès, ce qui s'y passe n'arrive jamais aux oreilles des curieux et personne n'en ressort pour témoigner de ce qu'il y a vécu.
Je remercie mon compagnon pour ses talents de furetage. Il n'empêche que même avec ça, impossible de savoir où chercher. De toute manière, on ne pourrait pas faire grand chose à deux.
- Je pensais à un truc.
- Mmh ?
- T'aurais pas entendu des rumeurs sur une île pas loin d'ici ?
- Une île ? Quel genre ?
- Un "royaume aussi grand qu'Alabasta"...
- Imashung ? Et alors ?
- Eh ben... Tu sais...
- ... Oh je vois où tu veux en venir. Je te connais.
- Et donc ?
- Je pense que t'es sacrément con.
Je me tourne vers Matt, cachant mal mon étonnement : c'est bien la première fois que je l'entends jurer aussi franchement, surtout à mon égard. Sans doute que sa mauvaise humeur passagère y est pour quelque chose, mais tout de même ! Il ne sourit pas du tout. Il a même l'air particulièrement sérieux.
- Tu penses à Lust, c'est ça ?
- ...
- C'est un Corsaire, Arhye. Une des femmes les plus dangereuses au monde qui plus est. Tu ne peux pas lui demander quelque chose sans t'attendre à en payer le prix. Et nous savons tous les deux que ce ne sera pas du gagnant-gagnant.
- Quand bien même, elle pourrait au moins savoir si...
- Quand bien même ! Soit elle nous réduit en esclavage, soit elle découvre tes pouvoirs et décide de te prendre comme larbin à vie. Sois raisonnable, bon sang ! Si tu veux les retrouver, c'est pas comme ça que tu dois t'y prendre.
- ET COMMENT ALORS ?
J'ai crié. Le voleur a sursauté, tout comme les quelques passants qui marchaient par là. Mais pour l'instant, je m'en contrefiche :
- Qu'est-ce que tu proposes ?! Hein ? Qu'on retrouve les autres ? Moka a disparu ! J'ai laissé Daemon derrière moi par pur égoïsme ! Les seules personnes qui m'ont aidé jusqu'à présent l'ont fait parce que la situation l'exigeait ! Depuis qu'on se connait, on a pas cessé de se faire utiliser, Matt. J'en suis conscient ! Mais tu vois... J'en ai plus rien à faire. Si ça peut me permettre de me rapprocher ne serait-ce QU'UN PEU de mes parents, alors soit ! Qu'on m'utilise ! Alors oui c'est désagréable, oui ça m'emmerde ! Mais est-ce que j'vaux mieux que ça ? Et même si c'était le cas, est-ce que je ne devrai pas tout faire pour les rejoindre au plus vite ? Est-ce qu'au moins ils sont encore en vie ?! PERSONNE NE LE SAIT ! MOI j'en sais rien et ça me tue ! Tu comprends ça ?!
Plus personne n'ose bouger autour de nous. Même les rares enfants du quartier ont cessé de rire et de pleurer, comme pour respecter la non-intimité du moment. J'ai relâché la pression. Pas toute, mais une bonne partie. J'en ai presque les larmes aux yeux... Ce qui pourrait être comique dans d'autres circonstances, vu ma peau sèche. Ma respiration est forte, mon coeur bat vite. Inconsciemment, je souffle de la vapeur d'eau froide.
Si je laissais libre court à mes pulsions, je gèlerai l'entièreté de la place, d'un revers de la main. Mais je n'ai ni la force ni l'assurance de me sentir mieux après ça. Et mes problèmes ne regardent que moi. Je n'en suis pas encore au point d'impliquer des innocents dans mes crises existentielles.
Je ne suis pas un monstre.
... Au final, cette humeur passagère est la preuve que tout est calme. Cela fait un moment que nous n'avons pas eu d'ennuis.
C'en est presque étrange.