Mount était depuis plusieurs semaines à bord du navire d'Aoi D. Nakajima, en attendant la prochaine escale. Après les événements de Vindex, le marin déchu avait été secouru par les Ombres du Chaos. Leur seul arrêt avait été l'Ile des Morts ; une minuscule île, censée apporter le deuil à ceux qui y envoient leurs morts. Mais cela n'avait résulté que d'une déception.
Alors, le Fantôme envisageait l'avenir. La Reine Rouge était de bonne compagnie ; mais il ne prévoyait pas de rester dans son équipage. Il souhaitait aller dans le Nouveau Monde, là où il pourrait faire un nouveau départ. Il n'avait décidément pas une âme de pirate, et sa dent contre la Révolution était beaucoup trop vive. Que faire ?
Il avait entendu parlé de royaume lointains, situés dans le Nouveau Monde, qui n'étaient ni sous la coupe des Empereurs, ni du Gouvernement Mondial. Des États indépendants, en somme. Loin de la cruauté des forbans, loin de l'immonde système corrompu contrôlé par les Dragons Célestes. Par son éducation et ses valeurs, il se voyait mal vivre dans un cadre anarchique.
Après tout ce temps passé en haute mer, la sixième flotte de Kiyori décida de s'arrêter à Lynbrook, sur la cinquième voie, avant de continuer sa route. Île des hors-la-loi par excellence, elle allait pouvoir se ravitailler sans problème auprès des nombreux escrocs qui jalonnaient l'endroit.
La nuit était déjà tombée, et on voyait au loin les lumières de la ville. Il s'agissait d'ailleurs plus d'une agglomération de cabanes plus ou moins robustes qu'une vraie ville. Un phare du crime sur Grand Line ; où la plupart des agents du Gouvernement n'osaient pas aller. La violence régnait partout, sans pour autant que les rues aient un côté apocalyptique. Tout cet aspect de Lynbrook restait caché derrière les murs fragiles des échoppes et des bars en tous genres.
Après avoir posé l'ancre du navire, une partie des Ombres du Chaos partit pour la terre ferme, à la lumière de lampes à huile. L'endroit était plutôt sinistre ; les bas-fonds étaient sans aucun doute les plus dangereux de la voie, tant la concentration de détraqués était élevée. Le groupe comportait une vingtaine de marins d'Aoi, et Mountbatten, qui avait été autorisé par la capitaine à partir. Il allait devoir éponger sa dette une autre fois.
Arrivé à proximité des faubourgs de la ville, le Fantôme décida qu'il était temps de quitter la bande de forbans. Après tout, sa trahison était relativement récente - quelques semaines, tout au plus -, et les informations avaient tendance à mal circuler dans des endroits si reculés de Grand Line. Le risque était donc qu'on crût toujours qu'il soit un marin d'élite. Par conséquent, il allait devoir faire profil bas.
"- Bien. Messieurs, je crois que je vais devoir me séparer de vous. Sachez que j'ai apprécié le moment que j'ai passé à bord du navire... Vous êtes de braves gars. J'espère qu'on se reverra, Ombres du Chaos.
- Plaisir partagé mon gaillard ! Mais fais gaffe à toi... Surtout ici. On risque de penser que t'es encore un foutu marine.
- C'est noté, merci."
S'éloignant de plus en plus, il se retourna une dernière fois vers les pirates qui l'avaient récupéré à bord de leur bateau. Ils s'avançaient vers une première boutique, probablement pour acheter de l'alcool. Après tout, on ne les change pas.
Se mettant en invisible, le vétéran de Vindex arpenta une rue différente, hagard. Par quoi pouvait-il commencer ? Le voilà qu'il était livré à lui-même, sans institution pour lui donner un fil directeur ; sans famille pour le recadrer. Rarement avait-il douté dans sa vie. Et même s'il essayait de se rassurer, pensant pouvoir refaire sa vie dans le Nouveau Monde, il n'empêche qu'il se sentait pour la première fois anxieux quant à son devenir. L'image du supérieur stoïque et compétent avait laissé place à un homme désillusionné, qui tentait coûte que coûte de garder la face.
La nuit était tombée. Fatigué, il lui fallait un gîte et un couvert, du moins jusqu'à ce qu'il trouve une occasion pour partir. Les rues ainsi traversées se ressemblaient plus ou moins : la misère était plus apparente que jamais. Sales, répugnantes et dangereuses, elles n'étaient guère accueillantes. Si bien que le Marijoan se demandait comment un esprit innocent pouvait se résoudre à vivre ici... Non, c'était sûr : il n'y avait plus aucune innocence sur cette île, et ce depuis bien longtemps déjà.
Pendant qu'il déambulait dans les allées désertées, des chuchotements s'élevaient dans l'ombre... Ils se faisaient discrets. Du moins pour l'instant...
Invisible, il cherchait un hôtel, ou quoi que ce soit qui y ressemblait. Il aurait sûrement les idées plus claires le lendemain. Et puis, toute cette angoisse l'avait petit à petit consumé. Il en allait de son intégrité mentale.
Au détour d'une énième rue, il aperçut un vieux bâtiment insalubre. Sur la façade, des lettres rouges indiquant les mots "Auberge du Vieux Sage". L'aspect extérieur de la bâtisse n'inspirait pas vraiment confiance ; la couleur partait à de nombreux endroits, la décoration était des plus austères. Mais à cette heure tardive de la nuit, Mountbatten n'avait d'autre choix que d'y séjourner.
Tout en poussant la porte fragile de l'entrée, il réinitialisa son invisibilité, de sorte de ne pas effrayer le réceptionniste. Celui-ci était un vieillard, lourdement assis sur son fauteuil, et feuilletant de la presse de charme.
"- Dix mille la nuit.", dit l'homme, sans même lever les yeux sur son nouveau client.
"- Hum... Bonsoir ?... Dix mille ?!", répondit le Fantôme, désabusé.
"- Douze mille.
- Pardon ? Vous n'avez pas honte ?!
- Quinze mille ou tu dégages."
C'était ça, Lynbrook. Un monde de truands, de bandits et d'escrocs en tout genre. Marche ou crève, dit-on. La violence était omniprésente ; que ce soit à l'extérieur ou à l'intérieur ; qu'il s'agisse de racket ou d'une simple transaction, en apparence banale. Ce manque de civisme avait stupéfait le Fantôme ; lui qui avait été habitué à vivre dans un environnement encadré par des règlements toujours respectés. Cette anarchie, il la méprisait.
Toutefois, il dut s'incliner et payer une avance sur le prix, la gorge nouée. Il avait une forte impression de s'être fait avoir ; mais mieux valait ne pas attirer l'attention. Alors, il gravit les marches pour atteindre le deuxième étage. Le couloir était à l'image du reste : complètement miteux. Il était tombé bien bas.
Sa chambre était suffisamment grande pour pouvoir accueillir un lit, un table et une chaise. La douche et les toilettes étaient communes aux autres chambres. A Lynbrook, les goûts de luxe n'avaient pas lieu d'être. Sans plus attendre, Mountbatten s'écroula sur son lit, remuant à peine les bras pour placer la couverture sur lui. Il était exténué, et démoralisé. Progressivement, ses pensées conscientes firent place à de nouveaux cauchemars. Ils étaient devenus incessants depuis la guerre. Des flashs, des cris, des mélanges de sensation. Des images insupportables, qui avaient fini par le hanter. Il revoyait ses camarades tomber au champ d'honneur ; diriger une section à l'assaut d'un col, ou encore enterrer les morts de la veille. Son syndrome post-traumatique se réactivait à chaque nuit ; il revivait ces scènes, sans pouvoir les oublier.
Le soleil venait taper sur le front de l'ancien marin. La veille, il n'avait pas fermé les stores. A mesure qu'il se réveillait, il pestait contre les rayons de lumière, lui qui voulait encore rester dans son lit. Là, il se sentait plus ou moins en sécurité... Contrairement à l'extérieur. Mais il finit par se lever, et s'étira. Ses yeux retrouvèrent petit à petit leur acuité habituelle. C'est alors qu'il sortit de son lit.
Et c'est là qu'il le vit.
Alors, le Fantôme envisageait l'avenir. La Reine Rouge était de bonne compagnie ; mais il ne prévoyait pas de rester dans son équipage. Il souhaitait aller dans le Nouveau Monde, là où il pourrait faire un nouveau départ. Il n'avait décidément pas une âme de pirate, et sa dent contre la Révolution était beaucoup trop vive. Que faire ?
Il avait entendu parlé de royaume lointains, situés dans le Nouveau Monde, qui n'étaient ni sous la coupe des Empereurs, ni du Gouvernement Mondial. Des États indépendants, en somme. Loin de la cruauté des forbans, loin de l'immonde système corrompu contrôlé par les Dragons Célestes. Par son éducation et ses valeurs, il se voyait mal vivre dans un cadre anarchique.
Après tout ce temps passé en haute mer, la sixième flotte de Kiyori décida de s'arrêter à Lynbrook, sur la cinquième voie, avant de continuer sa route. Île des hors-la-loi par excellence, elle allait pouvoir se ravitailler sans problème auprès des nombreux escrocs qui jalonnaient l'endroit.
La nuit était déjà tombée, et on voyait au loin les lumières de la ville. Il s'agissait d'ailleurs plus d'une agglomération de cabanes plus ou moins robustes qu'une vraie ville. Un phare du crime sur Grand Line ; où la plupart des agents du Gouvernement n'osaient pas aller. La violence régnait partout, sans pour autant que les rues aient un côté apocalyptique. Tout cet aspect de Lynbrook restait caché derrière les murs fragiles des échoppes et des bars en tous genres.
Après avoir posé l'ancre du navire, une partie des Ombres du Chaos partit pour la terre ferme, à la lumière de lampes à huile. L'endroit était plutôt sinistre ; les bas-fonds étaient sans aucun doute les plus dangereux de la voie, tant la concentration de détraqués était élevée. Le groupe comportait une vingtaine de marins d'Aoi, et Mountbatten, qui avait été autorisé par la capitaine à partir. Il allait devoir éponger sa dette une autre fois.
Arrivé à proximité des faubourgs de la ville, le Fantôme décida qu'il était temps de quitter la bande de forbans. Après tout, sa trahison était relativement récente - quelques semaines, tout au plus -, et les informations avaient tendance à mal circuler dans des endroits si reculés de Grand Line. Le risque était donc qu'on crût toujours qu'il soit un marin d'élite. Par conséquent, il allait devoir faire profil bas.
"- Bien. Messieurs, je crois que je vais devoir me séparer de vous. Sachez que j'ai apprécié le moment que j'ai passé à bord du navire... Vous êtes de braves gars. J'espère qu'on se reverra, Ombres du Chaos.
- Plaisir partagé mon gaillard ! Mais fais gaffe à toi... Surtout ici. On risque de penser que t'es encore un foutu marine.
- C'est noté, merci."
S'éloignant de plus en plus, il se retourna une dernière fois vers les pirates qui l'avaient récupéré à bord de leur bateau. Ils s'avançaient vers une première boutique, probablement pour acheter de l'alcool. Après tout, on ne les change pas.
Se mettant en invisible, le vétéran de Vindex arpenta une rue différente, hagard. Par quoi pouvait-il commencer ? Le voilà qu'il était livré à lui-même, sans institution pour lui donner un fil directeur ; sans famille pour le recadrer. Rarement avait-il douté dans sa vie. Et même s'il essayait de se rassurer, pensant pouvoir refaire sa vie dans le Nouveau Monde, il n'empêche qu'il se sentait pour la première fois anxieux quant à son devenir. L'image du supérieur stoïque et compétent avait laissé place à un homme désillusionné, qui tentait coûte que coûte de garder la face.
La nuit était tombée. Fatigué, il lui fallait un gîte et un couvert, du moins jusqu'à ce qu'il trouve une occasion pour partir. Les rues ainsi traversées se ressemblaient plus ou moins : la misère était plus apparente que jamais. Sales, répugnantes et dangereuses, elles n'étaient guère accueillantes. Si bien que le Marijoan se demandait comment un esprit innocent pouvait se résoudre à vivre ici... Non, c'était sûr : il n'y avait plus aucune innocence sur cette île, et ce depuis bien longtemps déjà.
Pendant qu'il déambulait dans les allées désertées, des chuchotements s'élevaient dans l'ombre... Ils se faisaient discrets. Du moins pour l'instant...
Invisible, il cherchait un hôtel, ou quoi que ce soit qui y ressemblait. Il aurait sûrement les idées plus claires le lendemain. Et puis, toute cette angoisse l'avait petit à petit consumé. Il en allait de son intégrité mentale.
Au détour d'une énième rue, il aperçut un vieux bâtiment insalubre. Sur la façade, des lettres rouges indiquant les mots "Auberge du Vieux Sage". L'aspect extérieur de la bâtisse n'inspirait pas vraiment confiance ; la couleur partait à de nombreux endroits, la décoration était des plus austères. Mais à cette heure tardive de la nuit, Mountbatten n'avait d'autre choix que d'y séjourner.
Tout en poussant la porte fragile de l'entrée, il réinitialisa son invisibilité, de sorte de ne pas effrayer le réceptionniste. Celui-ci était un vieillard, lourdement assis sur son fauteuil, et feuilletant de la presse de charme.
"- Dix mille la nuit.", dit l'homme, sans même lever les yeux sur son nouveau client.
"- Hum... Bonsoir ?... Dix mille ?!", répondit le Fantôme, désabusé.
"- Douze mille.
- Pardon ? Vous n'avez pas honte ?!
- Quinze mille ou tu dégages."
C'était ça, Lynbrook. Un monde de truands, de bandits et d'escrocs en tout genre. Marche ou crève, dit-on. La violence était omniprésente ; que ce soit à l'extérieur ou à l'intérieur ; qu'il s'agisse de racket ou d'une simple transaction, en apparence banale. Ce manque de civisme avait stupéfait le Fantôme ; lui qui avait été habitué à vivre dans un environnement encadré par des règlements toujours respectés. Cette anarchie, il la méprisait.
Toutefois, il dut s'incliner et payer une avance sur le prix, la gorge nouée. Il avait une forte impression de s'être fait avoir ; mais mieux valait ne pas attirer l'attention. Alors, il gravit les marches pour atteindre le deuxième étage. Le couloir était à l'image du reste : complètement miteux. Il était tombé bien bas.
Sa chambre était suffisamment grande pour pouvoir accueillir un lit, un table et une chaise. La douche et les toilettes étaient communes aux autres chambres. A Lynbrook, les goûts de luxe n'avaient pas lieu d'être. Sans plus attendre, Mountbatten s'écroula sur son lit, remuant à peine les bras pour placer la couverture sur lui. Il était exténué, et démoralisé. Progressivement, ses pensées conscientes firent place à de nouveaux cauchemars. Ils étaient devenus incessants depuis la guerre. Des flashs, des cris, des mélanges de sensation. Des images insupportables, qui avaient fini par le hanter. Il revoyait ses camarades tomber au champ d'honneur ; diriger une section à l'assaut d'un col, ou encore enterrer les morts de la veille. Son syndrome post-traumatique se réactivait à chaque nuit ; il revivait ces scènes, sans pouvoir les oublier.
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Le soleil venait taper sur le front de l'ancien marin. La veille, il n'avait pas fermé les stores. A mesure qu'il se réveillait, il pestait contre les rayons de lumière, lui qui voulait encore rester dans son lit. Là, il se sentait plus ou moins en sécurité... Contrairement à l'extérieur. Mais il finit par se lever, et s'étira. Ses yeux retrouvèrent petit à petit leur acuité habituelle. C'est alors qu'il sortit de son lit.
Et c'est là qu'il le vit.
Dernière édition par Mountbatten le Mer 6 Nov 2019 - 14:28, édité 1 fois