I "vous pouvez être sûr qu'ils seront aussi tenaces que la pourriture sur mes chicots !"
Le navire filait à toute vitesse sur le chemin argenté dessiné par la lune , projetant des gerbes d'écumes dans les airs.
A bord, les voix d'esclaves résonnaient à travers l'immensité de l'océan, certains clamaient leurs joies pour avoir réussi à quitter l'île de tous leurs malheurs, d'autres pleuraient la mort des compagnons gisant encore sur le pont, réduits au silence par les balles des soldats de la marine.
L'évasion de notre héros et sa bande s'était soldé d'un succès en demi-teinte, car beaucoup d'hommes avaient perdu la vie dans la bataille final pour quitter le port.
Le reste du plan s'était plutôt bien déroulé, le galion était maintenant aux mains des fugitifs et voguait sur le royaume de Poséidon depuis maintenant une trentaine de minutes.
Sola était posté sur le gaillard arrière, surplombant l'intégralité du navire. Il regardait les dix marchands captifs se rassembler lentement et s’asseoir les un à côté des autres sur le pont, sous la menace d'une dizaine d'esclaves pointant revolvers et sabres sur eux. Notre héros dénombra quinze de ses semblables sur le ponts et six autres sur le gaillard avant. Il reconnu Blum, Bewell et César à l'avant du navire, à côté d'un cordages laissé à l’abandon. Sur le pont principal, Léon était appuyé contre le grand mât, bras croisé et visage dur, Syrian était assis sur l'un des canons de la rangé de gauche, Jacky se tenait face à lui, dans la même posture. Koto et Kan faisait partit de ceux ayant géré les otages, ils étaient maintenant accoudés sur le bastingage droit. Le poète en déduit logiquement que seul neuf de ses quinze camarades étaient à bord, le reste d’esclaves lui était inconnue et constituait le groupe libéré pendant la prise du navire sur le port. Quatre de ces hommes gisaient tristement sur le sol, inanimé.
Daju se tenait à côté du poète et observait attentivement la scène de son seul œil. Sa chemise trouée et sa chevelure, couleurs charbons, flottaient au vent. Il tenait la barre d'un air fier, tel l'ancien glorieux pirate qu'il avait été dans une autre vie. Son visage balafré était éclairé par les rayons lunaires et rendaient l'homme encore plus ténébreux.
Il lâcha le gouvernail, fit deux pas en avant et leva un bras dans les airs.
"HOOOOY !!"
L'immense cris fit cesser le boucan immédiatement et tous se tournèrent vers le borgne. On entendit bientôt plus que le vent claquer les voiles du bateau et les vagues se fracasser contre celui-ci. L’expérience de piraterie de Daju l'avait naturellement désigné comme le leader de l'opération sur terre, il était donc logique qu'il agisse comme tel une fois sur les mers.
"Voila l'topo : ça a été un sacré merdier, y'a eu des morts, des imprévus et de la chicane, mais bon dieu... ON A RÉUSSI !!" clama Daju de sa voix roque en levant son sabre dans les airs. A ces mots, tous les esclaves hurlèrent en même temps. Après quelques secondes d’euphorie, le pseudo-capitaine donna un coup d'épée puissant dans la rambarde devant lui, se qui calma l'assembler de suite. Il tourna la tête vers Sola et le saisit par la manche, tirant l'homme à sa hauteur. Il passa un bras autour du cou du poète, et lui sourit de ses dents moisies avant de reprendre :
"C'est c'jeune taré qu'vous voyez là qu'il faut r'mercier ! C'grâce à lui qu'on a pus faire tous c'chemin ! Sola, tu nous a r'filé l'espoir et l'envie de nous barrer de l'île, et on peux tous t'remercier pour ça ! Mais pas maintenant. Maintenant... l'plus dur reste à venir les gars ! On chialera nos morts plus tard, parce que d'ici quelques heures, vous allez voir un navire marine nous coller au fion, et vous pouvez être sûr qu'ils seront aussi tenaces que la pourriture sur mes chicots ! "
Sola regarda les marchands assis devant lui, il pouvait lire la peur et l’incompréhension dans leurs yeux. Il se dégagea du bras de Daju et prit à son tour la parole.
"Personne ici ne veux plus de victimes ! Et surtout pas moi..Je sais que vous n'y êtes pour rien messieurs, mais le sort en a voulu ainsi, nous sommes tous maintenant dans le même bateau. Il ne vous sera fait aucun mal, ce que nous voulons, c'est simplement réaliser notre rêve : devenir libre.."
Sola laissa planer quelques secondes de silence, puis descendit les escaliers menant au pont et se dirigea vers le groupe de prisonnier. Il se posta devant un homme, vêtit d'un long manteau blanc ornée de dorure, il le regarda avec bienveillance et tendit un bras dans sa direction. L'homme regarda le poète d'un air incrédule avant d'empoigné doucement la main de notre héros. Sola tira sur le bras du marchands et le releva d'un coup sec, les deux se regardèrent quelques secondes silencieusement. Le marchand n'avait pas l'air apeuré par la situation, il semblait même au contraire rassuré, sans doute grâce aux paroles du poète.
"A partir de maintenant, vous n'êtes plus nos prisonniers, vous êtes nos alliés. Que ceux qui veulent nous rejoindre ce lèvent ! Sachez que ceux qui vont nous poursuivre ne nous feront pas de cadeaux et chercherons à reprendre ce navire par la force, que vous soyez avec nous ou contre nous. Plus nous serons nombreux et plus nous arriveront rapidement sur une nouvelle île. Si vous nous aidez, nous vous protégeront coûte que coûte, et vous serez tous libéré des que nous toucherons terre, vous avez ma parole, et la sienne !" continua t-il en montrant du doigt la montagne de muscle à la chemise délabrée.
Deux autres hommes se levèrent, ils balayèrent du regard le pont et ses occupant et se postèrent timidement près d'un tonneau de poudre, tel des animaux qu'on viendraient d'apprivoiser . Un autre marchand se mit debout et s'arrêta face à Sola, sa tenue paraissait moins reluisante que les autres, son visage était boursouflé et ses cheveux d'un gras répugnant. Il regarda le poète avec méfiance et s'approcha à quelques centimètres de lui.
"Comment peut-on te faire confiance, l'esclave ?
- Crois en moi.
- Ah.. Bien, je vais faire ça alors."
Son haleine empestait l'alcool et le rat crevé, il fit un quart de tours et avança de quelques pas. D'un coup, il fit volte-face et se jeta sur Sola en dégainant une lame caché dans sa botte. Sola eut à peine le temps de bloquer le bras de son assaillant, la lame s'arrêta à un poil de son œil gauche. Il balaya l'homme en un éclair et lui écrasa la tête avec son genoux avant de lui confisquer sèchement son arme. Deux esclaves accoururent pour lui venir en aide.
Daju arracha son sabre encore planté dans le bois et descendit lentement l'escalier à son tour. Il s'arrêta au milieu de celui-ci et pointa son épée vers notre héros.
"Ne l'prend pas pour n'importe qui, p'tit con ! Sola vous a laissé l'choix et t'as fais le tiens...moi, j'suis pas aussi gentil qu'le gamin figure toi ! César, Syrian, foutez le à la cale et faites un joli saucisson !"
Les deux esclaves qui s'étaient alarmés prirent le marchand par les bras et le traînèrent vers l'unique porte du gaillard avant.
"BANDE D’ENFOIRÉE ! VOUS ALLEZ TOUS COULER ET NOURRIR LES REQUINS ! POURRITURE D'ESCLAVES !!" hurla t-il avant de disparaître. On entendit bientôt qu'un cri lointain provenant des entrailles du navire, puis, plus rien à part le clapotement des flots. Jacky, doyen sur le galion, se leva de son siège canonique, le visage agacé. Il craqua sa nuque par deux reprises et s'avança vers le cercle humain d'un pas lourds faisant craquer le plancher.
"Bon, si il y en a d'autres qui veulent apprécier les joies d'une chambre de luxe comme votre copain, qu'il nous fasse signes. Les autres, restés pas plantés là, on dirait un troupeau de bétail ! Aller moussaillons, quartier libre. Je veux bien un coup de main pour déplacer les cadavres à l’intérieur du navire aussi, qu'on ai moins l'impression de voguer sur un cimetière à voile !"
Les marchands se levèrent un à un, et s’agglutinèrent aux bastingages par petit groupe de trois ou quatre, suivit par un mouvement de foule général de tous les esclaves, provoquant la cohue sur le pont.
Sola traversa la foule mouvementée et se posta seul à l'avant du navire pour admirer la mer. Il se permit un instant d'évasion en regardant l'eau tumultueuse devant lui. Différentes émotions traversèrent son corps et s'entremêlèrent, créant en lui une sensation étrange qu'il ne connaissait pas encore, comme une ivresse sans alcool, comme un orgasme sans sexe. Son esprit était confus et son taux d'adrénaline extrêmement haut, sans compter que les dernières heures vécu était indéniablement les plus intense de toute sa vie. Mais quelque chose malgré tout devint clair, limpide. il comprit que l'océan deviendrait pour lui une source insatiable et inexorable de poésie, qui dicterait ses actes et ses pensée à tous jamais, et qu'importe le dénouement de cette nuit, que plus rien ne serait comme avant à partir de cette nuit.
Quelques heures plus tard
L'aube se levait sur le vaste océan, il devait être sept heure du matin environ. Sola était plongé dans ces pensées, fumant un peu d'herbe qu'il avait précieusement conservé. Il contemplait l'énorme boule de feu gagner de la hauteur dans le ciel, peignant les quelques cumulus d'un jaune pâle. Une main vint taper l'épaule de notre héros qui se retourna brusquement, comme éjecté d'un doux rêve, il en fit tomber sa pipe. Daju et César se tenait devant lui, le balafré prit la parole :
"Bon, et maintenant quoi ?
- On vas où maintenant ? Parce que soit on fonce droit devant, soit on trouve une direction, bref tu m'a compris !
- J'en sais rien les gars.. Je sais pas, mais faut qu'on trouve !
- Ouai, on sait pas où on va quoi ! Moi j'peux naviguer autant qu'vous voulez avec ce p'tit bijou, mais si on à pas un endroit précis où aller, ça risque de s'corser...
- Je pensais que tu saurais quoi faire après avoir pris la galion Daju ! Tu sais pas où est l'île la plus proche ?
- Et bas non !
- On est mal !
- On encore un peu de temps pour réfléchir César.
- Non non, on est vraiment mal !!"
César montrait à présent l'horizon du doigt. Daju et Sola se retournèrent et virent au loin une voile aux couleurs bleu et blanche flottant dans la pénombre. Un galion ennemie était à peine visible, mais bel et bien à leur poursuite. Les trois se regardèrent à nouveau.
"Merde, ils ont réagi sacrément vite. Faut dire qu'ils savent surement mieux piloter que notre bande de bras cassé ! César, dis à tous ceux qui savent à peu près naviguer de c'démerder pour pousser le navire à sa vitesse maximal. On va devoir prier pour tombé sur une île d'ici peu de temps, si on veux éviter un combat naval... Sola, suis moi, faut qu'j'te montres un truc."
Une goutte de sueur naquit des cheveux grisonnant de César et dévala sur son visage défraîchis, elle s'engouffra dans sa barbe poivre et sel et tomba à ses pied. La crainte des événements qui allaient suivre put se lire dans les yeux bleus azur de l'homme.
Il tourna les talons et exécuta l'ordre donné tandis que les deux autres se dirigèrent vers la porte menant à la cale. Le borgne l'ouvrit et les deux compères entamèrent la descente d'un petit escalier en colimaçon pour atteindre le niveau inférieur, où étaient postés une quinzaine de canons à bâbord et tribord de la coque. Ils descendirent encore quelques marches pour arriver un étage en dessous. Là était entreposé un énorme stock de vivre et d'alcool en tout genre, amassé dans des caisses et tonneaux. Des viandes pendaient aux plafonds et se balançait doucement, l'odeur du lieu était agressive et prenait à la gorge. Dans le fond se trouvait une bâche bosselé où dépassaient des bouts de bras et jambes humaines, laissant deviner les cadavres du navire. Daju fit un signe à Sola et ils se dirigèrent vers une autre salle, séparé d'un simple drap. Le poète poussa le tissu et passa sa tête pour examiner les lieux, il s'agissait du dortoirs. Des hamacs étaient étendus au plafond et des vêtements jonchaient le sol. Au fond, une porte comportant trois verrous était entrouverte et laissait échapper un peu de lumière. Daju passa sur la gauche du poète en le bousculant légèrement, il traversa les rangées de couche et s'engouffra rapidement dans la dernière pièce. Sola le suivit et y pénétra à son tour. L'espace était minuscule, trois tonneaux étaient entreposés entre les quatre murs. Daju souleva le couvercle d'un des contenants, laissant apparaître une petite montagne de billet et pièce dorée.
" Pendant la prise du navire, on a fouillé les lieux d'fond en comble et on est tombés la d'ssus. Les autres coffres sont remplies des même merveilles, doit bien y avoir quinze millions de berrys, voir plus ! Si on arrive arrive à c'sortir de c'te galère, même on divisant avec tous le monde, ça nous f'ra une somme pas dégueu' pour commencer notre nouvelle vie !
- En effet ! Il y a encore d'autres endroits intéressants comme ça dans le bateau ?
- Un étage inférieur avec les mêmes quantités de bouffes et un tas d'armes entreposé, plus ton copain avec qui t'as fais mumuse t'à l'heure. Y'a aussi la cabine du capitaine, en dessous du gaillard arrière.. avec pas mal d'instrument d'navigation, qu'personne ne sait utiliser bien sûr ! Et des tableaux pas trop moche accrochés aux murs, sinon, rien d’intéressant.
- Gaillard ?
- Ah oui... gaillard arrière, c'est là où y'a le gouvernail. Gaillard avant, ben c'est l'autre partie plus haute que l'pont. T'as aussi la poupe qui désigne le cul d'un rafiot et la proue, qui désigne..ben l'avant hein !
- Ah d'accord ! Mes premiers mots du champs lexical des navires... ça se fête.
- Je t'en apprendrais plein d'autres des comme ça si tu veux ! Sola.. Vu qu'on est que tous les deux, j'voulais savoir un truc.. Tu t'es prit la tête avec le colonel Späre dans les champs avant hier, et c'est pas une première, il a l'air d'sortir de ses gonds seulement avec toi. Il t'a embarqué avec lui et on t'a plus revu jusqu'au lendemain, tu nous a expliqué que tu voulais te barrer de l'île le soir même. Je te connais pas hyper bien, mais j'sais reconnaître un homme tourmenté quand j'en vois un, qu'est ce qui s'est passé Sola ?
- C'est personnel, et long à expliquer.
- Nous sommes sur un galion que nous avons volé tous les deux après avoir organisé ensemble une évasion... Et on a encore du temps devant nous avant que les boulets d'nos amis militaires nous sifflent aux oreilles. Nous sommes dans le même bateau maintenant, comme tu l'as bien dit tout à l'heure, Sola...
- Späre m'a emprisonné dans une des tours d'observations et torturé pendant plusieurs heures avant de m'avouer qu'il était amoureux de ma mère. Pour lui, c'est à cause de moi si elle est morte. Il me hait Daju, il me hait comme tu ne l'imagine même pas. Nos destins sont.. liés en quelques sorte.
- Tu veux dire que...
- Il est possible qu'il soit sur le navire qui nous poursuit.
- Bordel... Un joyeux foutoir tous ça !
- On devrait remonter sur le pont maintenant."
Les deux hommes firent le chemin inverse, Sola profita de repasser devant les marchandises pour fouiller les caisses entreposés. Il en ouvra une, puis une deuxième et encore une autre, il fouilla cette dernière pendant un temps et finit par en sortir une petit bouteille de saké. Il regarda Daju en lui adressant un sourire satisfait et débouchonna la flasque avant de prendre cinq grosse gorgée au goulot. Il reposa la bouteille bruyamment sur la caisse en lâchant un petit rot disgracieux.
"J'avais pas bu de saké depuis longtemps, ça fait du bien ! T'en veux un peu ?" Dit-il en tendant la bouteille à son camarade, le borgne esquissa un sourire et lui répondit d'un signe négatif de la main. Le poète reprit la bouteille et la glissa dans sa poche, puis les deux regagnèrent les hauteurs du galion.
Plusieurs hommes s'occupaient des voilages tandis que les autres observaient le navire militaire au loin. Daju remonta jusqu'au gouvernail tandis que Sola se dirigea vers deux de ses camarades, occupés à charger un canon de poudre. Les deux têtes brunes se distinguaient facilement du reste du groupe. De pars leurs habits de marine, subtilisés sur l'île dans la nuit après avoir éliminés les militaires, mais également car ils étaient les plus jeunes de l'embarcation, avec Sola, et dénotaient largement des visages durs et marqués des autres esclaves.
"Vous avez gardés vos déguisements à ce que je vois" lança le poète d'un sourire narquois.
" Bas, on sait jamais.. ils nous prendront p'têtre pour l'un des leurs !" répondit Koto d'un ton ironique
"Et pis, ça nous vas pas si mal , non ?" Ajouta Kan, tout aussi ironiquement. Ils tournèrent aussitôt le dos à Sola et retournèrent à leur tâche. Le poète rejoignit Daju et s'appuya contre la rambarde de la poupe, observant les voiles ennemies à leurs poursuites. Le navire devait être à deux ou trois milles nœuds nautique d'eux. Sur le galion, les hommes se tenaient prêt, les canons avaient été placés, la poudre préparé, les armes vérifiés et les nerfs aiguisés.
Quand le soleil fut à son zénith, les esclaves pouvait distinctement voir le navire de guerre cuirassé à trois mats. A première vue, il était visiblement bien plus armé que celui de Sola et devait également comporter bien plus d'hommes en son bord.
Quelques heures plus tard, le premier boulet de canon vint s'écraser dans l'eau à quelques mètres seulement du navire, un nouveau tirs ne tarda pas à être porter, le boulet siffla juste au dessus du mat central et termina sa course une dizaine de mètre devant le bateau. Sept esclaves rejoignirent Sola et Daju, ils préparèrent les trois canons collé à la poupe et lancèrent une première salve de boulet en direction du cuirassé. Les hommes hurlaient à pleine gorge, levant leurs sabres et leurs poings en l'air, comme pour se donner du courage dans ce moment périlleux, La bataille naval était lancé. Une symphonie de bruit sourd commença alors, avec de multiples canons comme instruments et des esclaves en guise de chefs d'orchestre. Le galion était encore à bonne distance et les tirs ennemies étaient imprécis, mais pour combien de temps ?
Soudain, une détonation d'un autre genre, bien plus stridente, s'éleva au dessus des cris des matelots. L'instant d'après, un esclaves tomba de l'échelle de cordes sur laquelle il se trouvait et s'écrasa net sur le pont. Sola reconnue Léon, agonisant au pied du mât de misaine, son épaule saignait abondamment et le malheureux se cramponnait à sa jambe droite, visiblement brisé lors de l'impact au sol.
César, munis d'une longue vue, observa les assaillants au loin. Il s'écria :
"Chiotte, le colonel späre ! ATTENTION LES GARS, LE COLONEL DE L’ÎLE EST AVEC EUX !
- Que tous les marchands aillent s'abriter dans la cale ! Ceux qui veulent nous filer un coup d'pattes sont les bienvenues !! Restez au maximum à l'abris du sniper surtout, de cette distance, il peut tous nous abattre !"
César lâcha sa longue-vue et s'empressa d'allé porter secours à Léon, il l'aida à se relever et l'épaula jusqu'à la cabine du capitaine. Au même moment, tous les marchands se dirigèrent avec hâte vers le lieu indiqué par le borgne. Seul deux restèrent sur le pont, Sola alla à leur rencontre.
"Vous savez ce que vous faites les gars ?"
Un boulet passa à quelques centimètres d'une des voiles dans un sifflement assourdissant.
"Nous n'avons jamais été fan d'esclavagisme, alors si on peut vous aider, nous le ferons.
- Il y a des armes avec les provisions du navire, mais vous connaissez les lieux mieux que moi. Merci messieurs, je n'oublierais pas votre dévouement si on se sort de ce bourbier."
Sola récupéra la longue vue et retourna sur le gaillard arrière pour observer le navire, il vit Jerss Späre debout sur le mat de beaupré, son fusil à la main, il lui donna l'impression de le regarder directement dans les yeux. Le poète put également voir une cinquantaine de marines armées, dont le lieutenant de Späre. L'évasion du groupe avait rameuté une bien belle brochette de militaire. En voyant tout ce monde le pourchasser, le poète dégaina frénétiquement son sabre et lâcha la lunette, qui roula dans l'escalier et continua sa course sur le pont.
*Je t'attend Späre. viens donc qu'on en finisse !*
Les rafales de boulets ennemies ne s'estompaient pas et les tirs étaient de plus en plus précis.
Au bout d'une demi-heure, l'inévitable se produisit, un projectile vint traverser la voile du grand mat, et un deuxième fit partir le nid de pie en éclat. Les hommes s'affolèrent et le vacarme sur le navire s'intensifia encore un peu. Daju agrippait le gouvernail nerveusement, son visage ne laissait rien transparaître mais il était en réalité de plus en plus inquiet par rapport à leurs chances de survie. De son côté, Jacky fixait l'océan depuis quelques minutes avec la longue vue qu'il avait récupéré. Soudain, il s'écria :
"TERRE ! TERRE A L'HORIZON !!!"
Une île commençait en effet à se dessiner devant eux, environ une heure serait nécessaire pour la rejoindre. il s'agissait maintenant d'une course contre la montre, qu'ils devaient à tout prix gagner pour espérés ne pas finir au fond de l’océan avant la tombée de la nuit.