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Une mort fruitée

La chaleur de la colère, le froid glacial de la perte, les couleurs rouges et les couleurs bleues, voilà ce que Tozan ressentait lorsqu’il regardait au fond de ses yeux vide de vie. Le rouge prédominait. Il revivait à la fois l’abandon et la culpabilité. Abandonné par la vie de Maria et coupable d’avoir laissé cette vie s’échapper.

Il trouva la force de rentrer au village avec Maria dans ses bras, malgré ses blessures, accompagné des autres survivants. Rongé par la douleur, Tozan ne se rendait même pas compte du miracle qui s’était produit quelques instants plus tôt. Que des marines poursuivant des esclaves se pointent au moment où ils se faisaient pourchasser par les bandits relevait de la chance. Ils retournèrent tous au village maintenant exempt de toutes crapules.

Les villageois, voyant revenir à la place des brigands, une petite troupe de blessés ont vite compris que c’en était fini des autres. Par un premier sentiment de liberté, ils se ruèrent sur eux pour les aider à porter les blessés, administrer les premiers secours et prendre le relais sur leurs destins. Tozan se retrouva vite débarrasser du corps de Maria, il trouva juste la force de leur dire :

- Ramenez là chez elle s’il-vous-plait, je m’occuperai moi-même de ses funérailles

Les villageois s’exécutèrent et l’amenèrent chez elle, d’autres assirent Tozan pour nettoyer ses blessures, quelques-unes d’entre elles saignaient encore. Ils enlevèrent ses habits découpés et le passèrent sous de l’eau froide, avec du tissu des femmes épongèrent le sang coagulé avec le sable et pansèrent ses blessures. Un vieil homme lui apporta du pain avec un bout de viande.

- Tiens mange ça mon petit ça te fera du bien.

- Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
demanda une des femmes.

Tozan apporta la nourriture à sa bouche, croqua dedans, à peine il l’eu avalé qu’il vomit l’intégralité du contenu de son estomac, un mélange de sang de sable et de bile en ajoutant un bout de pain et un bout de viande. Une fois vidé et légèrement soigné, il se leva et parti dans la direction de la maison de Maria. En approchant de la maison il entendait déjà son chien Bernie aboyer la mort de sa maitresse, il entra et trouva son corps allongé au milieu de la pièce, Bernie léchait sa main qui pendouillait de la couchette et une jeune femme épongeait le sang séché.

Après avoir réussi à faire taire Bernie en lui offrant quelques caresses et un peu d’attention il arrêta le mouvement de la jeune femme et lui dit :

- Merci de t’en être occupé je vais prendre le relais maintenant.


Timide, elle fit un signe de la tête pour dire d’accord et s’en alla après avoir déposé un baiser sur le museau humide de Bernie. Tozan pris le tissu et commença à le passer doucement sur le corps rouge et humide, il nettoya ses plaies jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de sang sur sa peau. Il lava ensuite ses longs cheveux dans lesquels il les fit tremper dans un seau d’eau.

Maintenant qu’elle était propre, il se demandait pourquoi il venait de faire tout ça, il se demandait qu’est-ce que ça changerait vraiment à sa vie d’après qu’elle soit propre ou non, s’il y en avait une. Il ne s’attarda pas sur la question car il avait fait cela instinctivement, il lui devait bien ça, restaurer sa beauté même après la mort. Il lui devait également des funérailles, il décida de s’en occuper le lendemain.

Il était déjà tard, c’était le milieu de la nuit, le village avait retrouvé son calme et tous les êtres le composant avaient bien mérité un peu de repos. Tozan s’est assis à côté de Bernie en le prenant dans ses bras, il se rendit compte en le caressant que Bernie aussi était sale, ses poils étaient collés par du sang séché. Cela n’avait pas l’air d’être son sang, il n’avait pas l’air blessé et en parfait santé, juste triste et conscient du décès de sa maitresse. Tozan se dit alors que c’était à lui de s’en occuper maintenant, ça devait être la dernière chose qu’il devait à Maria.

Après l’avoir lavé il posa sa tête sur le pelage encore humide de Bernie et regarda dans le vide, sans doute que la présence du chien le réconfortait dans la situation qu’il vivait, bien qu’il se sentait toujours aussi responsable de sa mort. Il s’assoupi, épuisé par les derniers évènements, en plus sans avoir mangé depuis une journée entière.

Il se réveilla quelques heures plus tard après que Bernie se soit levé pour se dégourdir les pattes, Tozan profita de cette occasion pour se lever et observer le corps de Maria de plus en plus pâle.

- Il est l’heure de dire au revoir à ta maitresse mon chère Bernie, tu viens avec moi ?

Bernie poussa un son aigu et se frotta à la jambe de son nouveau maitre, en signe d’acceptation. Tozan enveloppa avec délicatesse Maria dans un grand tissu et la posa sur son épaule, il passa la porte et prit la direction de la sortie du village accompagné de Bernie, personne n’était encore debout, l’aube commençait tout juste à se lever. Il s’enfoncèrent alors dans la forêt, l’objectif de Tozan étant de trouver un endroit digne de Maria pour reposer en paix.
    Il marchait. Il ressentait les blessures qui lui avait été infligées plus tôt mais cela ne l’empêchait pas d’avancer. Le sol montait légèrement vers le centre de l’île, au fur et à mesure qu’il marchait la densité de la végétation se désintensifiait doucement, et plus de caillasse apparaissait. Il changea Maria d’épaules plusieurs fois pendant son trajet pour soulager ses muscles engourdis.

    Tozan s’arrêta quand il entra dans une minuscule clairière qui laissait le soleil entrer sur seulement quelques mètres carrés que la forêt permettait. Il déposa Maria sur le sol et s’assit à ses côtés, relevant la tête vers le soleil. Il découvrit ensuite le tissu de par-dessus le visage de maria afin qu’elle puisse profiter de la chaleur des rayons du soleil une dernière fois avant d’être ensevelie pour toujours.

    Quelques minutes passèrent et Tozan choisit un bâton rigide sur le sol et entama la conception de la tombe de Maria. Il ne lui fallut pas plus de temps que ça pour la terminer, il s’allongea dedans sans vraiment connaitre la raison de cette action, peut-être était-il curieux de connaitre ce qui abriterai pour toujours une personne qui comptait à ses eux et dont il était responsable de la mort. Le soleil qui déferlait sur son visage lui obligea à fermer les yeux, il resta quelques secondes dans cet état. Il écoutait la brise soufflée dans les branchages, il y avait des craquements, ainsi que le bruit des feuilles qui virevoltaient et donnait l’impression d’entendre une envolée d’oiseaux. Il y avait également dans cette musique des petits sons aigus et des grattements également, comme si des animaux s’agitaient à côté de lui. Il ouvrit les yeux car les bruits parasites s’intensifiaient et découvrit trois singes autour du corps de Maria. Le tissu était à moitié enlevé, ces petites bêtes cherchaient quelque chose à piquer sur le cadavre, Tozan bondit sur eux en criant pour leur faire peur. Avec succès. Cela l’énerva et il cria de toutes ses forces dans la forêt pour faire fuir toutes âmes présentes.

    Il se baissa pour replacer correctement le tissu de Maria. En lui recouvrant le visage il marqua une courte pause afin d’observer une dernière fois les traits et l’innocence qui se dégageait du visage, Bernie en profita pour déposer une dernière léchouille sur la joue de sa défunte maitresse. Une fois recouverte, il était prêt à finir ce qu’il avait commencé et déposa le corps dans le trou et ne s’arrêta pas pour le remplir de terre. Il ravala un sanglot pour s’interdire de verser une larme. Après avoir tassé le monticule de terre, il s’agenouilla enfin devant la tombe préparée par ses soins. Tozan baissa la tête et l’écrasa au sol tandis qu’il en faisait de même avec ses bras qu’il tendit vers l’avant. Il n’eût la force seulement pour lâcher :

    - Merci…

    Rien de plus ne voulait sortir de la bouche de Tozan, mais il pensa très fort à ce que cette personne avait pu lui apporter pendant cette période en fait très courte mais qui lui paraissait longue comme son enfance. Surement parce qu’il avait vécu les mêmes émotions aussi intensément ces derniers jours que dans son enfance, l’émotion qui ressortait le plus était sans doute la culpabilité.

    Coupable d’être né avec cette malformation au bras, coupable du rejet de ses parents, et coupable maintenant de la mort d’un être précieux, Tozan se demandait ce que le monde désirait de lui, jusqu’où ce sentiment de culpabilité l’emmènera-t-il ? Jusqu’à ce qu’il se sente totalement répréhensible et qu’il ne trouve plus une seule raison de rester dans ce monde ? Quelque chose en lui disait le contraire, il ne pouvait mettre des mots dessus, cependant une infime partie de lui savait que sa vie ne se résumerait pas à ça. Toutefois, il devra continuer à vivre et trouver une raison d’exister tandis que son sentiment de culpabilité ne s’estompera pas.

    Le visage de Maria ne disparaitra jamais de sa mémoire… Il l’avait déjà associé à la végétation extraordinaire de l’île, à toutes ses couleurs, toutes ses odeurs et tous ses sons qui la composaient. C’était une vision agréable de se souvenir d’un visage d’un être cher de la sorte, bien que cette vision ne retirait pas l’histoire qui se cachait derrière. Peut-être était-elle là la solution ! Voir le plus de visage possible et retenir toutes leurs histoires, ces sentiments cumulés l’aideront surement à réduire son mal-être à l’égard de la femme.

    Avec cette idée précise en tête Tozan se releva et décida de grimper à l’arbre le plus grand qu’il trouverait afin de contempler une dernière fois la vue magnifique qu’offrait ce paradis avant de la quitter à tout jamais. Il fit quelques centaines de mètres sans regarder derrière lui et trouva le tronc d’arbre le plus large qu’il ait vu dans les alentours, la largeur du tronc donnait souvent la taille de l’arbre, il était obligé de se fier à cette analyse car il n’en voyait pas la cime. Il commença à grimper avec une certaine agilité qu’il avait acquise pendant tout le temps passé sur cette île. Bernie resta sagement au sol en attendant le retour de son nouveau maitre, il s’allongea et fît mine de commencer une sieste.

    Arrivé à sa cime il avait une vue imprenable sur la canopée, il s’assit là un moment profitant une nouvelle fois des rayons du soleil et des bruits apaisants de la faune de la forêt. Lorsqu’il les rouvrit son regard fût saisi par un gros fruit d’une couleur mauve vif à quelques dizaines de mètres de lui en contrebas, 3 ou 4 arbres les séparaient. Tozan, à la vue du fruit, se rappela de la sensation de la faim qu’il avait oublié pendant quelques heures, son estomac se réveilla. Il n’hésita pas, se mit debout et sauta de branches en branches jusqu’à atteindre le fruit qu’il se voyait déjà dévorer. Il tendit le bras jusqu’à celui-ci, le décrocha et soudain une boule de poils passa à toute vitesse devant lui, lui dérobant l’étrange gros fruit au passage.

    Tozan reconnut les primates qui s’étaient approchés de Maria quelques instants plus tôt, il s’élança sur les branches à la poursuite de ce dernier.
      Ce satané singe était rapide et agile, il se baladait de branche en branche avec la plus grande des aisance, Tozan le poursuivait tant bien que mal grâce à une coordination hors du commun pour un humain, mais la distance se creusait. D’autre bruits de singes parvinrent à ses oreilles, toute la bande était là, ils étaient surement 5 ou 6, ils commencèrent à se faire des passes avec le fruit comme s’ils jouaient et que le fruit en lui-même ne les intéressait pas plus que ça. Ils jouaient, heureux d’avoir trouver la victime de la journée pour bien le ridiculiser. Ils étaient sans doute un peu trop présomptueux ces primates, ils se permettaient de jouer avec les âmes isolées pour leurs propres plaisirs personnels, et ils le faisaient ensemble comme si leur divertissement était au-dessus de toute valeur.

      Tozan n’avait clairement pas l’humeur à se laisser livrer à ce genre de comportement infantile, son estomac en était pour quelque chose, l’évènement de la veille encore plus, il voyait rouge. Il sauta de l’arbre pour pouvoir rivaliser sur la vitesse au sol, là où il était surement plus rapide qu’eux. Seulement, il fallait pouvoir continuer à les voir pour pouvoir le suivre, surtout qu’un seul d’entre eux détenait le fruit qu’il convoitait. Pour l’instant ils avaient l’air de vouloir s’amuser entre eux et ne pas vouloir se séparer donc Tozan pouvait se contenter de suivre le groupe. Le vacarme des rires des singes lui permettait de les localiser précisément dans l’ombre des arbres, Tozan ramassa quelques pierres au sol avec l’intention de séparer 1 ou 2 primates de la bande.

      Il les suivit encore quelques dizaines de secondes avant d’apercevoir une opportunité, il réussit à apercevoir que deux d’entre eux étaient un peu à la traine derrière le groupe, il lança immédiatement les 3 pierres de tailles moyennes qu’il avait dans sa main. Les pierres traversèrent la végétation et vinrent se loger de quelques centimètres dans les troncs d’arbres qui étaient très précisément situés devant les deux singes isolés à ce moment-même. Surpris par l’impact, les deux bêtes prirent peur et partirent dans des directions opposées, cela ne fût pas le seul effet, le peloton de tête quant à eux sursautèrent et augmentèrent la vitesse. L’objectif était maintenant de semer cet étrange humain qui leur lançait des pierres, ils voulaient jouer mais ils tenaient quand même plus à la vie qu’à leur moment de plaisir, mais cela ne suffisait pas pour leur faire lâcher le fruit qu’ils se balançaient maintenant depuis quelques minutes.

      Tozan était toujours en capacité de les suivre, sa vitesse au sol rivalisait toujours avec leur agilité dans les arbres. Il n’en voyait que trois, désormais, il décida de lancer une pierre mais cette fois-ci en visant l’un d’eux. Tozan en attrapa une et visa celui le plus proche de lui, il tira, de la même manière que les précédentes le caillou traversa l’air et la végétation pour finalement heurter la queue de l’animal. Ce membre chez le primate étant celui qui leur permet de s’équilibrer de la meilleure des manières, le choc avec la pierre obligea le singe à se stopper, de par la douleur et par le manque d’équilibre qui venait impacter son agilité. Un de plus était hors course, les deux restant prirent alors vraiment peur, l’un des deux jeta le fruit à l’autre et partit en sautant pour fuir le danger. Le premier, perdu entre peur et témérité, continua dans sa course.

      Étant seul maintenant à devoir porter le fruit, sans pouvoir se décharger de temps en temps à un de ses collègues, le dernier des singes ralentissait mais y voyait toujours un espoir. Tozan quant à lui bondit dans l’arbre, il savait qu’il allait pouvoir le rattraper et enfin dévorer ce satané fruit qui lui consommait plus d’énergie que celui-ci allait lui en procurer…

      Il était maintenant à la même altitude, la distance diminuait petit à petit, la végétation devenait légèrement moins dense au fur et à mesure de la course-poursuite, le singe ne voulait toujours pas lâcher ce maudit fruit. C’était que de la bouffe après tout. Tozan avait verrouiller sa cible et ne la quittait plus des yeux. Le singe s’arrêtait brusquement sur une branche nue, Tozan n’avait plus qu’à lui sauter dessus, il s’exécuta et lui arracha le fruit de ses pattes. A peine eut-il le temps de se réjouir du succès de la course, il ne sentait déjà plus la branche sous ses pieds, il était en train de tomber, vite, trop vite… D’un rapide coup d’œil il vit qu’il venait de sauter d’une falaise, et que c’était pour cette raison que le singe avait mis fin à son petit jeu. Une immense falaise de peut-être 200 ou 300 mètres, vertigineuse, les arbres situés au-dessous de lui semblaient ouvrir grand leurs bras pour l’accueillir à la fin de sa chute.

      Tozan se voyait déjà mourir écrasé au sol ou transpercé par les branches. Dans la panique, il décida tout de même de tenter de se rattraper le mieux qu’il pouvait pour limiter les dégâts, il entreposa alors d’un mouvement furtif le fruit entre ses dents pour libérer ses bras. Il continuait de chuter, mais plus pour très longtemps, l’adrénaline qui se libérait dans son corps lui serra la mâchoire assez fort pour qu’il croque dans le fruit d’un coup sec. Un morceau se détacha et resta dans sa bouche, l’autre bout qui n’était plus raccroché s’échappa et s’éloigna de Tozan dans la chute. Il tenta vainement de s’agiter pour rattraper le fruit, hélas il venait de perdre la quasi-totalité du fruit… Tout en s’agitant il avala tout rond le morceau de fruit sauvé, sans avoir le temps de même pouvoir le mâcher un peu pour goûter son jus surement délicieux…

      Sa chute approchait de la fin, il était prêt à se réceptionner, peut-être les feuillages amortiraient sa chute. C’était le moment, au premier contact de la végétation, celle-ci s’ondula, les matières se mélangèrent en quelques millièmes de seconde, sa main traversa la matière fibreuse comme dans du caoutchouc. Sa main se fit absorber, tandis que le reste de son corps en faisait de même, sa vitesse de chute diminua légèrement, comme si un coussin retenait son choc. Il dévala comme cela le bois qui se transformait en une matière molle, créant une grande coulée de matière tout le long de sa course. Sa vitesse s’approcha de 0 quand il atteint le sol, les yeux écarquillés, sans aucunes égratignures, il leva la tête pour se voir si tout ça était bien réel. Après le contact avec le corps de Tozan, le bois s’était rigidifié instantanément, on pouvait alors observer la trainée que le miraculé avait laissé sur son passage.

      - C’est quoi ce bordel ??? Je suis mort ?? C’est quoi çaaaa !!!!

      Son cœur s’était accéléré de manière exponentielle, il en tremblait de peur. Il prit quelques grandes inspirations sans bouger de son point de chute et approcha sa main de la base du tronc d’arbre, entra en contact avec la matière, ses doigts s’enfoncèrent alors dans le bois comme s’il ne pouvait même plus le toucher où qu’il le fuyait. En enlevant sa main, la matière se solidifia avec la forme des doigts de Tozan qui y était restée.

      - C’est moi qui fais ça ?? Mais qu’est-ce qui a bien pu se passer !!

      Il se repassa les derniers évènements en tête, qu’est-ce qui avait bien pu procurer un tel changement. La course-poursuite, le singe, le fruit, la chute, les arbres…

      - Ce n’est quand même pas ce foutu singe qui m’a refilé un virus ?? Non impossible… Le fruit bordeeel !!!

      C’était bel et bien le fruit qui lui avait procuré ce changement radical dans sa relation avec la matière fibreuse qu’est le bois. Il essaya d’attraper le bois qui se trouvait autour de lui, en vain, celui-ci se ramollissait à chaque contact avec sa main et se rigidifiait instantanément lorsqu’il l’enlevait. Tozan ne supportait pas de ne pouvoir plus toucher le moindre morceau de bois. Il se demandait ce qu’il avait bien pu faire pour attraper une telle malédiction juste après avoir perdu un être cher à ses yeux… Il pleura, il n’avait plus la patience de maintenir ses larmes, il venait tout juste d’échapper à la mort et un pouvoir ridicule venait de le sauver, il ne voyait pas ça comme un miracle ne savait pas encore comment vivre ce nouvel évènement.
        Tozan avait maintenant la sérieuse intention de quitter cette île, il marchait vers le village avec une idée précise en tête qui était de se construire une embarcation qui lui permettrait de se barrer de cet endroit, une embarcation…

        - *Comment diable je vais pouvoir me construire ne serait-ce qu’un radeau si je peux même pas toucher un bout de bois sans qu’il me fonde entre les mains ? *

        Il continuait de marcher avec le réalisme de cette question qui tournait dans sa tête, et avec son idée première qui devenait plus complexe à réaliser maintenant. Bernie sentait bien que quelque hose avait changer chez son nouveau maître, il n’avait pas l’air de ressentir d’énergie négative ou un ressenti de la sorte, mais plutôt l’intrigue d’une certaine force qui le liait à la nature.

        - *Je vais devoir trouver quelqu’un qui puisse m’aider au village. *

        A peine arrivé que les premiers yeux qui l’avaient repéré et reconnu se rapprochèrent.

        - Où étiez-vous ? On ne vous a pas vu de la journée ! Avec vos blessures en plus.

        - Et le corps de la femme dont vous vouliez vous occuper ?

        - Ne vous en faites pas, Maria est tranquille maintenant là où elle est.

        - Vous resaignez à certains endroits laissez nous nous occuper de vous.

        - Volontiers…

        Le petit groupe de femme et d’enfant qui lui avait sauté dessus s’exécutèrent, eau, bandages, plantes cicatrisantes, la totale ! Tozan sera comme neuf après tous ces soins. Ces gens y mettaient un honneur et une énergie à s’occuper de cet homme mystérieux, c’était quand même grâce à lui qu’ils étaient encore en vie et qu’ils avaient regagné une vraie liberté. Ces villageois savaient pertinemment qu’il avait mis en danger son amie, Maria, et qu’elle était morte maintenant, mais ils le voyaient comme un sauveur et feraient tout pour apaiser ses souffrances externes et internes.

        Tozan demanda :

        - J’ai besoin de quitter cette île maintenant, malheureusement je ne sais absolument pas manipuler le bois pour me fabriquer un petit radeau par exemple, vous ne connaissez pas quelqu’un qui s’y connaitrait un peu par hasard ?

        Les femmes marquèrent un temps de pause avant que l’une d’entre elle sorte de son silence :

        - Il y a bien un ancien qui était marchand de planches de bois à l’époque… Chéri tu veux bien aller chercher Sandero pour le monsieur ?

        Le Chéri en question était en fait son enfant haut de trois pommes, qui s’amusait avec les poils de Bernie, il rigolait et le chien lui donnait des gros coups de langue sur le visage, le gamin n’entendait pas sa mère parler.

        - Chéri s’il-te-plait !

        L’enfant redressa la tête, se leva et parti en courant chercher l’ancien.

        - Bernie va avec lui !

        - Wouf

        Le chien le rattrapa en un rien de temps, ils disparurent tous les deux derrières des maisonnettes en bois.

        Quelques minutes plus tard, Bernie surgit d’un coin d’une maison en courant, le gamin le suivait de prêt car il se faisait trainer par une corde accrochée dans la gueule de Bernie. Un vieux personnage le suivait plus lentement, tordu de rire devant la scène. Il arriva à leur niveau.

        - Arf ça faisait bien longtemps que je ne m’étais pas fendu la gueule comme ça moi ! Et c’est partie grâce à vous à ce que j’ai entendu dire, monsieur … ?

        - …Tozan.

        - Et bien monsieur Tozan moi c’est Sandero, que puis-je faire pour vous ?

        - Cette charmante femme m’a dit que vous commerciez des planches de bois, j’aimerai avoir vos conseils pour me construire une petite embarcation pour quitter cette île.

        - Pourquoi voulez-vous quitter cette île jeune homme ? Il y a tout ce qu’il faut pourtant vous n’avez rien besoin de plus pour être heureux !

        - Être heureux… J’ai déjà trop gagné et trop perdu sur cette île, cela fait déjà quelques années que je suis bloqué ici.

        - Je comprends… Vous êtes jeune après tout ahah ! J’accepte de vous aider jeune homme.

        - Vous êtes constructeur de bateaux ?

        - Oh non pas du tout j’étais autrefois un simple artisan, je fabriquai des planches de bois pour le compte du Consortium Ramba à South Blue. C’est une compagnie qui avait besoin de financement à ses débuts pour financer leur nouveau laboratoire de recherche sur le bois. Ils avaient une belle scierie dans laquelle j’ai été embauché pour fabriquer des planches pour des chantiers navals.


        - *Le Consortium Ramba ? Un labo de recherche sur le bois ? *

        L’espoir avait envahi Tozan en entendant les paroles de ce vieil homme passionné, il avait maintenant un net objectif au-delà de cette immense étendue d’eau. Un laboratoire de recherche sur le bois, c’était inespéré, c’était exactement ce dont il avait besoin à l’heure actuelle. Ils auraient surement des informations sur cet étrange pouvoirs, et quand bien même des scientifiques pour l’aider…