Bosser pour les pires chiasses de ce monde inccombe forcément de finir comme une sombre merde. Je l’ai accepté y’a des années maintenant, quand j’ai été forcé de bosser pour l’autre gros lard. Quand on te laisse le choix entre te faire trouer la carcasse par le plomb ou rouler pour une grosse tête de la mafia, si t’as un esprit un brin survivaliste, tu te fais pas des nœuds au cerveau pour prendre ta décision.
Antoni Caesar Bambana est une ordure de la pire espèce, mais c’est l’enfant de chienne qui décide de si je vis ou crève en un claquement de doigts. Alors tant que j’ai pas ce qu’il faut pour lui arracher les mâchoires à mains nues, j’irai pas me frotter à ce gros tas. Baisse la tête, garde ton claque-merde fermé et obéi, c’est encore la meilleure façon de rester en vie Peeter. Même quand on t'envoies chatouiller les gros prédateurs de la ville.
Il se fait appeler Judas, Pater Pugilat de son petit surnom. Croyez-moi quand je vous dis que celui-là, j’ai aucune envie de le rencontrer et encore moins avoir une petite discussion avec lui. Va savoir pourquoi le Boss lui veut la peau, d’ailleurs. De ce que j’ai glané en infos sur le gusse, il est du genre bon entente avec les bonnes personnes, le trucider c’est jouer gros. Risquer de perdre sa tête, et pas que.
Une chance qu’on file le sale boulot à la plus grosse ordure de la famille, hein. L’enfant de putain le plus solide des Bambana, celui que même l’affreux Sciavonnache n’a pas réussi à crever, pas faute d’avoir essayé pourtant. Encore que j’ai eu un sacré coup de cul ce jour-là, pas certain qu’il se louperait une seconde fois l’enfoiré.
J’ai eu le temps de mûrir depuis, l’ancien Caporal de la Marine, déserteur et assassin, désormais clébard enragé de la famille Bambana. C’est quand même une sacré descente aux enfers, bordel. Je suis venu, j’ai posé mes burnes à la table du Diable et je lui ai collé un gros doigt. Ce à quoi il a répliqué de la pire des manières, en m’épargnant. Vivre avec ses démons, ses angoisses, ses regrets, remords, toutes ces merdes qui empoisonnent la tête et pourrissent ta vie, c’est bien pire que de mourir.
Maintenant, c’est moi qui répand la souffrance. Sans trop regarder à qui j’administre les doses, on me désigne une tête et je la vaccine. Une bonne injection de violence et de saletés, histoire que plus jamais elle puisse espérer un monde meilleur, perde tout espoir. Je suis un peu devenu le Croque-mitaine de Manshon, à la différence que je n’épargne personne, adulte comme enfant. Si tu déconnes avec la pègre, Dicross viendra te faire payer.
S’occuper d’un cador comme ce Judas est loin d’être une mince affaire, c’est bien pour ça que c’est à moi de m’y coller. J’ai commencé par chercher un moyen de l’atteindre, ici, sur mon terrain. Profiter de l’agitation qui secoue la ville, les civils en colère qui se retournent contre les cadors contrôlant leur vie, leur ville.
L’Underground, la belle opportunité. Des combats clandestins organisés avec le soutien de la famille Tempiesta. Qu’il paraît que le Père Castagne, il en est le Roi, de ces combats illégaux. Est-ce que je peux espérer meilleure opportunité ? Je vais y aller pendant l’agitation de la castagne et lui trancher la gorge de la lame de mon rasoir. Il ne me verra pas venir et baignera dans son sang avant même d’avoir pu m’écraser un poil de fiacre.
Ils sont pas cons, les organisateurs, ceux qui gèrent le bordel. Ils déplacent régulièrement le lieu qui abrite les soirées salades de phalanges sauce raisiné. Mais avec les bons contacts et en s’adressant aux bonnes personnes, j’ai pu trouver où aura lieu la prochaine. Sur un gros navire casino qui va prendre le large pour l’occasion, l’histoire d’une soirée qui s’éternise sur une nuit, pour revenir déposer ses riches invités aux petits matins. C’est bien connu qu’on préfère être à l’abri des regards indiscrets de la Marine quand il s’agit des affaires.
Pour pouvoir monter à bord, je me fais passer pour un combattant. J’ai amené avec moi un tonton flingueur qui va me servir de manager, on va se battre pour une des têtes friquées de la soirée. Un familier, partenaire en affaires des Bambana.
On embarque quelques dizaines de minutes avant le départ pour le large, en silence et les mines sombres. Rocheurfield, le guignol plein aux as, n'est pas au courant de la combine. Pour lui, il vient seulement miser quelques liasses de billets sur un champion généreusement offert par la famille. C’est un peu naïf dit comme ça, mais je suppose qu’ils ont dû lui proposer une certaine somme en échange de service rendu.
Une fois à bord, on se dirige directement vers ce qui nous intéresse, l’arène. Salles des machines à sous, tables de poker et blackjack, tout ça ce sera pour plus tard. A l’heure qu’il est, Judas doit être en train de se préparer mentalement et physiquement pour son combat de la nuit. En tant que Champion de l’Underground et maître de la cage, il livre toujours combat en dernier, pour clôturer le spectacle de façon sanglante. On s’approche de sa cabine, je me faufile, lui règle son compte et on en parle plus.
Au fait M’sieur Dicross, les plans ont changés. Je fronce les sourcils, tique un coup. De quoi tu me causes ? Les plans ont changés ? J’aime pas trop ce que j’entends. Bah… vous savez ce que c’est, le Grand Brûlé en fait qu’à sa tête et au dernier moment, il a tout chamboulé. Je coupe net toute progression, sentant la bonne grosse quenelle me sauter à la fiole. Qu’est-ce que cet enculé de psychopathe a fait, au juste ? J’ai les mâchoires qui se serrent et la nervosité grandissante, ce que manque pas de remarquer Yolovich.
C’est un bon gars Yolovich, mais il bosse pour une saloperie de première. Il a graissé quelques pattes pour s’assurer que vous soyez au programme des combats de la soirée. Vous aurez le premier rôle m’sieur Dicross, un tête à tête avec le Pater Pugilat. Oh l’enfant de chienne. Anatoli, enflure de raclure de bidet, j’aurais ta peau enculé. ‘Faut pas me regarder avec cette envie de tuer m’sieur Dicross, j’y suis pour rien moi, le Grand Brûlé a pas voulu que je vous - Ferme-la Yolovitch, ferme ta putain de gueule.
Le ton comme la posture sont suffisants pour dissuader l’intéressé de se risquer à transgresser l’ordre. Il sait qui je suis et surtout ce que je suis, il prendra pas le risque de se faire exploser les chicots pour si peu.
Il me faut quelques minutes de calme pour assimiler l’information, pour me faire à l’idée que je suis définitivement le grand baisé de l’histoire. Ce putain d’enfoiré de Sciavo’, il a jamais pu me blairer et moi aussi. Il fera tout pour me sortir de la famille le trou du cul.
Je l’ai si mauvaise que j’allume d’un air agacé une clope à l’opium, besoin d’une foutue dose pour m'anesthésier un peu, retrouver mon calme avant de perdre le contrôle. C’est pas le moment de montrer à ces enfoirés mon mauvais côté, quelque chose me dit que je vais en avoir besoin dans quelques heures…
Dernière édition par Peeter G. Dicross le Mer 26 Mai 2021 - 1:44, édité 1 fois