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Cluedo party [PV Phara]

    3. Mademoiselle Reine arrive en ville et fait trois pas sur le pont.

    Il était tard lorsque Louise arriva. Elle avait navigué avec un groupe de pirates pas très malins qu’elle n’avait eu qu’à séduire pour pouvoir voyager gratuitement. Oh bien sûr, elle avait couché avec certains d’entre eux durant le voyage, mais ce n’était qu’un léger tribut à payer comparé à l’argent qu’elle aurait dû dépenser dans un "transport en commun". Et puis, de toute manière, voyager avec des pirates avait du bon, ils avaient toujours vent de diverses rumeurs et en tant que chasseuse de prime, Louise était toujours en quête d’informations.

    Toujours est-il qu’elle accosta sans encombre sur la petite île d’East Blue où elle avait décidé de se rendre. Elle ne connaissait pas l’endroit et s’était dit qu’il était temps pour elle de s’y rendre. Toute nouvelle île était susceptible de lui faire apprendre de nouveaux renseignements sur les révolutionnaires. C’était en partie la raison pour laquelle elle naviguait sans cesse d’un lieu à un autre, sans jamais s’attarder. Il y avait cette raison et aussi le fait qu’elle ne supportait pas de rester en place à se morfondre en attendant que le temps passe. En fait, elle ne supportait pas de se morfondre tout court.

    Descendant du bateau pirate, la jeune femme s’éclipsa, discrète comme une ombre, emportant au passage quelques objets précieux volés sur le bateau. Imaginer la tête de ses charmants compagnons de voyage lorsqu’ils découvriraient le larcin l’amusa. Combien de temps mettraient-ils à réaliser ? Sans doute trop. Leurs biens étaient perdus, tout comme la trace de la blonde allumeuse qu’ils avaient pris à bord. Tant pis pour eux, ils n’avaient qu’à se montrer plus malins.


    5. Mademoiselle Reine avance de cinq mètres dans la rue.

    La lune était haute dans le ciel et le vent marin soufflait violemment. Une tempête se préparait-elle ? Louise n’en savait rien, elle n’était pas climatologue. La seule chose qu’elle pouvait dire, c’est que les courtes bretelles de son débardeur ne lui tenaient pas bien chaud. Les bas résilles sous son mini short n’aidaient pas plus. Elle n’était pas spécialement frileuse, mais la fatigue accumulée durant le voyage accentuait l’impression de froid. Frissonnant, elle se mit en quête d’une auberge qu’elle trouva sans trop de mal. Le gérant l’accueillit avec affabilité et lui proposa une chambre hors de prix qu’elle paya avec l’argent dérobé plus tôt.

    3. Mademoiselle Reine passe trois portes avant d’arriver devant la porte de sa chambre.

    La chambre est petite, le lit unique fait dans des draps qui semblent propres. La pièce sent le bois et l’air marin. La fenêtre est grande ouverte et les rideaux s’agitent sous les courants d’air. Bah, c’est pas un cinq étoiles, mais c’est décent et elle a dormi dans des lieux bien plus douteux que ceux là. Après une rapide inspection – paranoïa oblige –, la blonde pose ses affaires dans un coin et s’étend sur le lit. Le matelas est usé, les lattes craquent et grincent. Louise était à peu près sûre que si une personne corpulente s’était installée ici, le sommier aurait tout simplement craqué. Elle, elle s’en fout, elle est maigre et, pour une fois, elle ne partage sa couche qu’avec Morphée.

    6. Mademoiselle Reine s’éveille à six heures piles. Elle n’a dormi que quatre heures.

    Quatre heures. Pas mal. Surtout si on prend en compte le fait qu’elle ne s’est pas réveillée toutes les heures. On peut dire que c’était une nuit reposante. La blonde s’étire comme un chat avant d’aller se nettoyer sommairement grâce à une bassine d’eau qui traine dans la chambre. L’eau n’est pas spécialement fraiche, mais elle s’en tape. Satisfaite de ce rapide décrassage, elle se change. L’avantage avec elle, c’est que ses vêtements sont trop indécents pour prendre de la place dans son sac. Elle passe un bustier qui montre une bonne partie de ses seins ainsi qu’un pantalon qui rendrait absurde le concept du « taille basse » ainsi qu’une paire de chaussures dont les talons vertigineux frôlent l’inconvenance. Y’a pas à dire, elle a l’air d’une vraie salope.

    6. Mademoiselle Reine joue au poker depuis maintenant six heures.

    Le poker n’est pas son jeu de prédilection, mais il est plutôt amusant. Seule femme de la table du bar mal famé, Louise s’amuse des hommes qui sont là. Un regard appuyé, une discrète caresse le long d’une jambe, une main qui effleure par inadvertance une cuisse… et voilà un jeu montré par étourderie, une erreur provoquée par l’excitation. Un à un, la manipulatrice les plume. Heure par heure, la table se vide. Ils ne sont plus que deux. Le dernier homme a vu clair dans le jeu de séduction de la blonde. Il ne se fera pas avoir. C’est ce qu’il croit. Trop occupé à ne pas se faire piéger par les distractions de la jeune femme, il n’a pas réalisé qu’elle a fait en sorte que son verre ne soit jamais vide. Le serveur du bar est du côté de Louise. L’homme éméché ne réalise pas qu’il a perdu en vidant d’une traite son dernier verre. Tapis. Brelan de dame contre paire d’as. Dommage mon beau, ce sera pour une prochaine fois. L’argent des pirates a été dilapidé en boissons, mais Louise a su rentabiliser la somme dépensée et la voilà renflouée. Satisfaite, elle regagne sa chambre à l’auberge.

    2. Mademoiselle Reine a passé deux jours dans ce village, elle songe à partir.

    Alors que Louise commence à chercher quelqu’un qui pourrait la transporter vers une nouvelle île, elle entend un homme demander à un marin s’il sait si des chasseurs de primes sont en ville. Avec un sourire enjôleur, la blonde interpelle l’homme.

    « Vous cherchez un chasseur de prime ? »
    « Oui. Il s’est passé quelque chose d’horrible au manoir, mon maitre m’a envoyé chercher quelqu’un en échange d’une forte récompense. Vous savez à qui je peux m’adresser ? »
    « Une forte récompense ? Je pense que je peux vous être utile. Il est où votre manoir ? »

    3. Mademoiselle Reine et le Colonel Bulle arrivent au manoir à trois heures passées.

    Une histoire de meurtre, rien de plus compliqué. Rien de plus intéressant. Huit suspects, une victime, une infinité d’armes. Que la partie commence.
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« Pressons, pressons ! Monsieur Fëanor requière votre présence au manoir dans les plus brefs délais. »

L'homme maigrelet que suivait Pharaun insistait environ toutes les quinze secondes pour lui faire accélérer la cadence de sa marche. Le chasseur de primes, cependant, ne savait toujours pas pourquoi on était venu le tirer de devant son assiette et commençait à se demander si cela en avait vraiment valu la peine. Mais le garde en costume bariolé ridicule avait été très pressant et lui avait bien signifié qu'il gagnerait beaucoup d'argent en échange de sa collaboration. Devant un tel argument il ne pouvait résister, car en effet, à cette époque, l'argent ne coulait pas à flot pour Pharaun.

Le déjeuner qu'il était en train de prendre était, pour ainsi dire, le dernier qu'il avait les moyens de se payer. Il avait été bloqué par ce maudit vent du nord qui soufflait sur l'île et qui empêchait tous les navires de sortir du port, ainsi que d'y rentrer, raison de sécurité. Comme l'endroit était tout ce qu'il y avait de plus calme en terme de banditisme, les chances pour un chasseur de primes tel que lui de gagner son pain semblaient réduites à néant.

Il avait donc passé les deux derniers jours à attendre en constatant désespérément le trou qui se creusait dans ses finances. Si bien que quand le garde était apparu à sa table, il n'avait pas vraiment pu refuser l'offre qu'il lui proposait. L'homme avait été dirigé vers lui par l'aubergiste de l'établissement dans lequel il créchait et celui-ci avait paru satisfait de constater le départ de Pharaun. Sans doute ce brave homme n'avait pas apprécié les huit assiettes cassées, le trou dans une des marches d'escalier ainsi que la disparition du rat ''Tatouille'', fidèle compagnon du chef cuistot qui avait servi de casse-croûte nocturne au chasseur de primes.


« Dépêchons, dépêchons ! » Lui rabâcha l'asperge en se mettant presque à courir. « Seigneur Fëanor demande votre assistance au plus vite. »

Pharaun eut un étrange sentiment de déjà-vu qui lui fit pousser un soupir exaspéré. Il se rendit compte que son attitude pouvait sembler outrageuse pour le domestique qui semblait tant respecter son maitre, mais fort heureusement il ne remarqua rien. Celui-ci était trop occupé à scruter sa montre d'un air paniqué.

« Déjà trois heures vingt-deux ! Avançons, avançons ! »

Ils avancèrent donc, en se dépêchant de se presser, pour finir enfin par arriver au domaine de la famille Fëanor. Celui-ci se dressait sur une petite colline et surplombait le village portuaire. Il était entouré par un mur haut de plusieurs mètres qui rendait toute escalade quasi impossible. La seule entrée existante était celle qui passait par les grandes grilles noires s'élevant en pointes vers le ciel. Le blason de la famille était sculpté sur chacun des deux battants, un cheval se cabrant avec à l'arrière un glaive et une lance qui se croisaient. Alors que Pharaun admirait l'œuvre d'art architecturale, le garde qui lui avait montré la route s'était arrêté pour parler à son collègue qui était posté à gauche de la porte.

« Tu es déjà là, toi ? »

« Oui, j'ai trouvé quelqu'un. Elle attend à l'intérieur. »


Pharaun ne releva pas ce qu'ils disaient et ne se rendit même pas compte que quelqu'un était peut-être là pour la même chose que lui, ce qui pouvait être gênant sachant qu'il y avait une récompense à la clé. Il en résultait obligatoirement une moins grosse prime en cas de partage.

Quoi qu'il en soit le garde ouvrit la grille et l'entraina à l'intérieur du domaine qui se révéla être vraiment immense. Des hectares de verdure s'étalaient devant lui, parsemés de petites allées en gravier. Les bosquets en forme d'animaux rivalisaient de beauté avec les fleurs éclatantes de couleurs. Tout semblait parfait. Pas un brin d'herbe n'était plus haut que son voisin, et nul part on ne voyait une feuille sur le gazon ou une plante fanée. Plus loin, le manoir s'élevait, d'un blanc éclatant. Celui-ci n'était composé que du rez de chaussé et d'un étage, et avait une forme de ''U'' dont les barres étaient pointées vers l'entrée. Rien n'était fait dans la démesure, mais la simplicité apparente cachait un savoir de haute qualité en terme d'architecture.

Tandis qu'il admirait le magnifique décors qui l'entourait, le garde conduisit Pharaun droit vers le bâtiment en empruntant l'allée principale. A mi chemin, le chasseur de primes constata la présence d'un homme s'occupant de creuser dans une terre meuble un trou afin d'y planter une nouvelle fleur composée de quatre pétales, bleue avec les bords noirs. Il s'agissait très certainement du jardinier, et Pharaun voulut s'arrêter pour le féliciter de son travail.

Sa bonne initiative diminua très vite lorsque l'homme, qui se révéla être très grand avec une longue chevelure grise et une barbe épaisse, se tourna vers lui. Il avait arrêté son travail lorsqu'il avait vu les deux personnes arriver, et les regardait maintenant fixement. Surtout Pharaun, pour ainsi dire. Celui-ci se sentit très vite gêné et détourna le regard, en continuant de marcher droit. Il sentit les yeux de l'homme sur son dos jusqu'à ce qu'il arrive au petit escalier donnant sur la grande porte principale en bois.

Il ne se fit pas prier pour entrer, mais le garde resta à la porte, le salua et retourna prendre sa place à coté de son collègue. Il se demanda un instant ce qu'il devait faire mais il fut très vite pris en charge par une très vieille dame qui vint l'accueillir. Elle se présenta sous le nom de Mary Guilt, gouvernante de la famille.


« Veuillez me suivre, je vous pris, Monsieur Fëanor vous attend. »

Tandis qu'elle prononçait ces mots, Pharaun cru déceler ce qui semblait être une grande lassitude dans sa voix. Au vu de l'expression sombre de son visage, il supposa que ce qu'il croyait voir était de la tristesse, et pensa que sa venue ici avait peut-être un rapport. Tandis qu'ils grimpaient les marches les menant au rez de chaussée, Mary repris la parole.

« Vous ne savez sans doute pas pourquoi vous êtes là, je suppose ? N'ayez crainte. Henri va tout vous expliquer dans un instant, à vous et à l'autre chasseuse de primes. Une jeune fille d'un genre... Comment dire... Pas commun. »

Ils arrivèrent immédiatement après l'escalier devant une grande porte qui semblait réservée pour accueillir les invités. Mary laissa Pharaun passer devant.

« Ils vous attendent. Je me tiens à votre disposition quand vous le souhaitez. »


Alors qu'il allait pénétrer dans la salle, une voix éraillée s'éleva du rez de chaussée, juste sous ses pieds : « Les anges aux visages de démons arrivent... Les anges aux visages de démons arrivent... ». Cela ne contribua pas à mettre à l'aise Pharaun qui commençait à trouver l'ambiance franchement pesante depuis qu'il était entré dans le domaine. Mary le regarda, se força à sourire et s'excusa pour aller s'occuper de la personne, vraisemblablement en plein délire, qui se trouvait en bas.

Se retournant face à la porte, le chasseur de primes souffla un bon coup, frappa et entra. La pièce était une sorte de salle de réunion où une grande table prenait la majeure partie de la place, et sur laquelle de nombreux candélabres étaient posés. Les murs étaient ornés de portraits peints représentant les divers membres de la famille Fëanor, en déduisait le nom des modèles au bas de chaque tableau.

Trois personnes étaient déjà présentes, assises autour de la table. A son bout, il y avait un vieil homme. Pharaun supposa qu'il s'agissait de ''Maitre Fëanor''. Il y avait aussi deux autres filles, toutes les deux blondes. L'une à coté du premier, qui était vêtue d'une longue robe noire et dont le maquillage autour des yeux avait coulé, la seconde à l'autre bout de la table. Cette dernière attira particulièrement son attention. Bien qu'il ne soit pas spécialement portée sur les attractions de la chair, il ne pouvait pas vraiment ignorer les atouts de la femme particulièrement bien mis en valeurs par ses quelques vêtements. Il ne put qu'avaler sa salive mais eut du mal à détourner les yeux. Il lui fallut l'aide du maitre des lieux pour que son attention puisse enfin se porter ailleurs que sur la jeune femme.

« Vous voilà enfin. Asseyez vous je vous pris. »

C'est ce qu'il fit. Il prit la place la plus près de là où il était. Pas trop proche des deux personnes assises côtes à côtes mais suffisamment loin de l'autre femme pour ne pas que son attention soit perpétuellement mise à l'épreuve. Il se focalisa donc sur le vieil homme qui repris la parole.

« Maintenant que vous êtes là, nous allons pouvoir commencer. J'ai un service à vous demander. Je sais que les gens comme vous ne travaillent pas sans argent, et bien n'ayez crainte, vous en aurez si vous réussissez. »

Il laissa s'écouler un temps pour que les deux chasseurs de primes (alors elle aussi l'était ?) digèrent l'information. Puis il prit le temps de les regarder tous les deux au fond des yeux avant de reprendre.

« Je veux que vous mettiez la main sur l'assassin de ma fille. »



Dernière édition par Pharaun Mizzrym le Sam 7 Juil 2012 - 17:52, édité 2 fois
    Henri Fëanor
    Spoiler:


    Carte chance. Rendez-vous dans la salle de réunion, touchez 20 000 berries si vous passez par la case départ.

      La pièce était somptueuse. Vaste et décorée avec goût, Louise avait l’impression d’être une tâche dans le décor. Ce qui, en soit, n’était pas complètement faux. Le luxe ambiant n’aidait pas à se sentir à l’aise, et l’allure austère des personnes présentes ne facilitait la tâche. Mais la blonde allumeuse n’avait cure de ce genre de détail. Elle était là pour se faire du fric, pas pour se faire apprécier d’une bande de bourgeois dépressifs. Bourgeois dépressifs et silencieux. Putain, tu parles d’une ambiance. Depuis que la jeune femme était arrivée et s’était attablée, aucune parole n’avait été décrochée. Elle sentait parfois le regard vaguement réprobateur d’une autre fille blonde et de celui qu’elle supposait être son père.

      Finalement, après de longues et interminables minutes d’attente, on frappa à la porte. Avant que quiconque ait le temps de réagir, celle-ci s’ouvrit sur un nouvel individu à l’air un peu paumé. Elle leva au ciel tandis qu’il la détaillait et reporta son attention sur le vieil homme qui s’était levé pour accueillir le nouveau venu. Visiblement, l’attente était terminée et on allait enfin passer aux choses sérieuses.

      « Maintenant que vous êtes là, nous allons pouvoir commencer. J'ai un service à vous demander. Je sais que les gens comme vous ne travaillent pas sans argent, et bien n'ayez crainte, vous en aurez si vous réussissez. »

      Un service payé ? Aux dernières nouvelles, on appelait ça un job. Mais bon, ce n’est pas la peine de jouer sur les mots. Avec intérêt, Louise attendait la suite. Qu’est-ce que ce vieux noble attendait des deux chasseurs de prime ? Oui, visiblement, l’inconnu en était un aussi. Après, ses compétences restaient à démontrer. Enfin bref.
      Comme pour rendre plus dramatique encore la situation, Henri Fëanor, le maitre des lieux laissa planer un silence avant de reprendre. Louise jugea l’effet parfaitement inutile mais attendit sagement.

      « Je veux que vous mettiez la main sur l'assassin de ma fille. »

      Ben tiens, rien que ça. Un meurtre à élucider. Y’avait un truc qu’on appelait « marine » pour ça, normalement ?

      « Pourquoi payer une somme exorbitante pour que des chasseurs de prime s’occupent de cette affaire plutôt que d’appeler des agents spécialisés ? »

      Et hop, les pieds dans le plat pour la demoiselle. Un silence gêné prit place entre les deux bourgeois. Voyant qu’ils ne se décidaient pas à répondre, la jeune femme poussa un soupir et reprit la parole.

      « Bon, c’est pas grave, on verra ça plus tard. On peut savoir ce qu’il s’est passé exactement ? »

      Le ton insolent fit tiquer les deux protagonistes, mais ils ne s’en formalisèrent pas. Après s’être raclé légèrement la gorge, Henri se mit à parler. Il exposa les faits clairement et simplement :

      Plus tôt dans la journée, aux alentours de midi et demi, la gouvernante Mary a gagné la chambre d’Emily, l’une des filles Fëanor, pour lui apporter son repas. La jeune fille était consignée dans sa chambre suite à une infraction au couvre-feu instauré par Mary. Cette dernière, en apportant donc à manger à Emily, l’a découverte poignardée dans son lit. Elle a donné l’alarme et il a été décidé qu’on engagerait deux chasseurs de prime pour résoudre le mystère. Emily et Cynthia, l’autre fille dans la pièce, étaient jumelles et cette dernière étant très affectée par la mort atroce et brutale de sa sœur, les deux chasseurs étaient priés de faire tout leur possible pour mettre la main sur l’assassin. Fin de l’histoire.

      Ca promettait de pas être triste ça encore. Les enquêtes, c’était pas forcément le truc de Louise. Normalement, elle courait après les hors-la-loi et les manipulait jusqu’à ce qu’ils tombent dans ses filets et elle touchait leur prime. Là, ça risquait d’être bien plus tendu. L’investigation nécessiterait plus de finesse, d’organisation et de recherche. Cela dit, le défi était plutôt intéressant à relever. Avec un sourire et ne manifestant pas la moindre compassion à l’égard de la famille en deuil, Louise interrogea Henri, laissant l’autre chasseur faire ce qu’il voulait.

      « Combien vous étiez dans la maison au moment où vous avez découvert le corps ? »
      « Huit. »
      « Qui sont-ils ? »
      « Attendez, je vais vous donner une liste. »

      Le vieil homme se dirigea vers un secrétaire dans un coin et en tira une feuille de papier, une plume et un encrier. Avec une écriture élégante, il entreprit de dresser les noms et activités des personnes présentes au manoir. Voilà qui serait bien utile pour la suite. Une fois terminé, il la tendit à la blonde qui l’examina avec intérêt.

      Henri Fëanor a écrit:Henri Fëanor, propriétaire des lieux, père d’Emily.
      Cynthia Fëanor, fille d’Henri et sœur jumelle d’Emily.
      Sandra Adams, grand-mère des deux filles et belle-mère d'Henri.
      James Fëanor, neveu d’Henri.
      Mary Guilt, gouvernante au manoir.
      Lucas Miura, valet de la maison.
      Ken Tsuyosa, cuisinier.
      Klaus Hänschen, jardinier.

      Bon, eh bien ça faisait un joli panel de suspects. La jeune femme détailla la liste puis la plia soigneusement avant de la ranger dans son bustier. Si l’autre chasseur la voulait, qu’il en demande une à Henri. Pas question de partager. Si Louise était la première à résoudre le meurtre, ça ferait plus d’argent pour elle. Et puis de toute manière, l’autre type ne l’intéressait pas vraiment. Bon, maintenant, il fallait trouver par où commencer. D’après la liste, il y avait peu de chance pour que ce soit la grand-mère qui ait fait le coup. Trop vieille. La gouvernante, elle l’avait croisée en arrivant et même remarque. Le neveu ou le valet étaient déjà plus crédibles dans leur genre. Bon, elle irait voir ce Lucas Miura.

      « Bien, je suppose que vous ne voyez aucun inconvénient à ce que j’investisse les lieux ? »

      Elle avait bien dit « je », se mettant par là même en retrait par rapport à l’autre « enquêteur ». Au moins, ça commençait dans une bonne ambiance…


    Dernière édition par Louise Mizuno le Lun 7 Mai 2012 - 0:21, édité 1 fois
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    Les jumelles Emily et Cynthia Fëanor:


    Il fallut apparemment plus de temps à Pharaun qu'à Louise pour comprendre le discours de Henri Fëanor. Bien après qu'il eut finit de parler, les explications tentaient encore vainement de se frayer un chemin parmi les neurones pourrissants du chasseur de primes. Il restait donc hagard, le regard vide, en attendant que son cerveau daigne enfin se mettre en marche. Fort heureusement l'autre chasseuse, que Pharaun trouvait fort sympathique au premier égard, avait pris les devants et comblait le silence. Ainsi, il ne passait pas trop pour un idiot pendant ce temps.

    Son cerveau ne perçut la première pulsion électrique synonyme de réaction que lorsque Louise sortit de la salle. Toutes les informations se bousculèrent d'un coup dans sa boite crânienne avant de se ranger sagement, deux par deux en se tenant la main, le temps que Pharaun les assimile. Cela lui provoqua un mal de tête court mais intense, mais c'était nécessaire pour que le chasseur de primes soit enfin efficace.

    Une affaire de meurtre donc... Une jeune fille exécutée dans sa chambre le matin même. Dernière heure où la victime avait été vu vivante : dix heures. Heures de la découverte du corps : midi et demi. Nombre de suspects : huit. Age du capitaine : deux derniers chiffres de pi... Bon, il serait temps de mobiliser sa matière grise et de commencer à devenir sérieux. Il y avait apparemment une forte récompense à la clé, et en plus cette histoire motivait Pharaun. Deux bonnes raisons d'essayer d'agir en professionnel.


    « S'il vous plait monsieur. Puis-je moi aussi avoir la liste des personnes présentes à l'heure ''C'' ? »


    Les deux protagonistes ouvrirent de grands yeux, ne comprenant visiblement pas ce qu'était l'eurcé (heure du crime, enfin !), mais Henri s'exécuta sans discuter et retourna chercher un papier qu'il tendit à Pharaun. Celui-ci avait voulu se faire passer pour un connaisseur, mais visiblement ça tombait à l'eau. Peu importe. Il était possible que dans le doute, ils le prennent pour un intellectuel, car il n'est pas rare d'accorder du crédit à une personne dont on ne comprend absolument pas les mots. Quoi qu'il en soit, il jeta un coup d'œil à la liste. Cette Louise avec qui, vraisemblablement, il allait bien s'entendre était partie d'un coup en oubliant l'essentiel. Pharaun se promit de lui donner quelques conseils plus tard, car il se doutait bien que la jeune était novice et ne disposait pas d'une intelligence aussi performante que la sienne. Elle qui disposait du même document que lui était allée enquêter sur d'autres personnes, alors que deux des protagonistes présents lors du drame étaient dans cette salle ! Se donnant un air important, Pharaun gonfla sa poitrine en se levant de sa chaise, s'appuya sur ses poings posés sur la table et regarda tour à tour Henri et Cynthia Fëanor.

    « Bien... Pour commencer, je vais vous demander de bien vouloir me dire ce que vous faisiez entre dix heures et midi et demi. A vous l'honneur, madame. »

    Youhou ! Trop la classe ! Pharaun avait toujours rêvé de dire ça ! Hum... Un peu de sérieux, un peu de sérieux. D'autant que le père et la fille ne semblait pas du tout trouver la situation amusante. Pour un peu, Pharaun aurait affirmé que les deux étaient persuadés de ne pas figurer dans la liste des suspects.

    Professionnel, professionnel. Ne laisser échapper aucune possibilité.

    Après avoir dévisagé son père un court instant, Cynthia pris la parole d'une voix chevrotante. Pharaun supposait que si elle n'avait pas parlé depuis tout à l'heure, c'est parce qu'elle avait peur de fondre en larme à peine eut-elle levé la voix. Ces mots étaient prononcés presque dans un murmure. Pour lui faciliter la tâche, le chasseur de primes la laissa raconter sans la couper.


    « Et bien... attendez, laissez moi réfléchir... déjà je me suis levée vers neuf heures, plus tard que d'habitude. J'ai ensuite déjeuné, pris ma douche... Puis je suis aller me promener dans le jardin. Je le fais tous les matins. Par contre, l'heure exacte... En tout cas il n'était pas encore dix heures.

    J'y suis restée un bon moment, je crois... Après ces deux jours de vent terrible, ça faisait plaisir de n'avoir qu'une légère brise. C'était agréable et j'en ai beaucoup profité. J'étais assise sur le banc en bois, le long du mur Ouest. De là on peut bien admirer les fleurs. Oh d'ailleurs, Klaus y était. Je lui ai fait un signe de la main, il vous confirmera. Puis je suis rentrée en prenant l'allée principale. Je suis presque sûre qu'il n'était pas encore onze heures à ce moment là. Puis j'ai rejoint mon père dans sa chambre où l'on a discuté jusqu'à midi. Puis on est allé manger. »


    Avant que Pharaun ait pu prendre la parole, Henri la lui emprunta.


    « Il était précisément dix heures quarante-cinq quand tu es arrivée, ma chérie... J'ai regardé l'horloge juste après t'avoir vu arriver au bas des marches. »


    Cynthia acquiesça, puis se tourna vers le chasseur de primes. Après cet effort de mémoire, elle sembla se rendre compte qu'il lui manquait quelque chose dans sa manière d'être... se lamenter, peut-être ? Aussitôt, elle se remis à pousser des petits sanglots discrets, ce que nota Pharaun.

    « Bien... Deux témoins, donc... Je vérifierai auprès de ce ''Klaus'' plus tard. En attendant, monsieur Fëanor, vous confirmez les dires de votre fille ? »


    « En ce qui me concerne, oui. J'étais avec elle d'un peu avant onze heures jusqu'à la découverte du corps de... d'Emily.... »

    « Parfait. Pourriez vous à votre tour m'expliquer votre emploi du temps, de dix heures à midi ? De dix à onze heures pardon, du coup. »


    Visiblement, il avait profité du monologue de Cynthia pour huiler son propre discours. C'est avec assurance qu'il commença.

    « Bien sûr. Comme d'habitude depuis la mort de ma bien aimé épouse, j'ai déjeuné avec ma belle mère, Sandra. Elle est vieille et à des sortes de rituels bien à elle... Vous aurez le temps de le constater. Quoi qu'il en soit, nous ne perturbons jamais nos habitudes, et nous nous retrouvons donc toujours dans ma chambre à neuf heures et demi. Pour information, ma chambre et juste au dessus de l'entrée, et elle se situe entre celles de mes deux filles.

    A dix heures, je l'ai ramené dans sa chambre, ainsi si le crime a eu lieu juste après mon départ, je n'ai rien pu remarquer. Ah ! J'en profite pour vous signifier qu'avant que nous quittions ma chambre, ma belle-mère et moi avons constaté la présence de Cynthia dans le jardin. Nous avons même échangé quelques mots à son sujet.

    Où en étais-je... Ah oui ! J'ai donc ramené Sandra dans sa chambre. Elle marche doucement, du fait de son grand âge, et cela nous a donc pris un certains temps. De plus elle habite tout au bout de l'aile Ouest, autrement dit à l'extrémité du manoir. Je suis revenu dans la mienne à dix heures et quart.

    Ensuite je me suis occupé de papiers administratifs. Je suis un homme très occupé, voyez-vous ? En tout cas pendant ce temps, personne ne m'a dérangé. Je suis donc dans l'incapacité de vous confirmer cela, navré. »


    Au vu du ton employé par le noble, Pharaun n'était pas certain qu'il était véritablement ''navré''. Cela dit, pour le moment, le chasseur de primes n'avait aucune raison de douter de lui. C'était quand même cet homme qui l'avait engagé. Pourquoi l'aurait-il fait s'il avait quelque chose à se reprocher ?

    Sauf que, comme l'avait si bien dit Louise, il y avait des hommes, au gouvernement, qui pouvait effectuer la même tâche... Et cela n'aurait pas couté un rond à la famille Fëanor...

    Assurément, il y avait une anguille sous une roche au pied d'un arbre qui cachait une forêt.

    Les histoires de Cynthia et de Henri tenaient la route, en tout cas pour l'instant. Mais Pharaun sentait, au fond de lui, que tout deux avaient des choses à cacher. Important ou pas ? De toute façon, la baraque semblait n'être habitée que par des personnes sortant de la normale, au vu de ce que le chasseur de primes avait d'ors et déjà vu, et entendu... Il n'était assurément pas au bout de ses surprises.

    Autant prendre congé pour le moment.

    Avant de partir, Pharaun demanda à Henri s'il pouvait lui donner deux plans du manoir, afin de situer les chambres de chacun. Il en avait prévu un second pour le donner à Louise quand il la croiserait. Il était sûr qu'ils allaient très vite sympathiser, et Pharaun ne voulait pas rester sur de mauvaises bases quand il aurait résolu l'enquête avant elle. Déjà que c'était lui qui allait toucher la prime, alors autant être courtois.

    Car oui, il allait résoudre l'enquête en premier. Il lui fallait des preuves, mais pour lui c'était déjà tout vu. Un alibi, ça s'invente.

    Et le crime n'est-il pas toujours l'œuvre de celui qui en tire le plus grand intérêt ?
      Spoiler:



      Une paire de chasseurs pour une River de suspects… Faites vos jeux.

        « Emily ! Elle est là ! Mais vous la voyez, non ? »
        « Calmez-vous Madame, il s’agit d’une jeune femme engagée par Monsieur Fëanor. »

        ***

        « Bien sûr que je déteste ces bourgeois. »
        « Au point de les tuer ? »
        « Ca m’a effleuré l’esprit à quelques reprises. »
        « Et ce matin ? »
        « J’ai été chez Mademoiselle Emily pour la poignarder à mort avant de retourner gentiment vaquer à mes occupations. »

        ***

        Entre panique et folie, l’ambiance était plutôt joyeuse dans la maison du crime. Louise savait à peine où donner de la tête au milieu des suspects. Tous pouvaient avoir tué Emily Fëanor. Aux yeux de la blonde, il n’y en avait pas un pour rattraper l’autre au manoir. Ca lui faisait penser à ces histoires qui renouvelaient sans cesse les rebondissements, allant parfois jusqu’à l’absurde le plus total tant on cachait de complots et de cadavres dans les placards. En fait, Emily elle-même aurait pu être suspecte dans cette affaire. Ces gosses de riche faut toujours se méfier avec eux ! Et leurs larbins, on n’en parle pas…

        Liste en main, ignorant ostensiblement l’autre chasseur de prime, Louise était donc partie à la recherche de Lucas Miura, le valet. Elle n’avait aucune idée de ce à quoi il pouvait ressembler, mais il fallait bien commencer quelque part. Et puis de toute manière, un valet, ça a toujours quelque chose à cacher. Du moins dans l’idée que Louise se faisait d’une maison bourgeoise. Car, il fallait l’avouer, la blonde n’était pas familière de la haute société des blues. Elle était plutôt du genre à trainer dans les ruelles sombres la nuit que de prendre son petit déjeuner dans le salon servie par un majordome aussi austère qu’efficace. Être une princesse, ça n’avait jamais été son délire. Et puis bon, on voyait bien où ça avait mené Emily…

        En tout cas, ce n’était pas ça qui allait l’aider à trouver son valet. Dame cherche valet, dame cherche valet. Y’a quelqu’un par ici ? Comme pour répondre à son appel muet, la jeune femme entendit des éclats de voix derrière une porte. Pas spécialement gênée, elle entra dans la pièce et tomba sur une chambre remplie de poupées à l’allure sordide. C’était quoi ça ? Le harem de Chucky ? Se forçant à détourner les yeux de ces horreurs, la blonde posa son regard sur deux femmes âgées.

        « Emily ! Elle est là ! Mais vous la voyez, non ? »
        « Calmez-vous Madame, il s’agit d’une jeune femme engagée par Monsieur Fëanor. »

        Okay… Si maintenant on la prenait pour une morte, ça n’allait pas le faire. Louise ne savait pas qui c’était la vieille bourge, mais elles allaient pas être copines si elle délirait comme ça à longueur de temps.

        « Je suis Louise Mizuno, et je cherche Lucas Miura pour l’interroger. Vous savez où il est ? »
        « Ce petit avorton ne devrait même pas être dans cette maison ! »
        « Ca me dit pas où il est… »
        « Excusez Madame Adams. Lucas se trouve certainement dans sa chambre à l’étage. »
        « Merci. »

        Sous les imprécations de la plus vieille des deux femmes, Louise quitta la pièce et se rendit à l’étage vers ce qui semblait être le quartier des domestiques. Elle espérait sincèrement que le lieu serait plus sain que l’étrange chambre dans laquelle elle avait mis les pieds un instant plus tôt. Vu l’âge de la vieille cinglée, il y avait fort à parier qu’elle avait croisé Sandra Adams, la grand-mère de la victime. Elle et ses amies les poupées de cire. Franchement, comment pouvait-on dormir dans une pièce où des poupées angoissantes vous épiaient sans cesse ? Réprimant un frisson, la blonde atteignit le dernier étage. Elle avait d’abord pensé qu’elle devrait frapper à toutes les portes avant de trouver la bonne, mais la chance était de son côté et elle arriva au moment où Lucas pénétrait dans le couloir.

        Alors qu'elle se dirigeait vers lui avec assurance, Louise eut le plaisir de noter l’expression de surprise sur le visage de son suspect. A peine plus vieux qu’elle, il avait des yeux verts et perçants qui étaient presque aussi déroutants que les prunelles dépareillées de la blonde. Mais dans ce domaine, elle se réservait quand même le monopole du regard flippant. En tout cas, ce Lucas Miura avait une tête à avoir commis un acte répréhensible – voire plusieurs.

        « C’est vous l’enquêtrice ? »
        « Ouais. »
        « Eh bien, si vous avez des menottes, je me ferais un plaisir de vous laisser les tester sur moi. »
        « Les tester ? J’ai fait plus de choses avec des menottes que tu ne peux imaginer. »
        « Je les découvrirais avec plaisir… »
        « Peut-être à la fin de l’enquête, si tu es sage… »

        Comment ? Ca ne se faisait pas d’allumer un suspect ? Ben tiens, elle se gênait ! Elle n’était pas un véritable agent gouvernemental, elle pouvait bien faire ce qu’elle voulait. Et puis un homme n’est jamais aussi coopératif que lorsqu’il est charmé (et plus si affinités). La blonde commença donc son interrogatoire avec les questions banales. Nom, rôle dans la maison, relation avec la victime, ce qu’il pensait des bourgeois… Le jeune homme se prêtait au jeu avec une assurance qui frôlait l’impudence.

        « Et ce matin ? »
        « J’ai été chez Mademoiselle Emily pour la poignarder à mort avant de retourner gentiment vaquer à mes occupations. »

        Louise haussa un sourcil dubitatif avant de lever les yeux au ciel.

        « Et en vérité ? »
        « Je me suis occupé de mes tâches habituelles avant d’aller manger. Techniquement, j’ai trainé un peu partout, donc tout le monde m’a vu. Et puis, si j’avais tué Cynthia, je n’aurai jamais eu le temps de me changer et d’effacer mes traces sans me faire voir. »
        « Emily. »
        « Hein ? »
        « C’est Emily qui a été tuée. »
        « Ah oui, bah, Emily, Cynthia… Ca reste de la petite bourge. Même si pour des jumelles, elles avaient des goûts plutôt opposés. Mais bon, je perdrais moins de temps le matin à faire couler le bain de mademoiselle Emily-je-prends-que-des-bains-à-une-température-précise-et-avec-une-mousse-tout-aussi-précise-dedans. Au moins sa sœur se contente de douches. »

        La blonde ne répondit pas. Les histoires de bains/douches des sœurs Fëanor ne la concernaient pas plus que ça et elle s’en carrait un peu. En tout cas, Lucas avait peut-être des allures de coupable, elle ne pouvait malgré tout rien affirmer pour le moment. Elle devrait interroger les autres membres du manoir avant de cibler des suspects en particulier.


      Dernière édition par Louise Mizuno le Ven 6 Juil 2012 - 1:14, édité 1 fois
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      Ken Tsuyosa, cuisinier :


      Il est des certitudes qui ne peuvent être altérées. Des intuitions si inexplicablement persuasives qu'on en vient à leur donner tout crédit. Peu importe les paramètres douteux, pour Pharaun, aucun doute ne subsistait : Cynthia avait tué sa sœur jumelle.

      Qui cela pouvait-il être d'autre ? Quatre vingt pour cent des histoires de meurtres ont pour motif l'argent. Qui gagnerait le jackpot en tuant Emily ? Réponse : Cynthia. Héritage multiplié par deux, et vu la prestance du manoir, ça ne se jouait pas à une petite dizaine de berries. Maintenant, qui d'autre trouverait un intérêt financier au décès de la jeune noble ? Réponse : personne. Tous étaient soit trop vieux, soit totalement en dehors des affaires familiales. Le neveu aurait éventuellement pu répondre au critère, mais ce n'est pas en tuant Emily qu'il obtiendrait une plus grosse part du gâteau, vu qu'il restait la coupable.

      La coupable étant Cynthia.

      Plus qu'à trouver des preuves maintenant. C'était ça l'essentiel de sa tâche, désormais. Mais alors qu'il se demandait par où commencer, un fumet envoutant parvint jusqu'à ses narines et le fit changer de direction instantanément. 16h30. L'heure de préparer le repas du soir. Le cuisinier Ken Tsuyosa, put lire Pharaun sur sa liste, venait d'allumer ses fourneaux. Bon... Quitte à commencer à se lancer dans une difficile recherche de preuves, autant le faire le ventre plein.

      Il poussa donc la lourde porte qui laissait filtrer les bruits secs d'un homme coupant la viande. Cette vision aurait pu faire peur à n'importe qui -les bouchers sanguinaires ayant la côte dans les histoires terrifiantes- mais Pharaun n'entendait dans celle-ci que le mot ''viande'' auquel il associait poisson, fruit, dessert, œuf, volaille et insecte grillé.

      La cuisine n'étais pas bien grande, il faut dire qu'un homme seul y travaillait. Tout était propre, lavé jusqu'au moindre grain de poussière, à l'exception bien sûr de la table de travail sur laquelle gisait une carcasse de bœuf. Le cuisinier, cependant, essayer de limiter les giclement de sang en ne donnant aucun coup de hachoir inutile. Chaque geste était parfaitement précis. L'intensité de tous ses mouvements étaient réglée pour ne jamais avoir à s'y reprendre à deux fois lors de son travail. Autour de lui était installé le top de l'équipement culinaire. On allait du réfrigérateur d'une taille dépassant l'entendement au four à bois, en passant par une gamme complète de marmite en cuivre, nickel, fer et tout autre métal. Tout parfaitement rangé et organisé d'une manière si évidente que même Pharaun aurait put s'y retrouver. Cuisiner là, c'était quelque chose qui donnait envie. On sentait que Ken était appliqué dans son métier.

      Quand à l'homme en lui-même... Pouvait-on vraiment parler d'un homme ? Dépassant les deux mètres, il avait plus l'allure d'un géant que d'un humain. Et s'il n'y avait que ça... Son regard fermé, sévère, donnait l'impression que l'homme ne désirait que provoquer les autres pour se lancer dans des combats acharnés. C'est du moins le sentiment qu'avait Pharaun alors que l'homme s'était arrêté et essuyait avec application une tache de sang venu s'écraser sur son tablier blanc. Un barbare à l'allure sanguinaire dans un costume méticuleux, à la limite du maniaque.

      On dit que l'habit ne fait pas le moine. Mais qui était l'habit et qui était le moine ? Voyait-il un cuisinier appliqué déguisé en mastodonte, ou un meurtrier psychopathe transformé en honnête travailleur ?

      Quoi qu'il en soit, le ventre de Pharaun le tirait vers le bas pour lui rappeler la chose importante du moment : il avait faim. Ouvrant la porte en entier, il pénétra dans la salle, sous le regard sévère de Ken qui s'était arrêté de découper sa carcasse. Il savait qui il était. Il savait pourquoi il venait ici. Il savait qu'il allait commencer à l'interroger. A l'accuser de meurtre simplement après avoir vu son apparence. Mais il n'en fut rien.

      Le chasseur de primes se laissa tomber sur une chaise posée devant la table. Le cuisinier fit de même. Il s'observèrent discrètement quelques secondes avant que Ken ne prenne la parole.


      « Bien... Je n'ai pas beaucoup de temps à vous consacrer, alors je vais tâcher de faire vite. Je suis en cuisine depuis neuf heures du matin, et j'ai travaillé jusqu'à ce que l'on serve le repas. J'ai mangé avec les autres employés de la maison, comme d'habitude, et tout le monde était présent. Je ne peux m'absenter de devant mes fourneaux plus de quelques secondes car cela ruinerait la préparation des recettes. Demandez aux autres personnes de cette maison, le repas était semblable à d'habitude. »


      Pharaun le regarda, étonné. D'une part parce qu'il se justifiait sans qu'il ne lui ait rien demandé, et d'autre part parce qu'il était béas d'admiration devant cet homme capable de passer tant d'heure juste pour préparer de la bonne nourriture. Un dieu pour Pharaun qui aurait été capable de manger de la viande crue, voir un animal encore vivant, si tant est qu'il ressentait la faim. Alors attendre plus de trois heures avant de se mettre à table...


      « Je vous crois. A vrai dire, je ne suis pas là pour vous interroger. Auriez-vous par hasard quelque chose à grignoter dans un coin ? »

      Le géant le dévisagea, surpris.

      « Vous n'êtes pas l'enquêteur que monsieur Fëanor a engagé ? »

      « Si, mais j'ai conclu l'enquête. L'évidence de la solution était si limpide qu'on aurait pu ne pas la voir en regardant à travers. »


      Ken croisa les bras et commença à s'exprimer d'une voix sarcastique.

      « Tiens donc ! Et en moins de vingt minutes, s'il vous plait. Encore mieux : sans rencontrer toutes les personnes présentes. Et bien, monsieur le détective, éclairez moi. Qui est le coupable ? »

      « Très bien, je vais vous le dire. Mais après, vous me servez quelque chose hein ? C'est que je suis venu pour ça, moi, à la base. Bon. C'est un crime familial. L'assassin d'Emily n'est autre que sa sœur jumelle, afin de se réserver la fortune du père. »


      Le cuisinier encaissa les affirmations du chasseur de primes et sembla les digérer pendant quelques secondes. Puis il se recula et se cala le dos contre sa chaise.

      « Mouais... »

      « Quoi ? »


      « Rien. Je pense juste que monsieur Fëanor a fait une belle erreur de calcul. »

      « Comment ça ? »


      A ce moment, Ken se rapprocha à nouveau de la table sur laquelle il posa les mains, puis il se remit sur ces deux pieds et se releva, dominant Pharaun d'une manière inquiétante.

      « Avec un crétin comme vous, il risque bien de perdre ses deux filles. Vous refusez d'enquêter parce que vous avez une intuition ? Je vous félicite. Mais moi je vais vous donner une faille dans votre raisonnement. Vous vous basez sur le fait qu'Emily est la seule est unique victime dans cette histoire. Méditez. »

      Il se détourna alors et recommença à découper sa carcasse, toujours en veillant à ce que rien ne gicle. Pharaun était choqué et effrayé par l'intervention aussi soudaine que hargneuse du cuisinier.

      « Euh... Pour mon repas ? »

      Il reçut alors sur son habit noir une gerbe rouge directement expédiée depuis le bœuf mort. Vous n'êtes plus le bienvenue dans cette cuisine, monsieur Mizzrym. Il s'en alla donc le plus rapidement possible sans demander son reste.

      Retour au point de départ. Les certitudes ébranlées, Pharaun se demandait si effectivement il n'était pas allé un peu vite dans ses conclusions. Néanmoins, il n'en démordait pas. Pour lui, si Cynthia n'était plus accusée à cent pour cent, elle était quand même la coupable la plus plausible.

      *Mais dans le doute, autant en être sûr et le vérifier. *

      Il se rappelait qu'elle avait parlé du jardinier. Il n'avait pas vraiment envie d'aller voir cet homme qui avait été la première vision qu'il avait eu en arrivant, mais il pourrait sûrement éclaircir quelques points noirs. C'est donc avec appréhension qu'il retourna dans le hall et poussa la lourde porte d'entrée qui le mena jusqu'à l'extérieur.
        Spoiler:

        L2. Touché. M3. Dans l’eau.


          Bon, bon, bon, le valet louche, c’était fait. A qui le tour maintenant ? Louise s’était posée au milieu d’un couloir en examinant sa liste de suspects. C’était pas gagné pour résoudre cette affaire avant la fin de la soirée. A tous les coups, elle allait devoir dormir dans cette maison de barges ! Quoique, dans le fond, c’était pas si mal, c’était gratuit et elle était nourrie en plus. Pas le mauvais plan en fait les enquêtes…

          Secouant légèrement la tête, la blonde évinça ces pensées inutiles et reprit son étude des suspects. Elle avait entendu ce Lucas Miura ainsi que Cynthia et Henri, elle avait croisé l’autre vieille folle et sa domestique, ne lui restait donc qu’à voir le cuisinier, le jardinier et le neveu. Un instant, elle se demanda où en était son « partenaire », mais à nouveau, elle chassa cette idée de son esprit. Faire équipe et partager, c’était pas son truc. Que ce chasseur de prime se débrouille tout seul, tiens !

          « Mademoiselle ? »

          Surprise, Louise releva la tête. Perdue dans ses réflexions, elle n’avait pas entendu Mary Guilt s’approcher. Cette dernière la regardait d’un œil inquiet, se demandant visiblement ce que la jeune femme faisait à camper au milieu du couloir avec sa liste de nom. Pour le coup, la blonde ne pouvait que lui donner raison. Elle aurait dû chercher une pièce tranquille plutôt que de se poser comme une clocharde.

          « Tout va bien ? »
          « Oui, oui. »

          Elle se releva pour faire face à la petite gouvernante. Une soixantaine d’année, les cheveux impeccablement coiffés, les lèvres pincées face à l’attitude de la chasseuse de prime, elle faisait vraiment cliché. La blonde ne put retenir un sourire goguenard alors que les yeux vifs de la vieille femme se baladaient sur sa tenue indécente. Elle arrivait presque à deviner le « les jeunes aujourd’hui… » dans l’esprit de Mary. Toutefois, cette dernière s’abstint de tout commentaire, sachant pertinemment pourquoi Louise avait été engagée.

          « Votre enquête avance ? »
          « On peut dire ça. »

          Puisque la nourrice était là, autant en profiter pour l’interroger.

          « C’est vous qui avez trouvé le corps, non ? »

          La question, posée abruptement et sans préparation fit tiquer Mary. Les événements étaient encore trop frais.

          « C’est exact. »
          « Comment ça s’est passé ? »
          « Je suis allée dans sa chambre ce midi pour lui apporter son repas. Comme elle ne répondait pas, j’ai cru qu’elle boudait et je suis entrée. Là, j’ai remarqué qu’elle était toujours dans son lit, que ses rideaux étaient fermés et qu’elle n’avait pas bougé à mon arrivée. J’ai déposé son plateau sur son bureau, j’ai ouvert les volets et me suis approchée. Et à ce moment… »

          La vieille femme ferma les yeux, comme pour juguler le flot de souvenirs.

          « Oui ? »

          Louise n’était pas là pour éprouver de la pitié pour les proches de la victime.

          « Les draps étaient tâchés de sang et Emily était morte, un poignard dans le ventre. »

          La douleur de la gouvernante semblait sincère, mais un détail chiffonnait toujours la blonde.

          « Tout à l’heure, monsieur Fëanor a expliqué que vous aviez puni Emily, pourquoi ? »
          « Elle… » Une mine gênée et coupable s’afficha sur le visage de Mary. « Elle a enfreint le couvre-feu hier. Je l’ai surprise dans le jardin alors je l’ai consignée dans sa chambre, comme je l’ai toujours fais dans ces cas là. Mon dieu, si j’avais su… »
          « Que faisait-elle dans le jardin ? »
          « Je ne sais pas… Elle a marmonné une histoire à propos d’un homme, d’un mot… Je croyais qu’elle mentait pour ne pas se faire punir et je n’ai pas écouté. Comme je regrette... Oh ! comme je regrette ! »

          Nouvel élément dans l’enquête. Devant la femme éplorée, Louise réfléchissait. Emily était sortie la veille au soir retrouver un homme – c’était du moins ce que laissait supposer Mary. Des hommes, dans cette maison, il y en avait… Hm… Cinq. Oui, c’était ça. Le père présumé innocent, le valet pas bien clair puis le neveu, le cuisinier et le jardinier que la blonde n’avait pas encore interrogé. Lequel, parmi les quatre suspects, pouvait bien avoir donné rendez-vous à Emily ? Et surtout, était-ce bien un de ces quatre là qui avait fait le coup ? Les deux vieilles femmes ne semblaient pas capables de cela, mais la sœur ? Un déguisement pouvait très bien berner n’importe qui, surtout la nuit. Tout ceci méritait plus ample réflexion.

          « Mademoiselle ? »
          « Hein ? »

          Complètement perdue dans ses pensées, la jeune femme avait complètement oublié Mary. Cette dernière semblait s’être calmée toute seule, comprenant rapidement qu’elle ne pourrait compter sur le soutien affectif de l’enquêtrice.

          « Vous allez retrouver celui qui a fait ça, n’est-ce pas ? »
          « Bien sûr. »

          Non, ne vous leurrez pas. Louise n’avait aucune intention de consoler la gouvernante. Elle pensait réellement être capable de trouver le coupable et empocher la récompense. Les sentiments nobles et le sens de la justice, ce n’était pas pour elle.

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        Klaus Hänschen, Jardinier:


        « Monsieur Mizzrym, un instant je vous pris. »

        Pharaun était parvenu jusqu’au hall d’entrée lorsqu’il se fit interpeler. Il était en train de descendre les marches d’un des deux gros escaliers longeant le mur et dominant le séjour. Lorsqu’il se retourna, il put regarder son interlocuteur, Henri Fëanor, qui s’était avancé jusqu’à la balustrade du balcon pour l’intercepter.

        « Excusez moi, mais il y a un détail dont il faut que vous connaissiez l’existence. J’ai oublié de vous en parler tout à l’heure. »


        Saisissant avec joie l’occasion de repousser son entrevue avec le jardinier, le chasseur de primes grimpa quatre par quatre les marches le séparant de son employeur.

        « Je vous écoute. »

        Le maitre des lieux sembla hésiter un instant. Alors que Pharaun attendait, il ne put s’empêcher de penser que l’homme ne ressemblait en rien à ses filles, physiquement en tout cas. Une couleur de cheveux différente, des yeux différents… Derrière lui, le portrait d’une femme faisait par contre plus penser à quelqu’un de la famille… Elisabeth Adam’s… Sans doute la femme décédée d’Henri. Effectivement, elle était le portrait craché de ses filles, si c’était bien le cas.

        « Un objet a été volé. »

        Pris dans ses pensées, Pharaun faillit ne pas entendre la phrase lancée finalement par l’homme en face de lui. Un meurtre, un vol. Le chasseur de primes se tut, attendant plus de détails, mais il comprit qu’il n’en aurait pas s’il ne le poussait pas un peu.

        « Quel objet, monsieur Fëanor ? »

        « Un collier de perles. Un des deux que ma femme a donné à chacune de ses filles à sa mort. Emily et Cynthia les portent sans arrêt. »


        Effectivement, Pharaun avait le souvenir que sa suspecte tripotait souvent le collier qu’elle avait autour du cou. Un coup d’œil en direction du tableau lui permit également de voir Elisabeth Adam’s portant ses deux colliers. Il ne s’était donc pas trompé sur l’identité du modèle. Il en profita pour étudier les deux objets. Les perles étaient énormes et innombrables, d’un blanc éclatant. Les colliers étaient si grands qu’ils descendaient jusque dans le décolleté de la défunte mère.

        « C’est Mary qui a fait cette constatation tout a l’heure, lorsqu’elle a nettoyé la chambre d’Emily. »

        « Comment ça ? Vous voulez dire que la chambre n’est plus dans le même état que pendant le meurtre ? »


        « Non bien évidemment. Je ne voulais pas que l’on observe ma fille dans cet état… »


        L’homme avait recommencé à trembler en songeant à ce souvenir. Ce n’était peut-être pas le moment pour l’engueuler pour sa bêtise. Autant songer à ce nouvel indice. Un collier comme celui-ci devait valoir des milliers de berries. Qui pourrait en avoir besoin ? Certainement pas un des membres de la famille. Ils portaient tous des apparats plus éclatants les uns que les autres. Peut-être était-ce juste une image, cependant, et que ces objets ne valaient rien... Mais les domestiques semblaient tout de même plus indiqués. Il faudrait qu’il y songe, à l’avenir.


        « Bien. Je vous remercie pour cette information, monsieur Fëanor. Je vais retourner à mes interrogatoires, si vous le voulez bien. »


        Sans attendre de voir si effectivement il le voulait bien, Pharaun se retourna et descendit à nouveau l’escalier de marbre pour se diriger vers la porte d’entrée volumineuse.

        « Vous allez voir Klaus ? »

        « Oui, oui effectivement je vais voir Klaus, pourquoi ? »

        « Je vous accompagne. »

        Le chasseur de primes poussa un soupir. L’homme ne semblait pas comprendre que ce qu’il faisait était sérieux.

        « Ecoutez… Cela n’est pas possible. Je vais certainement lui poser des questions sur vous et si vous êtes là, forcement les réponses seront biaisées. »

        A nouveau Henri cligna plusieurs fois rapidement des paupières, comme s’il essayait d’accepter l’outrecuidance de celui qu’il avait en face de lui. Il ne devait pas beaucoup apprécier d’être suspecté lui aussi. Secouant la tête, il insista.

        « Ne vous en faites pas pour cela. Si je demande à Klaus de tout raconter, il racontera tout. Et ma présence pourra vous être utile, je vous assure. »

        De dépit, Pharaun secoua la tête. Que pouvait-il faire, c’était lui le chef, après tout.


        « Très bien. »


        Le soleil commençait sérieusement à décliner à l’extérieur. Les nuages blancs étaient teintés de tâches rougeâtres. On aurait dit une mariée immaculée de sang. Pharaun frissonna. Il reporta son attention sur le jardin, magnifique. Les fleurs bleues situées juste devant lui semblaient rayonner pour éclairer d’une froide lumière les plantes alentours. Un instant, rien ne bougea. Seule la brise du soir, plus forte, venait faire onduler les herbes vertes en sifflant une douce mélodie. La paix semblait régner ici, loin des individus violents et sordides dans le manoir.

        Klaus le jardinier dépareillait cependant nettement avec le tableau. L’homme, grand et moustachu, couvert de muscles, de cheveux et de cicatrices, avait plus le profil du meurtrier sanguinaire que quiconque. Mais dans l’instant, il était appliqué à couper délicatement les herbes, une par une, pour leur donner exactement la même taille. Il était si concentré dans son travail qu’il ne remarqua même pas Pharaun et Henri qui s’approchaient.


        « Monsieur Mizzrym, je vous présente Klaus Hänschen, notre jardinier. Klaus, monsieur Mizzrym est l’homme chargé de l’enquête. Je vous demande d’être coopératif et sincère à cent pour cent, quelles que soient les questions qu’il vous posera. »


        Pharaun se serait bien passé des présentations d’Henri. D’une part parce qu’il aurait très bien pu le faire lui-même, et d’autres part car il avait l’impression qu’en faisant ça, il se plaçait dans une situation de médiateur défavorable à la libre expression. Quoi qu’il en soit le chasseur de primes salua poliment le jardinier, tandis que celui-ci se contentait d’un hochement de tête.

        « Très bien, monsieur Hänschen… Commençons par le plus important pour moi. Mademoiselle Cynthia Fëanor dit vous avoir croisé dans le jardin, ce matin, à l’heure supposée du crime. Elle vous aurait fait un signe et vous lui auriez répondu. Pouvez-vous confirmer ces propos ? Soyez sincère je vous pris, c’est très important. »


        Plutôt que de lui répondre directement, Klaus se tourna vers Henri. Il sembla hésiter un instant puis il entama une série de geste rapide avant de hocher à nouveau la tête.

        « Il confirme. Il dit que comme tous les jours, quand Cynthia passe devant elle, il lui dit bonjour de la main. »

        Un muet… D’accord. Ça allait être facile à gérer, ça…

        « Vous voulez dire que Cynthia passe tous les jours dans le jardin ? »

        « Je me permet de répondre. C’est effectivement le cas. C’est un des rituels de Cynthia. »

        « Très bien. »


        Très bien, pas tellement. Avec deux témoins, Cynthia était presque innocentée, et cela ne lui plaisait pas. Tout aurait été tellement simple. Pharaun repensa alors à ce que lui avait dit le cuistot. Vous partez du principe qu’il n’y a qu’une seule victime.

        Un frisson parcouru le chasseur de primes. Si effectivement Cynthia était innocente, il fallait vite changer d’angle de vue.

        Une morte, un collier volé.
        Une jumelle encore en vie, un collier restant.

        Qui profiterait d’une mort éventuelle des deux filles ?

        Pharaun secoua la tête. Pas le temps de penser à ça pour l’instant, il était en plein interrogatoire.


        « Pourriez-vous me donner votre emploi du temps de ce matin. Du moins entre dix heures et midi. Vous avez vu Cynthia, et sinon ? »

        Nouvelles séries de gestes.

        « Il dit qu’il n’a fait que ça. Il est resté dans le jardin toute la journée. Il est très occupé. »

        Mouais… Réponse commode mais néanmoins plausible, vu le travail effectué ici. Il voulait bien croire qu’effectivement un tel entretien requérait tout son temps. Pharaun était prêt à partir, convaincu qu’il n’obtiendrait plus rien. De plus, il n’osait l’avouer, mais cet homme avait dans le physique quelque chose de louche qui lui faisait un peu peur. Les cicatrices y étaient pour quelque chose, bien sûr, mais c’est comme s’il pouvait sentir la violence de l’homme caché sous ses habits terreux.

        Alors qu’il s’apprêtait justement à le remercier, une dernière question lui vint à l’esprit.


        « Dites-moi, monsieur Hänschen… Votre travail de jardinier, il est bien payé ici ? »

        Henri ainsi que Klaus ouvrirent de grands yeux surpris, puis se regardèrent l’un l’autre. Le jardinier se reprit vite pour répondre.

        « Je n’ai pas à me plaindre. C’est ce qu’il a dit. »


        Comme par hasard.

        « Je m’en doutait, fit Pharaun avec un petit rire. Et bien je vais prendre congé. Je vous remercie tous les deux pour ces précisions. »

        Laissant les deux hommes sur place, Pharaun se dirigea vers le manoir. Il avait de quoi réfléchir, et il sentait que cette affaire allait être un peu plus compliquée que ce qu’il avait supposé.

        Une morte.
        Une suspecte principale.
        Un collier.
        Une suspecte innocentée avec un collier.
        Une fille en danger ?
          Spoiler:


            « Excusez-moi, pendant qu’on y est, je voudrais interroger… Hm… Sandra Adams. »

            Toujours en compagnie de la gouvernante, Louise parcourait des yeux sa liste de suspects. Si la belle-mère du propriétaire du manoir était un coupable peu probable, elle avait peut-être tout de même entendu des bruits de couloir ou ce genre de chose. Et puis en la questionnant, ça évincerait une personne de la liste, et ce n’était pas du luxe.

            « Madame Adams ? Je ne sais pas si c’est une bonne idée… »
            « J’insiste. »
            « Bon… Très bien, mais sachez que Madame était très attachée à Emily, tout comme à Cynthia d’ailleurs. Je crains que cette affaire ne l’ait perturbée. Soyez indulgente avec elle, s’il vous plait. »
            « Très bien, très bien. Allons-y, nous n’avons pas de temps à perdre. »

            Le manque de délicatesse de la blonde sembla, une nouvelle fois, offusquer Mary. Cette dernière se garda néanmoins du moindre commentaire, tout comme précédemment. En revanche, elle garda le silence en conduisant Louise au rez-de-chaussée où se trouvait la chambre de la vieille femme. Monter chaque jour les escaliers devait être trop fastidieux pour la grand-mère des jumelles.

            « Attendez-moi un instant, je vous prie. »

            N’attendant pas de réponse, Mary s’approcha de la porte et frappa trois fois fermement avant d’entrer. La lumière qui filtra un instant par la porte empêcha Louise de distinguer la pièce, mais, l’espace d’un instant fugace, elle fut persuadée d’avoir vu une pair d’yeux l’observer. Ce manoir était de plus en plus flippant ! Quelques minutes plus tard, la gouvernante reparut et fit entrer la chasseuse de prime dans la chambre.

            Vaste, sombre et surchauffée, la blonde fit un pas en arrière lorsque la porte se referma derrière elle. C’était quoi cette chambre invivable ? Une odeur d’encens prenait Louise à la gorge, lui donnant l’impression qu’elle allait suffoquer. Contrairement au reste de la maison, Sandra Adams n’avait pas l’air de vouloir mettre ses hôtes à l’aise.

            « Vous vouliez me parler, mademoiselle ? »

            Une voix nasillarde et désagréable retentit dans la chambre et Louise tourna la tête près de la vieille femme qui l’avait interpellée. Celle-ci se trouvait debout, près d’une étagère regorgeant de poupées. Elle caressait la joue de l’une d’elle avec affection et l’image fit froid dans le dos à la chasseuse de prime. Malgré elle, ses yeux ne pouvaient se détacher des poupées de porcelaine. Soigneusement alignées, coiffées, pouponnées, elles observaient en silence les visiteurs de leurs yeux vides et inquiétants. Louise avait l’impression que quoiqu’elle fasse, les regards sans vie ne la quitteraient pas. Comment pouvait-on seulement dormir en présence de ces trucs là ? Avec un effort monumental, la blonde détourna les yeux et se fixa sur Sandra qui était partie se rassoir près de la cheminée où un feu ardent brûlait. Avait-elle si froid ?

            « Oui. Je voulais vous interroger au sujet de ce qui s’est passé ce matin. »
            « M’interroger ? Me jugez-vous donc coupable ? Petite impertinente. Et dire que je vous ai pris pour mon Emily adorée tout à l’heure ! Quelle honte ! »

            Ca commençait bien… La jeune femme se rapprocha toutefois. En s’avançant, dos aux poupées, elle remarqua un petit échiquier posé sur une table, près d’une tasse de thé fumante. Cette présence familière la rasséréna et elle s’accorda même une minute pour observer la partie en cours, momentanément abandonnée, visiblement.

            « Ce jeu est trop raffiné pour vous. Asseyez-vous donc qu’on en finisse. »

            Trop raffiné ? Louise se retint de faire une remarque et s’installa face à Sandra, un sourire aux lèvres.

            « Bien, sachez d’abord que je nous vous pense pas que vous soyez la coupable dans cette affaire. »
            « Enfin des paroles sensées. »
            « Je voudrais par contre savoir ce que vous faisiez ce matin et si vous avez entendu ou vu des choses suspectes. »
            « Je ne fais que cela de voir des choses étranges ici ! Lucas, ce voyou de valet, passe son temps à me persécuter ! Avec ses sourires mielleux et hypocrites, il se moque de moi, il me vole mes affaires, je le sais ! Il croit que je l'ignore, mais je le sais ! Il me vole mes poupées chéries ! »
            « D’accord… Et ce matin ? »
            « Ce matin, j’ai déjeuné comme tous les jours avec mon bon à rien de beau-fils et j’ai passé le reste de la matinée dans ma chambre, jusqu’au repas de midi. Comme toujours. »
            « Qu’avez-vous fait pendant que vous étiez ici ? »
            « J’ai pratiqué un rituel pour chasser le démon de cette maison. »
            « Le démon ? Vous voulez parler de Lucas ? »
            « Mais non, sombre idiote ! Je parle du démon, il est partout ici, je le sens. L’encens le repousse, mais je sais qu’il est dans cette maison ! C’est sans doute lui qui a tué ma pauvre petite Emily ! »
            « Un démon ? »
            « Oui. Prenez-moi pour une folle ou non, mais ce que je dis est vrai. Il prend la forme des habitants de la maison et il terrorise tout le monde ! »

            Elle était cinglée. Louise ne voyait que cette explication aux propos de la vieille femme. Tu m’étonnes que Mary ait tenté de l’empêcher de la voir… Des êtres comme ça, on les planque et on essaye de les faire oublier. Et puis, franchement, qu’est-ce que Louise pouvait bien répondre à de telles allégations ? « Excusez-moi madame, je vais chercher un exorciste de ce pas » ? Ridicule. Si elle avait été plus jeune, elle aurait fait une suspecte parfaite, malgré son attachement aux jumelles.

            « Bien, je vous remercie d’avoir répondu à mes questions. »
            « Vous ne m’avez pas laissé le choix. Vous les enquêteurs, vous n’avez aucune pudeur ! »

            Louise réprima un soupire et se leva.

            « Allez, sortez, vous avez posé assez de questions pour aujourd’hui, je suis fatiguée. Mary, reprenons notre partie. »

            Malgré elle, attirée par le damier, la blonde s’arrêta pour contempler à nouveau le jeu auquel Sandra faisait face.

            « A votre place, je déplacerais mon cavalier ici, sinon son fou prendra votre reine en laissant votre roi démuni. Votre stratégie manque de subtilité. »

            La vieille femme voulut répondre, mais la surprise bloqua les mots dans sa gorge, laissant le temps à Louise de quitter la pièce, un sourire satisfait sur le visage.


          La Reine venait de prendre le Fou.
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          James Feänor, neveu d'Henri Fëanor:


          Tourné vers ses sombres pensées, alors qu’il déambulait dans les couloirs, Pharaun ne remarqua qu’au dernier moment qu’il allait croiser une personne qu’il n’avait pas encore rencontré. Elégamment vêtu, le dandy était plongé dans des bouquins anciens qui l’absorbaient complètement, sans altérer sa marche. Si bien que pour l’arrêter, le chasseur de prime du l’appeler. L’homme leva la tête et lui fit face. Il avait des habits de noble et une vague ressemblance avec Henri, et Pharaun déduisit qu’il s’agissait de James Feänor, le neveu du propriétaire des lieux.

          Celui-ci était en train de l’étudier des pieds à la tête, avec une expression de profond dégoût non dissimulée. Il replongea bien vite dans son livre et se remis à marcher, obligeant Pharaun à lui emboiter le pas alors qu’il n’avait pas même pris la parole.


          « Un roturier… Un de plus dans cette maison trop mal fréquentée. Par tous les diables, comment se fait-il que mon oncle n’ait pas trouvé meilleure solution ? »

          Pharaun voulut répondre, comprenant que la phrase était clairement insultante, mais se rendit compte qu’il n’en avait pas saisi la totalité. Cherchant ses mots, il se contenta de suivre l’homme lorsqu’il rentra dans une grande bibliothèque. Celui-ci ferma son livre dans un claquement sonore et entreprit de grimper sur un escabeau pour le ranger à sa place.

          « Je vais finir par croire que mon oncle se plait en la compagnie de voleurs, de malandrins et de… Saltimbanques. Comme s’il avait le goût de la décadence qu’il ne connait pas. Enfin… Il faut que je m’y fasse, ce n’est pas aujourd’hui que cela va changer. Tenez-moi ça. »

          Toujours sans le regarder, James lui tendait un gros livre gris qu’il venait d’extraire de l’étagère. Pharaun le prit sans vraiment réfléchir, obéissant sans mot dire aux ordres du désagréable noble. Mais qu’importe ce qu’il pensait à ce moment de son interlocuteur, il avait dans la voix quelque chose d’impérial qui ne pouvait laisser personne indifférent. Il continua donc de se taire, pour le moment du moins.

          James attrapa un autre livre plus petit, à la reliure rouge, et redescendit de son perchoir. Il saisit le bouquin que Pharaun tenait dans les mains et l’essuya avec son gant, comme si le simple contact du chasseur de primes l’avait couvert de poussière. Il ne l’avait toujours pas regardé dans les yeux. Sans plus de cérémonie, il repartit dans l’autre sens comme il était venu, c’est-à-dire sans accorder un instant à Pharaun.


          « Je sais qui vous êtes. Vous avez été engagé par mon oncle pour trouver le meurtrier de ma pauvre cousine. » Pharaun nota qu’il avait trop appuyé sur le ’’pauvre’’ pour être réellement sincère. « Et bien je n’aime pas ça. Nous sommes assez grands et intelligents pour tirer cette histoire au clair nous-même. Pour moi vous êtes autre chose. »

          Réussissant enfin à sortir de sa transe dans laquelle il était plongé depuis plusieurs minutes, Pharaun réussit à briser son mutisme pour faire poursuivre l’idée de James.

          « Que suis-je alors ? »

          « Une mouche. Une vulgaire mouche qui vient tourner autour de nos têtes et qui nous agace. Un détail mineur mais sur lequel on est obligé de porter notre attention pour l’aplatir. Pour autant, on l’oublie la seconde d’après. Alors, monsieur mouche… Combien de temps survivrez-vous ici avant de vous faire écraser, selon vous ? »

          Pharaun cligna un instant des yeux sous l’insulte. Il s’arrêta de marcher pour encaisser les dommages verbaux sans exploser pour autant. Se faisant, James stoppa sa marche lui aussi, ce qui démontra qu’il ne négligeait pas totalement le chasseur de prime. Ce dernier se ressaisit au bout de quelques secondes mais surmonta sa fureur grimpante pour se concentrer sur l’essentiel.

          « Monsieur James Fëanor. J’aurais quelques questions à vous poser. Et je vous prie de me répondre comme si j’étais un véritable être humain. »

          « C’est embêtant… Si je vous réponds vous allez avoir l’impression que je m’intéresse à vous, alors que je vais le faire uniquement pour rester en bons termes avec mon oncle… Bref, que voulez-vous, et faites vite. »

          « Tiens, vous vous intéressez à ce que pense la mouche de vous, maintenant ? »


          Claquement de langue vexé. Le noble compris la petite faute qu’il avait fait dans son langage volontairement méprisant. Puis il se força à sourire, un sourire mauvais, et fit un signe de la main signifiant à Pharaun de continuer sans s’attarder sur ce détail.

          « On va faire simple et bref, ça nous arrangera tous les deux. Que faisiez-vous entre dix heures et midi ce matin. »

          « Dix heures : réveil. Jusqu’à dix heures et quart, je m’occupe de mes affaires dans mes appartements. A cette heure, cette chère Mary Guilt, la seule personne respectable dans le personnel, vient s’occuper de ma chambre et coule mon bain, dans lequel je plonge à onze heures moins le quart et dans lequel je reste jusqu’à onze heures et demi. A midi moins le quart je vais déjeuner en compagnie du reste de ma famille, à l’exception d’Emily, bien entendu. C’est assez simple et bref pour vous, ou faut-il que je clarifie encore les choses ? »

          « Vous voulez dire qu’à partir de dix heures quarante-cinq, personne ne vous a vu jusqu’au repas ? En gros, vous n’avez qu’un très faible alibi. »

          « Effectivement, mais je me fiche de votre enquête. Vous pouvez bien croire tout ce qu’il vous plaira, vous n’arriverez à rien ici. Je n’ai donc aucune raison de m’inquiéter. »

          « Faites attention tout de même. Il arrive parfois que l’on ignore tellement la mouche qu’on ne la voit pas déféquer dans notre confiture, nous en privant et chamboulant ainsi notre quotidien. »


          James plissa des yeux.

          « Vous insinuez que vous comptez me pourrir la vie, et donc que vous commencez à me croire coupable. Rien que cela est risible. Vous ne vous rendez pas compte que des vermines ici sont bien plus suspects que moi ? »

          « Qui donc en particulier ? »


          « On ne peut pas les rater, vu leur taille… Ce cuisinier antipathique et ce jardinier apathique. De vraies brutes, certainement sans une once d’honneur. Et ce valet, qui fouine partout et qui semble tout connaitre de tout le monde. Un véritable sadique, de surcroît. Ça ne m’étonnerait même pas qu’il ait tué Emily comme ça, pour le plaisir. »

          « Et vous vous avez ce côté sûr de vous et méprisant qui pousse à la méfiance. Comment était Emily ? Etait-elle appréciée ? »

          « C’était une garce finie qui n’hésitait pas à se vautrer dans la boue avec le premier venu. Pas digne de son rang social, évidemment. Il en est de même pour sa sœur Cynthia qui, sur ce point, ne vaut pas mieux. Elles sont bien différentes de leur père qui les adore, mais elles rendraient leur mère rouge de honte. La pauvre femme. »

          « Vous pensez valoir mieux qu’elles ? »

          « Oui »
          , répondit-il simplement, comme s’il s’agissait de la plus logique des choses. « Mais c’est ainsi, mon défunt père est né après Henri Fëanor, ce n’est donc pas lui qui a hérité du manoir. Je peux m’estimer heureux de vivre en son sein, c’est déjà ça. »

          James semblait regrettait les choses, son regard était devenu vide un instant. Ce que Pharaun nota immédiatement et cela le fit sourire méchamment.

          « J’en conclut que vous n’êtes pas aussi aisé que ce que vous voulez laisser croire. Des problèmes d’argent ? »

          Le noble le fixa et sourit à son tour.


          « Mon pauvre ami. Pour qu’il y ait une histoire d’argent dans l’air, il faut au moins qu’il y ait eu vol. Si je ne me trompe pas il ne s’agissait pas d’un cambriolage. »

          « L’information ne m’est parvenu que très récemment, mais il semblerait que le collier que portait sans cesse Emily, celui de sa mère, a été dérobé ce matin. »

          « Vous êtes sérieux ? »


          James sembla tout d’un coup avoir perdu tout intérêt pour le rabaissement du chasseur de primes et semblait retourné par l’information. Pharaun acquiesça de la tête.

          « Je l’ignorais, cela change beaucoup de choses. Pour répondre à votre question, non, je n’ai pas de problèmes d’argent, mais il est vrai que je ne suis pas le plus riche de cette maison. Mais vous pouvez fouiller mes appartements si cela vous chante. A condition que vous ne salissiez rien. »

          « Je comptais de toute façon retourner le manoir, vu que personne n’est sorti depuis ce matin. J’en ai fini avec mes questions, je vais donc aller voler vers une autre lumière. N’ayez crainte cependant. Même si j’adorerai vous emmerder un peu plus, je ne vous crois pas idiot au point de risquer de tuer votre cousine pour un simple collier. »


          Le chasseur de prime repartit à contre-sens dans le couloir où ils s’étaient arrêtés pour discuter. Alors qu’il allait sortir de son champ de vision, James lui accorda une dernière remarque.

          « Vous avez tort sur ce point. Vous ne connaissez pas la valeur de ces perles. N’importe qui dans cette maison aurait pu tuer pour s’en emparer. »






          Il croisa Louise quelques minutes plus tard. Elle aussi déambulait dans les couloirs. Lorsqu’il la vit, il fut à nouveau choqué devant sa beauté. Pendant un instant, il se demanda s’il devait l’embrasser où peindre son portrait sur une toile pour figer l’instant pour l’éternité. Puis il reprit ses esprits et s’approcha d’elle. Cela faisait une bonne heure et demi qu’ils s’étaient séparés et elle devait certainement détenir des informations qu’il ignorait. Il était certainement temps de faire le point et de s’échanger leurs raisonnements. Cela ne le gênait d’ailleurs pas de tout lui dire, car l’affaire semblait s’être compliqué au fur et à mesure qu’avançait l’après-midi.

          Il lui expliqua donc tout ce qu’il savait.

            Tricher n'est pas jouer.

              L’enquête s’avérait plus complexe que ce que la blonde avait escompté. Personne ne semblait sain dans cette famille. Entre le valet sournois et la folle furieuse aux poupées, il y avait de quoi avoir quelques sueurs froides ! Louise ne put d’ailleurs réprimer un frisson en songeant aux figures de cire. Si on lui annonçait que la coupable était l’une de ces poupées, elle n’en serait qu’à moitié surprise.

              « Bon, les vieilles, c’est fait. Le vieux aussi. La sœur, pareil… Hm… L’autre crétin c’est bon. Reste… »

              Marmonnant seule, assise sur les marches de l’escalier principal, Louise classait ses suspects lorsque des bruits de pas l’interrompirent brusquement. Elle rangea prestement sa liste et tomba sur l’autre chasseur de prime engagé. Elle l’avait complètement oublié celui-là ! Comment s’appelait-il déjà ? Bah, quelle importance ! Louise et le travail d’équipe faisaient rarement bon ménage de toute façon. Elle n’avait pas l’intention de collaborer avec cet imbécile. Elle s’apprêtait d’ailleurs à quitter le couloir pour aller trouver le cuisinier lorsque son ‘collègue’ se posa devant elle, visiblement désireux de l’entretenir. Avec un soupir et un regard vers le ciel, la blonde se résolut à rester là.

              « Qu’est-ce que tu veux ? »

              ***

              « Donc on a un collier volé, une morte et une tapée de suspects. »

              Dans le genre concis, Louise se posait là. Pharaun Myzzrim.6,5 bis venait de gentiment lui offrir les renseignements qu’il avait collecté jusque là, épargnant un travail fastidieux à la blonde.

              « Pour moi, c’est sûrement un domestique qui voulait se faire du fric avec les perles. Ou alors le neveu qui pouvait pas voir sa cousine. »

              Une moue réflexive déforma un instant son visage alors qu’elle essayait de mettre les pièces du puzzle en place. Elle n’aimait pas devoir réfléchir avec l’autre type, mais pour le coup, elle devait admettre que son aide pouvait lui être utile. Oh, elle ne comptait pas lui accorder la moindre confiance ou estime, mais dans le genre larbin à envoyer courir dans toute la baraque pour obtenir des informations, il pourrait le faire. Vous demandez une garce manipulatrice ? Appelez donc Louise Mizuno.

              Louise résuma donc à son tour ce qu’elle avait obtenu de chacun des protagonistes. Elle s’épancha moins sur les détails que son partenaire et s’en tint aux faits. Elle en était à lui exposer les problèmes de poupée de Sandra Adams lorsqu’Henri Fëanor sortit d’un bureau situé non loin de l’escalier. Il marqua un temps d’arrêt en les voyant installés ainsi au milieu de l’escalier, mais il se reprit vite et se dirigea vers eux, un petit sac à la main.

              « Je comptais partir à votre recherche. »
              « Vraiment ? »
              « Oui. Tout le monde est inquiet ici et plutôt stressé, je souhaitais m’assurer que l’enquête avançait pour le mieux. »
              « Ca avance. »

              Non, elle ne laissait pas à l’autre chasseur le temps de répondre. Elle n’avait pas envie qu’il fasse une bourde en lâchant une info ou un indice. Oh, il était peut-être plus fin que ça, mais la jeune femme ne tenait pas spécialement à prendre le risque.

              « Je vois… Tenez, prenez ces deux den-den mushi avec vous. Ils vous permettront de communiquer à distance et vous faciliteront la tâche. Je voudrais vraiment que ce crime soit résolu au plus vite. Il y a un meurtrier sous mon toit et je ne peux plus accorder ma confiance à quiconque tant que je ne saurai pas de qui il s’agit. »

              Confiance, hein ? Un mépris fugace teinta les traits de la blonde. La confiance n’amenait à rien sinon à la déception ou au malheur, Henri en faisait aujourd’hui les frais. Préférant ne rien répondre, la chasseuse de prime se tourna vers son collègue. Peut-être avait-il aussi une remarque pertinente à faire ?
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            Après avoir reçu le den den mushi confié par Henri Fëanor, celui-ci ainsi que Louise se tournèrent vers lui pour savoir s'il avait quelque chose à apporter à la conversation. Ce n'était pas le cas. Pour tout dire, il avait la sensation de perdre de plus en plus pied au fur et à mesure qu'il rencontrait les différents protagonistes de la maison. Il avait cette sensation de se trouver dans un labyrinthe depuis le début, qu'il pourrait terminer en un rien de temps. Mais plus il avançait, plus il se rendait compte de son immensité. Et depuis que Louise lui avait communiqué ses propres informations, il avait l'impression qu'en plus, les murs se déplaçaient pour rendre sa tâche encore plus compliquée.

            Quoi qu'il en soit, la gène que portait son silence ne dura que très peu de temps, car avant qu'elle ne s'ancre dans l'ambiance Mary arriva par l'intermédiaire d'un couloir. Elle ne s'attendait probablement pas à trouver là les deux chasseurs de prime, en compagnie de son maître. Pharaun crut voir une fugace expression de mécontentement sur son visage avant qu'elle ne se ressaisisse et annonce le but de sa venue.


            « Je vous prie de m'excuser, mais le repas va être servi dans un instant. »

            A l'évocation du mot "repas", Pharaun se rappela qu'il était affamé depuis de nombreuses heures. Son estomac aussi s'en souvint, et ce fut ce moment qu'il choisi pour se manifester bruyamment. Mary ouvrit de gros yeux coléreux et le dévisagea d'un air accusateur. On ne gargouillait pas en présence de maître Fëanor. Mais actuellement, cela semblait être le cadet des soucis de Henri, qui semblait à nouveau perdu dans ses propres pensées. Mais il parvint tout de même à relever une dernière fois la tête pour les saluer.

            « Nous nous reverrons plus tard dans la soirée. »

            Pharaun voulu lui emboîter le pas, comprenant intuitivement que la nourriture se trouvait dans la direction qu'il prenait, mais il fut intercepté par la gouvernante qui se plaça entre lui et le chemin de la salle à manger.

            « Pas ici. Il est certaines habitudes qui doivent être respectées en toutes occasions. La noblesse ne mange qu'avec des gens de son espèce, c'est ainsi. Suivez moi, vous mangerez avec le personnel. »

            Le chasseur de prime ne pensa même pas à s'offusquer. En effet, on lui proposait de manger, alors que ça soit avec le personnel, avec les propriétaires ou avec les animaux, cela ne le dérangeait guère. Il suivit donc docilement Mary, Louise emboîtant le pas elle aussi, et se laissa guider à travers les couloirs qu'il commençait un peu à connaître après plusieurs allez-retours dans la maison. Au travers des carreaux éclairant très largement les couloirs, le soleil commençait à décroître et le ciel se teintait de rouge. Des traînées de nuage effilés, portées par la brise marine, commençaient à s'accumuler au dessus de l'île. Pharaun eut la sensation de voir des poignards blancs se plantant dans une robe bleue, provoquant l'écoulement de sang et faisant disparaître la belle couleur de l'habit.

            Il tenta de penser à des choses moins sombres, comme la nourriture qu'il allait bientôt engloutir. Il y parvint pendant quelques instant, avant qu'ils sentent se hérisser tous les poils de son corps.

            Un cri horrible, inhumain, se mit à retentir comme une alarme aux alentours.

            Le duo de chasseur de primes eut à peine le temps de se dévisager que Mary avait bondit en avant, commençant à trottiner en direction du hurlement qui ne discontinuait pas. Pharaun et Louise se lancèrent à sa suite, prêt à intervenir. Ils maudirent très vite la lenteur de la gouvernante qui, du fait de son grand âge, n'avançait pas assez vite à leur goût. Ils ne pouvaient cependant pas la dépasser car elle semblait parfaitement savoir d'où venaient les cris, ce qui n'était pas le cas des deux enquêteurs. A plusieurs moments Pharaun aurait juré que les cris venaient d'un couloir à droite alors que Mary bifurquait à gauche. Étrangement, le visage de cette dernière ne sembla à aucun moment éprouver de l'inquiétude.

            Après deux minutes de course laissant cent fois le temps à la nouvelle victime d'être assassinée, le trio arriva sur le lieu du crime. Les deux chasseurs de prime furent alors tout à fait décontenancés par la scène qui se tenait devant eux, alors que la source des hurlements se révélait.

            Une Sandra Adams déchaînée s'écorchait la voix en tentant d’attraper un objet qu'un Lucas Miura souriant tenait dans les airs à bout de bras. Pharaun les identifia aisément car il s'agissait des deux seules personnes qu'il n'avait pas encore rencontré. La vieille semblait sur le point d'imploser. La couleur de sa peau était presque écarlate, et ses cris passaient de l'aigu strident à un semblant de pleur horrifiant.


            « Lucaaaaaas ! Rend-la moiiiiii ! »

            Mais le valet semblait prendre le plus grand plaisir à faire gémir Sandra, poussant même des petits ricanements courts. Il baissait le bras, attendait que la vieille sautille pour essayer d'attraper ce qui semblait être une poupée de son, mais relevait immédiatement le bras pour la mettre à nouveau hors de portée. Des instants qui parurent durer une éternité à Pharaun s'écoulèrent, tant la scène semblait cruelle, sans qu'il ne sache comment réagir. Il n'eut finalement pas à se décider car Mary s'avança en direction du domestique et tendit la main.

            « Lucas. Donne. »

            Dans un ultime rictus sadique, le valet tendit la poupée à la gouvernante qui la donna immédiatement à Sandra. Cette dernière la serra contre son corps avec force, gémissant des bribes de mots incompréhensibles, semblant perdre conscience de l'endroit où elle se trouvait. Lucas, lui, fila en trottinant dans un couloir, comme si rien d'important ne s'était passé et qu'il était temps de passer à un autre jeu.

            Tenant sa maîtresse par l'épaule, Mary se tourna vers les deux chasseurs de prime.


            « Veuillez excuser cette scène pour le moins honteuse. Comme vous le voyez, il existe certaines personnes ne jugeant pas utile de montrer un élémentaire respect à l'égard de nobles personnes. Lucas ne doit sa place ici qu'à son travail impeccable. Il est malheureusement difficilement remplaçable. Tout de même, je pensais que le deuil calmerait ses jeux tordus... »

            La gouvernante semblait calme, mais Pharaun pouvait voir dans ses yeux une colère sourde. Puis elle se ressaisit et indiqua aux deux chasseurs de primes la direction que Lucas venait de prendre.

            « La salle à manger du personnel se trouve juste au bout de ce couloir. Je vais raccompagner Madame Adams auprès de sa famille. »

            Soutenant Sandra qui claudiquait difficilement, les deux vieilles dames disparurent en empruntant la direction qui les avait fait parvenir jusqu'ici. Avant d'aller s'installer, Pharaun jeta un regard à Louise qui semblait impassible.

            « Tous fous, tous... Il n'y a pas une seule personne normale dans cette maison... »

            Il attendit un instant une réponse de la blonde, mais celle-ci ne vint pas, certainement parce qu'elle était finalement autant sous le choc que lui. A la place, il n'eut qu'un vague haussement d'épaule. En silence, ils rejoignirent donc le réfectoire.

            En poussant la porte, Pharaun tomba nez à nez avec le cuisinier qui lui adressa un regard hargneux en grommelant. Visiblement il avait reçu pour consigne de nourrir les deux enquêteurs, ce qui ne semblait pas l'enchanter particulièrement. Au centre de la pièce se tenait une table déjà prête à accueillir les quatre domestiques plus les deux chasseurs de primes. Mis à part elle et les chaises en bois, il n'y avait aucun meuble dans la pièce. Seulement une autre porte donnant directement sur les cuisines dans lesquels il s'était trouvé quelques heures auparavant. Excepté Mary, tout le monde était présent. Klaus et Lucas étaient déjà installés, ce dernier toujours un sourire au lèvres.

            D'un signe de tête, Ken les invita à s'asseoir alors qu'il allait chercher le plat principal. La marmite bouillante posée sur la table, pas question de se faire servir. Le cuisinier fut d'ailleurs le premier à remplir son assiette, puis il abandonna la louche à qui serait le plus rapide. Pharaun céda la priorité au jardinier et au valet, avant de s'emparer du couvert pour servir d'abord Louise, puis lui. Il attaqua ensuite à manger en silence. Excellent. Un ragoût de mouton aux haricot blanc, un plaisir pour son estomac vide. Il était tellement absorbé par son assiette qu'il ne se rendait pas compte de l'ambiance pesante dans l'air. Personne ne se parlait. Même l'arrivée de Mary se fit dans une discrétion totale. On avait l'impression que chacun cherchait à éviter l'autre, comme si la moindre discussion allait faire exploser les conflits qui semblaient opposer certaines personnalités de la maison. De plus, il s'agissait du premier repas depuis la découverte du corps d'Emily, et assurément des théories diverses et variées devaient se former dans l'esprit des habitants. Théories certainement très influencées par les relations qu'ils entretenaient entre eux.

            Au bout de quelques minutes tout de même, le manque de discussion sembla commencer à perturber Pharaun qui leva le nez de son assiette presque terminée. Tout le monde avait le nez dans sa nourriture, sauf Lucas qui jetait des regards à tout le monde, notamment à lui, avant de rire discrètement. Cette attitude mis mal à l'aise le chasseur de prime qui décida, dans une attitude futile, de refuser de le regarder. Son attention se porta sur Ken qui finissait son repas. Mauvaise idée. Sitôt terminé, le cuisinier posa son couvert, leva la tête, capta son regard et le dévisagea avec un sourire narquois. Il fut le premier à briser le silence depuis de nombreuses minutes.


            « Alors, monsieur le détective, votre enquête est terminée ? Cynthia est sous bonne garde dans une geôle humide ? »

            Le début d'altercation fit lever la tête de Klaus et de Mary qui les dévisagèrent, surpris. Louise ne sembla pas réagir, sentant probablement que le duel qui se préparait ne la concernait pas. Mais elle écoutait très probablement d'une oreille attentive. Lucas, lui, éclata de rire et murmura.

            « C'est très bien. Tout le monde sait que c'est mal de tuer sa propre sœur... Pauvre, pauvre fille... »

            Le chasseur de primes choisit de l'ignorer, de prendre son courage à deux mains et d'affronter le regard du cuisinier. Après tout, il serait obligé un moment ou un autre d'avouer qu'il était aller un peu vite en besogne.

            « Plusieurs éléments se sont rajoutés à l'enquête... » Pharaun essaya de ne pas perdre totalement la face en ajoutant : « Ça ne veut pas dire que je ne la soupçonne pas ! »

            Il aurait mieux fait de tourner sept fois sa langue dans sa bouche car le regard meurtrier que lui lança Mary aurait fait miauler le roi des animaux. Lucas sourit un peu plus et Ken perdit son sourire narquois.

            « Vous êtes vraiment borné. Bon, peut-on savoir quelles sont ces nouveaux éléments ? »

            Pour échapper à la position bancale dans laquelle il s'était mit, Pharaun décida que changer de sujet était peut-être le meilleur moyen de s'en sortir. Il leur fit donc part de ce qu'il savait, sachant qu'ils l'apprendraient tous très vite de toute façon.

            « Très bien. Vous devez savoir qu'Emily avait hérité d'un collier de sa défunte mère, tout comme sa sœur d'ailleurs. Et bien ce collier, qui vaut apparemment une fortune, est introuvable depuis ce matin. »

            Pas de réaction de la part de Louise et Klaus qui étaient déjà au courant. Stupeur et perte de voix pour Mary et Ken qui essayaient de comprendre ce que cela laissait supposer.

            Éclat de rire de Lucas qui ne put s'empêcher de s'amuser de la situation.


            « Palpitant, c'est tout simplement palpitant ! La direction que prend cette histoire est passionannte, ce collier vaut une fortune ! Cela fait des années que je suis ici, et je ne me suis jamais autant amusé. »

            Cela lui valut les regard irrités des trois autres domestiques. Lucas grogna avant d'ajouter :

            « Arrêtez de faire les hypocrites. Emilie était suffisante et insupportable, ne me faites pas croire que vous regrettez sincèrement sa mort. »

            « Nous ne sommes pas tous des créatures dénuées de sentiments comme toi. On devrait toujours pleurer le départ de quelqu'un. »


            La voix de Mary était glaciale. La même qu'elle avait utilisé pour le forcer à lui rendre la poupée de Sandra. Mais cette fois-ci, Lucas ne se laissa pas faire et la regarda dans les yeux.

            « Oh, pitié... Ne me fais pas croire ça. Je suis sûr qu'à chaque fois que tu vois les jumelles, cela te fait penser à la défunte femme du vieux Henri, pas sûr que ça te mette en joie. Comment se passe ton flirt avec lui, à ce propos ? Ça se met en place ? »

            La gifle partit d'un seul coup, sans même attendre la fin de la phrase. Le monde sembla se figer un instant, tant cela semblait irréel.

            « Tu ne crois pas qu'un autre moment que celui-là serait plus propice pour proférer tes bouffonneries mensongères ?

            Tous les autres participants étaient décontenancés. Pharaun ne savait plus vraiment dans quel coin se mettre. Klaus et Ken dévisageaient gravement le valet, comprenant qu'il avait dépassé la limite cette fois-ci. Du côté de Louise, un petit sourire en coin s'était peint sur son visage. Elle restait silencieuse, comme tout le monde, mais semblait s'amuser de la direction que prenaient les événements. Lucas resta quelques secondes muet, le visage de profil après la claque. Toute trace de sourire avait disparu. Il revint cependant très vite, encore plus marqué que précédemment, alors qu'il se tournait vers le duo de chasseurs de primes.

            « Vous voyez, dans cette maison, on n'aime pas trop dire des vérités. Je suis sans doute le seul qui n'en ai pas peur. Et c'est pour ça que je suis si mal aimé, notamment par cette pauvre Mary. Je connais leurs secrets à tous, et ils ont peur que je ne les révèle au grand jour. Ils ont raison d'ailleurs. Quand on sait ce que cachent certains, il vaudrait mieux que les murs restent muets. »

            Pharaun ne put s'empêcher de constater qu'il prononçait ses mots en appuyant ostensiblement son regard sur Klaus. Le jardinier ne pouvait évidemment rien répondre, mais ses yeux parlaient à sa place, ne cédant surtout pas une miette de terrain après l'attaque affichée du valet. Lucas ne recula pas non plus et la confrontation visuelle dura plusieurs secondes avant que Pharaun n'intervienne. Le valet semblait prêt à faire des révélations, et qu'elles soient vraies ou fausses elles étaient toujours bonnes à entendre.

            « Tu penses connaître l'identité du meurtrier ? »

            La question était grotesque et les formes n'y étaient pas, mais Pharaun n'avait pas le temps d'enrober sa phrase. Il sentait que l'ambiance était sur un fil prêt à céder, et que si vérités il devait y avoir, c'était maintenant ou pas du tout. Avec appréhension, il attendit une réponse du valet qui ne voulait pas venir. Finalement il fut déçu quand Lucas parla enfin, toujours en fixant le jardinier.

            « Je le pense, en effet. »

            Puis il détourna le regard et se rendit compte qu'il n'avait pas parfaitement fini son assiette. Pharaun soupira. Le moment était passé et il n'avait pas vraiment ce qu'il voulait, mais ce n'était qu'une question de temps. L'ambiance redevint tout d'un coup plus respirable, même si elle était toujours un peu électrique. Sentant qu'il serait difficile d'obtenir plus d'information à propos de Lucas, et voulant profiter du fait que tout le monde était réuni autour d'une table, il se pencha vers Louise et lui chuchota.

            « Je vais jeter un œil aux chambres. Je ne pense pas trouver le collier en évidence sur un lit, mais sait-on jamais... »

            Il s’éclipsa donc le plus discrètement possible. Discrétion toute relative car Lucas frappa la table d'un petit coup à chacun de ses pas pour accompagner sa sortie.
              Faites vos jeux, rien ne va plus.

                Parfaitement silencieuse, Louise avait assisté à la soirée en spectatrice. A quoi bon jouer les actrices quand tous les autres comédiens se donnaient tant de mal pour présenter leur scène ? Si Lucas le fauteur de troubles aimait à monter sur les planches et s’exhiber, d’autres restaient plus en retrait, sans se faire pourtant oublier. Quelle réaction violente de la part de Mary sur ses prétendus sentiments ! Et ce silencieux jardinier parlait tellement avec ses yeux, qu’avait-il à cacher ? Mais voilà que le cuisinier s’emporte aussi alors que l’enquêteur cherche à démêler les nœuds de l’intrigue. Allons, allons Pharaun, pas avant l’acte V les révélations !

                Les yeux vairons de Louise s’étaient posés tour à tour sur chacun des protagonistes, cherchant à percer les mystères qui les entouraient, à savoir quelle pièce elle devrait avancer pour faire tomber les pions et atteindre le roi sanguinaire. A moins qu’il ne s’agisse d’une reine meurtrière ? Les femmes de cette maison ne semblaient pas aussi inoffensives qu’elles en avaient l’air. Mary aurait parfaitement pu empoisonner Cyn… Non, Emily… dans son sommeil et la poignarder ensuite sans qu’aucune résistance ne lui soit opposée. Dans cette sombre demeure, tout était possible. Cependant, la blonde tenait à garder pour elles toute information ou début de soupçon, se contentant d’observer en silence et d’instiller doute et pression chez chacune des personnes présentes. Ce n’était pas parce que Pharaun posait les questions qu’il menait l’enquête.

                Finalement, dans une ambiance électrique, le dîner se termina. Louise repoussa calmement l’assiette à dessert qu’elle n’avait pas touché, s’attirant ainsi un regard noir de Ken. En refusant de terminer son repas, elle ne marquait visiblement pas de points avec le cuisinier. Qu’importe ! Elle lui adressa un sourire goguenard et sortit à la suite des autres, Pharaun s’étant éclipsé plus tôt pour partir à la recherche du collier. Louise eut un rictus en songeant à la vanité de sa recherche.

                « Plutôt mouvementé comme dîner, non ? »

                Appuyé contre un mur, Lucas semblait avoir attendu que Louise sorte. Il arborait son habituel sourire narquois, comme s’il en savait plus que quiconque au manoir. Peut-être était-ce le cas ?

                « J’ai connu pire. »

                D’une certaine manière, la blonde appréciait Lucas. Aussi sournois que manipulateur, il ressemblait à la chasseuse de prime à bien des égards. Cependant, contrairement à lui, Louise ne se serait jamais abaissée à servir une famille de nobliaux arrogants. En cela, elle se sentait clairement supérieur au jeune homme.

                « Oh vraiment ? Je vous en prie, dites m’en plus, mademoiselle. »

                La politesse ironique tira un sourire amusé à Louise et elle répondit sur le même ton.

                « Ce serait avec plaisir, mais je crois que vous avez des choses plus intéressantes à m’apprendre pour l’heure. N’est-ce pas, monsieur Miura ? »

                Un léger rire franchit les lèvres du valet alors qu’il se redressait. Il adressa un signe à Louise, l’enjoignant à le suivre dans une pièce adjacente à la cuisine. Combien y avait-il de pièces dans ce manoir ?

                Etait-ce bien prudent de suivre un homme qui avait tout le profil d’un meurtrier ? Louise s’en moquait bien et lui emboita le pas. S’il était dangereux, elle l’était bien plus que lui. Personne ne la connaissait ici, et le jeune homme était bien loin de se douter des pouvoirs de la chasseuse de prime. Les fruits du démon étaient peut-être difficile à manier et sujets à quelques faiblesses, ils avaient tout de même le mérite d’être discrets et efficaces, même lorsque leurs pouvoirs étaient passifs. Quel effet cela ferait-il à Lucas de devenir un pion ? Espérons qu’il n’ait pas à le deviner…

                Louise entra dans la pièce sombre, éclairée seulement par le soleil couchant d’une fenêtre poussiéreuse. Visiblement, la pièce était un débarras. Derrière la blonde, la porte se ferma et Lucas réapparut, de nouveau adossé au mur et souriant. Vraiment, il n’avait rien d’engageant.

                « Quelle mise en scène. C’est pour me poignarder ou me faire des aveux ? »
                « Peut-être les deux. »

                La mine soudainement devenue sérieuse de Lucas n’impressionna nullement Louise.

                « Tu penses être capable de me maîtriser ? »
                « Sans aucun doute. »

                Il le pensait sérieusement. Louise ne put s’empêcher d’afficher une mine amusée. Le jeune homme cachait peut-être bien son jeu, mais il était trop confiant pour son propre bien.

                « Tu me trouves si peu crédible ? »
                « Non. Trop optimiste. Alors, ces aveux ? »
                « Je n’ai tué personne pour le moment. L’idée m’a certes effleuré l’esprit, mais je me suis toujours contenté de faire tourner en bourrique cette vieille folle de Sandra. En revanche, concernant Klaus, je ne serais pas aussi catégorique sur son innocence. »

                Le jardinier ? Vraiment ? La chasseuse de prime ne s’était pas attendue à recevoir de révélations à son sujet. Ceci dit, il était vrai que durant le repas, Lucas lui avait lancé des regards plutôt appuyés. Qu’est-ce que cet homme pouvait bien avoir à cacher ? Impassible, Louise attendit la suite.

                « Je suppose que Monsieur Fëanor a omis de vous préciser que Klaus était un criminel il y a une vingtaine d’année. Braqueur de banque, voleur, sans doute pirate à ses heures, pas le genre d’homme fréquentable. Il a passé quinze ans en prison avant de se faire engager ici. »

                Effectivement, vu sous cet angle, Klaus prenait des allures de suspect numéro un. Lucas avait-il dévoilé tout cela pour évincer tous les soupçons de sa propre personne ? Ou considérait-il cela comme un jeu ? Louise penchait pour la seconde solution. Ce type était aussi malsain qu’elle, peut-être même plus. Si Klaus était vraiment le responsable de toute cette histoire, Pharaun avait plutôt intérêt à se munir d’une pelle pour retrouver le collier.

                « Je vois, merci pour les informations. Etant donné que tu n’as aucun poignard sur toi, je suppose que nous en avons terminé ? »
                « Je n’ai même pas le droit à une récompense pour ma coopération ? »
                « Il me semblait déjà t’avoir dit que nous verrions ça à la fin de cette enquête. »

                Sans attendre de réponse, Louise quitta la pièce. Ces nouvelles informations éclairaient sous un jour nouveau l’enquête. D’après ce que Pharaun lui avait dit plus tôt, c’est lui qui avait interrogé Klaus en compagnie d’Henri qui avait soigneusement évité de parler du passé douteux de son jardinier. Qui sait ce que le maître des lieux pouvait encore cacher ! Légèrement agacée par les secrets qui s’accumulaient les uns après les autres, Louise se mit à la recherche de Pharaun pour lui expliquer comment interroger efficacement un suspect. Après cela, Henri Fëanor et eux auraient deux mots à se dire en privé.
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              Pas de collier en vu dans les tiroirs des chambres de Cynthia ni de son père. Celles des quatre domestiques, bien plus modestes, furent également inspectées. Aucune trace de bijoux nul part. La mine un peu déconfite face à ces déconvenues, bien qu'un succès l'aurait étonné, il se dirigea à pas lents vers les prochains appartements, ceux de la doyenne Sandra.

              Redoutant de faire face à nouveaux à la vieille femme et à sa folie, Pharaun frappa timidement à la porte, espérant ne pas entendre de réponse pour pouvoir fouiner sans être dérangé. Rien ne fit écho à son appel et il se lança. Il plongea dans une chambre sombre, difficilement éclairée par les flammes des chandeliers qui faisaient danser les ombres des meubles contre les murs. Cela attisait les peurs irrationnelles de Pharaun qui croyait voir des démons dans chaque coin de pièce.

              Après quelques instants paralysé par un sentiment d'angoisse, très largement amplifié par l'armée de poupée située sur l'étagère face à la porte, le chasseur de primes se réprimanda silencieusement et commença ses recherches. Un rapide tour du propriétaire ne lui fit découvrir aucun collier de perle, il décida donc de s'attaquer aux tiroirs des meubles ; il pris cependant la décision de garder l'armoire effrayante pour la fin.

              « Le collier n'est pas ici, jeune homme ? »

              Dans un volte-face rapide, Pharaun se retourna pour faire face à la voix, après que tous ses poils se soient hérissés. Sandra lui faisait face, appuyée sur la porte qu'elle avait refermé sans un bruit. Il ne l'avait pas entendu entrer. Les yeux de la vieille le fixait intensément, mais dans ceux-ci il ne vit aucune folie, contrairement à deux heures auparavant.

              « Je vous pris de m'excuser. Je me dois de ne faire aucune exception. »

              « Vous avez raison. Mais vous comprendrez que je n'ai aucun intérêt de le voler. Après tout, il m'a appartenu, à une époque lointaine, avant que je ne le cède à ma fille le jour de ses quinze ans. »

              Pharaun se souvint du portrait d'Elisabeth Adam's, la mère des jumelles, portant un collier semblable autour de son cou.

              « C'est la tradition dans ma famille. Le collier va de mère en fille. Je l'ai reçu de ma mère, car j'étais l’aînée, et l'ai légué à ma fille. Il était tellement grand qu'on a pu le diviser en deux pour Emily et Cynthia. »

              Flairant une opportunité de fouiller un peu dans l'histoire de la famille, Pharaun sauta sur l'occasion.

              « Pardonnez-moi mais... Pouvez-vous me raconter comment... Comment est morte votre fille ? »

              « Cette histoire est-elle importante pour l'enquête ? »

              « Qui sait. »


              La vieille cinglé – qui actuellement ne semblait pas l'être tant, finalement – soupira et indiqua la table au centre de la pièce.

              « Asseyez-vous. »

              Ce qu'ils firent.

              « Je suppose que l'histoire telle qu'elle s'est déroulée vous intéressera moins que les rumeurs qui l'entourent. Je vais donc tout vous raconter dans l'ensemble. Voyez-vous, beaucoup de légendes et de croyances existent sur cette île. Parmi elles, il en est une qui jette la peur sur cette demeure : la gémellité. Personne ne saura vous expliquer l'origine de ce mythe, mais peu vous affirmeront qu'il n'est pas réel. Il dit que la naissance de jumeaux attire le Démon en personne sur la famille, qui ne pourra plus vivre dans le bonheur. Les pires tragédies s'abattront sur elle et le désarroi sera omniprésent. »

              Pharaun déglutit difficilement. Cette légende faisait écho à son propre passé, celui qu'il avait avec son frère jumeau aujourd'hui en prison.

              « Henri et Elisabeth, eux, n'étaient pas croyants. Ils ont tout bonnement ignoré les rumeurs. Mais alors que les filles approchaient de leur douzième année, elles tombèrent gravement malades, toutes les deux. La maladie inconnue eut l'attention des meilleurs médecins d'East Blue, mais personne ne parvint à la guérir. Pendant les deux semaines qu'elles passèrent entre la vie et la mort, leur mère resta à leur chevet, comme si elle voulait profiter des derniers instants avant que ses filles ne partent. »

              Le chasseur de primes était pendu à ses lèvres. La vieille femme racontant l'histoire semblait bien loin de la folle qu'il avait cru qu'elle était.

              « Elle n'aurait pas dû. Car alors que l'on croyait la maladie non contagieuse, elle l'attrapa à son tour. Moins d'une journée après, Dieu seul sait comment, les filles étaient guéries et sur pied. Elisabeth décéda la nuit suivante. »

              Pharaun resta bouche bée. Il imaginait sans peine ce que le gens avait du dire après cela.

              « Tout le monde a pensé que les jumelles ont apporté le malheur sur leur famille après ça, je suppose. »

              « Bien sûr. Et je vous laisse imaginer ce qu'ils doivent dire aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, cette rumeur n'est qu'une vaste fumisterie. Les jumelles n'attirent pas le Démon. »

              Ah, tiens ? Pharaun aurait pourtant juré que la vieille femme était du genre à croire ce genre d'histoire. Elle avait des allures de sorcière qui le laisser penser.

              « Le Démon n'a pas besoin de jeunes filles pour jeter son dévolu sur une famille. Il est ici ! Mais pas à travers les humains, non... Il cherchent à les atteindre, pas à les posséder. Mais il prend possession des corps des animaux. Les chats noirs, les oiseaux... Et il nous épie ! Il veut du mal à notre famille ! »

              Bon... Finalement, elle croyait bien à ce genre d'histoire, ce qui permis à Pharaun de retrouver le personnage comme il l'avait déjà vu. D'ailleurs, Sandra commençait à s'agiter et à faire doucement rouler ses yeux alors que sa tête se laissait emporter par la pesanteur à droite, puis à gauche, avant de revenir stable pour qu'elle puisse à nouveau fixer le chasseur de primes.

              « D'ailleurs, même si les jumelles attiraient le démon, ça ne pourrait pas être la cause de nos malheurs. Car les jumelles n'en sont pas. Elles sont triplées. Je les ai vu jouer ensemble, toutes les trois, il y a plusieurs années ! Eh eh eh... Par contre, la raison pour laquelle Elisabeth et Henri en ont toujours caché une au grand public, ça je l'ignore. »

              Sa voix devenait irrégulière. Un coup elle montait haut dans les aigus, un coup elle devenait si basse que Pharaun devait tendre l'oreille pour la comprendre.

              « Je ne les ai jamais revu ensemble après ça. Sûrement parce que Henri l'a tué. Eh eh eh... Et il l'a peut-être mangé, pourquoi pas. De la viande fraîche pour le dîner, de la viande fraîche pour le Démon. Il a mangé la deuxième, plus qu'une ! »

              Pharaun soupira. L'entretien était terminé, elle était partie. Elle était bel et bien folle finalement, mais avec quelques moments de lucidité. Mais comment savoir ce qui était vrai de ce qui ne l'était pas ?






              « Non mais vous avez vu l'heure ? Vous comptez vraiment fouiller ma chambre maintenant ? Et puis quoi encore ? Vous attendrez demain ! »

              Après s'être fait bruyamment fermer la porte au nez par un James Fëanor toujours très remonté contre sa présence ici, Pharaun dut admettre qu'il était maladroit de fouiller les placards des gens à neuf heures et demi du soir. Ses recherches auraient certainement eut le temps d'aboutir si Sandra ne l'avait pas retenu autant avec ses histoires de démon. Quoi qu'il en soit, le chasseur de primes rebroussa chemin, rageur, afin de retrouver Louise pour planifier la suite des événements. Mais plutôt que de trouver la blonde, il tomba sur Mary Guilt, qui semblait l'attendre au milieu de l'escalier principal. Elle semblait plus angoissée qu'à l’accoutumé, en déduisait ses mains qu'elle tordait violemment, rompant la barrière de la vieille femme rigide que Pharaun lui avait prêté.

              « Je dois vous parler. »

              Le chasseur de primes la dévisagea. Il croyait savoir de quel sujet elle voulait s'entretenir avec lui.

              « Oubliez ce qu'à dit Lucas tout à l'heure au repas. Ne vous inquiétez pas, je ne l'ai pas cru. Ça n'a donc pas d'importance. »

              La gouvernante ouvrit de grands yeux interrogateurs, avant de comprendre de quoi il lui parlait.

              « Non, non, ça n'a rien à voir. Mais je me sens tellement coupable pour ce qui est arrivé à Emily... »

              « Comment ça ? »

              « Vous savez qu'Emily était enfermée dans sa chambre lorsque c'est arrivé. C'est moi qui l'ait punie. Il faut que je vous explique. »


              Pharaun sentit tout à coup ses oreilles devenir particulièrement réceptrices à toutes nouvelles informations intéressantes.

              « Ça c'est passé cette nuit, il était aux alentours de deux heures. J'ai d'abord était réveillée par des bruits de pas dans le couloir. Comme personne n'a le droit de sortir après vingt-trois heures, à cause du couvre-feu imposé par monsieur Fëanor, je me suis levé pour sévir. Je n'ai tout d'abord trouvé personne. J'ai tout de même fait un tour avant de finalement entendre du bruit dans le couloir central au premier étage. Il s'agit de l'endroit où se trouve les chambres de Henri et de ses filles. »

              Le chasseur de primes nota tout de même qu'alors qu'elle racontait, la gouvernante était passé de "monsieur Fëanor" à "Henri".

              « Je me suis donc dépêchée d'aller voir, et je suis tombée sur Emily alors qu'elle sortait de sa chambre. Au début, j'ai cru qu'elle était somnambule. Elle ne cessait de répéter que son petit ami l'attendait dehors, dans le jardin. »

              A cet instant, elle marqua une pose. Elle semblait hésiter à poursuivre, ce qui attisa encore la curiosité de Pharaun.

              « Son petit ami qui est décédé il y a six mois lors d'une bagarre de rue... Mais au bout de quelques minutes, il devint évident qu'elle n'était pas somnambule mais en proie à une folie incontrôlable. Je l'ai donc enfermée jusqu'au lendemain soir... Et le monstre qui a fait ça en a profité pour l'atteindre tranquillement. »

              La vieille femme semblait accablée par le chagrin. Elle devait se considérer comme la cause de tout ce qui était arrivé. Dans un sens, ce n'était pas faux, vu qu'elle avait été le première élément du plan de l'assassin.

              « Je ne voulais pas vous en parler, j'avais trop honte, mais voici ce que j'ai trouvé sur le bureau d'Emily lorsque j'ai nettoyé la chambre de... De tout ce sang... »

              Pharaun attrapa ce que lui tendait Mary. Il s'agissait d'un simple bout de papier plié en deux, mais le chasseur de primes redoutait ce qu'il allait trouver à l'intérieur. Il avait la sensation que tout, depuis quelques heures, échappait à son entendement. Maladroitement, il ouvrit ce qu'il savait être un nouveau mystère.

              "Viens dans le jardin, je t'attends"

              Alors comme ça l'amant revenant voulait reprendre contact avec Emily. Le revenant, ou plutôt le Démon, ne put s'empêcher de penser Pharaun en repensant à sa conversation avec Sandra.

              « Monsieur Mizzrym, je crois que la personne qui m'a réveillé est le meurtrier d'Emily. Je pense que quelqu'un souhaite le malheur de cette famille. J'ai un mauvais pressentiment... Je vous en prie, protégez Cynthia. »

              Facile à dire. Lui aussi l'avait ; ce mauvais pressentiment. Il le traînait depuis quelques heures maintenant. Il ne savait plus où donner de la tête. Il n'arrivait plus à distinguer le vrai du faux ni la raison de la folie. Tout semblait indiquer qu'un esprit malveillant était effectivement à l’œuvre ici, bien que le côté logique de Pharaun lui disait que ce n'était pas le cas.

              Le moral au plus bas, il rejoint enfin le couloir principal dans le but de discuter avec son employeur avant la nuit. Couloir principal où l'attendait une Louise Mizuno apparemment très remontée alors qu'il se dirigeait vers elle.





              [Et voila, un an. Joyeux anniversaire, Cluedo Party ! J'en profite pour vraiment remercier Louise pour sa participation et son implication dans ce RP, qui est et restera pour moi le plus aboutit de ce que j'aurais pu faire. En espérant à ceux qui le liront qu'ils prendront autant de plaisir que j'aurais eu à l'écrire.]
                Jouez cartes sur table.

                  Agacée, Louise avait dû parcourir plusieurs couloirs pour réussir à mettre la main sur Pharaun. Alors qu’elle redescendait un escalier pour se rendre dans le hall, la jeune femme espérait que son imbécile de collègue n’était pas vraiment parti bêcher le jardin à dix heures du soir. Elle marmonnait encore contre l’inaptitude et la stupidité du chasseur de prime lorsqu’elle entendit des bruits de pas dans le couloir principal. Peu désireuse de laisser le garçon s’échapper, la blonde pressa le pas pour le rejoindre enfin. Bon sang, on ne pourra pas dire qu’enquêter dans un manoir était de tout repos !

                  Lorsqu’elle arriva à son niveau, elle nota avec humeur que le chasseur de prime avait les mains vides. Cela ne l’étonnait pas spécialement, mais elle aurait tout de même apprécié un peu plus de résultats dans cette enquête qui ne trainait que trop. Cela faisait moins d’une journée qu’elle était sur l’affaire, mais le temps semblait s’écouler différemment ici, comme si le manoir était sous l’emprise d’un sortilège quelconque. La blonde chassa d’un mouvement de tête ces pensées inutiles et se concentra sur le présent.

                  « Pas de collier ? Tu ferais peut-être mieux d’aller chercher dehors. Je suis sûre que Klaus se fera un plaisir de t’aider s’il ne lui prend pas l’envie de t’enterrer. Je suppose que pendant son interrogatoire, Henri n’a pas manqué de te signaler qu’il avait engagé un criminel comme jardinier ? »

                  Le ton de Louise était calme mais froid. Les yeux de la jeune femme étaient plantés dans ceux de Pharaun, exprimant au-delà des mots l’opinion de la jeune femme au sujet de son interlocuteur ; opinion guère positive, cela va sans dire. Toutefois, exprimer à haute voix son mécontentement calme Louise qui reprit rapidement le contrôle de ses émotions, attendant calmement que Pharaun ne réplique.

                  Lorsque le jeune homme répondit, Louise ne fut pas déçue. Il lui expliqua en détail la conversation qu’il avait eu avec Sandra, puis celle avec Mary, révélant des aspects encore plus sordide de la vie des Fëanor. Cette histoire devenait de plus en plus malsaine. La jeune femme laissa un léger soupir franchir ses lèvres alors qu’elle reprenait la parole pour faire le point.

                  « Si je comprends bien, nous avons à faire à des jumelles maudites qui ont tué leur mère en leur transmettant une maladie mystérieuse, un collier volé qui appartenait à ladite mère, un mec fantôme qui envoie des messages au milieu de la nuit… C’est pas des chasseurs de prime qu’ils auraient dû appeler mais un exorciste ! »

                  La blonde leva les yeux au ciel et, sans attendre de réponse de la part de Pharaun, tourna les talons en direction des quartiers de Henri Fëanor.

                  « Il est temps d’avoir une conversation avec notre employeur. Je veux savoir quel démon il nous cache encore ! »

                  ***

                  Henri était occupé à trier quelques papiers, cherchant désespérément à s’occuper l’esprit, lorsque la porte de son bureau s’ouvrit brusquement. Le vieil homme eut un sursaut, n’attendant personne à cette heure, et surtout personne qui se permettrait d’entrer sans frapper. Lorsqu’il vit arriver les deux chasseurs de prime qu’il avait employé, une expression à la fois irrité et inquiète se peignit sur son visage. La jeune femme ne semblait avoir aucun sens des convenances, mais cette présence impromptue indiquait clairement qu’il y avait un problème quelque part. Tentant de ne pas montrer son appréhension, le maître de maison se leva de son imposant fauteuil pour s’enquérir de la raison de cette intrusion tardive.

                  « Mademoiselle Mizuno, Monsieur Mizzrym, que puis-je faire pour vous ? »

                  Un air peu engageant se peignit sur le visage de Louise lorsqu’elle répondit tout aussi calmement qu’elle s’était adressée à Pharaun un peu plus tôt.

                  « Rien de bien important. Je voulais juste savoir quels squelettes se planquaient dans vos placards. Oh, j’imagine que vous avez simplement oublié de nous mentionner le passé criminel de votre jardinier, mais dans le doute, je préfère demander. »

                  Le peu de couleurs présentes sur le visage d’Henri sembla disparaitre après la tirade de la jeune femme. Visiblement, cette dernière avait fait mouche et il fallut quelques secondes à l’homme pour reprendre une contenance.

                  « Pardonnez-moi mais… »
                  « Oh, on se moque des bonnes manières ! » Louise leva les yeux au ciel avec exaspération. Elle ne supportait pas ces bourgeois stupides. « Qu’est-ce que vous ne nous avez pas dit, encore ? Je me tape complètement que vous soyez immoral ou quoi, je suis pas là pour fliquer votre charmante famille, mais pour trouver qui a tué votre fille. »

                  Pour le tact, on repassera. La chasseuse de prime en avait assez d’entendre des mensonges de la part de tous les occupants de la maison. Henri Fëanor semblait encore le seul à peu près sain d’esprit ici, Cynthia mise à part, peut-être, et s’il pouvait fournir les informations nécessaires à l’enquête, ce ne serait clairement pas du luxe.

                  Un silence embarrassé suivit les propos de Louise, mais celle-ci ne se formalisa pas de la gêne qu’elle avait provoqué, ni de l’air outré que son employeur avait eu à mesure qu’elle avait parlé. Quant à Pharaun, depuis le début, elle n’avait pas accordé grand crédit à son opinion.

                  « C’est vrai, je vous ai caché le passé de Klaus. Je savais pertinemment que vous le soupçonneriez sans chercher plus loin à cause de son passé. Mais sachez qu’il a changé. Je lui ai accordé une seconde chance malgré le désaccord des autres membres de ma famille, et je n’ai, jusqu’à aujourd’hui, jamais eu à m’en plaindre. Cependant, si je m’étais adressé à la marine, Klaus aurait sans doute porté le chapeau pour toute cette histoire. C’est pour cette raison que j’ai préféré faire appel à des enquêteurs indépendants. »
                  « Donc vous ne pensez pas qu’il soit coupable ? »
                  « Honnêtement, je ne sais plus quoi penser depuis ce matin. Je vous l’ai dit, je ne suis plus en mesure de faire confiance à quiconque ici tant que je ne saurai pas qui est le coupable. »
                  « Et à part Klaus, d’autres histoires du genre ? »
                  « Emily avait un petit ami, il y a quelques mois. Quelqu’un que l’on pourrait qualifier de mauvais garçon si vous voyez ce que je veux dire. Il est mort… »
                  « Oui, oui, on sait ça. Quel rapport avec l’enquête ? »
                  « Eh bien il avait de mauvaises fréquentations, peut-être que l’une d’elle voulait s’en prendre à ma fille ? »
                  « Et il aurait attendu des mois avant de le faire ? Je ne pense pas. Qui va toucher votre héritage une fois Emily morte ? »
                  « Eh bien il reste Cynthia, et s’il lui arrive malheur, tout reviendra à James, mon neveu. »

                  Louise considéra un instant les propos de l’homme. Il était possible que ce soit effectivement une affaire d’héritage plutôt que de démons comme l’avait suggéré Sandra. Mais à ce compte, cela donnait raison à Mary lorsqu’elle avait annoncé avoir un mauvais pressentiment. Après un moment de réflexion, Louise reprit la parole, tant pour Henri que pour Pharaun.

                  « Votre fille ou vous-même risquez d’être en danger cette nuit, mieux vaut qu’on monte la garde dans vos chambre. »



                [Ouais, bon anniversaire (en retard o/) Cluedo Party ! Même si je suis longue à la réponse, c'quand même un plaisir cette petite enquête !]
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                « Et il fallait vraiment que ça soit vous ? Pourquoi pas la fille ? »

                Cela faisait maintenant plusieurs minutes que Pharaun essayait de justifier maladroitement le fait que ça soit lui qui monte la garde dans la chambre de Cynthia plutôt que Louise. La raison était que les propos de Mary et Sandra l'avaient touchés profondément et il se sentait un peu coupable de l'avoir pris comme première cible. Il s'était donc porté volontaire pour surveiller cette chambre tandis que la chasseuse de prime était postée dans celle de Henri. Bien évidemment, il ne pouvait pas avouer ça à la riche -et unique- héritière des Fëanor.

                « Croyez moi madame. C'est la meilleure solution. »

                « Mais... et pour me changer ? »

                « Je tournerai la tête. »

                Cynthia fulminait. Apparemment, la présence d'un baby-sitter pour la nuit ne l'enchantait guère, mais en plus elle était gênée par la présence de l'homme. Comprenant néanmoins que rien n'y ferait, elle fit son possible pour se calmer.

                « Vous pensez vraiment qu'il m'ait nécessaire d'avoir une protection ? »

                « On ne peut le savoir. Mais votre sœur a été tuée la nuit dernière et son collier a été volé. Vous possédez la deuxième partie. On ne peut que prévoir le pire et tâcher de l'anticiper. »

                Cela parut à la fois attrister et effrayer la blonde. Sans mot dire, elle hocha lentement la tête, signe qu'elle acceptait enfin la présence de Pharaun en ces lieux.

                On frappa à la porte à cet instant. Cynthia donna son accord à Lucas pour qu'il entre. Le domestique, bien loin de l'image de folie qu'en conservait Pharaun, semblait transformé lorsqu'il s'agissait d'effectuer son travail. Celui-ci, propre sur lui, avait le visage sans expression et le dos droit. Il tenait dans ses mains un plateau sur lesquels reposaient deux verres remplis d'un liquide fumant.


                « La tisane de madame. Monsieur Tsuyosa m'a aussi demandé de proposer à sieur Mizzrym. »

                Cynthia se leva et récupéra elle-même le plateau, avant de congédier le domestique d'un geste de la main. Celui-ci sortit prestement non sans lâcher un sourire narquois que Pharaun détecta. Pendant ce temps, la jeune héritière avait posé le plateau sur une commode basse et avait commencé à fouiller dans l'un des tiroirs. « Du sucre ? » Cela empêcha le chasseur de primes de répondre qu'il n'aimait pas la tisane...

                Il se força néanmoins à la finir tout en rassurant Cynthia sur la nuit à venir. « N'ayez crainte. Avec moi, personne n'osera s'aventurer dans cette chambre avant demain matin pour changer les draps. » La jeune noble sembla rassurée. Puis elle commença à papillonner des yeux et à bailler, avant de se diriger vers son lit.


                « Et bien, il est temps de vous souhaiter bonne nuit... Enfin, bonne garde... Enfin... »

                Elle s'affala de tout son long sur le matelas moelleux. Parvint à puiser assez de force pour se glisser sous les couvertures mais pas pour finir sa phrase. Sa respiration se ralentissait de plus en plus au fur et à mesure que le sommeil l'envahissait. Pharaun, en tant qu'insomniaque, était jaloux de la facilité qu'elle avait eu à trouver le sommeil. Il se leva à son tour pour éteindre la bougie avant de regagner sa chaise. Ses jambes étaient de plomb. La journée avait certes été longue, mais tout de même...

                La chaise semblait si loin, au milieu de la pièce. Lorsqu'il parvint enfin à l'atteindre, après une marche qui semblait avoir duré plusieurs heures, il s'y affala sans ménagement en laissant s'étirer ses jambes et pendre ses bras. Tout son corps s'engourdissait. Il aurait put s'inquiéter si son cerveau ne faisait pas de même, bloquant ses pensées.









                Dans la chambre, devant sa chaise, Emilie avec son couteau dans le ventre était allongée dans une marre de sang. Sur le sol, inerte, elle fixait le plafond jusqu'à s'apercevoir de la présence de Pharaun. Alors ses yeux roulèrent dans ses orbites pour se fixer sur lui.

                « Vous aussi, vous cherchez le Démon? »

                Le chasseur de prime voulut répondre, mais sa voix se bloqua dans sa gorge quand apparu derrière la morte, debout et immobile, la grande silhouette de Klaus. Derrière sa chaise retentit un petit rire strident, qui se faisait de plus en plus fort, comme si la chose se rapprochait de lui lentement. Mais il ne voulait pas tourner la tête, trop absorbé par la scène macabre devant ses yeux.

                « Vous ne le trouverez pas, disait une voix chevrotante. Le Démon ne se dévoile pas. Il exécute. »

                Sandra, située un peu en arrière de Klaus, était assise sur une chaise comme en miroir à Pharaun. Elle caressait langoureusement la tête de deux poupées posées sur ses genoux. Les poupées de Henri et de James Feänor. Qui, de leur yeux ronds et blancs, dévisageaient Pharaun.

                « Tu es le Démon. » Disait l'un. « Tu es Dialaun. » Disait l'autre.

                « Non... Je suis Pharaun ! Dialaun est le fils indigne de mon père ! »

                « Tu as pris sa place ! Tu as menti à tout le monde ! »
                Hurla Sandra.

                Il voulut répondre, démentir les accusations qui étaient la stricte vérité. Mais l'attention qu'il porta soudain au deuxième corps étendu aux côté d'Emilie le coupa dans son élan. Le cadavre de Cynthia, un poignard dans le ventre. Elle aussi le fixait de ses yeux vides.

                « Je suis... morte ? Tu avais juré de me protéger ! »

                Derrière elle, l'ombre géante de Ken sembla acquiescer. Il perçu d'ici l'aura accusatrice qui se dégageait des deux êtres. Et toujours ce rire aigu derrière lui qui se rapprochait de plus en plus. De plus en plus menaçant. De plus en plus meurtrier. Mais il ne voulait pas détourner les yeux. Il ne pouvait pas détourner les yeux !

                « Démon, Démon, Démon, Démon ! » hurlaient en cœur les deux poupées sur les genoux de la doyenne de la famille.

                « Il est trop tard pour sauver notre famille du Démon, Dialaun. Elle est morte par ta faute. Mais c'est maintenant vous qu'il a sous les yeux. »

                Pharaun ne comprenait pas la menace. Jusqu'à ce qu'il entende le râle douloureux du cadavre qui se trouvait à côté de Cynthia. Le corps de Louise, un couteau dans le ventre. Et derrière elle, Lucas qui souriait, goguenard.

                « Nous n'y arriveront pas Pharaun. Nous ne survivront pas dans cette maison. »

                Le rire derrière lui, à quelques centimètres de son oreille désormais, l'empêchait de réfléchir.

                « Que dis-tu ? Nous allons survivre ! Nous allons résoudre le mystère de cette famille ! »

                Les yeux de la blonde semblèrent alors se remplir de pitié.

                « Tu ne comprends pas ? Je suis MORTE ! Et toi, tu es mort aussi... »

                Le rire s'amplifia alors, jusqu'à assourdir Pharaun qui, n'y tenant plus, se retourna enfin. Pour voir Mary à quelques centimètres de son visage. Les traits tirés, la peau décharnée, dans un rictus horrible qui déformait son visage d'ordinaire si paisible.

                « AHAHAHAHAH »

                Alors elle abattit sa main tenant une pierre tranchante. Elle visa l’œil de Pharaun qui ne put que voir directement sa mort arriver.








                La pierre rebondit plusieurs fois au sol avant de finir sa course aux pieds de Pharaun. Le bruit qu'elle provoqua le tira hors de son cauchemar, mais sa tête lui faisait néanmoins mal, comme s'il avait véritablement était frappé au visage. Il chercha quelques secondes à recouvrer ses esprits, afin de comprendre ce qu'il se passait dans cette chambre.

                On avait jeté un caillou par la fenêtre...

                La fenêtre grande ouverte...

                Quelqu'un venait de pénétrer dans la chambre !

                La silhouette avait déjà parcouru la moitié de la distance qui séparait l'extérieur du lit de Cynthia. Le long poignard qu'elle tenait dans la main droite scintillait dans la nuit. Au prix d'un effort surhumain, Pharaun se força à se mettre débout et à porter la main à son sabre. Trop lentement à son goût.

                Mais le meurtrier, sentant soudain les mouvements de Pharaun, se tourna vers lui. Le chasseur de prime put alors contempler le masque hideux qui recouvrait l'intégralité du visage de l'assassin. Un masque blanc comme la mort. Un sourire démesuré laissant apercevoir d'énormes dents serrées. Des lèvres rouges vifs remontant jusqu'à mi-hauteur de la tête. Les grands yeux écarlates écarquillés donnaient l'impression à Pharaun d'être littéralement transpercé par ce regard injecté de sang. Le reste du corps était dissimulé sous une épaisse cape brune à capuche, atténuant les éventuelles formes de l'intrus. L'assassin n'était pas très grand, aux environs de la taille de Pharaun.

                Pendant un instant, ils se regardèrent, sans bouger. Les yeux dans les yeux. L'un terrorisé, l'autre placide. Soudain, le meurtrier fit demi-tour prestement et prit la fuite en bondissant par la fenêtre. Pharaun tenta de lui asséner un coup de sabre, mais ses membres engourdis ne parvinrent même pas à lever l'arme au dessus de son épaule, et il manqua de trébucher à terre. Se ressaisissant, il plongea la main à sa poche et appuya sur le bouton du Den Den Mushi portatif.


                « Louise, il est juste dehors ! »

                Puis il se précipita vers Cynthia qui n'avait pas bougé durant tout l'affrontement silencieux. Elle respirait par saccade, comme secouée à son tour par de terribles cauchemars. Pharaun tenta de la réveiller en la saisissant par l'épaule, mais rien n'y fit.

                *La tisane...* compris alors enfin Pharaun.

                Mais elle était sauve, c'était le principal. Et son collier était toujours autour de son cou. Traînant la patte, Pharaun se dirigea vers la fenêtre pour tenter de voir le meurtrier en fuite. Mais il ne vit rien de là où il était. Il allait refermer la fenêtre lorsqu'il eut une sensation étrange. Là, dans le jardin, il sentait comme une présence qui le regardait, caché derrière tel ou tel arbre.

                « Il y a quelqu'un d'autre ici... »


                Dernière édition par Pharaun Mizzrym le Mar 12 Fév 2013 - 18:22, édité 4 fois
                  Chat, c’est toi qui es !

                    « Vous êtes sûre que laisser ce jeune homme avec ma fille… Non pas que je le trouve… Enfin, je veux dire… »
                    « On sait ce qu’on fait. »

                    Le ton peu amène de Louise eut le mérite de faire taire Henri. Ce dernier ne semblait toujours pas spécialement enthousiaste à l’idée de laisser sa fille passe la nuit avec un parfait étranger, mais au moins il cessa d’essayer de raisonner la blonde sur le sujet. La chasseuse de prime avait été très claire sur ce point avec Pharaun : elle ne passerait pas la nuit avec Cynthia. Elle n’avait aucune envie que la pauvre petite bourgeoise éplorée pensât trouver une confidente en sa personne. Les histoires familiales dramatiques, elle avait déjà donné, merci bien.

                    « Est-ce que vous voulez quelque chose pour cette nuit ? Si vous aimez lire, la bibliothèque est à côté. Nous avons un ouvrage sur notre famille, peut-être y trouverez-vous des pistes pour votre enquête… »
                    « Ca ira. »

                    Encore une fois, face au ton sec de la jeune femme, Henri n’insista pas. Il se contenta donc de disparaitre un instant dans la salle de bain attenante à sa chambre pour passer un pyjama tandis que Louise s’installait dans un fauteuil près de la fenêtre. La nuit allait vraisemblablement être très longue, mais de toute manière, la chasseuse de prime était convaincue qu’elle n’aurait jamais trouvé le sommeil dans cette maison de fou.

                    Henri ressortit finalement de la salle de bain dans un pyjama marron probablement fait d’un tissu hors de prix et se glissa sans un mot dans son lit, prêt à tenter de trouver le sommeil, lorsqu’on frappa à la porte. Plus vive que son employeur, Louise se redressa et alla ouvrir pour trouver Lucas sur le seuil de la chambre. Elle haussa un sourcil interrogateur et le valet, avec un sourire, dressa devant lui un plateau avec deux tasses de tisane.

                    « Tisane ? »

                    Avant que Louise puisse répondre, Henri invita Lucas à entrer pour déposer les infusions sur une petite table en le remerciant. La blonde adressa un rictus narquois au valet face à la politesse déférente qu’il manifestait en présence de Monsieur Fëanor. Compte-tenu de la situation, Lucas ne put rien répondre et se contenta donc de lancer un regard éloquent à la chasseuse de prime avant de lui souhaiter une « excellente nuit » d’un ton insolent. Henri renvoya la politesse à son valet, inconscient du jeu silencieux entre ce dernier et la blonde. Lorsque Lucas eut quitté la pièce et fermé la porte, l’homme s’empara d’une tasse qu’il présenta à Louise.

                    « Je ne la boirai pas. »
                    « Vous n’aimez pas la tisane ? Ca vous détendrait pourtant. »
                    « C’est ça. Buvez donc et allez vous coucher. »

                    Henri ne put retenir un léger soupir avant de porter la tasse à ses lèvres. La conduite de cette chasseuse de prime était absolument désolante. Il ne s’était évidemment pas attendu à tomber sur des modèles de courtoisie en faisant appel à des enquêteurs indépendants, mais il avait quand même espéré avoir à faire à des gens qui avaient un minimum de savoir vivre. Enfin… au moins le garçon avait l’air d’être fréquentable. Le maître de maison termina sa tisane et regagna son lit. Il souhaita bonne nuit à la jeune femme et éteignit la lumière. Louise l'entendit s'agiter quelques minutes dans son lit, probablement en proie à de sombres pensées, puis finalement la fatigue prit le pas sur le reste et il s'apaisa jusqu'à s'endormir profondément. Se calant plus confortablement dans son fauteuil, Louise laissa elle aussi ses pensées divaguer, consciente qu’elle allait passer l’une des nuits les plus ennuyeuses de sa vie.

                    ***

                    Il devait être aux alentours de trois heures du matin lorsque Louise crut entendre un son étouffé venant de la pièce à côté, celle où dormait Cynthia, comme un volet qui claque ou quelque chose de ce genre. Inquiète, la blonde se redressa et tendit l’oreille. Elle ne pouvait pas se permettre de quitter la chambre sans être sûre qu’il y ait vraiment du danger. Quelques instants s’écoulèrent silencieusement, donnant l’impression à la chasseuse de prime qu’elle avait rêvé. Puis, brusquement dans sa poche, le petit Den Den Mushi s’agita.

                    « Louise, il est juste dehors ! »

                    Perdant quelques précieuses secondes à essayer de comprendre ce qui se passait, Louise parvint finalement à réaliser que c’était la voix de Pharaun qui lui parvenait et qu’il y avait un problème à côté, visiblement un intrus. Ne cherchant pas à savoir plus de détails, la blonde se précipita au dehors, passant par la fenêtre de la chambre d’Henri et aperçut une silhouette sombre et encapuchonnée qui s’enfuyait en silence.

                    Louise sortit un couteau qu’elle tenta de lancer au fuyard, mais l'arme se perdit quelque part dans le jardin et la blonde jura en accélérant le pas. Putain, mais qu’est-ce que Pharaun avait foutu ? Finalement, l’écart entre Louise et sa cible commença à diminuer et la jeune femme crut vraiment qu’elle allait rattraper la silhouette. A l’angle du mur, elle tendit la main pour attraper la cape du fuyard et… n’attrapa rien. Lorsqu’elle tourna à son tour, plus rien. Disparu le fugitif, introuvable le suspect. Perplexe, la blonde resta quelques minutes interdite, avant d'apercevoir une fenêtre largement ouverte. Elle se précipita à nouveau et elle traversa la pièce en courant, renversant et brisant un vase sur son passage. Elle ignora le cri de surprise de James Fëanor qui venait d'être réveillé en sursaut et ouvrit la porte de la chambre en vitesse pour essayer de retrouver la trace du fuyard. Seulement, elle ne vit rien, pas plus qu'elle n'entendit autre chose que les propos de James sur un ton scandalisé.

                    « Fermez-la ! Vous avez vu passer quelqu'un ici ? »
                    « Quoi ? Non. Je vous prierai de me parler sur un autre ton mademoiselle. Le fait que mon oncle vous ait employé ne vous donne pas les pleins pouvoirs ici. »
                    « Gardez vos speech pour plus tard. Vous en aurez besoin pour me prouver que vous venez pas de tenter de vous introduire dans la chambre de votre cousine pour la tuer. »

                    Pour le coup, les propos de la blonde coupèrent le sifflet à l'arrogant nobliau. Louise le dévisagea des pieds à la tête pendant quelques instants, détaillant ensuite la pièce, mais elle ne trouva aucune trace d'une cape ou de quoique ce soit d'autre pouvant prouver que James était le coupable. Cependant, rien ne prouvait qu'il était innocent. Qui plus est, la culpabilité du neveu restait déjà plus probable que celle d'un putain de fantôme qui s'était volatilisé mystérieusement. Elle allait vraiment finir par croire qu'il fallait un exorciste à cette famille.

                    Ressortant par la fenêtre en ignorant délibérément James, Louise examina encore une fois le mur, mais il n'y avait rien d'autre que la fenêtre de la chambre du jeune Fëanor. Agacée par sa défaite, Louise tapa rageusement du poing contre le mur avant d’abandonner les recherches pour ce soir. Ce fut donc d’une humeur massacrante qu’elle rejoignit Pharaun qui était à la fenêtre de la chambre de Cynthia, à scruter le jardin. Elle n’attendit pas qu’il ait refermé et l’interpella d’une voix irritée.

                    « Putain, Pharaun, qu’est-ce qui s’est passé ? Qu’est-ce que tu foutais dans cette chambre ? Tu pouvais pas empêcher ce type de se barrer, non ? J’espère pour toi que Cynthia est pas morte ou je te jure que t’es le prochain sur la liste ! »
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                  « C'est que... D'habitude, on n'a pas le droit d'entrer dans la résidence... Ni même dans le jardin. On garde juste la grille. »

                  Un claquement de langue agacé fit taire le gros garde qui avait emmené Louise au manoir au début de toute cette histoire de fou. Pharaun répétât l'ordre qu'il venait de donner une seconde avant, histoire de bien faire comprendre au soldat l'importance de sa mission.

                  « Vous restez bien devant la porte de cette chambre et vous ne laissez personne rentrer. J'insiste. Personne, pas même maître Fëanor. Ah, et aussi... Vous ne laissez pas Cynthia sortir, quoi qu'elle dise. Et ce jusqu'à ce que nous, et seulement nous, vous en donnions l'ordre. Est-ce clair ? »

                  Alors qu'il hésitait, un nouveau regard appuyé de Louise lui fit hocher vigoureusement de la tête. Le chasseur de prime espérait qu'il s'en sortirait face à l'assassin si affrontement il devait y avoir, mais il pensait que oui, étant donné qu'il avait préféré fuir que de se frotter à un Pharaun faible la nuit précédente. Et de toute façon il n'avait pas le choix. Lui et son collègue maigrelet (qui montait la garde sous la fenêtre de Cynthia), étaient les seuls hors de cause. Trop balourds pour se glisser discrètement dans la résidence alors qu'ils n'en avaient pas le droit, et trop idiots pour élaborer un plan aussi subtil que ne semblait l'être toute cette histoire. Ou alors ils cachaient vraiment très bien leur jeu...

                  Après s'être éloignés, les deux chasseurs de primes purent reprendre leur discussion. Pharaun avait subit les foudres de Louise ce matin, cette dernière lui reprochant sa négligence pour avoir consommé la tisane droguée la veille. Mais au moins, il avait réussi à se réveiller au bon moment, ce qui n'avait pas été le cas de Cynthia qui avait vécu d'horribles cauchemars jusqu'au matin, sans que personne ne put la tirer de son sommeil. Il s'était aussi avéré qu'Henri n'avait pas connu une nuit aussi troublée, ce qui sous-entendait que seuls la fille rescapée et le chasseur de prime avaient été ciblés.


                  « Résumons. Nous avons un meurtre et une tentative avortée. Un collier volée à la première victime, et la deuxième en possède un identique. En plus de ça, nous pouvons ajouter des histoires de démons et de fantômes.

                  Henri ne peut pas être le meurtrier, puisqu'il était avec toi quand celui-ci à tenté de tuer Cynthia. Je pense qu'on peut aussi retirer Sandra de la liste... Je la vois mal t'égaler dans une course poursuite. Je serais moins catégorique pour Mary, mais ça serait quand même étonnant.

                  Il nous reste donc James, Lucas, Klaus et Ken. Le gabarit de l'assassin ne correspond en aucun cas aux deux derniers qui mesurent pas loin de deux mètres chacun. Ce qui laisse le neveu et le valet... Le plus logique étant James, selon moi, étant donné que tu as perdu la trace du meurtrier juste sous ses appartements. »


                  Louise, le regard dans le vide, réfléchissait. Alors qu'ils sillonnaient les couloir du manoir, faisant bien attention à changer de direction chaque fois qu'ils voyaient ou entendaient quelqu'un, elle prit enfin la parole, alors que la colère semblait s'être un peu dissipée.

                  « Qui a pu droguer la tisane ? Il n'y a que deux possibilités : Ken qui l'a préparée, et Lucas qui l'a apportée. Trois en fait, puisque je suppose que les herbes proviennent du jardin. Klaus peut donc être concerné. Il n'empêche. Lucas est celui qui correspond le plus. »

                  Ça paraissait tellement logique. Néanmoins, quelque chose clochait pour Pharaun. Il ne pouvait s'empêcher de penser à la sensation qu'il avait eut d'être observé par une autre personne dans le jardin, cette nuit. Mais il n'en avait pas dit mot à Louise, de peur qu'elle se moque de lui.

                  « Lucas alors ? On en est sûr ? On l'arrête dans ce cas ? »


                  « Pas si simple... On n'a aucune preuve. On ne sait ni comment, ni pourquoi il a fait ça. Hier matin, quand Emily a été tuée, il travaillait et s'est fait voir de tout le monde. Et enfin, on n'a toujours pas retrouvé ce collier. »

                  « Fouillons ses affaires, on va bien finir par mettre la main dessus ! »

                  « Il est bien trop intelligent pour se faire avoir aussi bêtement... On ne trouvera rien. Il nous faut une preuve, quelle qu'elle soit. »


                  Pharaun soupira. « Et bien on n'a plus qu'à interroger de nouveau chaque personne sur la nuit dernière. Peut-être que quelqu'un a constaté quelque chose. »

                  Le hasard fit qu'ils se trouvaient à cet instant tout proche de la cuisine, dans laquelle Ken Tsuyosa devait être en train de s'affairer pour le repas de midi. Mais l'employé aux fourneaux, encore plus désagréable que la veille, les reçu à bras fermé dans l'entrée de son lieu de travail.

                  « Je vous ai déjà dit que je n'avais pas le temps pour répondre à vos questions futiles ! Écoutez moi bien : chaque minute, chaque seconde que je perd avec vous a des conséquences irréparables sur le dîner de monsieur Fëanor. Et s'il y a bien une chose que je déteste, c'est de rater un plat ! Le temps est l'élément le plus important en cuisine, et vous m'en avez déjà trop fait perdre ! »

                  Ce sur quoi il leur claqua sèchement la porte au nez. Pharaun resta dépité quelques instants mais ne lutta pas, déjà habitué à ce comportement après leur précédent face à face. Louise, elle, peu encline à se laisser marcher sur les pieds de cette manière, tambourina plusieurs minutes à la porte pour avoir ses réponses. Lorsqu'elle abandonna enfin, les deux chasseurs de primes se détournèrent... Pour tomber nez-à-nez avec Klaus, le jardinier, le visage inquiet.

                  Vif comme l'éclair, se dernier posa dans les mains de Louise une grande enveloppe blanche avant de faire volte-face et de prendre congé à grande enjambée. Les deux chasseurs de primes mirent quelques secondes pour comprendre ce qu'il venait de se passer avant d'enfin réagir. Pharaun s'élança en avant et s'écria :


                  « Attendez ! On a quelques questions à vous poser ! » Le jardinier ne s'arrêtant pas, il tenta d'insister en prenant le ton le plus impératif dont il disposait. « Revenez immédiatement ! » Peine perdue... Il aurait bien le temps de l'interroger plus tard.

                  Lorsqu'il revint vers Louise, celle-ci était toute absorbée par la lecture de la lettre contenue dans l'enveloppe.


                  « Ça dit quoi ? »
                      Louise haussa un sourcil face à « l’autorité » de Pharaun. Un gamin de quatre ans lui aurait ri au nez avant de se barrer, alors le jardinier… Toutefois, la blonde garda ses remarques pour elle, fatiguée de devoir reprendre chaque acte de son pseudo-collègue. Aussi, elle ouvrit l’enveloppe sans ménagement et en tira la lettre remise par Klaus. Qu’avait-il de si embarrassant à dire, qu’il ne prenne pas la peine de rester ? Avec curiosité, la jeune femme parcourut rapidement l’écriture maladroite du jardinier. Lorsque Pharaun revint vers elle après sa crise d’autorité, elle lui mit la lettre entre les mains et tourna les talons. Les quelques lignes de la lettre, bien qu’inintéressantes, venaient de lui donner une idée.

                      « j’ai pas tué emily. j’ai tué personne depui que je suis ici. je suis un ex tolard alors vous me soupçonnez et c’est normal. mais moi j’ai tué personne. je ferais pas de mal au feanor pas après se que monsieur feanor a fait pour moi. le moment ou la petite a été tué j’étais en ville j’achetais du materiel pour le jardin. si vous voulez mon avis c’est le diable qu’en a après c’te maison. la vieille sandra est peut-être moitié folle mais elle a pas complètement tort quand elle dit que ya des trucs pas net qui se passe ici. démon ou pas jsais pas, pas cest pas normal. »

                      Ce démon, toujours ce foutu démon ! Tout ceci ne pouvait pas venir de nulle part. Ce genre de croyance n’apparait pas du jour au lendemain parce qu’une vieille folle perd la boule à force de passer plus de temps avec ses poupées qu’avec des personnes réelles. Il devait y avoir quelque chose dans les origines de la famille, de l’île, n’importe quoi ! Cette affaire allait finir par user les nerfs de la blonde à ce rythme. Après la course poursuite de la nuit, elle n’avait pas eu une minute de calme et ce n’était pas les quelques heures de somnolence dans la chambre d’Henri qui l’avaient reposée. Bon sang, vivement la fin ! Cette affaire lui retournait tellement le cerveau qu’elle en oubliait un détail important, et même essentiel. Mais ça, c’était à elle de le découvrir…

                      La blonde était bel et bien déterminée à découvrir quels autres squelettes se cachaient dans les innombrables placards du manoir Fëanor. La veille, Louise avait refusé la proposition d’Henri concernant les ouvrages de la bibliothèque, mais suite aux derniers événements, l’idée du maître de maison n’était plus si inintéressante. Aussi, c’était d’un pas pressé qu’elle se rendit jusqu’à l’endroit désiré. Sans la moindre douceur, elle abaissa la poignée et ouvrit la porte à la volée, ignorant le claquement que cela produisit contre le mur. Se défouler sur une porte était peut-être puéril, mais ça faisait toujours du bien.

                      « J’imagine que c’est trop vous demander que de vous montrer civilisée ? »

                      James Fëanor. Louise ne l’avait pas aperçu en entrant. Confortablement assis dans un fauteuil, le jeune homme observait la blonde avec dédain. Bon, elle allait d’incapables en incapables depuis ce matin. Sans se laisser démonter, la blonde s’approcha de l’insupportable bourgeois. Elle s’installa dans un fauteuil face à lui et se pencha, dévoilant impudiquement sa poitrine et, avec un air méprisant, prit enfin la peine de répondre.

                      « Son altesse m’en veut-elle de l’avoir surpris dans son pyjama de soie ? Peut-être l’ai-je tirée d’un doux rêve ? »
                      « Je n’apprécie guère le ton que vous employez. »
                      « Oh, arrêtez, je vais finir par culpabiliser. »

                      Le vouvoiement ironique était encore plus horripilant que le tutoiement insolent, et Louise tirait une grande satisfaction à observer la colère grandissante de son interlocuteur. Encore une fois, elle se défoulait de manière puérile.

                      « Que venez-vous faire ici ? Tenter de me séduire pour obtenir des informations ? Sachez que je ne m’abaisserais pas à partager quoique ce soit avec une… une roturière dans votre genre. Vous n’êtes qu’un insecte dans cette maison. »
                      « Un insecte ? L’image est intéressante. Alors voyez-moi comme une araignée. Une minuscule araignée qui tisse sa toile dans l’ombre et qui finira par attraper le meurtrier de votre cousine. Et vous savez quoi, vous avez déjà commencé à vous empêtrer dans mes fils. »

                      James pâlit brusquement. Visiblement, il n’avait pas l’habitude qu’on lui réponde. Ces nobliaux étaient tellement habitués à mener le jeu qu’ils ne se rendaient pas compte que d’autres pouvaient en faire autant.

                      « Je n’ai pas tué Emily. Je ne vois pas pourquoi je devrais craindre quoique ce soit de vous. »
                      « Vraiment ? Pourtant, cette nuit, le tueur s’est évaporé sous votre fenêtre. Vous voyez, cher monsieur Fëanor, je ne crois pas aux coïncidences. »
                      « Vous devriez. Je ne suis pas responsable de l’attaque de cette nuit. Vous outrepassez les limites en m’insultant de la sorte, mademoiselle. »
                      « C’est mon rôle d’aller au-delà de vos ridicules petites conventions. Vivre dans un château ne fait pas de vous un roi. Mais je vous en prie, si vous voulez me chasser, faites-le, et si vraiment vous n’êtes pas coupable, alors vous êtes certainement sur la liste des victimes. Je me ferai un plaisir d’envoyer des fleurs pour votre enterrement. »
                      « Je commence à en avoir plus qu’assez de vous entendre déblatérer de telles absurdités ! Veuillez quitter cette pièce immédiatement. »
                      « Non. »
                      « Non ? »
                      « Non. »
                      « Oh je vous en prie, vous n’allez pas me faire croire que vous êtes venu ici pour lire ? »
                      « En l’occurrence, si. Je n’étais pas venu vous chercher, j’ai d’autres informations plus intéressantes à relever. »
                      « Alors permettez-moi de rester. Je suis curieux de vous voir chercher quelque chose dans un livre. Je suis sûr que c’est un spectacle d’une délicieuse rareté. »

                      Louise pinça les lèvres à la remarque. James venait de marquer un point. Elle n’était pas coutumière des bibliothèques, ni même des livres en général. Elle n’avait aucune idée de l’étagère par laquelle commencer. Maintenant qu’elle observait les rayons d’ouvrage, elle remarquait que la famille Fëanor était plutôt bien fournie en terme de littérature. Bon sang, il était hors de question qu’elle se ridiculise face à James.

                      « Oh, aurais-je touché un point sensible ? »

                      Avec un regard sombre, Louise se leva du fauteuil pour aller se positionner face à James, les mains sur les accoudoirs de son fauteuil. Elle ficha son regard dépareillé dans celui du jeune homme et déclara froidement :

                      « Tu te crois supérieur ? Tu te crois au-dessus de tout parce que tu vis dans un manoir et que tu as les poches remplies de berries ? Alors laisse-moi te poser une question. Une simple et unique question. »

                      Louise se tut un instant, laissant le temps à ses mots de se ficher dans l’esprit de l’homme. Celui-ci perdait sa superbe de syllabes en syllabes, une vague crainte commençant à poindre en lui alors que les yeux étranges de la blonde le déstabilisaient, l’empêchant de s’ancrer dans son regard comme il l’aurait souhaité pour lui tenir tête.

                      « Si maintenant, je décidais de te tuer, comment te défendrais-tu ? »

                      Froid comme la mort, le ton de la blonde ne laissait planer aucun doute : elle en était capable. Toutefois, touché dans sa fierté, James se rebiffa. Il posa sa main sur l’un des bras de la blonde, entreprenant de l’enserrer dans une poigne ferme pour l’obliger à se dégager. Mais, avant de pouvoir faire quoique ce soit, Louise, à l’aide de son autre main, lui empoigna les cheveux et tira sa tête en arrière avec brusquerie. Dans le même geste, elle leva l’une de ses jambes et plaça son pied au niveau de l’entrejambe du jeune homme.

                      « Retire ta main immédiatement ou je m’assure que tu ne puisses pas perpétuer la lignée Fëanor. »

                      En silence, James obtempéra. Louise maintint sa position quelques secondes de plus et le lâche finalement. Elle recula d’un pas, laissant James se relever, le visage d’une pâleur effrayante. Se faire dominer par une femme n’était clairement pas quelque chose dont il était coutumier.

                      « Vous me paierez cela, soyez-en sûre. »

                      Louise ne répondit pas et se contenta d’observer James fuir la queue entre les jambes, malgré une tentative pour garder la tête haute. Maintenant que cet imbécile était parti, elle allait pouvoir chercher tranquillement des informations sur cette famille maudite. Ne sachant pas par où commencer, la blonde se dirigea vers une étagère au hasard et observa les différents titres à la recherche d’une piste.

                      Gold Roger, d’une pièce à One Piece
                      Griselda la folle
                      Je ne suis pas méchant !
                      Jurisprudence sur East Blue
                      Kaléidoscope et autres effets d’optique

                      Bon, eh bien c’était une bibliothèque plutôt éclectique… Henri avait parlé d’un ouvrage sur la famille, mais où était-il ? Elle aurait peut-être dû lui demander avant de foncer ici comme une idiote. Elle se décala vers la droite, leva la tête et parcourut encore les titres.

                      Vandalisme en haute mer : un terrible roman de piraterie
                      Vert ? Mais quelle horreur !
                      Vivement la fin, anthologie


                      L’alphabet ! Cette satanée bibliothèque était rangée par ordre alphabétique ! Elle n’était pas blonde pour rien. S’invectivant elle-même, Louise chercha l’étagère consacrée à la lettre F. Elle ne tarda pas à la découvrir et espéra que l’ouvrage qu’elle cherchait commençait par famille ou par Fëanor. Elle n’avait clairement pas envie de se taper toute la bibliothèque à chercher un ouvrage qui s’intitulait Vie et mort des Fëanor ou Grandeur de la famille Fëanor… ! Bon, elle tenait les F.

                      Rapidement, la blonde repéra l’ouvrage désiré mais, au moment de le saisir, un autre titre l’interpella. Il se trouvait juste à côté du livre sur la généalogie de la famille et était rangé à l’envers, comme s’il avait été remis à sa place précipitamment. La blonde s’en saisit, de plus en plus intriguée. Si c’était bien ce qu’elle croyait, alors elle s’était fourvoyée depuis le début…
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                    « Ça ne tient pas debout... Cette lettre est complètement contradictoire avec ce qu'on a... »

                    Toujours les yeux rivés sur l'écriture maladroite du jardinier, Pharaun attendait une réaction de Louise, avant de lever la tête et de constater qu'elle s'était volatilisée. Pas très important néanmoins. Ils seraient plus efficaces séparés, et la jeune femme était au moins aussi brillante que lui. Elle avait probablement noté l'incohérence de la lettre.

                    Une incohérence qu'il ne parvenait pas à comprendre. Pourquoi diable Klaus affirmait s'être rendu en ville le matin du meurtre ? Cela lui retirait son alibi, à savoir qu'il travaillait dans le jardin. Le plus étrange, c'est que Cynthia lui avait affirmé qu'elle l'avait vu. Cherchait-elle à le couvrir ?


                    *Ou alors Cynthia elle-même n'était pas dans le jardin. Elle a dit n'avoir vu Klaus uniquement car elle savait qu'il était en ville et que ça l'arrangerait qu'elle le couvre. Se faisant, Klaus était obligé de dire qu'il l'avait vu lui aussi, ce qu'il a fait. Après tout, cela lui offrait un merveilleux alibi. *

                    Après quelques secondes de réflexion, Pharaun secoua vigoureusement la tête. N'importe quoi ! Sandra et Henri déjeunaient dans la chambre du propriétaire des lieux et avaient tous deux constatés la présence de Cynthia dans le jardin. Donc elle y était. Donc si elle avait parlé de Klaus, c'est que lui aussi y était.

                    Donc cette lettre n'était qu'un tissu de mensonge.

                    Mais quel intérêt ?

                    Rien n'avait de sens. Depuis la veille, tout semblait tellement compliqué et insoluble... Pharaun se prit la tête entre les mains et tenta de réfléchir. Ils avaient bien un semblant de piste avec ce meurtrier nocturne, mais il ne correspondait en rien avec le physique de Klaus. Alors pourquoi cette nouvelle intrigue ? Le chasseur de prime relu la lettre, tentant tant bien que mal d'en extraire quelque chose pour continuer son investigation. Mais rien ne semblait indiquer le début d'une nouvelle piste, excepté cette allusion à un démon.

                    Un démon. Encore et toujours. A croire qu'il existait véritablement une entité immatérielle en ces lieux. Pharaun refusait d'y croire, mais tout revenait toujours à ça. Et si c'était vrai, après tout ? Et si la famille Fëanor était vraiment maudite ? Et s'il essayait d'en savoir plus, plutôt que d'essayer désespérément d'écarter cet élément qui lui rappelait tant son passé ?

                    La personne qui pourrait lui parler sur ce point était bien évidemment Sandra. Pharaun se hérissa à l'idée d'aller la voir, tant elle le mettait mal à l'aise, mais s'y résolu néanmoins. Il était temps d'affronter enfin ces zones d'ombres, pour peut-être y voir plus clair.

                    Il traversa tout le bâtiment pour se rendre à la chambre de la vieille, traînant le pas malgré lui. Il avait peur de ce qu'elle pourrait lui dire. Il avait peur que cela ouvre un abîme dans ses souvenirs, qui le plongerait directement dans son passé le plus sombre. Mais il arriva bien trop vite devant la porte, de laquelle sorti Mary, l'air complètement épuisée.


                    « Vous vouliez voir Sandra ? Je regrette, mais ça ne va pas être possible. Elle n'est pas dans de bonnes dispositions. »

                    Pendant un instant, Pharaun ressentit un soulagement à l'idée de repousser cette conversation. Mais quelque chose en lui le convainquit que c'était maintenant qu'il devait entrer. Que l'affrontement devait avoir lieu à cet instant. Que s'il patientait ne serait-ce qu'une nuit de plus, une autre tentative de meurtre surviendrait. Il était temps d'en finir. La peur au ventre, il continua donc d'avancer.

                    « Laissez-moi passer »

                    Quelque chose en lui était changé. Une froideur dans la voix. Si bien que Mary s'écarta, sans réfléchir, comme s'il n'y avait pas d'autre solution. Elle le regarda, sans réaction, ouvrir la porte et se glisser à l'intérieur des ténèbres.

                    La chambre était suffocante. Elle puait la mort et la maladie. Elle avait un goût d'enfer. Les volets clos derrières les fenêtres closes ne laissaient passer aucune luminosité, et seule la flamme virevoltante de quatre bougies sur une table au milieu de la pièce permettait de distinguer le visage émacié de Sandra, assise sur une chaise juste derrière.


                    « Est-ce toi ? Viens-tu enfin me chercher ? »

                    « C'est moi, madame. C'est Pharaun. »

                    Elle sembla de pas entendre et lui fit signe de s'approcher. Puis elle le dévisagea longuement, pendant quelques secondes qui parurent être une éternité au chasseur de prime.

                    « Non. Tu n'as pas l'odeur de cette sinistre maison. Tu n'es pas le Démon. Tu es possédé, mais tu n'es qu'un diable de pacotille. Tu veux pervertir ce lieu toi aussi, mais tu n'es pas assez fort. »

                    Pharaun soupira longuement, tentant de réprimer la petite voix dans sa tête qui lui hurlait « DÉMON ! DÉMON ! »

                    « Madame... De quel démon parlez-vous ? »

                    La vieille sembla soudain hésiter. Son expression devint plus lucide et pendant un instant, Pharaun crut bien qu'elle allait lui raconter une histoire qu'il pourrait mettre en lien avec toute cette affaire. Elle commença même à ouvrir la bouche avant qu'une larme ne coule jusqu'à ses lèvres. Puis elle sembla se tasser sur sa chaise et se mit à sangloter bruyamment.

                    « Emporte-moi ! Tire-moi en enfer une bonne fois pour toute ! N'ai-je pas assez souffert ? Tu m'as volé ma fille et deux petites filles. Par pitié, prend mon âme plutôt que la vie de Cynthia ! Épargne-la... »

                    Le chasseur de prime fut désemparé par la tournure que prenait la situation. Tout d'un coup, il eut pitié de la vieille femme. Il l'avait toujours prit pour folle, et elle l'était assurément, mais jamais il n'avait imaginé qu'elle pouvait souffrir à ce point. C'était pourtant logique, si l'on imaginait son passé. Maladroitement, Pharaun tenta de poser sa main sur le bras de Sandra pour tenter de l'apaiser.

                    Mais avant qu'il y ai contact, son comportement changea du tout au tout.

                    Elle ne le laissa pas le toucher, mais lui agrippa le bras à la place, d'une manière incroyablement vive compte tenu de son âge. Elle lui enfonça profondément ses ongles dans la peau jusqu'à faire couler cinq filets de sang qui commencèrent à s'égoutter sur la table. Pharaun tenta de se dégager mais la vieille maintint sa prise en se levant de sa chaise et en suivant le mouvement. Elle agrippa une bougie au passage qu'elle brandit au visage du chasseur de prime.


                    « Arrière, être infâme. Tu ne me pervertiras pas comme tu as perverti les tiens. Je peux sentir le moisi de ton cœur jusqu'au plus profond de mes narines. Ne t'avise pas de toucher à un cheveu de ma famille ! »

                    La bougie se rapprochait de plus en plus du visage de Pharaun, complètement tétanisé.

                    « Tu n'as pas plus ta place en ce monde que le plus abject des rats. Tu finiras en décrépitude dans les abysses les plus sombres, tandis que des milliers de créatures aveugles se repaîtront de ta chair pourrie. Les miettes de ton esprit malin seront alors entraînées dans le néant, où la souffrance que tu mérites te torturera à jamais ! »

                    « LA FERME ! »

                    Parvenant enfin à briser sa paralysie, le chasseur de prime repoussa la vieille sans ménagement avant que la bougie n'atteigne son œil. Sandra lâcha prise et partit en arrière avant de chuter lourdement sur le sol dans un cri de surprise, puis de douleur.

                    Pharaun suffoquait. De l'air, il lui fallait de l'air. Il regarda autour de lui, paniqué. Les ombres des poupées qui le regardaient semblaient se rapprocher de plus en plus. L'ambiance lourde et chaude qui régnait dans la chambre menaçait de lui faire perdre la tête. Dans un geste de désespoir, il bondit vers la fenêtre et l'ouvrit dans le but de respirer l'air sain de l'extérieur.


                    « NOOOOOON ! N'ouvre pas les volets ! Le Démon va entrer ! »

                    Mais Pharaun n'écoutait plus et débloqua les battant en bois et les poussa. Une atroce luminosité envahit la pièce et, avant que le chasseur de prime ne soit éblouit, il distingua une ombre qui l'observait dans l'arbre juste en face de la chambre. Une ombre qui ouvrit ses ailes en grand et se jeta sur lui. Puis tout devint blanc tandis qu'il battait des bras en tombant en arrière. Il entendit le bruissement des plumes au dessus de lui et se prépara à se faire arracher les yeux dans la seconde par un bec acéré.

                    Mais rien ne se passa d'autre qu'un long piaillement qui résonna de l'autre côté de la pièce. Puis la voix de Sandra hystérique résonna.


                    « Pas ma poupée ! Laisse-moi ma poupée ! »

                    La vue revenait à Pharaun, et il put alors assister à une scène surréaliste. La pie était en train d'attaquer une poupée horrible aux yeux blanc, toute boursouflée. Comme si des centaines d'insectes tentaient d'en sortir. Sandra tentait tant bien que mal de se relever pour se jeter sur l'oiseau.

                    Mais ce dernier fut plus rapide et parvint à arracher à la poupée un de ses yeux. Puis elle s'envola à nouveau et s'enfuit par la fenêtre. La vieille qui avait enfin réussit à se mettre debout se jeta à sa poursuite et cria à l'animal de revenir. Quant à Pharaun, l'absurde de la situation lui avait fait oublier son malaise. Si bien qu'il profita du fait que Sandra fixait le jardin pour s'approcher de la poupée délaissée au sol, tombée de l'étagère suite à son combat contre la pie.

                    Il la souleva pour mieux pouvoir l'observer. Il la palpa pour comprendre à quoi correspondait toutes ces boursouflures. Elles étaient dures, comme si des billes étaient cachées sous le coton. Puis il observa l’œil rescapé.

                    Un œil rond et blanc, enfoncé dans l'orbite. Trop brillant. Comme une perle.

                    Une perle d'un collier volé.
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