Webley
Quelque part dans l'Ouest sauvage, un vieil homme vivait tranquillement dans une petite ville dont il était le maire, le juge et le barman. Il semblait qu'il avait toujours été aussi vieux. De mémoire d'homme, il avait toujours porté sa barbe blanche et son ventre rebondi. Les photos de sa jeunesse avaient disparues avec les ans et on disait de lui qu'il avait découvert le secret pour vivre éternellement. Lui répondait que vivre éternellement aussi vieux, ça n'était pas un cadeau.
Ce jour-là, il y avait une séance au tribunal. Malgré le fait qu'il n'y ait pas de boisson pendant le jugement, la salle était comble. Aussi parce qu'une loi condamnait ceux qui ne venaient pas à la séance à une amende salée.
- Le condamné du jour...
- Euh. Vous voulez dire "accusé", sans doute.
- Silence dans la salle ou je fais pendre tout le monde ! Bref, voici les faits. Hier soir, vous êtes arrivés dans la ville et vous avez pris une chambre à l'hôtel. Vous êtes ensuite descendu au saloon qui se trouve en face et avez commandé un whisky. Par la suite, selon plusieurs témoins, vous avez pris part à une rixe amicale qui opposaient trois très bons clients et vous avez cassé le nez de l'un d'eux. Ensuite, fait plus grave, vous avez cassé le grand miroir du saloon et vous avez envoyé une bouteille pleine sur le tenancier du bar qui s'avère être aussi le maire de la ville. Avez-vous quelque chose à dire pour votre défense ?
- Mais... C'est quoi cette mascarade ? C'est une parodie de procès, ce truc.
- Monsieur, vous insultez la cour qui vous condamne à lui verser sur le champ une compensation financière de... Combien avez-vous en poche ?
- Euh... Il me reste vingt-et-un mille berries et des poussières, mais...
- Compensation financière de vingt-et-un mille berries et des poussières ! La séance reprendra demain matin. À chaque jour suffit sa peine. Le bar est ouvert, messieurs ! Rangez les chaises et évitez de foutre le boxon. Shérif, raccompagnez le condamné à sa cellule. Je passerai après le service pour lui causer. Et venez prendre une bière quand vous aurez le temps, c'est la maison qui régale !
Le juge se leva de sa chaise et alla servir les premiers clients.
Vers minuit, alors qu'il avait mis les derniers alcooliques dehors, une ombre bedonnante se dirigea vers la prison. Il entra par la porte de derrière.
- Alors, Bill, comment va le pensionnaire ?
- Pas mal, Judge. Il gueulait un peu au début mais j'avais mes bouchons et il a pas insisté bien longtemps. J'lui ai servi la soupe il y a trois heures et il dort maintenant.
- Et ben on va le réveiller. Holà, de la cellule ! Debout, c'est l'maton !
- Gnuh ? Ah ! Monsieur Bean...
- Ce sera Judge pour toi, fiston, si tu veux pas finir à la balançoire.
- Euh... Monsieur Judge. J'aimerais bien qu'on m'explique cette situation aberrante. Je ne suis coupable de rien, je buvais tranquillement mon whisky quand ce type a cassé votre miroir. Et puis, il me semble que le deuxième vous est arrivé par derrière pour vous assommer. D'ailleurs, je crois que vous étiez le troisième, non ?
- Ah ouais, tu crois ? Tu t'permets de croire sans qu'on t'autorise ? Monsieur a fait des études, sans doute ? Môssieur croit qu'il peut penser tout seul, comme un grand ? Bah mon p'tit gars, si tu l'as pas encore compris, tu es dans une mouise terrible. Demain, on reprend le jugement et j'te condamne à la corde...
- Quoi ?! Mais vous n'avez pas le droit !
- Bien sûr que si. Le droit, ici, c'est moi. Alors, puisque tu sais sans doute compter, tu as compris que ta situation peut difficilement être pire ? Tu as peut pensé (ahah, j'me marre) à une solution ?
- Mais vous m'avez pris tout mon argent tout à l'heure... Je ne possède plus rien...
- Ah oui ? Et bien, c'est ce que nous allons voir, gamin. Shérif, apporte-moi ses affaires personnelles. Merci bien. Bon. Un peu de tabac à mâcher. Une montre en argent. Une gourde. Un chapeau à la con. Une croix en or. Un colt Webley & Scott Mk II. Et bien, ça n'est pas rien, tout ça. En échange de votre libération, je pourrais saisir cette montre...
- Monsieur Judge, non ! Cette montre est dans ma famille depuis des générations. Je préfère encore mourir que de la céder !
- Tu te rends compte que c'est ce qui va peut-être arriver ? Bon, ceci dit, on est pas des bêtes. La croix, je la laisse. J'vais pas me mettre l'Seigneur sur le dos, tout d'même. Bon, alors...
- Voilà ce que je propose, Monsieur Judge. Je vous cède le revolver - c'est une merveille de mécanique qui vous ira à merveille - et je me propose à votre service pour disons... deux mois. Qu'est-ce que vous en dites ?
- J'en dis que ce sera six mois, pas moins. Ce miroir m'avait coûté la peau du cou... Bon, shérif, faites-le sortir. Monsieur va dormir dans un vrai lit, ce soir. Enfin, celui de la chambre du pianiste, ce qui ressemble déjà plus à un lit que cette paillasse-là. Pauvre Joe. Moche de mourir la tête coincée dans son piano... Moche, de mourir comme ça...
- Si je comprends bien, il vous manque un musicien. Il se trouve que je me débrouille plutôt bien, un instrument en main.
- Et ben voilà, fallait commencer par là ! Vous serez pianiste et vous toucherez même une prime de risque, si vous touchez un jour votre salaire. Votre nom ?
- Lancastle. John Lancastle.
- Parfait, monsieur Lancastle, suivez-moi. Bonne nuit, shérif.
Et dans la nuit, Judge et son nouveau pianiste s'en allèrent. Une fois de plus, la justice avait été rendue !
Ce jour-là, il y avait une séance au tribunal. Malgré le fait qu'il n'y ait pas de boisson pendant le jugement, la salle était comble. Aussi parce qu'une loi condamnait ceux qui ne venaient pas à la séance à une amende salée.
- Le condamné du jour...
- Euh. Vous voulez dire "accusé", sans doute.
- Silence dans la salle ou je fais pendre tout le monde ! Bref, voici les faits. Hier soir, vous êtes arrivés dans la ville et vous avez pris une chambre à l'hôtel. Vous êtes ensuite descendu au saloon qui se trouve en face et avez commandé un whisky. Par la suite, selon plusieurs témoins, vous avez pris part à une rixe amicale qui opposaient trois très bons clients et vous avez cassé le nez de l'un d'eux. Ensuite, fait plus grave, vous avez cassé le grand miroir du saloon et vous avez envoyé une bouteille pleine sur le tenancier du bar qui s'avère être aussi le maire de la ville. Avez-vous quelque chose à dire pour votre défense ?
- Mais... C'est quoi cette mascarade ? C'est une parodie de procès, ce truc.
- Monsieur, vous insultez la cour qui vous condamne à lui verser sur le champ une compensation financière de... Combien avez-vous en poche ?
- Euh... Il me reste vingt-et-un mille berries et des poussières, mais...
- Compensation financière de vingt-et-un mille berries et des poussières ! La séance reprendra demain matin. À chaque jour suffit sa peine. Le bar est ouvert, messieurs ! Rangez les chaises et évitez de foutre le boxon. Shérif, raccompagnez le condamné à sa cellule. Je passerai après le service pour lui causer. Et venez prendre une bière quand vous aurez le temps, c'est la maison qui régale !
Le juge se leva de sa chaise et alla servir les premiers clients.
Vers minuit, alors qu'il avait mis les derniers alcooliques dehors, une ombre bedonnante se dirigea vers la prison. Il entra par la porte de derrière.
- Alors, Bill, comment va le pensionnaire ?
- Pas mal, Judge. Il gueulait un peu au début mais j'avais mes bouchons et il a pas insisté bien longtemps. J'lui ai servi la soupe il y a trois heures et il dort maintenant.
- Et ben on va le réveiller. Holà, de la cellule ! Debout, c'est l'maton !
- Gnuh ? Ah ! Monsieur Bean...
- Ce sera Judge pour toi, fiston, si tu veux pas finir à la balançoire.
- Euh... Monsieur Judge. J'aimerais bien qu'on m'explique cette situation aberrante. Je ne suis coupable de rien, je buvais tranquillement mon whisky quand ce type a cassé votre miroir. Et puis, il me semble que le deuxième vous est arrivé par derrière pour vous assommer. D'ailleurs, je crois que vous étiez le troisième, non ?
- Ah ouais, tu crois ? Tu t'permets de croire sans qu'on t'autorise ? Monsieur a fait des études, sans doute ? Môssieur croit qu'il peut penser tout seul, comme un grand ? Bah mon p'tit gars, si tu l'as pas encore compris, tu es dans une mouise terrible. Demain, on reprend le jugement et j'te condamne à la corde...
- Quoi ?! Mais vous n'avez pas le droit !
- Bien sûr que si. Le droit, ici, c'est moi. Alors, puisque tu sais sans doute compter, tu as compris que ta situation peut difficilement être pire ? Tu as peut pensé (ahah, j'me marre) à une solution ?
- Mais vous m'avez pris tout mon argent tout à l'heure... Je ne possède plus rien...
- Ah oui ? Et bien, c'est ce que nous allons voir, gamin. Shérif, apporte-moi ses affaires personnelles. Merci bien. Bon. Un peu de tabac à mâcher. Une montre en argent. Une gourde. Un chapeau à la con. Une croix en or. Un colt Webley & Scott Mk II. Et bien, ça n'est pas rien, tout ça. En échange de votre libération, je pourrais saisir cette montre...
- Monsieur Judge, non ! Cette montre est dans ma famille depuis des générations. Je préfère encore mourir que de la céder !
- Tu te rends compte que c'est ce qui va peut-être arriver ? Bon, ceci dit, on est pas des bêtes. La croix, je la laisse. J'vais pas me mettre l'Seigneur sur le dos, tout d'même. Bon, alors...
- Voilà ce que je propose, Monsieur Judge. Je vous cède le revolver - c'est une merveille de mécanique qui vous ira à merveille - et je me propose à votre service pour disons... deux mois. Qu'est-ce que vous en dites ?
- J'en dis que ce sera six mois, pas moins. Ce miroir m'avait coûté la peau du cou... Bon, shérif, faites-le sortir. Monsieur va dormir dans un vrai lit, ce soir. Enfin, celui de la chambre du pianiste, ce qui ressemble déjà plus à un lit que cette paillasse-là. Pauvre Joe. Moche de mourir la tête coincée dans son piano... Moche, de mourir comme ça...
- Si je comprends bien, il vous manque un musicien. Il se trouve que je me débrouille plutôt bien, un instrument en main.
- Et ben voilà, fallait commencer par là ! Vous serez pianiste et vous toucherez même une prime de risque, si vous touchez un jour votre salaire. Votre nom ?
- Lancastle. John Lancastle.
- Parfait, monsieur Lancastle, suivez-moi. Bonne nuit, shérif.
Et dans la nuit, Judge et son nouveau pianiste s'en allèrent. Une fois de plus, la justice avait été rendue !
Dernière édition par The Judge le Dim 15 Jan 2012 - 12:59, édité 4 fois