Posté Lun 28 Juin 2021 - 23:47 par Serena Porteflamme
-Zagahahahahaha ! IL FAIT UN DE CES SOLEIL AUJOURD’HUI ! ON POURRAIT CUIRE UN ŒUF SUR MON CRANE !
-Je te jure Bermudes que ça m’avait presque manqué.
-Oh, le désert ? Nooooon… il n’y en a pas sur la route des fous, là, sur aucune île où tu as foutu les pieds ?
-Je parlais pas de ça.
Je parlais de ton rire, de tes randonnées surréalistes toute la journée dans le désert, à pied mais en traînant derrière nous un chameau à moitié crevé par la cadence et qui a du mal à nous suivre, et qui galère d’autant plus qu’on l’a chargé comme un galion, histoire d’avoir ce qu’il faut pour entretenir ton énorme bide, pour se poser un moment comme ont l’a fait au bord d’une petite oasis avec parasol, glacière, meuble complet avec les verres dedans, la totale. Tu es cinglé Bermudes, un grand cinglé comme ton père, mais en sympa. Et putain, ce que tu m’avais manqué.
-Les meilleures choses ont une fin ! On rentre au bercail Serena ! C’est que je suis de garde, moi ! Et puis je t’ai pas dit, j’ai un nouveau petit compagnon!
-Ah ouais ?
-Un chat ! Il est merveilleux ! Je l’ai appelé Poupoule !Tu ne devineras pas, il fait le salut au drapeau en miaulant, le réveil des troupes en feulant, et le couvre feu…
… En pétant. D’accord Bermudes. C’est de ma faute. J’aurais pas du demander.
Toujours est-il qu’on élargit encore le pas, on court presque sur le sable. J’ai perdu un peu l’ancrage, parfois, je glisse un peu, mais pas assez pour ne pas participer activement au remorquage du chameau, qui a la moitié des pattes qui touche même plus terre. Ses babines moussent littéralement sous ses gros yeux jaunes injectés de sang. Je dois être en train de devenir une connasse insouciante et heureuse de vivre, parce que je trouve ça marrant. Vraiment marrant. Tiens, t’avais qu’à connaître la guerre, les latrines à l’éponge et les entraînements de Bermudes, Ketsuno, Jenkins, la bête. Ce serait toi qui serait en train de galoper comme un con en nous traînant derrière toi, et en nous regardant cracher du sable par tous les orifices.
-Bercail en vue !
La vue perçante de Bermudes le trompe jamais. On la voit de loin, Hinu Town, avec son port qui attire les derniers bateaux du jours, qui tracent sur l’eau des traits d’écume qui font penser aux mailles d’une énorme toile d’araignée, ses maisons en terre cuite qui recuit encore sous ce qui reste de soleil, et ses palmiers qu’on devine prêts à se coucher tellement qu’ils débordent de dates. J’ai toujours aimé ce patelin. Il fait sec, on y mange bien. Et il y a Bermudes. C’est con qu’Andy ait pas pu venir aussi en permission. Toujours blessé, toujours au pieu. Mais hors de danger d’après le doc. Juste salement défiguré. Il a dit que c’était mieux comme ça, qu’on avait encore moins de chances de capter qui il était vraiment. Et qu’on ferait peut-être moins de difficultés pour le faire changer d’unité, et le placer sous mes ordres. J’ai le sourire en pensant à tout ça. Tellement que quand on arrive dans la première ruelle avec Bermudes et le chameau, qui galère à retrouver de sa superbe, on est encore tellement dans l’euphorie qu’on se bouscule ce qui ressemble à une caravane complète. Avec une nana qui a l’air d’avoir subi pour la première fois de sa vie un entraînement spécial Bermudes, façon soixante bornes dans le désert avec option cailloux dans le sac, flotte à l’arrivée si tu es sage, et météo choisie sur mesure pour son nombre de degrés au-dessus de trente.
J’ai à peine le temps de noter ça, parce qu’avec le chameau qui est en roue libre, on fait un massacre. Il continue tout droit, et il y a du turban qui vole, des robes qui se soulèvent, des culs qui tombent sur les pavés, et des jurons qui partent de tous les côtés. Bermudes se marre. Et je dois dire que moi aussi, un peu. Merde, c’est les vacances. Aucune raison pour que ça tourne mal.