Après la promotion d’Eïna en matelot première classe suite à la bataille d’Orange, elle a eu droit à sa première affectation sérieuse. Cette fois, elle n’a pas pour mission de faire des patrouilles en ville ou de regarder ce que les vrais marines font en essayant de ne pas trop les faire chier. Cette fois, sa mission est simple : Garder l'ordre dans le camp de réfugiés. Toute fois, on lui a tout de suite expliqué que cette mission est impossible. La guerre civile date déjà d'il y a plusieurs années, mais le pays ne s’est pas encore remis des dégâts qu’elle a causés. Le camp qui devait être temporaire est finalement devenu le logement permanent pour les réfugiés, enfin, de ceux qui ont survécu à la famine.
Pour l'instant, Eïna est toujours blessée. Le coup de poings que Barbe Rousse lui a donné au visage a laissé une grosse bosse sur sa joue qui est pour l'instant couverte. Et même si ce n'est pas visible, les brûlures et les quelques autres petites ecchymoses qu'Eïna a gardée comme souvenir de la bataille continuent de la faire souffrir.
Avant même que le soleil ne se lève, Eïna est déjà mobilisée pour surveiller le camp. Partout où elle passe, elle voit des enfants mal nourris et des hommes suspects qui guettent son passage. Les effectifs de la marine ont été renforcés, mais à quoi bon ? Le problème, ce n'est pas qu'il n'y a pas assez de personnes pour surveiller les habitants. Le problème, c'est que vu qu'il n’y a rien à s'mettre sous la dent, bah forcément les plus forts prennent ce qu'ils peuvent prendre. Du coup Eïna est obligée de faire ce qu'elle peut pour sauver les meubles. Elle patrouille seul, elle n'a pas vraiment besoin d'aide ici, et de temps à autre elle charge entre des bâtiments pour essayer de chopper des criminels en flagrants délits.
Cette fois-ci, elle entend quelques cris pas loin, ainsi que des bruits qui la font penser à des coups de poings. Ni une ni deux, elle saute par-dessus des débris et court le long d'une ruelle pour arriver nez à nez avec trois hommes qui sont en train d'en agresser un quatrième.
"Hé ! Arrêtez de le frapper ! "
Les trois hommes sursautent et s'arrêtent soudainement, ils se retournent vers Eïna et se préparent à fuir... Jusqu’à ce qu'ils remarquent finalement à qui ils ont affaire. Ils éclatent de rire tout les trois. Celui qui a l'air d'être leur leader s'approcher vers elle en sortant un couteau.
"Putain, tu nous as fait peur sale gosse. Mais j'reconnais que c'était marrant. Je te laisse partir si tu nous dis ou tu as volé cet uniforme."Eïna observe les quatre individus en face d'elle. Enfaite, ils lui font plus pitié qu'autre chose. Ils sont tous habillés de haillons et même si les trois hommes sont mieux nourrit, ils ont tous l'air de ne pas avoir mangé à leur faim depuis bien longtemps. La gamine a pas peur d'eux.
"Je suis la matelot deuxiè... Première classe Nesterii. Je n’ai pas envie de vous frapper alors s'il vous plait, excusez-vous auprès du monsieur et rendez-lui sa nourriture, je dirais que j'ai rien vu pour cette fois." Ces hommes sont clairement des criminels, mais si elle devait tabasser des gens pour la moindre effraction, faudrait qu'elle assomme les trois-quart du ghetto. "Aussi, vous allez me donner vos armes, vous êtes déjà trop dangereux comme ça."Les trois hommes ont l'air perturbés de voir une gamine haute comme trois pommes leur parler comme ça. Ils ne rigolent plus, ils sont juste incrédules. Le leader est le premier à réagir.
"Alors toi... Tu l'auras cherché !"Il charge vers Eïna, il veut lui donner un coup de poing. Au moins il n'a pas essayé de l'attaquer avec son couteau, donc elle n'aura pas besoin de le sanctionner plus nécessaire. Malgré sa petite taille, la gamine arrête le coup de poing sans le moindre problème, la malnutrition ça n'aide pas à avoir de la force. Ce qui est délicat maintenant c'est de désarmer le monsieur sans le mettre hors combat. Pourquoi est-ce que la marine n'enseigne pas ça ? C'est plutôt important comme technique. Du coup, elle donne juste un gros coup de pied sur les jambes du chef pour le faire tomber et pendant qu'il est au sol, elle lui arrache le couteau des mains. Elle essaye de lui attraper les mains, mais par un gros coup de chance le chef lui donne un coup de coude en plein visage, en temps normal, elle n'aurait même pas sourciller, mais le coup est tombé sur sa joue, là où Eïna est déjà blessée. Elle contient tant bien que mal son cri de douleur, elle sent que sa blessure s'est réouverte.
Dès qu'Eïna recule, le chef se relève et prend la fuite en panique, il a compris qu'il a eu affaire à la mauvaise personne. En voyant leur leader partir, les deux autres ne tardent pas à décamper aussi. Ne reste plus dans la ruelle qu'Eïna et l'autre monsieur qui c'est fait attaquer. Eïna s'approche lentement de lui et lui tends la main.
"Bon, je n’aurais pas réussi à leur arracher des excuses cette fois. Désolé."
Eïna se rends compte que le monsieur n'en est pas vraiment un. C'est plutôt un adolescent d'à peu près 16 ans, presque son âge. Mais la vie ici a tendance à faire vieillir les réfugiés. L'adolescent la regarde avec un air méfiant, mais il finit par prendre sa main.
"Arg... Vous êtes... Avec la marine ?"Eïna sourit et l'aide à se relever, il a du mal à tenir seul alors elle le supporte en se mettant sous son épaule.
"Bah oui ! Ça ne se voit pas ? C'est quoi votre nom ?"
Le réfugier reste silencieux, ça fait longtemps qu'il n'avait pas vu quelqu'un de bonne humeur.
"Euh... Non ça ne se voit pas." Il a l'air inquiet quand il remarque qu'Eïna est en train de l'inciter à la suivre. "Vous... Vous m'emmenez ou?! J'ai rien fait j'vous jure !"Visiblement, il n'a pas envie de lui donner son nom, c'est pas grave. Elle sourit simplement pour essayer de le rassurer.
"Enchanté monsieur sans nom, moi c'est Eïna! Pas de panique. j'vous emmène à la clinique."
Le réfugier ne dira presque rien pendant tout le trajet, c’pas grave. Eïna est tout à fait capable de faire la conversation pour deux. Sur la route, ils croisent plusieurs autres marines. Elle n’est pas la seule à avoir été mobilisée aussi, mais ils n’arrivent pas du tout à stabiliser la situation dans le coin, les marines qui sont là depuis longtemps sont épuisés et ont du mal à finir leurs patrouilles. Eïna fini par rentrer dans la clinique de Fushia avec le réfugier.
"B'jour! J'ai un blessé ici !"
À l'intérieur de la clinique...C'est un sacré bordel. Visiblement, même avec les agrandissements récents, ils ont du mal à suivre le rythme des malades. Eïna voit plusieurs lits improvisés, des hommes qui ont l'air plus proche de la mort que du monde des vivants, et des médecins qui...Ah non enfaite, c’est probablement pas des médecins, juste des personnes débrouillardes recrutées pour aider. Même avec son uniforme de marine qui lui donne un peu plus de crédibilité ici, Eïna a dû attendre un moment avant qu'un médecin finisse par arriver.
"Oh, on m'a dit qu'il y avait un blessé, mais je vois qu'il y en a deux. Je vais commencer par vous jeune homme."Le docteur guide le réfugier jusqu'à une salle à part, pendant qu'Eïna place sa main sur sa joue, se rendant compte soudainement qu'elle est couverte de sang. Sa blessure s'est remise à saigner.
"Ah euh...Je peux m'occuper de ça docteur... ?"
Tout en examinant, le docteur répondra :
"Docteur Armando. Et non, matelot. Tant que vous êtes ici, je vais au moins examiner vos blessures." Dès que le jeune homme comprend qu'il est entre de bonnes mains, il s'assoupit sur le lit. Le docteur Armando siffle en voyant les blessures. "Qu'est-ce qui est arrivé à ce pauvre jeune homme ?"Eïna fronce les sourcils pendant un instant.
"C'est de vieilles blessures... Il avait de la nourriture et des hommes étaient prêts à le frapper pour l'avoir."
Le docteur hoche la tête, c'était plutôt normal. Il invite Eïna à sortir pendant qu'il s'occupe du blessé. La gamine attend donc dans la salle d'attente pendant une dizaine de minutes, durant lesquels elle inspecte le fonctionnement de la clinique. Visiblement, tout tourne autour d'un docteur moustachu qui a l'air dans une sale humeur, les autres ne sont pas aussi expérimentés et ont besoin de son avis pour tout. Elle n'a pas grande expérience en médecine, mais elle voit que la plupart des malades sont là à cause de symptômes de malnutrition, ou d'autres maladies causées par les conditions de vie déplorable. Au moins, avec le nombre de marines stationné dans le coin, 'y a pas trop de blessés. Elle va devoir aider un peu, tant qu'elle est ici. Mais avant qu'elle n'ai le temps de le faire, la porte s'ouvre et le docteur Armando l'appelle. Le jeune homme la remercie chaleureusement avant d'aller dans un autre lit, il a maintenant plusieurs nouveaux bandages et pansements sur le visage. Une vraie momie !
Quand elle entre dans la pièce, Eïna s'assoit tout de suite sur le lit, elle sourit.
"Je vous assure que c'est pas très grave m'sieur. Chui une marine moi, y a des gens qui sont plus prioritaire."
Le docteur Armando soupire, mais il ébouriffe les cheveux de la gamine. Il enlève petit à petit les bandages de la gamine, et il se rend compte que le gros coup au visage n'est que la partit visible de l'iceberg. Elle a aussi tout un assortiment de blessures à divers endroits de son torse. Brûlures, bleus, ecchymoses, tout y passe.
"Justement, si tu es une marine alors tu es prioritaire." Plus il examine les blessures de la gamine, plus il grimace. Et alors qu'il voit les blessures et de vieilles cicatrices, son expression s'assombrit. "Comment tu t'es fait ça ? Ce n'est pas ce qu'une marine aurait normalement. Et je ne sais pas qui t'a soigné, mais il a fait un travail extrêmement mauvais. Tu as besoin d'au moins 5 points de sutures au visage pour que la blessure se referme bien, elle a déjà commencée à mal guérir."Eïna regarde juste le docteur avec un air incrédule, elle dira simplement.
"J'étais euh... dans une bataille. Orange, vous en avez entendu parler ?" Le docteur grimace avant de hocher la tête. "Et du coup, c'est les médecins de la marine qui m'ont soignés, mais c'était en pleine bataille donc ils n’ont pas eu le temps..."Ce qu'elle ne précise pas, c'est que vu qu'elle était pressée de revenir au combat, elle n'a pas laissée aux médecins le temps de s'occuper convenablement d'elle.
"Tss... Décidément. Les médecins de la marine sont pas mauvais, mais ils ont tout le temps la pression et on leur laisse jamais le temps de faire leur travaille. J'en sait quelque chose, c'est à cause de ça que j'ai quitté la marine."Pendant qu'ils s'échangeaient des anecdotes sur leur début dans la marine, le docteur Armando soigne donc pour de vrai Eïna. Le docteur comprend rapidement que s’il s'arrête de parler, la gamine va commencer à bouger, qu'il ait l'aiguille pointée sur son visage ou pas. Mais apparemment, les anecdotes de service ça a l'air de l'occuper. Mais il a quand même été obligé de faire vite, sinon elle aurait fini par danser sur le lit. Avant de partir, Eïna demandera :
"Merci Docteur Armando! Je peux aider dans la clinique ? J’suis pas médecin, mais ma maman l'était, et elle m'a montré comment aider !"
Souvent, il y a beaucoup de choses qu'on peut faire pour aider un médecin sans avoir de connaissance médicale. Rien que parler aux patients et les rassurer ça aide beaucoup. Armando fronce les sourcils et il finit par dire.
"Fait attention, le docteur Eustachio est un vieux grincheux qui passe son temps à râler. Parfois, il est pire que tous les sergents que j'ai connu dans la marine."Eïna tremble de terreur face à cette remarque, déjà qu'elle a du mal avec les sergents...
"Je ferrais attention... Encore merci !"
Et avant qu'Armando n'ait le temps de finir, Eïna avait déjà disparue. La gamine se dirige vers une grande pièce qui sert de salle commune où sont soignés une trentaine de malade sous l'œil et les hurlements du docteur en chef. Probablement le docteur Eustachio. Techniquement, les marines ont pas besoin d'autorisation pour aider, donc elle rentre juste sans demander l'autorisation et commence à discuter avec les patients pendant qu'ils se font soigner. Il faudra une quinzaine de minute avant que le docteur Eustachio remarque sa présence.
"Hein?! Oh, mais bon dieu...Je n’ai pas le temps de m'occuper des rejetons de la marine ! Vous ne voyez pas qu'on est occupés ici ! Les rues sont tellement dangereuses que même moi je me fais attaquer parfois. Vous n’avez pas mieux affaire que de me marcher dans les pattes ?"Ah... Ah ouais. Eïna s'attendait à se faire crier dessus, mais pas à se prendre une pluie de critique pareille. Face à son air de chien battu, et aussi en voyant qu'elle est blessée, le docteur fini par se calmer un petit peu.
"Bon... Qu’est-ce que tu veux soldat ?"L'expression d'Eïna change complètement. Elle regarde le docteur avec un air radieux.
"J'm'appelle Eïna m'sieur! Le docteur Armando m'a soigné donc je voulais aider pour vous remercier ! Je ne suis pas médecin, mais ma maman était chirurgienne ! Je sais m'occuper des malades, nettoyer le matériel et je n’ai pas peur du sang ou des maladies !"
Le docteur pose un doigt contre sa tempe, puis il gratte sa moustache en regardant cette gamine. Il se demande quel démon il a bien pu offenser pour devoir subir une tempête comme ça.
"Il te reste plus qu'à apprendre à la fermer alors. Qu'on soit claire, c'est moi qui commande ici. Si tu me gênes, je t'expulse à grand coup de pied. Que tu sois marine ou pas."Eïna se mets au garde à vous.
"Chez oui chef !"
Pendant quelques heures, Eïna viendra donc en aide à la clinique de Fushia. Le travail ne manque pas, et d'ailleurs ça lui donne une nouvelle appréciation pour la situation dans le camp de réfugier : C'est la merde. La malnutrition, c’est une chose, mais avec la saleté les médecins redécouvrent des maladies qui aurait dû disparaitre depuis bien longtemps. Il y a des patients qu'Eïna essaye d'encourager, mais ils ne lui répondent même pas. Ils regardent juste dans le vide en silence, comme si l'esprit a déserté le corps depuis un moment déjà. Il y a d'autres problèmes aussi, à plusieurs reprises, des proches de malades essayent d'entrer en nombre dans la clinique pour une visite. Mais vu qu'il n'y a déjà pas assez de place, Eïna est obligée d'utiliser le peu d'autorité qu'elle a (et quelques coups de pieds bien placés) pour calmer la situation. Elle force des parents à faire la queue pour voir leurs enfants. Ce n'est pas exactement quelque chose qui lui fait plaisir, mais elle est obligée.
Alors que la situation commençait enfin à se calmer, Eïna voit que le docteur Eustachio a l'air d'avoir du mal avec un patient qui est en train de trembler violemment dans son lit en crachant de la bave comme un animal en rage. Ça a l'air d'être grave. Eïna court pour essayer d'aider, avant que le docteur n'ait le temps de l'en dissuader, elle organise les aides-médicaux pour immobiliser le patient pendant que le docteur fait son travail. Elle profite également de l'occasion pour ramener de l'eau et de nouveaux médicaments au docteur pendant qu'il travaille, celui-ci a l'air très concentré dans ses mouvements et il ne fait plus attention à ce qu'il se passe autour depuis un moment. Mais malgré beaucoup d'efforts, ça a été peine perdue, le docteur fini par annoncer sobrement la mort du patient.
Un silence complet s'abat sur l'infirmerie, deux aide-soignants évacuent le cadavre pendant que le docteur sort une gourde de sa poche et va boire assis sur une chaise face au lit. Au début, Eïna avait l'impression que le docteur Eustachio était un homme grincheux qui aime pas son travail, mais là elle voit que derrière le caractère difficile il y a quelqu'un de bien. Alors, elle s'approche du docteur et lui tapote doucement le dos.
"Vous avez fait du bon travail m'sieur."
Après un long moment de silence, Eustachio fini par répondre.
"Foutaises, je n’ai pas réussi à le sauver."Eïna fait non de la tête, lentement.
"Vous n’auriez pas pu le sauver de toute façon, un médecin a des priorités et il consacre ses ressources de manière appropriées, lorsqu'il échoue, il réévalue ses méthodes et passe au prochain patient."
Eustachio regarde Eïna en fronçant les sourcils, la phrase que la gamine a utilisé est familière au docteur, et surtout, c’était trop propre et bien articuler pour une gamine qui parle plus comme une fille des rues que comme une médecin.
"À quoi bon faire tous ces efforts si ça ne sert à rien au fond."La gamine sourit et refait non de la tête, elle continue simplement à réciter bêtement ce que sa maman disait à ce sujet.
"Dans la vie, on fait tout ce qu'on peut. On fait face à des problèmes et on les résout comme on peut. Quand on fait face à des problèmes impossibles, il suffit de les affronter comme on peut en se disant que nos actions faciliteront la tâche à ceux qui viennent après nous." Elle pointe du doigt son uniforme. "Par exemple, nous autre chez la marine on peut rien faire pour le problème qu'est ce camp. Mais pour chaque crime qu'on évite, ça fait un blessé en moins ici et peut être un mort en moins pour la morgue. Il faut prendre du recule parfois m'sieur !"
Le docteur Eustachio boit une dernière gorgée avant de demander à Eïna:
"Ça fait deux fois que tu cites ce livre... C’est quoi déjà le nom ? Application réelle de la chirurgie ? Pourquoi est-ce qu'une gamine comme toi lit un livre aussi complexe ?"Pour la première fois depuis très longtemps, Eïna reste immobile pendant un long, très long moment. Le docteur fini par s'inquiéter et après l'avoir secouée quelques fois, la gamine demandera d'une voix tremblante.
"Un...Li...Livre?"
Eustachio ne comprend pas du tout ce qu'il se passe dans la tête d'Eïna, il continue simplement.
"Tu ne vas pas me faire croire que tu as juste sortit ça par hasard ? ça ressemble bien trop aux phrases que j'ai lu dans ce livre. C'était quoi déjà le nom de l'auteure, c'était un nom un peu pompeux, Ofé...Ophélie...?"Très lentement, Eïna prononce un nom qu'elle n'avait pas prononcé depuis très longtemps.
"...Ophélia Nélèstia..."
Toujours sans comprendre ce qu'il se passe, Eustachio continue.
"Oui, c’est ça ! Le livre en lui-même est un peu barbant, même pour un livre technique. Y a de bons conseils que j'ai appréciés, mais le choix de s'orienter sur l'aspect moral et philosophique de la chirurgie est... étrange. Surtout, certaines idées morales sont radicales, peut être trop optimistes. Tiens, je dois toujours l'avoir quelque part."Eustachio parlait plus à lui-même qu'autre chose à ce stade, de toute façon Eïna observe la situation avec un air choqué. Quand le docteur revient avec un livre, elle l'attrape d'une main hésitante, avant de le tourner vers la première page...Un nom est marqué en bas.
"Médecin chirurgienne,
Ophélia Nélèstia"
Le nom de sa mère. Qu'elle n'a pas revue depuis quatre ans.
Le docteur était en train de parler, mais Eïna ne l'écoute plus depuis longtemps, elle commence à lire les différentes pages, et plus elle avance dans le livre, plus elle reconnait les mots que sa maman lui disait, plus elle se met à pleurer.
"... Tu es là ? Qu'est-ce qui t'arrive gamine ?"Eïna revient vers elle petit à petit, elle regarde le docteur avec les yeux rougis.
"Je...Rien, ça m'a rappelé des souvenirs. Je peux vous emprunter ce livre ?"
Eustachio ne s'attendait pas à ça, ce n'est pas exactement le genre de livres qui déchaine les passions, bien au contraire. En dehors de ceux qui s'intéressent à la chirurgie, personne n'en a entendu parler.
"Et bien en soit, je l'ai déjà lu deux fois. Tu peux le garder, prend ça comme un remerciement pour l'aide qui tu nous as donné aujourd'hui."La gamine regarde le docteur avec un air surpris. Elle lui saute dessus pour lui faire un câlin, elle prendra le livre avec elle avant qu'il n'ait le temps de changer d'avis. Eustachio la couvre allégrement d'insultes en expliquant avec beaucoup de détails à quel point les câlins sont efficaces pour transmettre les maladies. Mais Eïna en a rien à foutre, ce vieux monsieur grincheux avec la moustache moche qui aime aider les gens lui a donné quelque chose de très important pour elle : Un moyen de se rappeler de sa mère. Avant de partir elle aide à nettoyer la clinique, mais elle s'éclipse rapidement.
Il lui faut de toute urgence un endroit calme pour lire. Elle ne trouvera pas ça dans le camp de réfugier, ni dans la base de la marine. Le meilleur endroit qu'elle connait, c’est le village de Fushia, un village tellement calme que la marine ne prend même pas le temps de patrouiller. Elle n'a pas vu le temps passer pendant qu'elle était dans la clinique, mais le soleil est levé depuis bien longtemps déjà maintenant.
Alors qu'elle se dirigeait vers le village, elle entend au loin bruit qu'elle commence à bien connaitre, des bruits de coups de feu. Eïna soupire en regardant le livre de sa maman, elle finit par le mettre dans son sac pour courir en direction du village. Lorsqu'elle arrive, c'est déjà la panique avec des villageois qui court dans sa direction.
"Au secours ! Un géant attaque le village !"La gamine fronce les sourcils, un géant ? Ici ? Elle aurait peut-être pas du sortir de son lit ce matin. Mais bon, de toute la marine qui serait mieux placé qu'elle pour combattre un géant ? Avec un peu de chance, elle va peut-être passer pour une fourmi face à lui.
Quand Eïna arrive au centre du village, son visage s'assombrit immédiatement. La scène de destruction qu'elle voit derrière lui rappelle orange. Et même si au début elle avait l'intention de dire au géant de partir, là elle ne va pas pouvoir le faire. Parce que manifestement, il faut qu'elle lui donne une bonne une leçon. Elle voit qu'il y a également un homme qui ressemble bizarrement à un animal, mais on va déjà commencer par le problème qui fait 20m de haut.
"HÉ ! LE GRAND-MÉCHANT ! ICI LA MARINE. JE TE SIGNALE QUE JE VAIS DEVOIR T'APPRENDRE POURQUOI ON DIT QUE PLUS ON EST GRAND, ET PLUS ON TOMBE DE HAUT !"
La petite marine qui fait face à Atlas ne paye pas du tout de mine, Eïna a plus le physique d'une fille des rues que d'une vraie marine, mais au moins elle porte l'uniforme. Par contre, sa voix est absolument assourdissante, elle résonne dans l'air comme une explosion. Elle avait probablement pas besoin de crier, Atlas l'aurait entendu sans. Mais là, il l'a définitivement bien entendu. Eïna sort ses deux couteux et ce mets en position de combat, c'est pas avec deux pitis couteux qu'elle va éventrer un géant, mais elle a bien l'intention d'exploiter sa vitesse pour ce combat. Les villageois vont finir par ramener les autres marines depuis le camp de réfugier, mais Eïna ne s’attends pas à beaucoup de renforts parce que les marines sont déjà surchargés. Et aussi parce que habituellement, rien ne se passe sur Fushia.