Quand tu tombes au fond du gouffre, que tu plonges fiole la première dans la noirceur et que t’es heureux de t’y noyer, c’est là que tu captes que t’as un problème. Et pas un petit, le genre sans fin qui va te bouffer l’esprit jusqu’à ce que tu fasses une connerie, ou que la précédente te rattrape.
T’as le mec paumé qui sait pas où il va dans la vie, ni comment il pourrait y aller. Il se contente de se laisser porter et qu’importe la merde qui lui tombe sur la tronche, il avance. Déprimé, déphasé, mais avec un soupçon d’espoir. S’il avance, c’est parce qu’il pense qu’à la fin du chemin, il arrivera là où doit être. Un endroit bon pour lui, pour évoluer, s’épanouir, être enfin heureux. Il pourra y rester, dans ce foutu paradis personnel. Il y crèvera, le sourire aux lèvres, aimé par une femme et trois enfants. Moi, j’ai arrêté d’avancer depuis l’année dernière. Y’avait cette lueur qui brillait, faiblarde, vacillante, mais elle était là. Elle éclairait au fond de moi et m’empêchait d’abandonner.
Cette lueur a été soufflée dès l’instant où j’ai refroidi ce mec pour une putain de dose d’opium à la con.
Ouais, je suis le genre de sombre merde qui sort du caniveau crasseux dans lequel la vie l’a balancée, pour braquer un flingue sur ton crâne et le faire sauter parce que tu veux pas me filer ma came.
Je suis ce genre de salopard, celui que je déteste. Je suis devenu ce que je hais le plus, pour de la putain de drogue. Enfoiré. Ça me fout en l’air, ça m’a foutu en l’air et les Bambana ont failli me foutre en l’air. Que je sois obligé de bosser pour eux maintenant, je trouve que je m’en sors trop bien. Ou alors c’est le truc vicieux, reste en vie et passe le restant de ta vie merdique à repenser à ce que t’as fais, à chialer parce que t’es qu’un foutu chien à qui on vient de mettre une laisse pour rembourser une dette. Une dette à vie. Pour une vie prise. Une vie contre une vie, sauf que je peux encore profiter de la mienne, pas lui.
J’en tire rien de satisfaisant pour autant, c’est même tout le contraire. J’ai doublé ma consommation de toutes les merdes qui empoisonnent le corps et l’esprit, à boire comme à fumer. Je dors moins, je comate plus souvent. Je me bats régulièrement, pas besoin de raison à ça, juste ce besoin de trouver mon exutoire. Y’a cette rage qui gronde, qui me ronge, qui me tord, m'étouffe. Frapper, faire mal et surtout me faire du mal, ça fait tout ressortir, mais y’en a tellement que j’en verrai jamais le bout.
S’allumer une clope à l’opium, le dos appuyé contre un mur, regard perdu dans le vide, à pas savoir l’heure qu’il est. Il fait jour, c’est que la nuit est passée et que j’ai pas encore fermé l'œil depuis la veille. Torché, quelques verres au bar, puis gentiment mis dehors à la fermeture. J’ai terminé dans ma piaule, la bouteille aussi est terminée. Prendre un peu l’air, les yeux qui piquent, la tête en vrac, le cœur en sang. Je dois puer la transpiration, des fringues pas lavées depuis deux ou trois jours, je sais même plus. Sale haleine, ventre vide, les dents serrées et la gorge nouée.
Perdu, dans cette ville merdique qui m’aura tout pris. Mon âme, ma vie, ma liberté, et le peu de bon qui restait en moi. Rogné jusqu’à l’os, recraché comme un malpropre, un foutu clébard qui obéit au doigt et à l'œil de son nouveau maître. Déserter la marine pour finir dans une famille de salopards mafieux, quelle foutue réussite. J’ai envie de me coller une balle, plusieurs en fait, mais je suis trop lâche pour passer à l’acte. Je sais que picoler moi, fumer, déprimer, me morfondre sur mon sort, blâmer tout et n’importe quoi pour ma chute que j’ai moi-même provoqué.
J’ai personne avec qui partager ça, seul comme une sombre merde. De la famille ? Tous pourris, hypocrites et égoïstes. S’ils restent auprès de toi, c’est parce que tu leur est profitable ou pas rester seuls, parce qu’ils supportent pas ce sentiment de solitude. Des amis ? J’ai la fâcheuse tendance à tous les repousser, disparaître du jour au lendemain ou me faire oublier, jusqu’à ce qu’on se lasse de me courir après ou de se faire envoyer chier. Pareil pour les gonzesses, aucune ne reste plus qu’un couple de mois, voir quelques-uns en rab pour les plus courageuses. Mais mes histoires d’amour finissent toutes pareilles, sur une phrase. “Va te faire foutre Peeter, sale con.”
Je le sais que je suis qu’un connard, que je détruis ou pourris absolument tout ce que je touche, je peux même pas leur en vouloir. C’est plus fort que moi, parce que la peur me pousse à faire des conneries, à me comporter comme le dernier des enfoirés. La peur de l’abandon, qu’elle salope.
J’ai marché sans même m’en rendre compte jusqu’à ce bâtiment religieux à la con, une espèce d’église dont les façades portent encore les traces de balles des fusillades qui éclatent généralement dans le quartier. Si vous pensiez que les familles respectaient ce genre de lieu, vous avez tout raté. L’autre fois, je suis allé égorger un pauvre type à l’angle de ce mur que je peux pas m’empêcher de fixer. Il avait fait chier le Padre, alors avec quelques tontons flingueurs on lui a fait passer l’envie de recommencer.
Si Dieu existe, ce sale enfoiré a rien fait pour empêcher l’autre gars de se faire saigner comme un porc. Putain d’égoiste, lui aussi ? Si même une entité divine, qui aurait tous les pouvoirs et tout contrôle sur nous, pauvres humains qui lui offrons un spectacle quotidien, n’intervient pas pour réparer les injustices, alors à quoi bon se casser le cul ? Pourquoi résister ? Pourquoi lutter contre le mal si c’est toujours à lui de l’emporter ?
Dans ce monde, t’es rien si t’es pas une pourriture.
Alors à quoi bon se battre ? Pour finir comme ce mioche, à deux pas de là, qui se fait maraver par une bande de sales petits cons et dépouiller de ses fringues ? La vie je vous le dit, elle en demande beaucoup mais ne rend rien. Rien d’autre que des emmerdes.
Aujourd’hui, j’ai plus la foi. Plus de courage, plus d'envie, ni de motivation.
Aujourd’hui, je songe encore une fois à charger le pistolet et me faire sauter le caisson.
Et ce petit, qui se fait savater si fort la gueule que bientôt, il se sentira plus pisser le sang. Si Dieu existe vraiment, il attend quoi pour lui venir en aide, hein ?
T’as le mec paumé qui sait pas où il va dans la vie, ni comment il pourrait y aller. Il se contente de se laisser porter et qu’importe la merde qui lui tombe sur la tronche, il avance. Déprimé, déphasé, mais avec un soupçon d’espoir. S’il avance, c’est parce qu’il pense qu’à la fin du chemin, il arrivera là où doit être. Un endroit bon pour lui, pour évoluer, s’épanouir, être enfin heureux. Il pourra y rester, dans ce foutu paradis personnel. Il y crèvera, le sourire aux lèvres, aimé par une femme et trois enfants. Moi, j’ai arrêté d’avancer depuis l’année dernière. Y’avait cette lueur qui brillait, faiblarde, vacillante, mais elle était là. Elle éclairait au fond de moi et m’empêchait d’abandonner.
Cette lueur a été soufflée dès l’instant où j’ai refroidi ce mec pour une putain de dose d’opium à la con.
Ouais, je suis le genre de sombre merde qui sort du caniveau crasseux dans lequel la vie l’a balancée, pour braquer un flingue sur ton crâne et le faire sauter parce que tu veux pas me filer ma came.
Je suis ce genre de salopard, celui que je déteste. Je suis devenu ce que je hais le plus, pour de la putain de drogue. Enfoiré. Ça me fout en l’air, ça m’a foutu en l’air et les Bambana ont failli me foutre en l’air. Que je sois obligé de bosser pour eux maintenant, je trouve que je m’en sors trop bien. Ou alors c’est le truc vicieux, reste en vie et passe le restant de ta vie merdique à repenser à ce que t’as fais, à chialer parce que t’es qu’un foutu chien à qui on vient de mettre une laisse pour rembourser une dette. Une dette à vie. Pour une vie prise. Une vie contre une vie, sauf que je peux encore profiter de la mienne, pas lui.
J’en tire rien de satisfaisant pour autant, c’est même tout le contraire. J’ai doublé ma consommation de toutes les merdes qui empoisonnent le corps et l’esprit, à boire comme à fumer. Je dors moins, je comate plus souvent. Je me bats régulièrement, pas besoin de raison à ça, juste ce besoin de trouver mon exutoire. Y’a cette rage qui gronde, qui me ronge, qui me tord, m'étouffe. Frapper, faire mal et surtout me faire du mal, ça fait tout ressortir, mais y’en a tellement que j’en verrai jamais le bout.
S’allumer une clope à l’opium, le dos appuyé contre un mur, regard perdu dans le vide, à pas savoir l’heure qu’il est. Il fait jour, c’est que la nuit est passée et que j’ai pas encore fermé l'œil depuis la veille. Torché, quelques verres au bar, puis gentiment mis dehors à la fermeture. J’ai terminé dans ma piaule, la bouteille aussi est terminée. Prendre un peu l’air, les yeux qui piquent, la tête en vrac, le cœur en sang. Je dois puer la transpiration, des fringues pas lavées depuis deux ou trois jours, je sais même plus. Sale haleine, ventre vide, les dents serrées et la gorge nouée.
Perdu, dans cette ville merdique qui m’aura tout pris. Mon âme, ma vie, ma liberté, et le peu de bon qui restait en moi. Rogné jusqu’à l’os, recraché comme un malpropre, un foutu clébard qui obéit au doigt et à l'œil de son nouveau maître. Déserter la marine pour finir dans une famille de salopards mafieux, quelle foutue réussite. J’ai envie de me coller une balle, plusieurs en fait, mais je suis trop lâche pour passer à l’acte. Je sais que picoler moi, fumer, déprimer, me morfondre sur mon sort, blâmer tout et n’importe quoi pour ma chute que j’ai moi-même provoqué.
J’ai personne avec qui partager ça, seul comme une sombre merde. De la famille ? Tous pourris, hypocrites et égoïstes. S’ils restent auprès de toi, c’est parce que tu leur est profitable ou pas rester seuls, parce qu’ils supportent pas ce sentiment de solitude. Des amis ? J’ai la fâcheuse tendance à tous les repousser, disparaître du jour au lendemain ou me faire oublier, jusqu’à ce qu’on se lasse de me courir après ou de se faire envoyer chier. Pareil pour les gonzesses, aucune ne reste plus qu’un couple de mois, voir quelques-uns en rab pour les plus courageuses. Mais mes histoires d’amour finissent toutes pareilles, sur une phrase. “Va te faire foutre Peeter, sale con.”
Je le sais que je suis qu’un connard, que je détruis ou pourris absolument tout ce que je touche, je peux même pas leur en vouloir. C’est plus fort que moi, parce que la peur me pousse à faire des conneries, à me comporter comme le dernier des enfoirés. La peur de l’abandon, qu’elle salope.
J’ai marché sans même m’en rendre compte jusqu’à ce bâtiment religieux à la con, une espèce d’église dont les façades portent encore les traces de balles des fusillades qui éclatent généralement dans le quartier. Si vous pensiez que les familles respectaient ce genre de lieu, vous avez tout raté. L’autre fois, je suis allé égorger un pauvre type à l’angle de ce mur que je peux pas m’empêcher de fixer. Il avait fait chier le Padre, alors avec quelques tontons flingueurs on lui a fait passer l’envie de recommencer.
Si Dieu existe, ce sale enfoiré a rien fait pour empêcher l’autre gars de se faire saigner comme un porc. Putain d’égoiste, lui aussi ? Si même une entité divine, qui aurait tous les pouvoirs et tout contrôle sur nous, pauvres humains qui lui offrons un spectacle quotidien, n’intervient pas pour réparer les injustices, alors à quoi bon se casser le cul ? Pourquoi résister ? Pourquoi lutter contre le mal si c’est toujours à lui de l’emporter ?
Dans ce monde, t’es rien si t’es pas une pourriture.
Alors à quoi bon se battre ? Pour finir comme ce mioche, à deux pas de là, qui se fait maraver par une bande de sales petits cons et dépouiller de ses fringues ? La vie je vous le dit, elle en demande beaucoup mais ne rend rien. Rien d’autre que des emmerdes.
Aujourd’hui, j’ai plus la foi. Plus de courage, plus d'envie, ni de motivation.
Aujourd’hui, je songe encore une fois à charger le pistolet et me faire sauter le caisson.
Et ce petit, qui se fait savater si fort la gueule que bientôt, il se sentira plus pisser le sang. Si Dieu existe vraiment, il attend quoi pour lui venir en aide, hein ?
Dernière édition par Peeter G. Dicross le Jeu 15 Sep 2022, 15:36, édité 1 fois