-Cet endroit est in-croix-yable. Vraiment. J'adoooore ♪ ♫
Elle appréciait la visite, pour sûr. Comme une gamine pour qui c’était Noël avant l’heure et qui était en visite de son parc d’attraction préféré. Un arbre gargantuesque, qui surplombait les trois quarts de l’île. Presque dix mille habitants, ça faisait quand même une belle ville centrée autour du vénérable totem centenaire d’Ohara. Et en l’absence de cultures significatives et d’installations portuaires pour témoigner d’une pêche ou d’un commerce important, Oboro était ravie de constater qu’une petite société comme celle-ci pouvait se reposer sur la connaissance et sa transmission pour gagner de quoi vivre confortablement. Il y avait des touristes, mais il y avait surtout une énorme masse de gens de passage venus tout spécialement pour consulter la bibliothèque. Elle ne se souciait pas du tout de ce genre de choses en temps normal, mais cela ne faisait qu’illustrer à quel point cette visite avait agréablement surpris la jeune femme. Elle aimait cet endroit.
D’autant plus que pour satisfaire aux besoins de ces nombreux voyageurs qui devaient rester sur l’île le temps de quelques jours ou souvent davantage, un grand nombre de commerces dédiés à leur hébergement et leur restauration avait fleuri sur l’île. Et il y en avait pour tous les goûts et toutes les bourses, la qualité dénouant souvent celles de qui avait les moyens. Or, en cet instant très précis, Oboro avait faim, ce qui la rendait particulièrement vulnérable aux parfums alléchants qui dardaient de toutes parts pour faire de la clientèle. Elle se sentait complètement perdue, cruellement troublée par des pâtisseries d’Ali Fustat qu’elle affectionnait particulièrement (des doses mortellement concentrées de miel et d’amandes et de pistaches et de sucre, capables de terrasser un diabétique en une bouchée) et qui détourna son attention le temps d’une bonne vingtaine de secondes. Juste avant, elle lorgnait sur une autre terrasse aux plats trop raffinés pour ses finances et ses habitudes, mais qui proposait comme desserts des assortiments de mignardises aux fruits rouges à l’allure extrêmement séduisante.
-On t’a pas dit que tu devais réduire ton train de vie toi ?
-Rhooo, c’est pas parce qu’un sanglé du cul aux balloches trop chargées est venu me faire des leçons de morale que tu vas t’y mettre aussi cocotte. Ces vieux sages en carton qui veulent te balancer de grands principes moraux alors qu’ils avaient pour réput’ d’aller aux jeux et aux putes quinze ans plus tôt c’est gentil mais franchement abusé.
-Et comment ça se fait que tu te retrouves quasiment dans le rouge du coup ?
-J’ai accompli ma mission divine de petite sœur modèle qui fait des cadeaux de mariage ambitieux à son grand boulet de frère et à l’incarnation de pitié et de dévotion qui a bien voulu de lui. Cette fille est un ange. Sauf que j’ai foiré une mission et que du coup pas de paiement et que je l’ai dans l’os.
-La joie des professions libérales, hein ?
-Baaah… ça fait mal au cul mais c’est justice, j’avais qu’à pas me vautrer. Tu m’invites du coup ?
-C’est mort très chère ♡.
-Ouais bah ton Balgrid aussi il sera mort si j’suis pas au meilleur de moi-même ♡.
-Ca sera pour ta conscience, tant pis.
Meifang avait pour principe, et elle n’était pas la seule, de ne jamais négocier avec des terroristes. Même quand celle-ci était une amie de longue date sur qui elle avait toujours pu compter. Qu’il s’agisse de lui servir d’épaule (quoi qu’un peu trop surélevée) sur laquelle pleurer à l’heure de ses premiers chagrins d’amour ou de lui tenir patiemment (enfin, en lui pestant dessus en rafales) les cheveux au terme de festivités trop prolongées au goût de ses intestins, sa comparse ne lui avait jamais fait défaut. Aucune dispute, aucune contrariété n’avait jamais contredit ce fait, et pourtant dieu sait qu’il y en avait eu.
D’un autre côté, c’est vrai que ces choux à la crème de noisette nappés de chocolat fondant et de coulis de cerise parsemé de petits éclats d’amandes caramélisés et de cannelle en poudre avaient l’air terriblement…
-Le chef vient de Shishoku en plus, ça doit être une tuerie, glissa Oboro en regardant la carte, des pépites dans les yeux et de la bave aux lèvres.
-L’île qui se mange ?
-Et où les diplomates en visite se font corrompre à grand coups de festins somptueux. Parait que c’est plus redoutable que n’importe quelle came et qu’un business de contrebande menace la pérennité des littoraux du coin. Ils embarquent tout le sable qui a un goût de sucre et ça pourrit le reste.
-T’imagines, une île où absolument tout le décor est comestible ?
-Bonjour l’hygiène quand même. Manger un truc où tout le monde marche dessus… genre l’île viande ils bouffent tout cru ? Et les maladies, les bactéries et les saloperies du répertoire, osef et quartier libre ? Y’a que la viande de bœuf qu’on peut manger bleue parce que les bébêtes ne se trouvent qu’en surface, tout le reste faut cuire à cœur sinon bonjour la chiasse.
-Ou alors si ça se trouve l’île est faîte entièrement en viande… cuite. Ou bien ils la cuisent après l’avoir prélevée. Ca serait plus logique.
-Ouais mais même… ça doit faire bien dégueu de marcher sur une île où le sol est une viande saignante qui gicle quand tu appuies dessus. Y’a des films d’horreur ou des représentations de l’enfer dans ce genre ? Un nanar qui serait tourné là-bas avec ce genre de décor ça serait tellement fou…
-Je crois que ça mérite une enquête. En tout cas, je suis curieuse. Bravo, tu as encore réussi à me lancer pour creuser sur des anecdotes inutiles. Je regarderai dans la bibliothèque, tiens. Je suis sûre que Billy aura quelque chose là-dessus.
Billy, c’était… le garçon qu’elles devaient retrouver d’ici quelques minutes. C’était aussi quelqu’un dont son amie lui avait beaucoup parlé et qu’elle était curieuse d’observer en action. Parce que, elle l’avait bien noté, Mei’ lui en avait beaucoup parlé. Et qu’Oboro était absolument disposée à fourrer son nez dans ce genre d’affaires pour le simple plaisir de satisfaire sa curiosité et d’obtenir des billes pour taquiner lourdement son amie. Elle voulait aussi se faire une idée du gaillard en question, évidemment. Pour aussi perspicace et intelligente que puisse être Meifang, il y avait des sujets sur lesquels tous ses neurones prenaient la clé des champs et où elle se retrouvait amourachée de blaireaux possessifs et bardés de dettes qui ne trouvaient rien de mieux à faire que de squatter chez elle pour ingurgiter des quantités astronomiques de bière tout en devisant des plans à la limite de la légalité pour se refaire une fortune. L’argent facile, comme si ça existait.
Le problème était quand ça marchait vraiment et que lesdits loustics désormais contrebandiers ou dealer en puissance se faisaient subitement rouler dessus (littéralement, et jusqu’à ce que mort s’ensuive) par une mafia déjà bien établie qui n’était pas très portée sur les principes de libre marché et de saine concurrence.
Alors bon, un mystérieux révolutionnaire au service du dragon de Freeman et qui servait d’archiviste à bons tuyaux pour les sbires de l’énigmatique Raven, ça puait la mort à plein nez.
Tout ça indépendamment du fait que Mei elle-même était dorénavant complètement enlisée dans la révolution, participant aux travaux de la section développement sous couvert d’être une simple botaniste et agronome indépendante. De toute manière, tout individu en provenance de Kanokuni était hautement suspect aux yeux de la marine depuis que le pays avait fait sécession, et le simple fait d’avoir les yeux bridés était maintenant un motif de suspicion particulièrement éloquent devant ses militaires. Kanokuni, Wanokuni… en bon mélange des deux, Oboro faisait une candidate idéale de contrôle au faciès.
Et ils avaient raison.
La marine s’était récemment illustrée en enlevant la principale figure des révolutionnaires qui pullulaient paisiblement sur Ohara, et Oboro n’était là que pour aller fouiner au cœur d’un de leurs navires qui avait de bonnes chances de détenir des informations sur le sort qu’on lui avait réservé. La mouette l’avait à priori destiné à l’échafaud comme tant d’autres actuellement, mais on avait l’espoir de pouvoir le libérer avant même qu’un convoi ne l’emmène sur son lieu d’exécution. A une condition : qu’on sache où il était détenu actuellement.
Et pour ça, avoir une ninja expérimentée sous le coude ne pouvait que faire du bien. Elle n’avait que quelques années de vol sous le coude, mais c’était tout à fait dans son répertoire.
Il y avait évidemment des agents révolutionnaires capables de faire ce genre de choses, mais personne n’avait répondu à l’urgence jusque-là. Une belle bande de baltringues complètement éclatées, avait déclaré la Kanokunienne en apprenant par la suite les faits d’armes et l’implication de Balgrid pour leur propre camp. Laisser ce gars crever, ça avait l’air débile et complètement dégueulasse. Les risques du métier, diraient certains. Pas une priorité, elle traduisait comme ça.
Et pas qu’elle : Meifang et Wangyi l’avaient missionnée pour s’en charger, le contexte lui semblait abordable, elle avait dit okay. Et c’est ainsi que les deux jeunes femmes avaient pris la première caravane jusqu’à Jing, puis le premier navire jusqu’à Ohara.
-J’aurais dû demander un acompte, râla Oboro de bonne humeur. Ou même négocier le cachet avant de dire quoi que ce soit.
-Euh… on te traitera très bien une fois tout ça fini.
-Oh les promesses je sais ce que ça vaut hein. Les révos ont réputation de dormir sous les ponts et de se rassembler dans des squats tout cradas et humides pour dormir à l’abri, alors j’imagine très bien la tronche du paiement que je vais recevoir. « Gn’einhinhin, tiens, la gratitude éternelle du mouvement et… bah c’est tout, huhuhu hinhin chuis un mongoloïde sous-alimenté de la révolution parce qu’on m’paie pas assez ~~ ».
-Pffff.
Il y en avait qui voulaient qu’elle rejoigne les rangs des gris, alors qu’ils n’étaient même pas capables de gérer leurs affaires comme des grands. Il fallait que quelqu’un les aide à se torcher les fesses. Et ça avait foutu le bordel sur Kanokuni pour essayer de prendre le pouvoir. Et ç’a failli marcher.
Putain, quoi.
Elle appréciait la visite, pour sûr. Comme une gamine pour qui c’était Noël avant l’heure et qui était en visite de son parc d’attraction préféré. Un arbre gargantuesque, qui surplombait les trois quarts de l’île. Presque dix mille habitants, ça faisait quand même une belle ville centrée autour du vénérable totem centenaire d’Ohara. Et en l’absence de cultures significatives et d’installations portuaires pour témoigner d’une pêche ou d’un commerce important, Oboro était ravie de constater qu’une petite société comme celle-ci pouvait se reposer sur la connaissance et sa transmission pour gagner de quoi vivre confortablement. Il y avait des touristes, mais il y avait surtout une énorme masse de gens de passage venus tout spécialement pour consulter la bibliothèque. Elle ne se souciait pas du tout de ce genre de choses en temps normal, mais cela ne faisait qu’illustrer à quel point cette visite avait agréablement surpris la jeune femme. Elle aimait cet endroit.
D’autant plus que pour satisfaire aux besoins de ces nombreux voyageurs qui devaient rester sur l’île le temps de quelques jours ou souvent davantage, un grand nombre de commerces dédiés à leur hébergement et leur restauration avait fleuri sur l’île. Et il y en avait pour tous les goûts et toutes les bourses, la qualité dénouant souvent celles de qui avait les moyens. Or, en cet instant très précis, Oboro avait faim, ce qui la rendait particulièrement vulnérable aux parfums alléchants qui dardaient de toutes parts pour faire de la clientèle. Elle se sentait complètement perdue, cruellement troublée par des pâtisseries d’Ali Fustat qu’elle affectionnait particulièrement (des doses mortellement concentrées de miel et d’amandes et de pistaches et de sucre, capables de terrasser un diabétique en une bouchée) et qui détourna son attention le temps d’une bonne vingtaine de secondes. Juste avant, elle lorgnait sur une autre terrasse aux plats trop raffinés pour ses finances et ses habitudes, mais qui proposait comme desserts des assortiments de mignardises aux fruits rouges à l’allure extrêmement séduisante.
-On t’a pas dit que tu devais réduire ton train de vie toi ?
-Rhooo, c’est pas parce qu’un sanglé du cul aux balloches trop chargées est venu me faire des leçons de morale que tu vas t’y mettre aussi cocotte. Ces vieux sages en carton qui veulent te balancer de grands principes moraux alors qu’ils avaient pour réput’ d’aller aux jeux et aux putes quinze ans plus tôt c’est gentil mais franchement abusé.
-Et comment ça se fait que tu te retrouves quasiment dans le rouge du coup ?
-J’ai accompli ma mission divine de petite sœur modèle qui fait des cadeaux de mariage ambitieux à son grand boulet de frère et à l’incarnation de pitié et de dévotion qui a bien voulu de lui. Cette fille est un ange. Sauf que j’ai foiré une mission et que du coup pas de paiement et que je l’ai dans l’os.
-La joie des professions libérales, hein ?
-Baaah… ça fait mal au cul mais c’est justice, j’avais qu’à pas me vautrer. Tu m’invites du coup ?
-C’est mort très chère ♡.
-Ouais bah ton Balgrid aussi il sera mort si j’suis pas au meilleur de moi-même ♡.
-Ca sera pour ta conscience, tant pis.
Meifang avait pour principe, et elle n’était pas la seule, de ne jamais négocier avec des terroristes. Même quand celle-ci était une amie de longue date sur qui elle avait toujours pu compter. Qu’il s’agisse de lui servir d’épaule (quoi qu’un peu trop surélevée) sur laquelle pleurer à l’heure de ses premiers chagrins d’amour ou de lui tenir patiemment (enfin, en lui pestant dessus en rafales) les cheveux au terme de festivités trop prolongées au goût de ses intestins, sa comparse ne lui avait jamais fait défaut. Aucune dispute, aucune contrariété n’avait jamais contredit ce fait, et pourtant dieu sait qu’il y en avait eu.
D’un autre côté, c’est vrai que ces choux à la crème de noisette nappés de chocolat fondant et de coulis de cerise parsemé de petits éclats d’amandes caramélisés et de cannelle en poudre avaient l’air terriblement…
-Le chef vient de Shishoku en plus, ça doit être une tuerie, glissa Oboro en regardant la carte, des pépites dans les yeux et de la bave aux lèvres.
-L’île qui se mange ?
-Et où les diplomates en visite se font corrompre à grand coups de festins somptueux. Parait que c’est plus redoutable que n’importe quelle came et qu’un business de contrebande menace la pérennité des littoraux du coin. Ils embarquent tout le sable qui a un goût de sucre et ça pourrit le reste.
-T’imagines, une île où absolument tout le décor est comestible ?
-Bonjour l’hygiène quand même. Manger un truc où tout le monde marche dessus… genre l’île viande ils bouffent tout cru ? Et les maladies, les bactéries et les saloperies du répertoire, osef et quartier libre ? Y’a que la viande de bœuf qu’on peut manger bleue parce que les bébêtes ne se trouvent qu’en surface, tout le reste faut cuire à cœur sinon bonjour la chiasse.
-Ou alors si ça se trouve l’île est faîte entièrement en viande… cuite. Ou bien ils la cuisent après l’avoir prélevée. Ca serait plus logique.
-Ouais mais même… ça doit faire bien dégueu de marcher sur une île où le sol est une viande saignante qui gicle quand tu appuies dessus. Y’a des films d’horreur ou des représentations de l’enfer dans ce genre ? Un nanar qui serait tourné là-bas avec ce genre de décor ça serait tellement fou…
-Je crois que ça mérite une enquête. En tout cas, je suis curieuse. Bravo, tu as encore réussi à me lancer pour creuser sur des anecdotes inutiles. Je regarderai dans la bibliothèque, tiens. Je suis sûre que Billy aura quelque chose là-dessus.
Billy, c’était… le garçon qu’elles devaient retrouver d’ici quelques minutes. C’était aussi quelqu’un dont son amie lui avait beaucoup parlé et qu’elle était curieuse d’observer en action. Parce que, elle l’avait bien noté, Mei’ lui en avait beaucoup parlé. Et qu’Oboro était absolument disposée à fourrer son nez dans ce genre d’affaires pour le simple plaisir de satisfaire sa curiosité et d’obtenir des billes pour taquiner lourdement son amie. Elle voulait aussi se faire une idée du gaillard en question, évidemment. Pour aussi perspicace et intelligente que puisse être Meifang, il y avait des sujets sur lesquels tous ses neurones prenaient la clé des champs et où elle se retrouvait amourachée de blaireaux possessifs et bardés de dettes qui ne trouvaient rien de mieux à faire que de squatter chez elle pour ingurgiter des quantités astronomiques de bière tout en devisant des plans à la limite de la légalité pour se refaire une fortune. L’argent facile, comme si ça existait.
Le problème était quand ça marchait vraiment et que lesdits loustics désormais contrebandiers ou dealer en puissance se faisaient subitement rouler dessus (littéralement, et jusqu’à ce que mort s’ensuive) par une mafia déjà bien établie qui n’était pas très portée sur les principes de libre marché et de saine concurrence.
Alors bon, un mystérieux révolutionnaire au service du dragon de Freeman et qui servait d’archiviste à bons tuyaux pour les sbires de l’énigmatique Raven, ça puait la mort à plein nez.
Tout ça indépendamment du fait que Mei elle-même était dorénavant complètement enlisée dans la révolution, participant aux travaux de la section développement sous couvert d’être une simple botaniste et agronome indépendante. De toute manière, tout individu en provenance de Kanokuni était hautement suspect aux yeux de la marine depuis que le pays avait fait sécession, et le simple fait d’avoir les yeux bridés était maintenant un motif de suspicion particulièrement éloquent devant ses militaires. Kanokuni, Wanokuni… en bon mélange des deux, Oboro faisait une candidate idéale de contrôle au faciès.
Et ils avaient raison.
La marine s’était récemment illustrée en enlevant la principale figure des révolutionnaires qui pullulaient paisiblement sur Ohara, et Oboro n’était là que pour aller fouiner au cœur d’un de leurs navires qui avait de bonnes chances de détenir des informations sur le sort qu’on lui avait réservé. La mouette l’avait à priori destiné à l’échafaud comme tant d’autres actuellement, mais on avait l’espoir de pouvoir le libérer avant même qu’un convoi ne l’emmène sur son lieu d’exécution. A une condition : qu’on sache où il était détenu actuellement.
Et pour ça, avoir une ninja expérimentée sous le coude ne pouvait que faire du bien. Elle n’avait que quelques années de vol sous le coude, mais c’était tout à fait dans son répertoire.
Il y avait évidemment des agents révolutionnaires capables de faire ce genre de choses, mais personne n’avait répondu à l’urgence jusque-là. Une belle bande de baltringues complètement éclatées, avait déclaré la Kanokunienne en apprenant par la suite les faits d’armes et l’implication de Balgrid pour leur propre camp. Laisser ce gars crever, ça avait l’air débile et complètement dégueulasse. Les risques du métier, diraient certains. Pas une priorité, elle traduisait comme ça.
Et pas qu’elle : Meifang et Wangyi l’avaient missionnée pour s’en charger, le contexte lui semblait abordable, elle avait dit okay. Et c’est ainsi que les deux jeunes femmes avaient pris la première caravane jusqu’à Jing, puis le premier navire jusqu’à Ohara.
-J’aurais dû demander un acompte, râla Oboro de bonne humeur. Ou même négocier le cachet avant de dire quoi que ce soit.
-Euh… on te traitera très bien une fois tout ça fini.
-Oh les promesses je sais ce que ça vaut hein. Les révos ont réputation de dormir sous les ponts et de se rassembler dans des squats tout cradas et humides pour dormir à l’abri, alors j’imagine très bien la tronche du paiement que je vais recevoir. « Gn’einhinhin, tiens, la gratitude éternelle du mouvement et… bah c’est tout, huhuhu hinhin chuis un mongoloïde sous-alimenté de la révolution parce qu’on m’paie pas assez ~~ ».
-Pffff.
Il y en avait qui voulaient qu’elle rejoigne les rangs des gris, alors qu’ils n’étaient même pas capables de gérer leurs affaires comme des grands. Il fallait que quelqu’un les aide à se torcher les fesses. Et ça avait foutu le bordel sur Kanokuni pour essayer de prendre le pouvoir. Et ç’a failli marcher.
Putain, quoi.