Troisième plat de friture englouti, le festival de saveur est désormais terminé et me voilà rassasié. Sans mauvais jeu de mot, faut dire qu'ils savent y faire avec la poiscaille ici. Six jours que Yuzu et moi squattons cette petite auberge miteuse, si on est là, c'est à propos d'une sombre histoire de tueur en série. Un notable de l'île a fait appel au Baroque Works et c'est "La Légende" en personne qui nous a proposé le boulot. Inutile de dire qu'un travail confié personnellement par Charlie Cook, ça ne se refuse pas. Le type derrière ce contrat, qu'on a rencontré en arrivant, se prénomme Pavel et pour lui c'est une affaire personnelle. En effet sa jeune fille figure malheureusement parmi les victimes de celui qu'on surnomme dans le coin "Le Taxidermiste". Pourquoi ce surnom me demanderez vous ? Hé bien tout simplement parce que ses victimes ont toutes été retrouvées embaumées et dans un état irréprochable. Il nous a également précisé que les cinq victimes étaient de jeunes femmes, âgées tout au plus de la vingtaine. Yuzu fait que me dire que ça fait froid dans le dos, moi ce que j'en pense, c'est que ce brave Pavel propose une coquette somme pour la capture de ce tordu, et je me ferai un véritable plaisir à mettre fin à ses agissements.
Bien entendu, nos premiers soupçons se sont aussitôt portés sur la morgue locale et son petit personnel, des gens charmants au demeurant. Je les ai longuement interrogés et Yuzu les a filé durant les deux derniers jours, mais ça n'a rien donné. Sans doute ne regardons-nous pas au bon endroit. La seule chose qu'on a pu tirer de ces braves gens, et tous s'accordaient à le dire, c'est que celui qui à fait ça à ces pauvres gamines est un pro. Un vrai travail d'orfèvre qu'ils disaient. Autre chose qui m'interpelle un peu, c'est que le tueur a prit soin de maquiller et d'habiller ses victimes de façon très coquette... Ça aussi Yuzu dit que c'est glauque. Donc mise à part la triangulation approximative de son rayon d'action, le choix du ciblage de ses victimes et son sens du détail exacerbé, on a rien. Que dalle. Ce qui avouons-le, n'est pas hyper encourageant.
Nous revoilà donc devant ce délicieux plat de friture, ou plutôt ce qu'il en reste. J'ai entendu parler de ce type, le barman du seul débit de boisson du coin, un jeune homme à la chevelure verte, plutôt simple à repérer. Pourquoi ce type m'intéresse-t-il ? D'après les locaux, il sait tout, il a des yeux et des oreilles partout. Et dans ce genre d'affaire, copiner avec un gars dans ce genre, c'est commencer la partie avec un avantage certain.
- "Je me demandais si tu n'allais pas en commander un quatrième..." me dit alors Yuzu avec un sourire amusé.
- "Oh ce serait de la gourmandise ça. T'es sûre que t'as pas faim ?"
- "Humpf.. Je dirais que t'as bien mangé pour nous deux. On s'met en route ?"
Yuzu, véritable touche de douceur sur cette fresque chaotique qu'est ma vie. Sans elle mon boulot serait bien triste, je dois l'admettre. Repas terminé et réglé, nous voilà tous deux à l’extérieur de l'auberge, le soleil est déjà aux abonnés absent et l'obscurité commence à envahir les ruelles de ce petit bourg. Vêtus de grands manteaux aux teintes sombres, surmontés de chapeaux en roseau, nous nous mêlons à la populace, à la multitude de marchands et voyageurs qui fourmillent encore dans la rue. Notre objectif, ce petit bar ou on peut trouver le dénommé Gunar et la ville n'étant pas bien grande, nous arrivons bien vite à destination.
Un petit bâtiment, qui extérieurement ne paie pas de mine. L'intérieur en revanche est bien plus chaleureux que je ne le pensais. Yuzu est restée en retrait, elle souhaite observer les allées et venues. Moi par contre, je ne me fais pas prier, j'entre, me faufile jusqu'au bar et commande un verre. Je vous assure que c'est pour passer inaperçu... La salle est plus spacieuse qu'il n'y parait, l'endroit est bondé de monde, ça danse, ça ricane, c'est plein de vie. Dans un coin au fond de la pièce un petit groupe de musique joue d'un air que j'ai déjà pu entendre il y a quelques temps de ça sur un navire marchand originaire d'Hinu Town. Sans doute un groupe itinérant. Le décor est planté et il ne me faudra que quelques minutes et deux-trois gorgées de ce whisky de qualité avant d’apercevoir notre cible qui revient vers le bar. Le type à la chevelure verte reprend son travail, je le vois nettoyer quelques verres, donner des ordres au reste du personnel, pas de doute, ici c'est bien lui le patron. Nos regards se croisent, il poursuit son nettoyage. Deux gorgées de plus, je balaye la pièce du regard, impossible de savoir avoir exactitude combien de personnes entrent et sortent de ce petit bar.
- "Un autre, étranger ?" me lance alors une voix derrière moi. Je fais volte-face et me retrouve nez à nez avec le type à la chevelure verdâtre.
- "Avec plaisir, merci..."
Cul sec, je pose mon verre sur le comptoir et mon interlocuteur y verse le précieux breuvage. Hochement de tête pour le remercier, je prends alors deux autres gorgées. Ce n'est pas le même whisky, là on est sur une toute autre qualité. En bouche, c'est la fête, c'est fin, une tourbe discrète, quelques notes d'agrume et un arrière goût vanillé. J'ai rarement bu un aussi bon whisky... Mais on est pas launiquement pour picoler. Je pose mon verre à moitié plein (ou à moitié vide c'est vous qui voyez) sur le comptoir et à ma grande surprise c'est lui qui poursuit.
- "Parait que vous me cherchez ? J'ai cru comprendre que vous étiez descendus à l'auberge des Tanneurs il y a quelques jours ? Je dis vous par rapport à la charmante jeune fille qui était tantôt avec vous. J'ai une question, que fait un chasseur de prime dans un petit bar tranquille de Poiscaille ? me dit il alors d'un ton calme tout en essuyant une choppe qu'il vient de nettoyer.
Sans doute sa manière à lui de souligner avec une insistance certaine, qu'ici c'est lui le boss. A vrai dire, ça ne me pose aucun problème, c'est même tout l'inverse, il vient de me prouver que ce qu'on dit de lui est vrai. Que sa réputation n'est pas usurpée. Je souris alors, amusé par la situation, amusé par ce petit jeu de "qui sait quoi" qui vient de se mettre en place malgré moi, et tout en le toisant, je termine mon second verre aussi sec avant de le reposer délicatement sur le comptoir.
- "On m'avait dit que vous étiez le genre de type bien renseigné. Je.. Nous sommes ici pour affaire. Et j'ai le sentiment que vous pourriez nous aider.
- "Ah vraiment ? Et en quoi pourrais-je bien aider deux étrangers de votre acabit ? Mmmh ? ... J'imagine que ce type, le .. Taxidermiste ? N'est pas étranger à votre présence sur cette île ? J'ai bon ? ajoute-t-il sans même m'accorder un regard, se contentant de remettre les choppes propres sur l'étagère qui surplombe le comptoir.
- "Dans le mille. On m'a dit que vous aviez des yeux et des oreilles partout, je suis venu vérifier si vous étiez à la hauteur de votre réputation.
Le type se fige, tourne la tête lentement vers moi, et son air jusqu'alors impassible laisse place à un très léger sourire. Touché. On dirait bien que j'ai touché la corde sensible. Cet homme est surement extrêmement fier de sa position, sans doute extrêmement fier d'être celui que l'on vient consulter lorsque l'on espère obtenir des lumières sur un associé peu scrupuleux ou encore une épouse infidèle. Le voilà qui pose carrément un second verre à côté du mien avant de les remplir tous deux du même whisky succulent auquel j'ai eu droit juste avant. Une seconde d’hésitation plus tard, je prends mon verre, bois une gorgée, mes papilles s'affolent de nouveau pendant que le type m'imite. Je m’aperçois alors que les présentations ne sont pas faites, et de toute évidence, le même constat vient de traverser l'esprit de mon nouveau compagnon de beuverie.
- "Je suis Gunar, et ce bar m'appartient. Et vous êtes ..?" me dit il calmement en me regardant droit dans les yeux.
- "Appelez-moi Wes. Et si nous discutions de l'affaire qui m'amène ?"
- "Je vous en prie Wes, j'ai l'intuition que certaines questions vous brûlent les lèvres. Allons-y sans détour." ajoute-t-il avec un léger sourire.
Rarement vu un mec avec autant d'assurance, j'ignore s'il sait réellement quelque chose au sujet de ce tueur en série, mais il est actuellement ma meilleure chance d'obtenir des infos dans cette sombre affaire. J'oublie un instant Yuzu, pour m'adonner à une conversation qui promet d'être enrichissante ne serait-ce que pour comprendre un tant soit peu ce qui se passe dans ce petit bourg de pécheurs, d'ordinaire sans histoire.
Bien entendu, nos premiers soupçons se sont aussitôt portés sur la morgue locale et son petit personnel, des gens charmants au demeurant. Je les ai longuement interrogés et Yuzu les a filé durant les deux derniers jours, mais ça n'a rien donné. Sans doute ne regardons-nous pas au bon endroit. La seule chose qu'on a pu tirer de ces braves gens, et tous s'accordaient à le dire, c'est que celui qui à fait ça à ces pauvres gamines est un pro. Un vrai travail d'orfèvre qu'ils disaient. Autre chose qui m'interpelle un peu, c'est que le tueur a prit soin de maquiller et d'habiller ses victimes de façon très coquette... Ça aussi Yuzu dit que c'est glauque. Donc mise à part la triangulation approximative de son rayon d'action, le choix du ciblage de ses victimes et son sens du détail exacerbé, on a rien. Que dalle. Ce qui avouons-le, n'est pas hyper encourageant.
Nous revoilà donc devant ce délicieux plat de friture, ou plutôt ce qu'il en reste. J'ai entendu parler de ce type, le barman du seul débit de boisson du coin, un jeune homme à la chevelure verte, plutôt simple à repérer. Pourquoi ce type m'intéresse-t-il ? D'après les locaux, il sait tout, il a des yeux et des oreilles partout. Et dans ce genre d'affaire, copiner avec un gars dans ce genre, c'est commencer la partie avec un avantage certain.
- "Je me demandais si tu n'allais pas en commander un quatrième..." me dit alors Yuzu avec un sourire amusé.
- "Oh ce serait de la gourmandise ça. T'es sûre que t'as pas faim ?"
- "Humpf.. Je dirais que t'as bien mangé pour nous deux. On s'met en route ?"
Yuzu, véritable touche de douceur sur cette fresque chaotique qu'est ma vie. Sans elle mon boulot serait bien triste, je dois l'admettre. Repas terminé et réglé, nous voilà tous deux à l’extérieur de l'auberge, le soleil est déjà aux abonnés absent et l'obscurité commence à envahir les ruelles de ce petit bourg. Vêtus de grands manteaux aux teintes sombres, surmontés de chapeaux en roseau, nous nous mêlons à la populace, à la multitude de marchands et voyageurs qui fourmillent encore dans la rue. Notre objectif, ce petit bar ou on peut trouver le dénommé Gunar et la ville n'étant pas bien grande, nous arrivons bien vite à destination.
Un petit bâtiment, qui extérieurement ne paie pas de mine. L'intérieur en revanche est bien plus chaleureux que je ne le pensais. Yuzu est restée en retrait, elle souhaite observer les allées et venues. Moi par contre, je ne me fais pas prier, j'entre, me faufile jusqu'au bar et commande un verre. Je vous assure que c'est pour passer inaperçu... La salle est plus spacieuse qu'il n'y parait, l'endroit est bondé de monde, ça danse, ça ricane, c'est plein de vie. Dans un coin au fond de la pièce un petit groupe de musique joue d'un air que j'ai déjà pu entendre il y a quelques temps de ça sur un navire marchand originaire d'Hinu Town. Sans doute un groupe itinérant. Le décor est planté et il ne me faudra que quelques minutes et deux-trois gorgées de ce whisky de qualité avant d’apercevoir notre cible qui revient vers le bar. Le type à la chevelure verte reprend son travail, je le vois nettoyer quelques verres, donner des ordres au reste du personnel, pas de doute, ici c'est bien lui le patron. Nos regards se croisent, il poursuit son nettoyage. Deux gorgées de plus, je balaye la pièce du regard, impossible de savoir avoir exactitude combien de personnes entrent et sortent de ce petit bar.
- "Un autre, étranger ?" me lance alors une voix derrière moi. Je fais volte-face et me retrouve nez à nez avec le type à la chevelure verdâtre.
- "Avec plaisir, merci..."
Cul sec, je pose mon verre sur le comptoir et mon interlocuteur y verse le précieux breuvage. Hochement de tête pour le remercier, je prends alors deux autres gorgées. Ce n'est pas le même whisky, là on est sur une toute autre qualité. En bouche, c'est la fête, c'est fin, une tourbe discrète, quelques notes d'agrume et un arrière goût vanillé. J'ai rarement bu un aussi bon whisky... Mais on est pas la
- "Parait que vous me cherchez ? J'ai cru comprendre que vous étiez descendus à l'auberge des Tanneurs il y a quelques jours ? Je dis vous par rapport à la charmante jeune fille qui était tantôt avec vous. J'ai une question, que fait un chasseur de prime dans un petit bar tranquille de Poiscaille ? me dit il alors d'un ton calme tout en essuyant une choppe qu'il vient de nettoyer.
Sans doute sa manière à lui de souligner avec une insistance certaine, qu'ici c'est lui le boss. A vrai dire, ça ne me pose aucun problème, c'est même tout l'inverse, il vient de me prouver que ce qu'on dit de lui est vrai. Que sa réputation n'est pas usurpée. Je souris alors, amusé par la situation, amusé par ce petit jeu de "qui sait quoi" qui vient de se mettre en place malgré moi, et tout en le toisant, je termine mon second verre aussi sec avant de le reposer délicatement sur le comptoir.
- "On m'avait dit que vous étiez le genre de type bien renseigné. Je.. Nous sommes ici pour affaire. Et j'ai le sentiment que vous pourriez nous aider.
- "Ah vraiment ? Et en quoi pourrais-je bien aider deux étrangers de votre acabit ? Mmmh ? ... J'imagine que ce type, le .. Taxidermiste ? N'est pas étranger à votre présence sur cette île ? J'ai bon ? ajoute-t-il sans même m'accorder un regard, se contentant de remettre les choppes propres sur l'étagère qui surplombe le comptoir.
- "Dans le mille. On m'a dit que vous aviez des yeux et des oreilles partout, je suis venu vérifier si vous étiez à la hauteur de votre réputation.
Le type se fige, tourne la tête lentement vers moi, et son air jusqu'alors impassible laisse place à un très léger sourire. Touché. On dirait bien que j'ai touché la corde sensible. Cet homme est surement extrêmement fier de sa position, sans doute extrêmement fier d'être celui que l'on vient consulter lorsque l'on espère obtenir des lumières sur un associé peu scrupuleux ou encore une épouse infidèle. Le voilà qui pose carrément un second verre à côté du mien avant de les remplir tous deux du même whisky succulent auquel j'ai eu droit juste avant. Une seconde d’hésitation plus tard, je prends mon verre, bois une gorgée, mes papilles s'affolent de nouveau pendant que le type m'imite. Je m’aperçois alors que les présentations ne sont pas faites, et de toute évidence, le même constat vient de traverser l'esprit de mon nouveau compagnon de beuverie.
- "Je suis Gunar, et ce bar m'appartient. Et vous êtes ..?" me dit il calmement en me regardant droit dans les yeux.
- "Appelez-moi Wes. Et si nous discutions de l'affaire qui m'amène ?"
- "Je vous en prie Wes, j'ai l'intuition que certaines questions vous brûlent les lèvres. Allons-y sans détour." ajoute-t-il avec un léger sourire.
Rarement vu un mec avec autant d'assurance, j'ignore s'il sait réellement quelque chose au sujet de ce tueur en série, mais il est actuellement ma meilleure chance d'obtenir des infos dans cette sombre affaire. J'oublie un instant Yuzu, pour m'adonner à une conversation qui promet d'être enrichissante ne serait-ce que pour comprendre un tant soit peu ce qui se passe dans ce petit bourg de pécheurs, d'ordinaire sans histoire.