Est-ce un Bateau ?
Est-ce un Poisson ?
Non, c’est un Cochon !
Est-ce un Poisson ?
Non, c’est un Cochon !
Présent
✘ Quête Solo
✘ Quête Solo
Un océan, calme et brillant sous les reflets dorés d’un soleil chatoyant. J’avais embarqué il y a de cela une semaine sur ce navire marchand, monnayant le passage grâce à une bourse subtilisée sur le port. Je ne regrettais pas ce geste, la victime étant richement pourvue j’en avais conclus que sa bourse ne lui manquerait pas. Le transport m’avait ainsi coûté une bonne partie de l’argent volé, ne me laissant que de quoi m’éponger le gosier dans une taverne pour une soirée, peut-être même pour une nuit si l’établissement n’était pas trop cher. Enfin, c’est tout ce dont j’avais besoin, une bonne bière et l’embrun marin. Une douce brise me chatouillait le visage, faisant voleter les quelques mèches de cheveux argentés qui dépassaient de ma casquette. Les pans de mon sweat-shirt, noué à ma taille comme à mon habitude, dansaient dans le vent derrière moi qui étais assis là, sur la proue du navire. J’avais un point de vue imprenable sur le vaste océan de South Blue, admirant le paysage en égrenant quelques accords sur le luth que j’avais emprunté à un matelot. L’homme avait d’abord refusé devant mon insistance, persuadé que je le lui volerais, mais j’avais sus le rassurer et le convaincre quand j’avais retiré mon sweat-shirt devant lui. Bien que, maintenant que j’y pense, ce geste avait peut-être été mal interprété. Les notes de l’instrument m’accompagnèrent dans cet instant de contemplation, finalement avalées par le bruit des vagues. Les vagues venaient s’écraser sur le navire dans un tintement de percussion auquel je me joignis. Certains matelots s’étaient arrêtés dans leurs tâches pour m’écouter, d’autres qui ne lésinaient pas battaient simplement du pied sur le pont.
« Terre en vue ! » s’écria soudain la vigie depuis son perchoir. « On arrive à Rhétalia, Capitaine ! »
Le pont se mit en branle, chaque matelot qui flânait rejoignit son poste avant que le capitaine ne pointe le bout de son nez. Et il ne tarda pas, ouvrant la porte de sa cabine de manière théâtrale, avec fracas en la poussant fort contre le mur, sa grosse paluche velue plaquée dessus, son air autoritaire toujours imprimé sur son gros visage barbu. Le Capitaine Vergas, pour vous servir messieurs dames. Un gros bonhomme bougon en permanence, à grommeler dans sa barbe, mais gentil comme tout après une demi bouteille de rhum. Et sacrément doué aux cartes l’enfoiré, il m’avait presque plumé pendant la semaine. Malin, le vieil homme.
« C’est pas trop tôt ! » s’exclama Vergas, avançant de son pas lourd et titubant, penchant d’un côté puis de l’autre, ses pieds touchant rarement le sol au même moment. « A vos postes, bande de larves ! Clitus, bouges-toi le cul, je te paies pas à rêvasser ! Ernest, tu la gères cette voile ou j’embauche quelqu’un de compétent pour te remplacer ? » aboya-t-il à ses hommes, ceux-ci se dépêchant d’obéir à ses ordres. « Raaaaah, tous des incapables ceux-là j’te jure Ralalalala ! » bougonna-t-il assez fort en s’approchant de moi à la proue. « Alors blanc-bec, on rêvasse face à l’océan ? »
Blanc-bec, c’était le surnom qu’il m’avait trouvé après la première soirée à se saouler en jouant aux cartes. Au moins, ce n’était pas ‘l’albinos’, c’est déjà ça. Il se plaça à côté de moi, observant l’horizon tout comme je le faisais, crachant la fumée de sa longue pipe qui s’envolait au gré du vent.
« Je profite du paysage et d’un vent de liberté. » répondis-je songeur, fixant l’île vers laquelle nous nous approchions.
« Hum, pour ce qui est de la liberté, c’est pas vraiment l’odeur de là où nous accostons aujourd’hui. » fit-il alors, marquant une pause tandis qu’un filet de fumée s’échappait de ses lèvres. « Rhétalia, le Pays aux Milles Pyramides... »
« J’en ai entendus parler. » soufflais-je doucement, appréhendant mes propres réactions dans un tel endroit, à l’opposé de mes convictions.
Pour moi, la liberté était fondamentale. J’avais vécus la majeure partie de ma vie emprisonné dans un rôle que j’aurais préféré éviter, mais c’était fait. J’avais volé pour retrouver ma liberté, j’avais trahis et j’avais tué. Je pouvais vaguement imaginer ce que vivaient les vrais esclaves à Rhétalia, de plus l’endoctrinement auxquels ils étaient soumis les privaient de l’espoir.
« Quel enfer. » finis-je par dire, pas vraiment à l’attention de Vergas, c’était une simple constatation.
Heureusement pour moi, ce n’était qu’une escale dans mon voyage sur le navire marchand. Alors que nous nous approchions, les nombreuses et immenses pyramides apparurent les unes après les autres dans le paysage. Majestueuses, trônant fièrement ici et là, symbole d’un pouvoir basé sur l’esclavagisme. Cependant, je n’étais pas venu en ces lieux pour changer le système, je suivais ma voie. Soufflant une nouvelle fois, dépité que de telles traditions subsistent, je reprenais le luth en main pour continuer à jouer, un air mélancolique parfaitement en accord avec ce que je ressentais en pensant à tout ça.
« Show must go on. » dis-je alors, pensif tandis que les notes s’envolaient autour de moi, accompagnées des bruits des vagues, des cordages, des voiles et des mouettes.
Le navire emprunta alors un fleuve pour remonter au milieu des terres de Rhétalia. Le Rubis comment l’avait appelé le capitaine, le plus grand le fleuve de l’île qui nous mènerait droit jusqu’à notre destination : la Nova Rhodésia. Vergas, bien qu’il ne paraissait pas être un mauvais bougre, ne semblait pas tremper que dans des business légaux. Enfin, personne ne m’en dit rien, mais les nombreuses cargaisons louches dans la cale parlaient d’elles-même.
La remontée du fleuve nous prit plusieurs heures avant d’arriver à la Baie aux Chagrins, un nom qui respirait l’endroit calme et tranquille. La grande cité portuaire apparaissait fièrement au creux des bras de la baie, une image que je trouvais assez représentative des activités qui avaient cours en ces lieux. Je me levais enfin de la proue, arpentant le pont pour rendre son luth au matelot qui esquissa d’abord un mouvement de recul par réflexe. Décidément, je lui avais laissé une sacrée impression à celui-là.
« Tu vois, je te le rends, pas besoin de paniquer mon gars ! » lui dis-je en affichant un grand sourire avenant et rieur.
« Je...J’suis pas ton gars mon pote. » murmura-t-il en détournant le regard, gêné.
« Quoi ? Eh ! J’suis pas ton p... » commençais-je avant de m’arrêter et de lui faire un signe de la main. « Oh et puis merde, laisse tomber. »
Je m’éloignais, m’arrêtant au bord du bastingage pour observer le navire s’amarrer au port. L’activité grouillait ici, des hommes et des femmes qui portaient des marchandises, déchargeant à la hâte les cargaisons des navires qui s’y arrêtaient, sous l’œil attentif de leurs maîtres. Enfin, le navire marchand s’amarra à un ponton, lâchant l’ancre qui se déroula dans un bruit métallique. Je me craquais la tête en la tournant à droite puis à gauche, bougeant légèrement les épaules en cercle, resté trop longtemps en tailleur sur la proue. Les matelots se mirent à décharger leur cargaison, aidés par des esclaves que Vergas avait loué pour la tâche à leurs maîtres. Un principe que je ne connaissais pas, la location d’esclave, mais qui devait être fort lucratif. A tout les coups ils possédaient une carte de fidélité.
« Eh blanc-bec ! » m’interpella Vergas. « On met les voiles demain midi, sois à l’heure ou on part sans toi, ce qui serait con vu que t’as payé pour tout le voyage. »
« Okay, on se revoit demain vieil homme ! » lui répondis-je en m’éloignant, arpentant le ponton en lui faisant un signe de la main en lui tournant le dos.
J’avais du temps à tuer jusqu’au lendemain, et j’avais envie de me dégourdir un peu les jambes avant d’aller à l’auberge. Enfin, le coin n’était pas le plus adapté pour une promenade. Près de la moitié des personnes que je croisais étaient des esclaves, reconnaissables à leur regard vide, dépourvu de toute émotion hormis la nécessité d’obéir à son maître et de le satisfaire. Généralement, je détournais le regard, je maintenais la colère qui montait en moi dans une boîte de déni. Autrement, j’aurais éclaté le crâne de ce dresseur sadique qui s’amusait à jouer du fouet sur deux esclaves. Le sifflement de l’instrument de dressage claquant à quelques mètres, un bruit qui tient de l’horreur dont seul l’homme est capable. Je soufflais, déprimé par tant d’absurdités, quand soudain des exclamations un peu plus loin, causée par une petite foule, attira mon attention. Je m’approchais, les mains dans les poches. Un petit monde s’était regroupé devant un navire immense, parlant entre eux, surexcités.
« Tu le vois d’ici, non ? » dit une femme à son amie.
« Non, mais j’ai vu sa truffe tout à l’heure ! Et tu sais quoi ? »
« Non ? »
« Il est tout vert ! » finit alors la seconde, je décidais de me détourner de leur conversation.
Je passais dans la foule en levant les yeux vers le pont qui, à la taille du navire, devait pouvoir accueillir une petite armée. Pourquoi avoir besoin d’un tel bâtiment ? Je m’arrêtais derrière deux hommes en costumes à l’allure chic. Les yeux toujours en l’air, j’aperçus alors quelque chose. Un énorme cercle vert, percé de deux trous. Intrigué, je plissais les yeux pour y voir mieux, mais je devais probablement me tromper. Enfin, ça me rappelait ce que disait une des femmes que j’avais écouté plus tôt.
« Ah ! Quel spectacle ce sera ! » s’exclama l’un des hommes en costume à son camarade.
« Ce genre de bête, ça ne se voit pas tout les jours. » répondit l’autre.
« Ah ! Un cochon de cette taille, ce n’est pas commun. »
Intrigué, et surtout choqué par la déclaration de l’homme en costard, j’avançais ma tête entre eux, au-dessus de leurs épaules, les observant d’un air ahurit avec de gros yeux.
« Vous avez bien dit un COCHON ?! » m’exclamais-je, ne respectant pas les us et coutumes de la bourgeoisie.
Fiche par Ethylen sur Libre Graph'
Dernière édition par Ren Aoncan le Ven 18 Mar 2022 - 3:39, édité 1 fois