Un Petit Poisson dans une grosse Flaque
La traversée commença bien, au sein de cet immense navire, dans le boxe de Borat. Je m'étais assuré qu'il soit calme et qu'il s'endorme tranquillement avant de quitter son énorme pièce, assez spacieuse pour accueillir son royal postérieur. Son gros ventre, renversé sur le côté, avait finit par se gonfler pour relâcher de lourds souffles de ronflement, soulevant la paille devant ses naseaux. Puis, j'étais sortis du boxe, arpentant l'immense couloir où de nombreux cris d'animaux résonnaient au travers de la pièce géante. Grégor Athelbaf nous avait laissé nous reposer après nous avoir conduit jusqu’ici, m’invitant à le rejoindre plus tard sur le pont pour me parler. Je ne savais pas ce qu’il me voulait, mais je me méfiais de cet homme aux allures de mafieux, avec ses sourires carnassiers qui me faisaient froid dans le dos. Néanmoins, il avait tout de même réussit à me convaincre d’accepter sa proposition. Comment refuser en même temps ? Moi qui étais fauché, me payer un trajet aussi cher à moi et Borat, l’occasion était bien trop rêvée pour ne pas la saisir.
Le navire était composé de plusieurs strates, le grand entrepôt à bestiaux dans lequel j’étais en était la dernière ainsi que la plus spacieuse et haute de plafond. En grimpant les escaliers, j’atteins l’étage supérieur destiné à des cargaisons plus banales, des caisses à perte de vue hormis pour des passages entre elles qui formaient un véritable labyrinthe. Grâce à des panneaux pour indiquer le chemin j’atteignis le prochain escalier. La dernière strate avant le pont était destinée aux cabines, cuisines et tout ce qui est nécessaire à la vie à bord de l’immense navire. Je grimpais enfin le dernier escalier après avoir emprunté de nombreux couloirs et m’être perdu plus d’une fois. J’atteignis alors le pont, j’en profitais pour prendre une grande inspiration d’air frais, les odeurs des nombreux animaux du dernier palier m’étaient restées dans le nez pendant tout le trajet. Je pus ainsi observer l’immensité de la mer, la hauteur du bâtiment permettait de voir l’océan d’un point d’observation que je n’avais jamais atteint jusque là. Tel un aigle qui observe sa proie haut dans le ciel, je m’approchais du bastingage pour admirer la vue, me rendant compte de la hauteur qui me séparait de la surface de l’eau.
« C’est magnifique. » soufflais-je, admiratif en observant la mer qui s’étendait jusqu’à se fondre dans le ciel à l’horizon.
J’avais dormis dans le boxe de Borat une bonne partie de l’après-midi, le soleil commençant à se coucher à l’horizon. La grande boule de feu vint épouser l’océan, descendant peu à peu en coloriant le ciel de milles couleurs. Des dauphins bondissaient en banc hors de l’eau à une centaine de mètres et de longs bancs de poissons passaient sous le navire. Je me remis à marcher sur le pont immense, je passais à côté d’un mât aussi large qu’un arbre centenaire et vêtu d’une voile gonflée tout aussi grande. Une centaine de matelots s’affairaient à leurs tâches quotidiennes sur le pont du navire, courant dans tout les sens comme des fourmis. Je dus d’ailleurs en éviter plusieurs alors que j’avançais tranquillement, les mains dans les poches en sifflotant. En regardant devant moi, j’aperçus Grégor, toujours entouré de cinq de ses gardes, des espèces de gorilles tout en muscle, comme moulés dans leurs costumes.
« Hey par ici ... » commença-t-il en levant la main dans ma direction tandis que j’approchais. « Je me rends compte que je ne connais même pas ton nom. »
« Appelez-moi simplement Mazino. » lui répondis-je simplement, sans un sourire mais sans être froid pour autant.
« Très bien Monsieur Mazino. » reprit-il alors, enchaînant directement comme s’il était pressé. « J’aurais adoré vous faire visiter cette merveille de navire moi-même, seulement des affaires urgentes demandent mon attention. Cependant, mes hommes ici présents se feront un plaisir de vous accompagner pour vous montrer tout les secrets de ce navire. » dit-il, presque d’une traite, désignant les cinq gorilles qui avoisinaient tous les deux mètres.
« Hm je préférerais visiter seul. » fis-je en observant les cinq hommes aux visages patibulaires, pas convaincu pour un sou.
« Pour votre sécurité, bien entendu. » continua-t-il pour me rassurer, cette phrase sonnait comme répétée de nombreuses fois. « Vous savez, de nombreux bandits, criminels et pirates empruntent ces transports pour subtiliser leurs biens aux passagers. Et, sur mon honneur, je ne laisserai jamais mes chers clients être mis en danger. Ainsi, vous comprendrez mon insistance à vous confier à la protection de mes hommes. » sa tirade finie, il plaça une main sur son cœur en me saluant en se baissant légèrement en avant. « Je vous prie de m’excuser si cela vous met mal à l’aise. »
Je l’observais attentivement, de son sourire commercial à ses manières, dans ses gestes et son regard perçant qui tentait de lire en moi. Je faisais en sorte de ne pas laisser une seule émotion transparaître, gardant mes doutes pour moi. A sa longue tirade, j’avais compris que quoi que je dise pour me débarrasser de ses gorilles il trouverait une excuse pour me les imposer. Il était fort pour tourner les choses dans son sens, et je m’inquiétais d’où il allait bien pouvoir aller pendant que ses gardes me feraient ‘visiter’ les lieux.
« Bien, j’imagine que je n’ai pas le choix. » répondis-je finalement en hochant la tête, résigné à devoir en passer par là.
Sur ces mots, Grégor tourna les talons et disparut par un escalier menant aux paliers inférieurs. Les cinq gorilles m’entourèrent et celui en tête me fit signe de le suivre. Ils ne parlaient pas, même pas entre eux, leurs visages fermés ne me jetant même pas un regard. L’avantage était, qu’en effet, personne n’osait m’approcher ou me chercher des noises. Le désavantage était que, bien qu’ils étaient censés me montrer les environs du navire, ils me bouchaient la vue, ne voyant que par intermittence de leurs mouvements d’épaules dans leur marche, un interstice se créant de temps en temps. J’avais l’impression d’être enfermé en cage et, ce n’était vraiment pas à mon goût.
Ils passèrent ainsi près d’une heure à me montrer différents endroits du navire, bien que la visite était si imprécise et désordonnée que je ne saurais retrouver mon chemin tout seul. Plus nous avancions désormais, et moins il y avait de personnes autour de nous. Le soleil s’était couché et seules des lampes à huile et des torches éclairaient les lieux. Nos pas nous menèrent jusqu’à un pont arrière, à l’abri des regards derrière un ensemble de cabines. La cage de gorille s’écarta finalement, les cinq hommes toujours m’entourant firent deux pas en arrière avant que leur chef prenne la parole.
« Bon, tu dois te douter de ce qu’il va se passer maintenant. » me fit-il en me défiant du regard, son large poing s’écrasant dans sa main ouverte.
Fiche par Ethylen sur Libre Graph'
Dernière édition par Ren Aoncan le Dim 27 Mar 2022 - 20:30, édité 3 fois