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Le Procès de Mûre en Vert

Robina se réveilla, avec la faim qui lui tenaillait le ventre, bientôt deux jours qu’elle n’avait rien avalé, elle passait le plus clair de son temps à ne rien faire, pour ne pas trop se dépenser et garder ses forces s’il se passait un imprévu. La porte de sa chambre s’ouvrit, la femme champignon qu’elle connaissait depuis maintenant trois jours lui apporta un paquet, à manger, elle pouvait le sentir à l’odeur qui se dégageait du paquet.

Tenez, c’est pour vous, un de mes soldats n’a pas eu de difficulté à se rendre à Cactus Town, il a pris de quoi manger, je ne sais pas combien de fois par jour vous faites un repas, et combien vous absorbez, il a donc pris seulement ça.

Seulement, était un mot qui n’allait pas avec la situation, il aurait collé s’il avait pris trois brochettes de cactus et une saucisse, mais ici, le sac que portait la jeune chanterelle était si imposant, qu’elle avait du mal, malgré sa force physique à passer la porte avec. Quand elle ouvrit le contenant, des dizaines de kilogrammes de nourriture tombèrent sur le sol, saucisses, rôtis de porc, brochettes de cactus, de bœuf, de dinde, des poissons en papillote, elle ne savait plus où donner de la tête, tant il y en avait.

Je vous remercie, mais c’est trop.

Mais non, ça n’est rien, je vous devais bien ça.

Non, je veux dire, c’est trop, il y a trop de choses, je ne pourrais jamais avaler ça.

Ah ! Je pensais que vous n’auriez pas assez.

Nous ne mangeons pas tant que ça, nous les humains, une tranche ou deux de ça. Elle montra un des rôtis de porc. Ou quelques brochettes et nous sommes pleins pour plusieurs heures.

C’est fascinant, je ne savais pas qu’il vous fallait si peu pour vous nourrir.

Vous pensiez qu’il nous fallait quoi exactement ?

Eh bien, au moins ça, pour que vous teniez quelques jours.

Nous mangeons peu, mais souvent, trois fois par jour. Tout ce que vous venez de m’amener, pourrait me durer des semaines, seulement, ça sera perdu d’ici deux jours, au grand maximum.

Perdu ? Pourquoi ?

Parce que dans deux jours, même moins, si ça se trouve, les aliments vont commencer à avoir un goût acide, voir plus sucré, ça n’est pas une bonne chose, c’est le début de la décomposition, ils feront un très bon engrais, mais ça ne sera plus de la nourriture.

Oh, d’accord, il vous faut donc peu de chose, mais souvent.

Exact, mais je vous remercie beaucoup de cette attention.

Mais de rien, après tout, nous sommes amies.

Elles discutèrent de sujets divers, tels que la vie en dehors du village des légumes, l’enfance de la jeune femme sur Sanderr, très patriotique, elle était intarissable sur le sujet, ce qu’elle mangeait à l’extérieur, les différentes îles qu’elle avait visitées, tant de sujets et si peu de temps.

Il va être l’heure d’y aller, Robina.

Déjà ? J’espérais ne pas devoir y aller.

Malheureusement, vous ne pouvez pas y échapper.

Très bien, j’espère juste que le jugement ne sera pas fini dans la journée, j’ai l’impression que ça va être long.

Je le pense aussi, ne vous inquiétez pas, vous n’avez rien à vous reprocher, vous allez vous en sortir.

C’est tout ce que je souhaite.

La cuisinière souffla et se releva de son lit où elle s’était assise pour manger, n’ayant pas de table pour s’installer, elle avait fait une sorte de pique-nique improvisé, piochant dans différents produits, pour se remplir lentement l’estomac en ne se faisant pas de mal. Elles laissèrent le tout sur le sol, l’Amirale abuserait de ses pouvoirs pour que la chambre soit propre quand elles reviendraient le soir, la jeune Sanderrienne sourit en entendant ça, elle était une femme de pouvoir qui rendait la vie plus facile à son ami, en ordonnant que sa chambre soit nettoyée. D’un côté, elle était heureuse, c’était quelque chose qu’elle n’aurait pas à faire, de l’autre, elle aurait voulu que Chante ne le fasse pas, pour ne pas donner plus de travail aux domestiques. Elle hocha des épaules en esprit, ils l’avaient mis en prison, ils pouvaient bien s’occuper de ça pour elle, c’était un prêté pour un rendu.

Elle croisa les deux gardes aux côtés de la porte de sa « cellule », un fruit avait été échangé avec un ancien garde des hommes de confiance de Relle, il la foudroya du regard, si le comportement des légumes avait été jusqu’ici neutre envers l’humaine, les fruits étaient beaucoup plus belliqueux. Les deux soldats suivirent sans la foulée les deux femmes, chacun à un côté de la chasseresse de primes, quelques pas en arrière, de quoi avoir la marge de manœuvre pour s’armer si les événements tournaient mal, son amie lui avait expliqué pendant une de leurs rares conversations.

Pourtant, au grand regret de l’homme fruité, la jeune femme ne fit aucune résistance alors qu’elle suivait le tapis sous la surveillance des trois membres du peuple végétal, dans un silence pesant, la procession passa devant plusieurs membres des deux peuples, tous la regardèrent en lui laissant des regards assassins. Elle sortit dehors pour la première fois depuis deux jours, la lumière lui brûla les yeux, il lui fallut quelques secondes pour s’habituer, malgré cela, le fruit la frappa d’un coup de lance qui la fit tomber à genoux.

Avance !

Vous êtes des invités du peuple Légumes, ne maltraitez pas les prisonniers.

Elle ne voulait pas se rendre au tribunal.

Elle n’est pas sortie depuis des jours, elle s’est fait éblouir, ça n’était que temporaire. Elle ira jusqu’au tribunal, nous sommes en avance encore.

Plus vite, je serais loin de cette humaine, mieux je me porterais.

Vous pouvez partir si vous voulez, au moins, vous n’aurez plus à la supporter.

Mes ordres sont clairs Amiral Relle, je dois escorter la cuisinière jusqu’au tribunal avec vous.

Alors ne maltraitez pas la prisonnière, ils ont beau mal se comporter avec nos semblables, nous n’avons pas à être des monstres comme eux.

Je comprends, j’écouterai vos ordres jusqu’à ce que nous ayons atteint la fin de notre convoi.

Parfait, alors laissez cette humaine pour l’instant, elle mourra bien assez vite.

Robina avait beau savoir que le rôle que jouait Chante Relle n’était pas réel et qu’elle ne faisait cela que pour garder sa place au sein des juges et ainsi qu’elle ait une alliée dans le groupe, elle avait presque cru à son petit cinéma, c’était dire à quel point elle était sérieuse dans son rôle. La Sanderrienne se releva et se frotta les genoux, quelques griffures, mais rien de grave, elle foudroya le fruit du dragon des yeux et se dépoussiéra avant de se tourner vers la cheffe de l’armée légume.

C’est bon, je suis prête.

La femme champignon hocha de la tête et reprit la route, au loin, le bâtiment qui existait depuis quelques mois dominait les alentours, à part le palais royal, un arbre d’une trentaine de mètres de haut, le tribunal de Mûre en Vert. La masse du végétal écrasa la jeune femme en posant les yeux dessus, elle ne l’avait pas vu le premier jour, caché derrière le palais, c’était ici que son destin allait se jouer.
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Robina se faisait escorter par les hommes armés, sur le bas-côté, des légumes les suivaient du regard, elle savait ce qu’ils pensaient, les regards de haine, de dégoût ainsi que de colère se posaient partout sur elle. Parfois, un légume ou un fruit la regardait avec tristesse, pitié, ils savaient qu’elle n’allait pas s’en sortir, l’Amirale de l’armée légume avait été très claire, elle partait déjà avec la tête au bout d’une corde, à elle d’avoir la défense qui les ferait tous changer d’avis. Et cela n’allait pas être une mince à faire, tous la voyaient comme un monstre abominable qui s’amusait à tuer leurs congénères.

Elle devait déjà briser cette illusion, oui, le stress, la fatigue ainsi que la peur l’avait bloqué tout ce temps, maintenant qu’elle avait au moins l’estomac plein et les idées en place, elle n’allait pas rester au pied du mur, elle grimperait jusqu’à surmonter cet obstacle, une fois libre, elle pourrait enfin discuter avec Chante Relle sans être en prison. Malgré le fait qu’elle était sa gardienne, les deux femmes s’étaient trouvées des envies communes, l’aventure, la découverte de nouveaux endroits, de nouvelles personnes, cette excitation qui montait alors qu’elle ne savait pas ce qui allait se passer, bien que dans la vie de la cuisinière, cela soit rarement bon signe, tout cela les avaient rapprocher.

Les pieds de la chasseresse de primes se posèrent enfin sur les marches modelées dans le bois de l’écorce et des racines de l’arbre tribunal, elle leva les yeux vers l’entrée, les portes s’ouvraient sur un grand hall sculpté par les pouvoirs des légumes. Ici, plusieurs escaliers partaient dans différentes directions, elle ne savait pas où ils menaient, cependant, les deux gardes derrière elle s’arrêtèrent alors que ceux qui se trouvaient devant le tribunal arrivaient en vue.

La prisonnière a été escortée jusqu’au tribunal, nous vous laissons, vous et les chevaliers cactus prendre le relais.

Je vous remercie de votre travail soldat, j’informerai le Secrétaire Général de votre exemplarité.

Je vous remercie Amirale. Au plaisir de retravailler avec vous.

Elle se tourna vers l’entrée du bâtiment et continua son chemin, son sabre fongique dans la main, elle en était experte dans le maniement, pour soigner les apparences, elle la tenait dans sa main droite, montrant au peuple qu’elle était prête à attaquer si l’accusée tentait de s’enfuir. Néanmoins, les armes de la capitaine des Glaciers se trouvaient dans son dos, à tout juste un mètre de distance, elle n’avait qu’à bondir pour les récupérer, si la femme voulait s’enfuir, elle avait le choix comme ça, pourtant, elle n’en éprouvait pas le besoin, face à cette situation, elle était calme, tout comme sur l’Îlot Flottant, quand sa mort approchait, elle avait préféré mourir comme elle le souhaitait, plutôt que de la main de son adversaire.

Ici, la sérénité qui l’avait envahi était la même, elle n’avait pas peur, parce qu’elle avait choisi d’y aller de son propre chef, elle était peut-être sous bonne garde, cependant, elle aurait pu filer aussi rapidement qu’elle le voulait. La femme Champignon se tourna vers elle et lui sourit légèrement.

Nous pouvons y aller ?

Oui, qu’on en finisse.

Deux chevaliers s'approchèrent de Robina au signal de la femme champignon, elle savait déjà qu'elles allaient se séparer à l'arrivée au tribunal, aucune surprise, pourtant elle aurait préféré que Chante la suive plus longtemps. Elle souffla et posa ses yeux sur les deux guerriers ou guerrières, elle n'en savait absolument rien, l'armure qui les recouvrait, une sorte de membrane de cactus que les deux peuples travaillaient pour les rendre solide, si résistant qu'ils pouvaient arrêter les balles. Leur bouclier était un véritable pavois d'une hauteur pouvant atteindre le mètre trente, seul les plus grands et forts de l'armée pouvaient prétendre au titre prestigieux de garde du tribunal, ces derniers firent un geste du bras pour inviter l'humaine à le suivre.

Veuillez nous suivre s'il vous plaît !

Ne le voulant pas, mais n'ayant pas le choix, elle prit appui sur la marche devant pour se hisser après plusieurs d'entre elle au niveau des personnes en armure.

Allons-y.

Elle passa devant les deux guerriers devant elle, surpris par sa réaction l’habitude, qu’ils avaient, était plutôt de trainer les accusés derrière eux alors qu’ils criaient leur innocence, ils haussèrent les épaules en se regardant l’un l’autre puis de suivre la jeune femme jusqu’aux portes du bâtiment. Ici, c’est celui de gauche qui dépassa Robina pour se glisser devant elle, ils la guideraient jusqu’à sa cellule, chaque pièce d’armure des soldats était entretenue religieusement, elles semblaient faites d’acier, réfléchissant la lumière du soleil, les pointes faisaient dix centimètres de long, de quoi infliger de lourds dégâts à ceux qui s’attaquaient à ces hommes.

Elle recula de quelques pas, le soldat derrière elle calla son rythme sur le sien, pour ne pas la perdre de vue tout en lui laissant un espace vital, ici, aucune animosité, pas de réflexion sur sa race, sa profession, juste leur travail qu’ils effectuaient avec professionnalisme. Le dédale de couloirs était plus simple que dans le palais, ils prirent des escaliers menant au sous-sol, tout était composé de végétaux, de l’écorce, des racines, des feuilles… Elle se trouvait dans une des cités fantastiques qu’elle pouvait lire dans ses romans de cape et d’épée, sauf qu’ici aucune marraine la bonne fée ou de pouvoir magique pour s’enfuir.

La cuisinière se retrouva dans une pièce avant une chaise, un bureau et plusieurs étagères remplis de dossiers, de livres et de divers trophées, bibelots ou objets en tout genre, pas véritablement une cellule, c’était plutôt le bureau de quelqu’un. Les deux personnes qui l’avaient escorté se trouvaient maintenant devant la porte, l’empêchant de s’enfuir, aucune fenêtre, mis à part un petit conduit d’aération, elle se devait maintenant d’attendre pour le procès.

La chasseresse de primes était nerveuse, l’attente était interminable, combien de temps s’était-il passé depuis son arrivée dans cette salle ? Aucune horloge, ou point de repère pour savoir, même les chevaliers devant la porte ne bougeait pas, ne faisant aucun bruit. Elle aurait pu se distraire, en comptant le nombre de bruit de friction entre les morceaux de l’armure de cactus, les bruits de pas sur le sol s’il y avait eu du monde à l’extérieur mise à part les deux soldats, mais rien, cela la minait, il fallut attendre qu’une porte s’ouvre de l’autre côté pour que la monotonie se brise.

Faites-la sortir, la salle est prête. Les juges aussi.

La porte s’ouvrit pour laisser passer un troisième cactus qui la regarda intensément avant de prendre la parole.

Suivez-moi accusée. Nous allons vous escorter jusqu’au banc des accusés.

La Sanderrienne se leva de la chaise, elle était sereine, elle se sentait bien, elle regarda ses doigts, longs, fins, fermes, elle pouvait voir chaque fissure, les grains des tableaux et de sa peinture, ses sens étaient exacerbés par la pression grandissante et la peur de mourir. Pourtant, le calme régnait en elle, ses idées étaient claires, elle serait libre quand elle ressortirait de ce tribunal pour la dernière fois, et non enchaînée, à partir, pour la potence où elle en était sûre, la majorité des personnes des deux peuples seraient heureuses de la voir mourir.

Une petite porte au loin, qu’un garde d’épine ouvrit pour laisser passer la jeune femme, une grande pièce s’ouvrit à elle, toute sculptée dans les fibres du bois de l’arbre qui lui servait de squelette, elle ouvrit de grand en voyant le siège qui l’attendait. La porte se referma derrière, elle allait maintenant devoir attendre sur le banc des accusés, déjà la salle était pleine de curieux, la majorité était des légumineux, pourtant quelques fruits se trouvaient dans les premiers rangs, ils voulaient voir une humaine se faire juger coupable pour tous les crimes contre leurs congénères dans le monde.

Son destin se jouerait ici dans les prochains jours, elle allait tout faire pour s’en sortir vivante.
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En attendant le début du jugement, la jeune femme regarda à droite et à gauche, des bancs avaient été préparé en nombre pour laisser s’asseoir le plus de personnes possibles dans la pièce, les portes étaient ouvertes, encore, chacun jouant des coudes pour être témoin d’un des plus grands événements de l’histoire des fruits et légumes. Plusieurs gardes cactus créaient un cordon, autant pour la sécurité de l’accusée qui pouvait sentir les regards de haine, que pour les citoyens qui pouvaient envahir la zone de la salle d’audience très rapidement vu le nombre de personnes qui se trouvaient là.

Elle voulut demander quand les juges allaient arriver quand tout à coup un petit fruit ouvrit une porte sur le côté de la pièce, il sursauta quand il croisa le regard de la jeune femme puis reprit son chemin jusqu’à un pupitre où se trouvait une grande pile de dossiers et de papiers. Il récupéra plusieurs feuilles, jeta un coup d’œil rapidement à ces derniers et s’éclaircit la voix, il semblait être celui qui lançait la cérémonie, il frappa dans ses mains et d’un seul tenant, les chevaliers cactus frappèrent le sol de leur bouclier, le silence se fit instantanément dans la salle.

Je vous remercie, veuillez-vous lever pour accueillir mesdames et messieurs les juges suprêmes !

D’un seul mouvement, toute la salle se leva, un bruit de talons, de mouvement dans la salle, comme un bruissement léger qui s’éleva dans les airs, de chaque côté de la salle, cinq représentants de chaque peuple, dix juges en tout, elle allait devoir ne pas perdre l’équilibre et avoir de bons arguments pour ne pas finir les pieds devant.

Le Secrétaire Général John Lemon.
Secrétaire Général John Lemon:

L’homme citron salua la foule avant de s’installer.

La princesse Diana Pea.
Princesse Diana Pea:

La petite princesse s’inclina respectueusement avant de s’asseoir dans sa chaise.

La reine de Frutopolis, Yuzu Uno.
Reine de Frutopolis:

Une femme avec des ailes dans le dos, un sucre transparent composait ces dernières, rentra dans la pièce, son regard hautain ne quitta pas la jeune femme et son buste en écorce de citrus lui descendait jusqu’aux hanches.

La conseillère Carro Rott.
Conseillère Carro Rott:

Elle salua d’un geste de la main, la foule et croisa les jambes sous son pupitre pour s’installer, ignorant la Sanderrienne.

Le général Yan Durri.
Général Yan Durri:

Un durian d’environ deux mètres de haut, entra dans la pièce, il jeta un regard noir sur la cuisinière puis balaya la pièce des yeux, comme analysant ce qu’il voyait.

L’Amirale Chante Relle.
Amirale Chante Relle:

L’amie de la jeune femme aux cheveux bleus lui jeta un rapide regard, lui souriant, puis reprit un visage fermé, elle ne pouvait pas montrer son amitié en plein jour. Elle posa son arme à ses côtés et regarda la pièce dans sa globalité, telle une soldate.

Le chef de la garde royale Allan Anassi.
Chef de la garde royale Allan Anassi:

Un ananas dont les points de ses feuilles frôlèrent le haut de l’encadrement de la porte se glissa à l’intérieur, il eut le même comportement que l’amirale Relle, regardant la pièce dans sa globalité, plutôt que de s’arrêter sur de menus détails.

La sénatrice Barbie Rhu.
Sénatrice Barbie Rhu:

Entrant le menton haut dans la pièce, la jeune politicienne dévisagea l’humaine sur le banc des accusés, elle la désignait déjà coupable, la jeune femme pouvait le lire dans ses yeux. Elle détourna le regard et s’installa à sa chaise de juge.

Le chef des interrogatoires, Phil Salys.
Chef des interrogatoires Phil Salys:

L’homme qui rentra dans la pièce était un amour-en-cage, le fruit que Robina avait mangé sur l’Archipel aux Éveillés, elle détourna le regard, même si elle ne se sentait pas coupable pour ce qu’elle avait fait, elle ne se sentait pas le courage de croiser les yeux de ce dernier. Il ne chercha pas plus loin, néanmoins, il continua son chemin jusqu’à son dirigeant et lui murmura quelques mots avant de revenir sur ses pas et de s’asseoir à l’un des dix sièges de la haute instance de la Légumanité.

Le lieutenant Nail Fenne.
Lieutenant Nail Fenne:

Un fenouil en armure complète tira son siège directement en arrivant derrière lui et n’émit aucun commentaire et garda une attitude très froide quant à tous ces événements.

Mesdames, Messieurs les Juges, bienvenue. La séance va commencer, vous pouvez vous asseoir.

Le petit fruit s’installa derrière son bureau, il était le greffier et donnerait aux juges suprêmes les preuves et documents dont auraient besoin les dix autorités pour l’audience, déjà, il distribuait une fiche à chacun des cinq fruits et légumes et se remit en attente derrière son secrétaire.

Accusée Robina Erwolf, levez-vous pour entendre vos chefs d’accusation.

Elle s'exécuta sans discuter.

La profession de cuisinière de l’accusée, ainsi que des organisation annexes, devint l’instrument de liaison entre l’accusée et les coauteurs des actes de barbarie, ainsi qu’un instrument pour la réalisation des repas et desserts de leur profession. L’accusée devient cuisinière en pleine connaissance de ses buts et desseins ou bien, avec la même connaissance, elle en devient la complice.

Robina Erwolf s’est associée à diverses reprises à d’autres cuisiniers en tant que cheffe, seconde, cheffe de partie, commis ou adhérente, a ou en est arrivée à avoir pour but et dessein d’obtenir par tous moyens jugés opportuns, la torture, le meurtre, l’agression avec pour résultat la réalisation d’un repas.

Le fait que l’accusée ait été l’auteure de crimes internationaux, pour réaliser des repas en torturant, tuant et agressant des fruits et légumes, même sous les ordres d’un chef, ne dégages en rien sa responsabilité personnelle.

L’humaine ici présente a employé des organisations commerciales comme instrument d’une mobilisation économique en vue de l’extermination du peuple Légumineux et Fruités. Déportant, maltraitant, arrachant les familles à leurs terres pour réaliser des plats dans le cadre de son travail.

Dès le début de son apprentissage, et au cours de sa formation, la cuisinière exécuta des êtres Légumineux et Fruités réalisant ses plans de réalisation de repas dans un mépris impitoyable et total des droits de la Légumanité. Au cours de l’exécution de cet apprentissage, furent commis les crimes de guerre énumérés dans le chef d’accusation numéro trois de la présente assemblée, par le juge Yuzu Uno.

En raison de tout ce qui précède, l’accusée est coupable d’un plan pour accomplir des plats, une réalisation pour commettre des crimes contre la Légumanité au cours de la préparation de ces derniers et de la poursuite des mauvais traitements cités plus tôt. Non seulement contre les Fruits, mais aussi contre les Légumes, des êtres sans défenses.

Que plaide l’accusée ?

Non-coupable vos honneurs.

Très bien, suite à ses déclarations, nous allons faire entrer le premier témoin dans un instant, nous laisserons le procureur Baie Eman être le défenseur des lois de la Légumanité pendant que l’accusée assurera sa propre défense.

Êtes-vous en accord avec ce qui vient d’être dit mademoiselle ?

Oui votre honneur.

Très bien, que l’on fasse entrer le premier témoin.
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Une carotte rentra dans la pièce par une porte qui se trouvait à la droite de la pièce, en face de la jeune femme, elle avait l’impression de l’avoir déjà vu quelque part, mais elle avait vu tellement de légumes ces trois derniers jours, qu’elle n’aurait su dire où exactement. Le légume semblait usé par la fatigue, il ne semblait pas avoir beaucoup dormi ces derniers jours, il avait coiffé les fanes qui lui servait de cheveux en arrière, pour se présenter au mieux et s’assied sur une chaise sculptée dans du bois par les techniques des forgeurs de bois de l’île.

Témoin, veuillez décliner votre nom, votre peuple ainsi que votre profession.

Oui monsieur le procureur. Henry Cota, je suis une carotte du peuple des Légumes, je travaille dans les champs pour faire pousser de nouveaux légumes.

Par le Grand Monolithe, jurez-vous de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité ?

Je le jure sur le Grand Monolithe.

La jeune princesse Pea frappa de son petit marteau pour mettre fin à la cérémonie de l’entrée du nouveau témoin, le témoignage pouvait maintenant commencer maintenant que la carotte avait prêté serment de vérité devant les juges et sur le Grand Monolithe.

Témoins, merci de soumettre les événements qui se sont passés lors de votre rencontre avec la cuisinière il y a de cela trois jours, aux abords de la frontière du Pic.

La carotte plongea son regard dans celui de Robina avant de se détourner pour fixer la salle, elle passait régulièrement entre les dirigeants des deux peuples et les spectateurs libres, là pour voir le verdict qui allait libérer ou non la chasseresse de primes.

Je me trouvais avec un collègue radis, monsieur Ray Dicul, et nous discutions d’un légume que nous étions en train de faire pousser tous les deux, il allait bientôt prendre vie, nous commencions à en voir les premiers signes.

Félicitations pour ça.

Merci, Monsieur le Procureur. Comme je disais, nous discutions de l’arrivée future d’un nouveau membre de notre peuple quand nous avons pu voir l’accusée ici présente en haut du pic qui sert de frontière naturelle entre le monde humain et la Légumanité.

Ils vous observaient ?

Je le pense, en tout cas, la femme aux cheveux bleus a commencé à descendre le pic du côté abrupt, sans prendre la pente qui était sur sa gauche, elle n’avait qu’à tourner la tête et elle l’aurait vu. Suite à ça, elle a fait un faux pas et est tombée en dégringolant le pic en roulant, se retrouvant à mes pieds, pendant la chute de l’accusée, j’ai envoyé mon collègue chercher la garde, pour qu’ils puissent s’occuper d’elle si elle était blessée.

Vous êtes sûr qu’elle est tombée ? Elle ne courait pas vers vous, d’un air menaçant ?

Ah non, je sais voir quand quelqu’un tombe, elle s’est retrouvée à rouler sur le côté jusqu’à moi, elle n'avait rien de menaçant, elle était plutôt ridicule.

La foule rigola à ces mots, la Sanderrienne voulut se cacher pour qu’on ne puisse pas la voir, certains la montraient du doigt en pouffant, d’autres se frappaient les cuisses, l’atmosphère était à l’hilarité quand le maillet de juge du Secrétaire Général Lemon frappa à plusieurs reprises.

Silence dans la salle ! Silence, je vous dis ! C’est inacceptable ! Taisez-vous ou je vous fais tous évacuer !

Le calme revint très vite, tous voulaient avoir le fin mot de cette histoire, le petit fruit se racla la gorge en se retournant vers le témoin, pour attirer son attention.

Pouvez-vous continuer votre témoignage s’il vous plaît ?

Oui, oui. Comme je vous disais, elle a dévalé la pente et s’est arrêtée à mes pieds, elle semblait se sentir mal, alors je n’ai rien dis, attendant qu’elle prenne la parole. Quand elle a repris la parole, elle a dit qu’elle était venue nous voir, elle a commencé à poser beaucoup de questions sur nous.

Quel genre de questions ?

Si l’on ressentait la douleur, comment cela se faisait que nous ayons des bras et des jambes, comment nous parlions. Elle ne semblait pas vouloir s’arrêter, et j’ai vu qu’elle était armée de deux épées, j’ai été prudent et ai reculé légèrement en répondant à la première de ses questions.

Qui était ?

Si nous ressentions ou non la douleur, et la réponse est bien sûr oui. Ensuite, elle s’est présentée, disant qu’elle était cuisinière, qu’elle n’allait peut-être pas nous cuisiner vu que nous avions des sentiments.

Voyez ce que dit le premier témoin, l’accusée était venue pour nous tuer, elle était déjà dans une optique de nous massacrer et de nous torturer pour préparer un repas.

Une stupeur se propagea dans la salle, des chuchotements s’échangèrent entre ses voisins, chacun s’échangeant son avis sur la question, ils la jugeaient déjà coupable, la question était déjà réglée pour eux. De nouveau le bruit du marteau sur le bois qui frappait alors que la princesse Pea soulevait à plusieurs reprises l’instrument de la justice.

Du calme, s’il vous plaît, du calme. Nous allons devoir vous évacuer si le silence ne revient pas.

Elle avait beau avoir parlé calmement, le silence se fit presque instantanément, la curiosité se battait toujours avec l’envie de discuter avec ses proches de l’affaire pour débattre, néanmoins, il devrait sortir pour le faire, et cela leur était impossible, tant leur envie de savoir était grande.

Je vous remercie votre honneur, je n’ai rien à ajouter.

Après la présentation de ce témoignage, il est clair que l’accusée est une criminelle en puissance et que si elle avait été libre de ses faits et gestes, nous nous serions retrouvé avec un génocide quelques heures après son arrivée. Je vous remercie…

Pardonnez-moi votre honneur. Mais n’ai-je pas le droit de me défendre ?

Bien sûr, cependant, vous n’avez pas été appelé à la barre, ici, vous n’avez à vous défendre des accusations.

Mais j’ai le droit de me défendre et de poser des questions au témoin aussi, sinon je ne peux pas présenter tous les faits à l’assemblée.

Tous les faits, comment cela ? Il vient de décrire la scène de votre arrivée, rien de plus.

Et pourtant, il manque des éléments qui montrerait que je ne suis pas le monstre que vous décrivez si bien votre honneur. Je rajouterais que c’est une façon de faire normal dans le monde humain, la défense a autant le droit de poser des questions au témoin que l’état-civil, vous en l’occurrence.

Les juges se concertèrent pendant un instant, ils acquiescèrent rapidement, leur décision était prise, après tout, ils la pensaient déjà coupable, même si elle s’échinait à se débattre avec un témoin pour tenter de prouver son innocente, ça ne changerait rien. Ils verraient bien assez vite cette femme au bout d’une corde.

Vous pouvez poser vos questions alors.

Je vous remercie votre honneur.

C’était maintenant l’heure de se défendre pour Robina, elle n’était pas avocate, mais elle ferait de son mieux pour montrer qu’elle n’était la femme assoiffée de sang que tous s’imaginaient.
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Robina se leva de son banc et fit le tour, tous les regards étaient braqués sur elle, personne ne manquerait une miette des prochains instants, après tout, elle allait se couvrir de ridicule en voulant se défendre en posant des questions à l’un de leur concitoyen, celui-ci n’oserait jamais aider une cuisinière pour sortir du tribunal libre. Elle analysa les visages des juges, elle se heurta à des visages fermés, pour la plus grande majorité, certains étaient curieux, d’autres attendaient avec impatience de voir comment la cuisinière allait retourner la situation. D’après les dires du témoin, elle était venue avec l’objectif de les cuisiner, et non de faire leur connaissance.

Monsieur Cota, vous avez énoncé votre témoignage en disant que moi, l’accusée se trouvait en haut du Pic qui formait la frontière naturelle entre le monde humain et la Légumanité. Est-ce exact ?

En effet.

Et depuis combien de temps aviez-vous découvert la présence de cette jeune femme ?

Très peu de temps, à peine une dizaine de secondes, je dirais, mais vous devez le savoir.

Je le sais, néanmoins, la cours ici présente n’était pas au courant, ce qui veut dire qu’en dix secondes, mon navigateur et moi sommes arrivés sur le sommet du pic, vous avons vus et sommes descendus, vous êtes bien d’accord ?

Oui… Je ne vois pas où vous voulez en venir.

Et moi non plus mademoiselle Erwolf, alors accélérez le rythme si vous ne voulez pas vous faire éplucher à votre tour, que vous compreniez ce qu’ont vécus les pauvres légumes que vous avez torturé durant toute votre vie.

J’y viens votre honneur. Vous dites que la jeune femme était seule, pourtant, je viens de vous demander si mon navigateur était avec moi et vous venez de le confirmer, ce qui veut dire que vous avez déjà omis ce détail de votre récit.

Objection votre honneur, le navigateur de l’accusée n’a rien à voir dans cette affaire.

Permettez-moi aussi d’objecter votre honneur, si l’histoire n’est pas complète dès le départ, peut-être le témoin a-t-il oublié, sans le vouloir, des détails qui pourrait acquitter l’accusée, m’acquitter.

Objection rejetée pour l’accusation, continuez Robina Erwolf, mais ne tournez pas autour du sujet trop longtemps pour vos prochains exemples.

Je vous remercie votre honneur.

Elle s’inclina vers la juge Uno qui venait de lui permettre de continuer sa défense, elle faisait comme dans les livres de fiction qu’elle avait pu lire, toujours décrédibiliser le témoin, si les juges ou les jurés doutent de ce qu’il a pu dire, il aura moins d’impact. S’il oubliait des détails, les rajouter soit même en les rappelant au témoin, montrait que lui aussi est faillible, et donc que son témoignage était discutable, une façon parmi tant d’autre de s’en sortir, d’habitude cela concernait les romans policés avec des jugements de mafieux, mais il fallait bien ça pour tous les chefs d’accusation qui pesait sur elle.

Saviez-vous que les deux humains, vous regardaient depuis plus longtemps que dix secondes ? Qu’ils étaient allongés sur le sol pour observer les champs et voir ce qui se passait derrière la crête du pic sans se faire voir ?

Non… Je… Je l’ignorais.

Vous ignoriez donc que si l’accusée avait eu des intentions belliqueuses, elle aurait très bien pu vous attaquer furtivement sans que vous le sachiez.

Exact.

Objection ! Tout ceci n’a rien à voir avec l’affaire vos honneurs.

Objection à mon tour de nouveau ! Le témoin était incapable de savoir certains faits, je ne fais que les présenter à la cour.

Ne vous inquiétez pas Lemon, nous aurons le fin mot de cette histoire bien assez vite.

Objection rejetée, continuez accusée.

Merci, Secrétaire Général Lemon. Ici, la situation est la suivante, l’accusée, qui était cachée jusqu’ici s’est approchée découverte, à la vue de tous vers le peuple Légumineux pour faire connaissance, c’est bien ce que vous avez dit, n’est-ce pas monsieur Cota ?

Oui.

Et elle a dévalé la pente sur le côté après une chute ?

La carotte eut un sourire et une atmosphère amusée s’éleva dans la salle d’audience à l’énoncé de la scène burlesque qu’avait décrite le témoin plus tôt.

Et bien ?

C’est tout à fait exact.

Ma question est donc la suivante : si, moi, l’accusée est venue avec l’intention de nuire au peuple des Fruits et Légumes vivants, pourquoi s’être découvert devant vous alors qu’elle avait l’effet de surprise pour vous attaquer ? De surcroît, en se couvrant de ridicule, alors que vous avez dit vous-même une pente facile d’accès était à sa disponibilité sur sa gauche.

Je n’en ai aucune idée.

Je vais vous dire pourquoi, parce que l’accusée n’était pas venue pour vous cuisiner ou vous attaquer, mais bien par curiosité, qu’elle venait d’entendre parler de vous et qu’excitée par la nouvelle, elle s’est précipitée jusqu’à votre village où elle s’est fait arrêter.

Je n’en sais rien.

Vous avez dit avoir vu que l’accusée était armée. Est-ce étrange que des humains soient armés quand ils viennent vous voir dans le village ? Ou aucun humain ne vient jusqu’ici ?

Non, non, il y a bien quelques-uns qui viennent discuter avec nous, et la plupart sont armés, pour leur propre sécurité de ce qu’ils disent, nous voulons bien les croire, des animaux sauvages grouillent sur les terres entre nos deux villes.

Alors pourquoi avoir reculé en répondant aux questions que je vous posais ?

Elle savait que cette affirmation était fausse, soit l’un des juges l’avait soufflé au témoin avant la séance, soit il inventait suite aux événements, inventant sans le savoir et le vouloir ce qui s’était passé, ou encore, il voulait voir la jeune femme morte, mais cela, elle en doutait, en voyant l’attitude affolée de la pauvre carotte.

Parce que j’avais un doute, j’ai vu quelque chose dans ses yeux.

Dans ses yeux ? Pourtant, je vous cite :
« Elle a dévalé la pente et s’est arrêtée à mes pieds, elle semblait se sentir mal, alors je n’ai rien dis, attendant qu’elle prenne la parole. Quand elle a repris la parole, elle a dit qu’elle était venue nous voir, elle a commencé à poser beaucoup de questions sur nous. »
À aucun moment, vous n’avez fait part d’une attitude agressive.


J’ai dû l’oublier dans mon témoignage.

Une goutte de rosée coula le long du tubercule alors qu’il semblait se sentir mal à l’aise.

Encore un oubli donc ? Cela en fait déjà deux avec le deuxième humain, qui ne sont pas des détails, mais bien des éléments importants au dossier.

Des détails sans importance, ici, c’est bien l’accusée qui nous importe, mesdames et messieurs les juges !

Mais si le témoin ne donne pas la bonne version des faits, des erreurs peuvent être faites ! Comme de condamner à mort une personne innocente !

Innocente, vous êtes une cuisinière, vous l’avez avouée vous-même lors de l’audience préliminaire avec quatre des dix juges ! Vous n’êtes bonne que pour la potence !

Et cela ne fait pas de moi un coupable pour autant ! Je me défends des crimes contre la Légumanité dont on m’accuse monsieur et non du travail que je fais en dehors de ce tribunal !

Elle vient d’avouer de nouveau devant toute l’assemblée ! C’est une cuisinière ! Tuez-la !

Plusieurs frappes de maillet se répercutèrent dans le hall alors que John Lemon demandait le calme.

Silence ! Ceci est inacceptable que vous, Monsieur le Procureur perdiez votre calme ! Je vous demande de vous taire, je ne veux plus vous entendre jusqu’à ce que l’accusée ait fini son interrogatoire du témoin.

Bien, votre honneur.

Pourquoi avoir oublié un détail aussi important monsieur Henry Cota ? Après tout, je suis une cuisinière dangereuse qu’il faut empêcher de nuire d’après Monsieur le Procureur.

La carotte n’ouvrit pas la bouche, il semblait attendre quelque chose, il jetait des regards à gauche et à droite sans s’arrêter.

Vous semblez nerveux monsieur Cota, pourquoi ne pas répondre à la question ?

Oui ! Répondez à la question s’il vous plaît qu’on en finisse.

De plus, vous disiez plus tôt que je me sentais mal après avoir dévalé la pente, que j’ai parlé après avoir repris mes esprits, avoir des intentions derrière la tête et l’envie de vomir ne se marie pas très bien selon moi.

Eh bien… Je… Bon, c’est vrai, l’accusée n’avait pas une attitude agressive, et je n’ai vu que de la curiosité dans son regard, on m’a dit de dire ça.

Qui ça ?

Le procureur Bay.

Le procureur ? Pourquoi donc a-t-il fait cela ?

Pour rajouter une pièce à son dossier déjà épais.

Je vous remercie d’avoir dit la vérité monsieur le témoin. Mesdames et messieurs les juges, voyez comme le procès est truqué, les témoins ont été manipulé par le procureur pour modifier leur témoignage et ainsi me faire exécuter ! Je demande une annulation de ce procès !

Un coup puissant de marteau retentit dans la salle alors qu’un brouhaha commençait à peine à s’élever, l’Amirale Chante Relle venait de lever son instrument de juge pour la première fois et chacun pouvait entendre distinctement qu’elle savait s’en servir.

La séance est suspendue ! Monsieur Bay, mademoiselle Erwolf, merci de suivre les juges pour une discussion à huit clos.

Même si c’était elle qui avait fait l’annonce, tous étaient d’accord sur le sujet, il fallait régler ce point de litige en privé, et non devant la salle entière, surtout si l’accusation était corrompue.
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La porte se referma durement derrière la jeune femme, elle était souriante, elle avait frappé fort dans l’accusation, manipulation de témoins, elle pouvait peut-être faire annuler le procès et s’en sortir libre plus vite qu’elle ne l’avait pensé. Malheureusement, la suite des événements allait lui donner tort, le Secrétaire Général était furieux, il fusilla du regard son greffier et procureur du moment, Baie Eman, il semblait sur le point de péter un pépin. Chacun des juges se mit à une place aléatoire autour d’une table rectangulaire qui semblait ne pas avoir de fin, puis le chef des interrogatoires prit la parole, il était calme, sa voix était monocorde, pourtant ses paroles frappèrent le petit fruit comme un fouet.

Vous nous avez extrêmement déçus monsieur Eman. Je vous pensais professionnel, au lieu de cela, vous avez manipulé le tout premier témoin dans le seul but de vous faire gagner le procès plus vite. Ce qui n’est pas le but de ce tribunal, une affaire aussi importante est ici pour traiter si oui ou non les cuisiniers sont des criminels contre la Légumanité. Vous n’avez fait que nous couvrir de honte, devant cette humaine, ainsi que devant nos voisins les Légumes.

Mais monsieur Salys, si je n’avais pas fait ça…

Si vous n’aviez pas fait ça, nous auriez eu un témoignage clair et précis, au lieu de cela, nous allons devoir tout reprendre depuis le début, l’humaine mènera cet interrogatoire. Elle semble beaucoup plus apte à le faire que vous.

Monsieur Lemon ! S’il vous plait !

Je suis d’accord avec le chef Phil Salys, vous avez couvert de honte le peuple de Frutopolis Monsieur Eman, j'espère que vous vous en êtes rendu compte ?

Oui Secrétaire Général Lemon.

Ce fut la tête basse que le procureur sortit de la salle, l’assemblée commençait à se lever pour partir quand la cuisinière qui assumait sa propre défense prit la parole.

Pardon, mais vu les circonstances, que va-t-il se passer ?

Comme nous venons de le dire, vous allez reprendre le témoignage de Monsieur Cota. Nous vous laissons toute latitude pour mener à bien ce témoignage, l’accusation pourra reprendre ce dernier durant votre plaidoirie.

Je ne suis pas acquitté alors que l’accusation a manipulé des preuves ?

Cela serait, peut-être, possible autre part, mais ici, nous ne vous laisserons pas partir tant que vous ne serez pas jugée coupable ou innocente. Retournez dans la salle d’audience, que nous continuions cette affaire.

Un accablement s’abattit sur les épaules de la Sanderrienne, elle s’était attendue à ce que ça marche, qu’elle puisse retourner sur son navire le plus vite possible, sans se retourner, pour quitter cette île le plus vite possible, cependant, on venait de lui couper l’herbe sous le pied. Elle voyait néanmoins une leur d’espoir, le procès ne semblait pas perdu d’avance, autant qu’elle le pensait, certains juges paraissaient partiaux, elle avait une possibilité de s’en sortir, il fallait juste qu’elle réussisse à convaincre cinq membres du juré qu’elle était innocente.

Je ferais de mon mieux pour vous prouvez que je suis innocente alors.

Vous devriez, si vous ne voulez pas voir votre tête au bout d’une pique.

Elle déglutit avant de faire demi-tour, elle sentait que John Lemon restait cordial avec elle, plus par sa fonction, que par amitié, il était resté froid, distant, malgré le fait qu’elle pouvait se défendre elle-même, interroger les témoins, il ne faisait pas cela par sympathie, mais bien pour prouver que quoi qu’elle fasse, elle serait coupable à ses yeux. Elle releva ses épaules, remonta la tête et se claqua les joues, elle n’allait pas se laisser abattre, elle ne l’avait jamais fait dans sa vie, elle n’allait pas commencer maintenant, la bataille ne faisait que commencer, elle allait montrer à tous ces juges qui elle était et qu’elle ne se laisserait pas faire.

De retour dans la salle d’audience, le silence se fit, les fruits et légumes la regardèrent revenir devant le témoin, le procureur était revenu humble, la mine déconfite, un comble pour un fruit, ils avaient compris plus ou moins ce qui s’était passé à huit clos. Chacun des jurés s’installa de nouveau dans sa chaise, de nouveau le greffier se leva pour demander le silence.

S’il vous plaît, calmez-vous. L’audience va reprendre, l’accusée interrogera le témoin, le procureur restera muet à part si une question lui vient à l’esprit durant la déposition. Est-ce que c’est bien clair Monsieur Eman ?

Bien sûr, je ne saurais revenir sur les décisions de la cour.

Parfait ! Que la séance continue.

La capitaine de l’Iceberg se tourna vers le témoin, il semblait plus calme, libéré du poids du mensonge, il regardait la jeune femme dans les yeux, il ne semblait plus avoir peur de mentir, la conscience libérée.

Monsieur, êtes-vous prêt pour reprendre ?

Oui. Même si j’aimerai bien un verre d’eau, c’est que j’ai beaucoup parlé depuis le début.

Je comprends, je vais vous donner ça.

Déjà, un page radis se dirigeait vers l’homme carotte qui avait demandé un verre d’eau, on le servit longuement, l’homme s’abreuva lentement, il semblait vraiment en avoir besoin, beaucoup plus qu’un humain.

Vous buvez beaucoup.

Pas tant, cela faisait longtemps que je n’avais pas pris un verre.

Et vous buvez souvent, je veux dire, j’ai appris que vous ne mangiez pas, que vous ne faisiez que boire est-ce vrai ?

Exact, mais pourquoi cette question ?

Un détail sans importance, reprenons maintenant que vous avez fini votre verre. Reprenons depuis le début, voulez-vous ?

Bien sûr.
Comme je vous le disais, j’étais avec mon collègue Ray Dicul et nous discutions d’un petit-pois que nous étions en train de faire pousser, il était sur le point de prendre vie, quand nous avons pu vous voir, enfin voir l’accusée, qui se découpait à l’horizon au sommet du pic.


Était-elle seule ?

Non, il y avait quelqu’un avec elle, un navigateur, d’après vos dires, et je veux bien le croire, vu qu’il ne se trouve pas dans cette pièce avec vous en ce moment. Vous avez dévalé la pente, et l’homme a fait le tour, en prenant le chemin sur la gauche, comme je le disais plus tôt, il s’est penché vers vous pour prendre des nouvelles alors que vous étiez nauséeuse.

Cet homme, a-t-il eu une attitude agressive ? Déplacée ? A-t-il eu un regard haineux ?

Aucunement, il était surtout préoccupé par votre état, heureusement, vous avez vite repris vos esprits, et n’avez pas rendu votre estomac, je crois que j’aurais fait pareil si ça avait été le cas. Vous avez commencé à vous présenter, et j’ai vu que l’homme vous a coupé, j’ai cru qu’il était le chef de vous deux.

Vous avez cependant envoyé votre collègue chercher les gardes alors que l’accusée et son compagnon venaient d’arriver. Pourquoi ? Les deux humains n’avaient rien fait.

J’ai eu peur, vous savez, je ne suis qu’un fermier, vivant près de la frontière et je vois deux humains qui apparaissent de nulle part, j’ai pris peur et j’ai préféré faire appeler la garde. Surtout que vous étiez armés et nous pas, si vous aviez de mauvaises intentions, je n’aurais rien pu faire, je suis sûr que vous comprenez.

Bien sûr, vous avez eu peur et avez voulu vous sentir en sécurité. C’est normal. Je vous laisse continuer votre histoire.

Après ça, vous avez commencé à me poser des questions sur nous, je ne vais pas énumérer lesquelles, je l’ai fait tout à l’heure, vous répondant que nous ressentions la douleur, c’est à ce moment-là que vous avez dit que vous ne vouliez pas nous cuisiner. J’ai compris que vous étiez cuisinière.

Vous avez alors finis votre présentation, je me suis tourné vers la direction où j’avais envoyé mon collègue, voyant que la garde était sur le point d’être là, je leur ai crié que vous étiez cuisinière, que vous veniez de l’avouer. J’ai paniqué.

Qu’avez-vous dit exactement ?

J’ai dit que vous alliez nous éplucher vivant, je me suis légèrement emporté, je suis désolé.

Ne vous excusez pas, que s’est-il passé ensuite ?

Le sergent Frisé ainsi que ses soldats sont arrivés, sortant leurs armes sans attendre, ils vous ont mis en état d’arrestation sans que vous ne résistiez, ils ont pris vos armes et vous ont emmené en direction du palais, sans perdre une seule seconde.

Votre témoignage s’arrête là ?

J’aurais bien voulu suivre, mais j’étais complètement sonné par ce qu’il venait d’arriver, c’est quelques heures plus tard, qu’un des gardes du tribunal, un chevalier cactus, est venu me trouver à mon domicile pour prendre mon témoignage et m’informer que vous alliez passer en procès.

J’aurais quelques questions pour le témoin, si vous permettez.

Allez-y Monsieur Eman, mais attention, pas de manipulation du témoignage.

Bien sûr, c’est terminé monsieur Lemon.Monsieur Cota, la jeune femme était armée, ainsi que son compagnon, vous avez dit ?

C’est ça, sinon les gardes légumes n’auraient pas confisquer leurs lames, je crois que l’Amirale Chante Relle les a toujours avec elle.

Pouvons-nous les voir s’il vous plaît votre honneur ?

La femme champignon regarda le petit fruit un instant avant de se lever de son siège, elle fit lentement le tour, ses talons claquant sur le sol en bois, elle regarda les deux hommes qui se faisaient face et prit les deux armes de Robina et les déposa sur la table du greffier.

Ce sont bien les armes prisent sur l’accusée ?

Je ne suis pas sûr exactement, mais je crois bien que oui, je n’ai pas pu bien les voir, tout est allé si vite.

Faites attention, c’est important, est-ce que ce sont bien les armes de la cuisinière ?

La carotte se concentra, il regarda longuement les sabres, les passant en revue plusieurs fois, la cuisinière aurait pu répondre à sa place, cependant, elle ne voulait pas s’immiscer dans l’interrogation de l’accusation, donner des munitions à l’homme qui allait possiblement la condamner à mort n’était pas dans ses plans.

Ce sont bien eux.

Vous en êtes certains ?

Sûr, je pense que je pourrais me rappeler cette garde en forme de coquillage partout où je la vois.

Elle avait donc deux armes avec elle, une assez grande pour se défendre pour contre les créatures, et une plus petite pour découper ou éplucher des légumes. Non seulement, elle vous avait dit qu’elle ne vous cuisinerait peut-être pas, et pour rajouter à cela, elle avait de quoi cuisiner, elle avait donc prévu son attaque, pas de se faire arrêter aussi vite à cause de sa maladresse. Je vous remercie monsieur Cota.
J’en ai fini avec le témoin vos honneurs.


Mademoiselle Erwolf, quelque chose à rajouter ?

Une dernière question et j’en aurai fini votre honneur. Monsieur le Témoin, quand vous dites que la femme n’allait peut-être pas vous cuisiner, êtes-vous sûr de vos dires ?

Certain.

N'avez vous pas plutôt entendu : Je ne me vois pas cuisiner des légumes qui ressentent la douleur ?

Ah ! Maintenant, que vous le dites, oui, je crois bien que c’est ce que vous avez dit. Oui, c’est sûr, c’est ce que vous avez dit, vous ne vouliez pas nous cuisiner, ce sont vos mots.

Je vous remercie, j’en ai fini votre honneur.

La séance est levée pour aujourd’hui suite à ces nouvelles pièces se rajoutant au dossier ! Nous reprendrons demain à la même heure !

Le maillet frappa sur le bureau et on ramena Robina dans sa cellule, au sein du palais royal.
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La soirée ainsi que la matinée étaient passées à une telle vitesse que Robina avait la sensation d’avoir à peine cligner des yeux au tribunal la veille qu’elle se retrouvait maintenant dans cette même salle, à attendre que tout se mette en place dans les coulisses pour faire son entrée. La scène se répétait encore et toujours, la discipline de fer des gardes cactus du tribunal réglait leur mouvement comme du papier à musique, chacun à trois mètres les uns des autres, ils avaient pu constater que la chasseuse de primes ne se rebellait pas, pourtant, leurs vigilances ne se relâchait en aucun cas.

C’est en suivant le même parcours qu’elle se retrouva de nouveau sur le banc des accusés, attendant patiemment les juges, le procureur ainsi que le greffier, le même bal chorégraphié qui se répétait encore une fois devant ses yeux. Mais au contraire d’une sensation de ridicule qui aurait pu l’envahir, ou d’accablement de voir que tout recommençait, elle était fascinée de voir la discipline des hommes et femmes qui menaient cette cérémonie avec autant de minutie. De nouveau l’entrée du greffier en premier, suivis du procureur, pour finir pour faire se lever toute la salle, annoncé un à un les juges, se rasseoir et ainsi démarrer la séance.

Sauf qu’aujourd’hui, un détail avait changé dans le tableau, le petit fruit se trouvait, ou ne se trouvait pas, plus exactement là, il avait été remplacé par une petite femme salade, de la laitue à première vue, qui prit place sur le siège de l’accusation. Elle regarda la jeune femme et lui fit un geste de la tête, comme pour la saluer, elle fit tout de suite bonne impression à la cuisinière, peut-être que le jugement serait plus équilibré maintenant que le fruit ne faisait plus parti du tableau.

Mesdames et messieurs les juges, vu que l’accusée dirige elle-même sa défense, et qu’elle interroge aussi les témoins, pourquoi ne pas la faire sortir de son box pour la mettre du côté de la défense ?

Vous n’y pensez pas mademoiselle la procureure adjointe ?

Bien sûr que si Secrétaire Général Lemon, certes, nous avons une affaire extrêmement grave et sérieuse, mais si celui-ci doit se dérouler de façon partiale et égalitaire pour tous, nous devons traiter cette humaine de la même façon que notre peuple. C’est pourquoi je réitère ma demande.

Un vacarme ambiant se fit entendre partout dans la salle, le juges ne firent pas revenir le silence, eux aussi étaient occupés à discuter entre eux, ils n’avaient pas prévu ce déroulement, de plus la prisonnière n’était pas attaquée, elle pourrait s’enfuir parmi la foule, prendre un otage, voir pire encore…

Nous ne pouvons accéder à votre requête mademoiselle la procureure, le danger pour les civils dans la salle est trop grand.

Faites-la garder par des chevaliers cactus alors. Je veux un combat à la loyal.

Et pourquoi donc ? Je vous prie.

Car je veux la battre sans avantages, et qu’elle ai autant de chance que moi de gagner, dans le banc des accusés, seule elle pourrait dire que c’est parce qu’elle faisait déjà coupable que nous l’avons jugé ainsi, je ne veux pas de cette excuse.

Moi, l’Amirale Chante Relle, accorde le droit à l’accusée de se retrouver à la place de l’avocat de la défense, et non sur le banc des accusés, cependant, nous allons faire des modifications pour la sécurité de tous.

Elle se tourna vers un page qui partit en courant après avoir reçut ses ordres, tous les autres jurés étaient surpris, énervés ou stupéfait d’entendre la décision, non concertée, de l’Amirale.

Vous n’y pensez pas !

Nous voulions un procès équitable, la procureure adjointe vient de nous en offrir un sur un plateau, pourquoi nous en priver ? L’histoire retiendra que nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir pour que cette cuisinière ait ses chances, malgré ses crimes.

Je ne dis pas le contraire Chante, mais tout de même, prendre cette décision…

Si la prisonnière tente n’importe quelle action, de quelque sorte qui mettrait en danger nos concitoyens, j’en prendrais l’entière responsabilité. De plus, j’ai déjà fait chercher des chevaliers cactus, ils ne devraient pas tarder à arriver.

Sur ces dernières paroles, une dizaine de soldats entrèrent, se postant devant le premier cordon d’homme, ici, personne ne pourrait passer entre les civils et la salle d’audience, deux cactus encadraient même la table de la défense, pour être au plus près de la Sanderrienne si elle tentait de s’échapper.

Ainsi, elle n’aura pas de moyen de s’échapper et nous pourrons dire dans le futur, avoir laissé toutes ses chances à cette humaine, ne trouvez-vous pas cela généreux ? Princesse Pea et Secrétaire Lemon ?

Je comprends votre résonnement, même si je ne l’approuve pas entièrement, je passerai l’éponge pour cette fois, Amirale, mais que cela ne se reproduise pas.

Merci Secrétaire.

Robina eut ainsi le droit de passer derrière le comptoir en bois, qui la séparait des autres dans la salle, et de s’installer à la chaise en bois, prévue pour que l’avocat de la défense puisse s’asseoir, elle était maintenant à égalité avec l’accusation.

Je vous remercie procureure.

Ne me remerciez pas. Elle se tourna en regardant Robina de haut, malgré sa plus petite taille. Je n’ai fait cela que pour que le jugement soit le plus propre possible, ainsi quand vous serez jugée coupable de crime contre la Légumanité, et vous le serez, vous n’aurez aucune excuse pour contester le verdict.

Le choc souffla la jeune cuisinière, elle s’était attendue à une alliée, mais elle se retrouvait face à une vipère qui crachait son venin.

Mon prédécesseur a entaché la profession, je remets les pendules à l’heure. Tous ici, voulons que vous voir pendu au bout d’une corde, ou la tête tranchée, cela sera selon votre bon vouloir. Je prendrais même plaisir à vous voir souffrir, cependant, avant la fin, je veux vous voir vous débattre alors que j’enfonce lentement chaque clou dans votre cercueil.

Elle aurait voulu enterrer la hache de guerre, pourtant, l’accusation la brandissait haut dans le ciel, et même si le procureur Eman avait été sournois, ici la salade voulait sa tête ouvertement. La chasseuse de primes sentit la pression montée alors que le deuxième témoin entrait dans la pièce pour faire sa déposition.
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Le sergent Frisé fit son entrée par la même porte où était rentré le témoin carotte hier, c’était lui qui avait été responsable de Robina ainsi que de Fang Shui jusqu’au palais royal, il les avait escortés, non sans ménagement pour les laisser aux mains de l’Amirale Chante Relle. Tout comme la veille, le légume jura sur le grand monolithe de ne dire que la vérité et toute la vérité, l’humaine espérait cette fois que c’était bien vrai dès le début et qu’elle n’aurait pas à se battre contre un témoin corrompu, cette fois encore.
Le Sergent Frisé:

De nouveau, le maillet de l’un des juges frappa pour annoncer le commencement de la déposition du témoin du jour, la cuisinière ouvrit les oreilles pour bien tout écouter, elle ne devait rien laisser au hasard et noter ce qui lui semblait étrange.

Sergent Frisé, pouvez-vous nous faire votre rapport sur les événements qui se sont passés il y a de cela quatre jours ?

Bien sûr mademoiselle, je faisais ma ronde près de la frontière de notre village, quand j’ai entendu un cri derrière nous, un radis courrait vers notre direction, il semblait secouer, j’ai donc donné l’ordre que la phalange se stoppe pour pouvoir comprendre ce qui n’allait pas.

En quoi monsieur Dicul, le radis qui était en train de venir vous voir, semblait secouer, selon vos dires ? Après tout, vous n’aviez échangé encore aucune parole.

On pourrait appeler ça de l’instinct, Ray Dicul est un légume calme, que l’on voit très peu courir, encore moins aller le plus vite possible pour rattraper la garde, comme ça n’était pas dans sa nature, j’ai fait arrêter ma colonne, comme je vous le disais, pour écouter ce qui n’allait pas.

Continuez, je vous en prie.

Il nous a annoncés qu’une humaine avait fait une mauvaise chute, qu’elle était peut-être blessée, elle se trouvait proche de la frontière entre le village humain et le nôtre, nous avons fait le plus vite possible pour arriver sur place. Il faut faire vite pour aider quelqu’un, nous n’avions pas de temps à perdre, de surcroît, cela restait des humains, nous avons des échanges cordiaux avec eux, cela ne veut pas dire pour autant que nous nous tenons main dans la main.

Oui, certaines tensions existent entre nos deux peuples.

C’est ça, je devais faire au plus vite pour empêcher que certains ne puissent s’en prendre à cette jeune femme ou que l’inverse n’arrive, se sentant menacé, elle aurait pu se défendre, ce que je ne souhaitais pas. Mes hommes et moi-même nous sommes rendus sur place après une course de trente secondes, nous étions très proches du lieu de rencontre, c’est là que nous avons entendu les appels à l’aide de monsieur Cota, déclarant que la jeune femme avait annoncé qu’elle était cuisinière.

Je vois, et qu’avez-vous fait à ce moment-là ?

J’ai fait sécuriser le périmètre par quatre de mes hommes, moi, ainsi que le reste de mon bataillon, six soldats, nous avons ensuite encerclé les deux cibles, pour les désarmer ainsi que les arrêter, ils n’ont opposé aucune résistance, et nous avons pu commencer notre route vers le palais royal après seulement quelques minutes. Le temps d’organiser l’évacuation ainsi que de calmer la foule qui se pressait autour, puis mes subordonnés et moi-même nous sommes rendus au palais royal pour faire notre rapport.

Je vous remercie pour tous ces détails, qui j’en suis sûr seront très important pour la cour. Pouvez-vous nous décrire comment s’est passé cette procession ?

Nous avons mis environ dix minutes à arriver jusqu’au palais, durant ce temps, les prisonniers sont restés calme, ils ont bien tenté ponctuellement de communiquer, cependant, j’ai bien fait attention à étouffer dans l’œuf toute tentative.

J’en suis certaine ! Pourtant, je suis sûre que mesdames et messieurs les juges seraient heureux de savoir ce que les deux humains pouvaient vouloir se dire.

L’accusée s’est excusée auprès de son collègue, lui assurant qu’elle ne pensait pas à mal, il lui rétorqua qu’elle aurait dû réfléchir avant d’ouvrir la bouche, c’est à ce moment-là que j’ai arrêté leur conversation en les rappelant à l’ordre. Ils ont bien tenté de s’excuser auprès de nous, nous affirmant qu’ils n’avaient rien fait de mal, mais je n’ai, bien entendu, rien écouté, l’Amirale Relle allait prendre le relais.

Bien entendu. Je vous en prie, continuez.

Comme je vous le disais, nous avons continué à marcher, les deux ont compris que nous ne dialoguerions pas avec eux et se sont enfermés dans le mutisme, c’est quelques minutes plus tard que nous avons atteint les portes du palais, une grande activité y régnait.

Comme à l’accoutumé.

En effet, malheureusement, cela ne me rendait pas la tâche plus facile, j’ai ainsi fait envoyer un des hommes qui gardait la porte pour prévenir la Princesse Pea, il est parti au pas de course, et c’est ainsi dans un silence tendu, alors que toutes les personnes sur la place devant le palais nous observaient, que nous avons attendu.

Et c’est là que la princesse Relle est arrivée ?

Pas du tout, c’est la Sénatrice Rhu que nous avons vu sortir des portes du palais, elle semblait désappointée, si je puis dire.

Désappointée ? Vraiment ?

Exact, elle me demanda tout d’abord si les deux prisonniers avaient résisté, ce qui n’était pas le cas, je lui en fis part, c’est après ça que je lui ai fait part de ma surprise, j’avais fait chercher notre dirigeante, et non elle. J’appris par la suite que le soldat l’avait croisé et qu’il lui avait communiqué la situation quand elle lui avait fait part de sa surprise. Elle lui avait offert de se reposer et de lui expliquer le pourquoi de sa course, il ne s’est pas fait prier pour lui dire, ainsi, elle s’était présentée aux portes.

Un relâchement de la part de ce garde.

En effet, l’Amirale m’en a fait part quelques minutes plus tard.

Je vous en prie, continuez, je suis désolé de vous interrompre avec mes questions ainsi que mes anecdotes.

Vous ne faites que votre travail madame, je reprends donc. C’est ici qu’elle a commencé à me questionner, vérifiant que les deux humains venaient d’arriver sur nos terres, demandant si la femme était une cuisinière, je lui ai répondu par l’affirmative.

Et quelle a été la réaction de la Sénatrice Rhu ?

Elle m’a donné l’ordre de faire exécuter séance tenante les deux humains, pour montrer l’exemple à leur congénère que nous n’étions pas à prendre à la légère.

Mensonge !

Votre honneur la sénatrice Rhu ?

Je vous assure que je n’ai en aucun cas ordonné au sergent Frisé de tuer les deux humains, tout comme le témoin d’hier, il doit être manipulé, sûrement par cette humaine. Oui, elle a dû sortir de sa chambre pour aller trouver le témoin et le menacer de le transformer en salade, je ne vois que ça.

Mais mademoiselle la sénatrice, la liste des témoins est tenue secrète de l’accusée, elle n’y a jamais eu accès.

Elle a sûrement trouvé une copie quelque part, probablement dans le bureau où vous l’enfermez durant la mise en place de la salle d’audience, elle est ainsi donc sortie et a conspiré pour être acquittée.

Pardon de vous interrompre Barbie Rhu, mais les gardes qui montaient la garde devant la chambre du prisonnier n’ont pas bougé et ils peuvent vous assurer qu’elle n’a pas quitté sa cellule depuis la veille au soir, après le procès, jusqu’à ce matin, avant la séance.

Vous êtes du côté de l’humaine, je suis certaine que vos hommes l’ont laissée sortir ! Humaniste !

C’est inacceptable sénatrice Rhu ! Vous savez pertinemment que les fruits aussi montent la garde devant la cellule de cette humaine, insinuez-vous que nous sommes de mèche aussi avec les humains ?

Absolument pas, Général Durri.

Je préfère. Je sais que ce procès est important, mais je ne laisserais personne compromettre ce qui est l’événement du siècle pour notre peuple. Notre comportement changera à la suite des décisions des prochains jours, qu’il y ait exécution ou non, nous aurons une ligne directrice pour tous, que cela soit les fruits comme les légumes.

Je ne le sais que trop bien votre honneur Durri, mais comment l’accusée a-t-elle fait pour menacer le témoin ?

Elle ne l’a pas fait, tout simplement. Plusieurs de mes hommes, les plus proches, la gardent à tour de rôle, je peux vous assurer qu’elle n’a pas pu s’enfuir, ou avoir le temps de menacer le témoin, ce qui veut dire que s’il est manipulé, c’est par l’un des nôtres.

Surement l’Amirale Chante Relle, elle aime tellement ses humains.

Maintenant, vous m’accusez moi ? Un des juges de ce procès ? Je vous demande de reprendre vos esprits et d’accepter le témoignage et que la vérité soit dévoilée devant toute l’assemblée, vous avez tenté de faire exécuter les deux humains sans jugement.

Personne ne disait plus rien, même le Secrétaire Général Lemon regardait avec intensité la jeune femme rhubarbe qui sentait bien que la situation lui échappait, elle souffla après avoir repris ses moyens et fixa la nouvelle procureure.

C’est exact, j’ai voulu faire décapiter cette cuisinière avant de passer en jugement.

Je vous remercie de votre honnêteté mademoiselle la juge. Pouvez-vous continuer sergent Frisé ?

Bien sûr. Comme je le disais, Mademoiselle la Sénatrice Rhu m’a ordonné de faire tuer ces deux humains, j’ai bien sûr refusé.

Évidemment.

Malheureusement, Mademoiselle, la Sénatrice est revenue à la charge, me soutenant que le monde se porterait mieux avec une cuisinière en moins dans le monde, qu’une promotion pouvait arriver si j’accédais à sa requête.

Vous avez, comme un bon soldat, refusé, n’est-ce pas ?

J’ai accepté, je ne suis qu’une salade madame, je n’aurais pas accès à de hautes fonctions militaires, administratives tout au plus, je ne suis pas puissant comme l’Amirale Relle ou le Colonel Hate. Je me suis dit, que ça ne changerait rien, que je pourrais gagner quelques sous en plus et ainsi vivre mieux.

Oui, je comprends après tout, nous sommes tous légumes.

Exact, j’ai donc ordonné à Pi et Men d’emmener les deux prisonniers à l’écart et de faire ce qu’ordonnait la sénatrice, alors qu’ils commençaient à contourner le palais, l’Amirale Chante Relle est intervenue et a stoppé les deux soldats piment en leur ordonnant.

Une cheffe militaire, admirable s’il en convient. Mais je pensais que c’était la princesse Pea que vous aviez fait chercher, est-ce que votre soldat est une commère ?

Aucunement Mademoiselle la Procureure, ici, la cheffe de l’armée avait entendu le rapport du caporal Nouil et s’était précipitée jusqu’aux portes, son instinct lui dictant qu’un tel acte était possible.

Et donc l’Amirale est arrivée sur ces faits ?

C’est bien ça.

Je vous remercie, je n’ai pas d’autres questions, le témoignage de l’Amirale Relle demain nous permettra d’éclaircir les points qui restent obscurs pour certains. Je pense que cette dernière ne pourra être, en aucun cas, manipulée, ni par l’humaine, ni par qui que ce soit. Vous en conviendrez ?

Affirmation pleine et entière de tous les jurés ainsi que de la salle.

Je laisse donc la parole à la défense.

Je vous remercie.


Dernière édition par Robina Erwolf le Mer 20 Avr 2022 - 9:49, édité 1 fois
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Sergent Frisé, longtemps que nous ne nous étions pas vus.

Quatre jours madame, le temps passe vite à cause de toute l’agitation du procès, cela retombera une fois que ça sera finie.

J’en suis certaine.

Elle lut les quelques notes qu’elle avait prise durant le témoignage de la salade, elle voulait pointer quelques détails qui selon elle pouvaient avoir leurs importances, elle fit le tour de la table de la défense, prit son menton entre ses doigts, comme lorsqu’elle partait dans une intense réflexion et fixa le témoin pour la première fois, elle n’avait jamais pu le détailler. D’environ un mètre vingt ou trente, il était beaucoup plus petit qu’elle, heureusement, sinon son amour-propre en aurait pris un coup, elle le regarda se rasseoir plus confortablement dans sa chaise, ses petits yeux, formés par des bourgeons de salade, la fixait sans ciller. Son armure en cosse de noisette géante était toujours sur son torse, son uniforme, sans aucun doute, elle brillait de mille feux, sûrement lustrer pour l’occasion.

Que vous a dit exactement le radis civil qui est venu vous chercher exactement ?

Vous permettez que je réfléchisse ? C’est que je vais devoir me souvenir d’un détail que je n’avais pas spécialement en tête, donc ça pourrait prendre du temps.

Aucun soucis monsieur Frisé, nous avons tout notre temps, la vérité doit être établie.

Le temps de réflexion qu’avait demandé le témoin permit de regarder les juges, chacun d’eux était très attentif, à elle, au témoin, à ce qui se passait dans la salle, les moindres faits et gestes étaient répertoriés par l’un d’eux, leurs visages étaient fermés par la concentration que leur demandaient leurs fonctions. Néanmoins, ce qui changeait le plus aujourd’hui, était le public, certes, il y avait toujours autant de monde dans la salle, peut-être même un peu plus, tous voulaient être au courant de l’avancée du procès.

Les visages du public avaient changé, certains qui avaient pu avoir une attitude haineuse, pour dédaigneuse, ne l’étaient plus, plus neutre, ils étaient surtout attentifs aux évolutions, le témoignage de la veille ainsi que le revirement de situation leur avait fait changer de point de vue. Des regards plein de tristesse ne la quittaient pas, les fruits et légumes dans ce cas-là, la pensait déjà condamner à mort, dans tous les cas, et ils s’apitoyaient sur son sort. D’autres la soutenaient, en silence, ils la pensaient innocente, ils ne se comptaient que sur les doigts d’une main, mais ils étaient là avec leur petit poing levé, signe de soutien, en tout cas, c’était ce qu’espérait la cuisinière.

Sergent Frisé ? Vous souvenez-vous maintenant ?

Oui, désolé du temps d’attente. Je peux vous dire très exactement ce que m’a dit le pauvre Ray Dicul.

Nous vous écoutons.

Je cite :
« Une humaine est tombée du côté du village, Henry m’a envoyé pour vous prévenir, il est resté avec elle, elle est probablement blessée, nous avons besoin de votre aide. »


Vous êtes sûr que ce sont ses mots exacts ?

Certain, madame.

Comment pouvez-vous en être aussi sûr ? Cela fait déjà quatre jours que l’événement s’est produit, vous pourriez avoir la mémoire qui vous joue des tours.

En effet, cependant, sachez que je suis une salade madame, nous sommes réputés chez les légumes pour être ceux qui ont la meilleure mémoire. Les grades les plus importants dans l’armée demandent d’avoir une astuce, une capacité pour se remémorer des moments exacts au-delà de Commandant, tout comme les salades.

Est-ce exact ?

Elle se tourna vers les juges et la procureure, ne connaissant pas la culture végétale, elle ne pouvait que se poser la question.

En effet, les légumes de la famille des salades ont une mémoire très importante et très bien organisé, ils auront parfois du mal à retrouver les informations qu’ils recherchent à l’intérieur, pourtant, ils la retrouveront toujours et leurs souvenirs seront toujours exact.

Je vous remercie pour cette information Princesse Pea.

Je vous en prie, continuez s’il vous plaît.

Bien sûr. Vous êtes donc venus avec votre colonne, pour venir en aide à l’humaine qui venait de se faire mal ?

C’est tout à fait ça, comme je le disais à Madame la Procureure Aythu, je suis venu pour aider, vous, comme mon peuple, une guerre ouverte entre nos deux peuples seraient très mauvais pour nous, nous ne sommes que très peu, alors que vous êtes des milliers.

Monsieur Frisé, les faits s’il vous plait et seulement les faits ! C’est inacceptable !

Bien sûr votre honneur Lemon, désolé.

Passons au second point, vous avez témoigné plus tôt, disant, que vous avez « étouffé dans l’œufs toutes tentatives de communication ». Comment avez-vous fait exactement ?

J’ai frappé l’humain qui était avec vous de mon fléau.

Est-ce un comportement normal dans votre culture de frapper les prisonniers pour avoir le silence ?

En effet, cela n’est peut-être pas le cas dans le monde humain, mais chez nous c’est quelque chose de banal.

Elle accusa le cou, elle n’était pas sûr de ce dernier, elle avait tenté le bluff, se disant que ça n’était pas normal et qu’elle pourrait peut-être récupérer encore un peu de capital sympathie avec ce dernier évènement, c’était râpé, elle allait devoir trouver autre chose.

J’ai un dernier point, cependant, cela ne concerne pas votre témoignage, enfin indirectement, vous avez dévoilé que la sénatrice Barbie Rhu avait voulu me faire couper la tête alors qu’elle venait de me voir, est-ce exact ?

Vous venez de l’entendre, comme tous dans la salle, oui, elle m’a donné l’ordre de vous faire tuer, et quand elle a insisté, me promettant de plus hautes fonctions, j’ai cédé.

Ma question est donc pour mesdames et messieurs les juges de cette cour exceptionnelle. Que fais la sénatrice Barbie Rhu dans cette assemblée ?

Comment osez-vous ?

Comment j’oses ? Ce tribunal est sensé être neutre, impartial et prêt à rendre un verdict tout ce qu’il y a de plus juste, cependant, dès les premiers instants où madame la juge m’a vu, elle a décidé de prendre ma vie. N’est-ce pas une preuve que tout ceci n’est qu’une mascarade pour me faire pendre ou trancher la tête ? Après tout, c’était votre intention première.

Mademoiselle Erwolf, vous allez trop loin !

Absolument pas ! Accepteriez-vous, vous madame Uno, que votre mari se fasse juger par l’une des femmes qui, il y a à peine quelques jours, demandait sa tête alors qu’il n’était pas passé en jugement ?

Non, il est vrai.

La reine de Frutopolis se tourna vers John et l’effleura de ses mains délicates, le geste était rapide, presque imperceptible, pourtant il démontrait un attachement entre les deux êtres que la chasseuse de primes n’aurait pas imaginé jusque-là. Dans le même mouvement, elle se rassit sur sa chaise, elle s’était levée à cause de l’émotion, ce qui n’était pas dans sa nature, cependant, le sujet les concernait tous au plus haut point, elle était à fleur de peau ces derniers jours.

La séance reprendra tout à l’heure, les juges vont se réunir pour discuter du sujet qu’est la participation de la sénatrice Barbie Rhu dans ce jugement.

Les deux chevaliers cactus, qui se trouvaient sur les côtés de la table de la défense, où était assise Robina durant l’interrogatoire du témoin par la procureure, vinrent l’encadrer.

Veuillez nous suivre pendant que les jurés délibèrent sur la question que vous venez de soulever.

Elle repassa la porte des accusés, derrière le banc, le bureau dans lequel on l’installait avait été vidé pendant la séance de ce matin, il restait le bureau, mais les livres, dossiers, papiers et autres éléments de travail avaient disparus pour ne laisser place qu’à du vide. Les deux soldats l’invitèrent à entrer, puis refermèrent la porte derrière elle, ils étaient professionnels, tellement qu’ils n’engageaient jamais la conversation avec elle, malgré ses nombreuses tentatives. Le temps passa lentement, l’horloge était toujours là, et c’était bien la seule distraction qu’elle avait, pas un bruit venant de l’extérieur, et même plus de dossiers d’anciennes affaires qu’elle aurait pu feuilleter pour se donner de l’inspiration pour sa défense.

Elle stoppa le compte à quatre mille huit cent soixante-quinze, quand on frappa à la porte et qu’elle s’ouvrit derrière pour laisser la place à un homme en armure qui la fixa pendant un instant avant de l’inviter à sortir.

Les juges ont choisi, vous pouvez revenir en salle d’audience.

Elle fit de nouveau le voyage dans le sens inverse, déjà deux fois qu’elle passait les mêmes salles, les mêmes portes, elle aurait aimé avoir des nouvelles de Fang, était-il en sécurité, avait-il pu rentrer sur l’Iceberg, prévenir le sergent Lanch ainsi que les Glaciers ? Que feraient-ils sans elle ? Rentreraient-ils à Sanderr ? Pourquoi n’étaient-ils pas déjà là pour prendre sa défense ? Tant de questions alors qu’elle les évitait normalement, cependant le moment de flottement qui la suivait suite à cette absence d’action lui faisait se tourner vers ses pensées les plus sombres. Malgré cela, elle se retrouvait de nouveau dans la chaise de la défense, prête à écouter la décision du juré.

Mademoiselle Erwolf, accusée, à la suite des nouvelles preuves que vous avez soulevée, vous, ainsi que la procureure Aythu, nous avons décidé de retirer le droit de faire partie des dix juges de ce tribunal exceptionnel. Êtes-vous satisfaite ?

Extrêmement, votre honneur.

Bien, la séance peut reprendre. Nous remplacerons mademoiselle Rhu dès demain.

Je vous remercie vos honneurs.

Elle s’inclina légèrement pour appuyer ses propos avant de se relever.

Je pense en avoir fini, c’était le point le plus litigieux dans le témoignage du sergent Frisé et je voulais vous en faire part.

Nous allons donc mettre fin à la séance d’aujourd’hui. Que les gardes escortent l’accusée jusqu’à sa cellule.

C’est ici que les deux chevaliers qui s’occupaient d’elle depuis ce matin l’encadrèrent de nouveau pour l’escorter, elle avait encore gagné un peu de terrain, se débarrasser d’une juge qui la trouvait déjà coupable était un bon point, il suffisait de continuer comme ça et elle pourrait s’en sortir, en tout cas elle l’espérait de tout son cœur.
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Une nouvelle journée commençait, Robina ouvrit un œil, déjà la nourriture qui se trouvait dans un coin de la pièce commençait à dégager une odeur qui n’engageait pas à la consommation, elle allait devoir en parler à Chante Relle quand elle la verrait aujourd’hui. Elle récupéra tout de même un fruit de cactus encore en bon état, après tout, les fruits frais étaient ce qui se conservait le mieux, surtout dans leurs milieux naturels, et croqua à l’intérieur, si on voyait ce qu’elle venait de faire, elle se ferait tuer instantanément par les gardes derrière la porte, mais ici, pas d’yeux scrutateurs et elle finissait rapidement de le manger avant de le jeter dans une poubelle improvisée.

Alors qu’elle était en train de manger une saucisse de cactus, la porte de sa chambre s’ouvrit, cependant, pas d’Amirale Chante Relle pour lui souhaiter le bonjour, comme à l’accoutumé, ici, un homme betterave la fixa quelques instants avant de se retourner vers le couloir et ressortir de la cellule, le message était clair. Elle sortit, sa saucisse dans la main, et regarda à gauche comme à droite, aucune trace de son amie, elle aurait bien posé la question, malheureusement, cela aurait pu démontrer un attachement entre les deux femmes, et elles ne pouvaient pas se le permettre, la neutralité de l’Amirale ne devait pas être remise en cause, sous peine qu’elle se retrouve exclue des dix juges légumes et fruits de l’assemblée.

Comme à l’accoutumé, la cuisinière fut installée dans la même pièce, elle pouvait prendre ressentir que les deux personnes qui l’encadraient aujourd’hui, étaient les mêmes que la veille, ainsi que le jour d’avant, des hommes lui avaient été attribuer de ce qu’elle pouvait comprendre. Comme du papier à musique, les deux chevaliers cactus se mirent chacun à un côté de la porte alors qu’un troisième l’ouvrait, déjà deux jours qu’elle vivait ça, un troisième lui donnait une impression de déjà-vu assez singulière, dire qu’elle n’en avait pas encore fini.

En rentrant dans la pièce, elle put s’installer directement au niveau de la place de la défense, les gardes étaient toujours aussi nombreux que la veille, la sécurité avait été bien renforcée et aucun civil ne pouvait se faufiler jusqu’à la chasseuse de primes, ou l’accusée s’enfuir en se mêlant au public. L’annonce journalière du greffier fit entrer les juges, ici, pas de Barbie Rhu, un homme à l’air patibulaire, harnaché d’une armure complète en écorce de bois se mit à la place de la sénatrice.

Le Sous-Amiral Rayv Bet.
Le Sous-Amiral Rayv Bet:

Tous prirent place et ainsi l’entièreté de la salle put s’asseoir.

Ici, commence le troisième jour du jugement de mademoiselle Robina Erwolf pour crimes contre la Légumanité.

Que le témoin s’avance et prenne sa place dans le box des témoins.

Comme annoncé la veille, ce fut l’Amirale Chante Relle qui se leva de sa chaise de juge pour faire le tour du comptoir des jurés et s’installa dans la chaise réservée pour les témoins, elle déposa les armes qu’elle portait, dont deux à la Sanderrienne, sur le côté et croisa les mains devant elle en attendant que Madame la Procureure ne prenne la parole.

Témoin, veuillez décliner votre nom, votre peuple ainsi que votre profession.

Je suis Chante Relle, amirale et cheffe de l’armée des légumes, j’organise et coordonne l’armée de la princesse Pea, je suis une chanterelle.

Par le Grand Monolithe, jurez-vous de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité ?

Je le jure sur le Grand Monolithe.

La séance peut ainsi commencer.

Madame Aythu, c’est à vous.

Je vous remercie votre honneur. Mademoiselle Relle, vous avez interrompu l’exécution des deux humains au premier jour de leur arrivée, est-ce exact ?

En effet, comme le sergent Frisé a pu en témoigner dans la journée d’hier, j’ai sommé aux deux soldats piments de se stopper, j’ai ensuite réprimandé le Sergent Frisé, pour sa décision que je qualifierai ici de contestable. Il a bien tenté de se défendre, en m’expliquant qu’il ne faisait que prendre une initiative suite aux ordres de la sénatrice Rhu, cependant, je ne l’ai pas écouté, il avait outrepassé ses droits.

Oui, je suis sûr que le sergent ne devait pas avoir la conscience tranquille.

Absolument pas, je l’ai invité à me voir dans mon bureau après les événements, ce qui n’a pu être le cas pour l’instant. Avec les préparatifs pour le jugement, en collaboration avec nos voisins les fruits, je n’ai pu faire le nécessaire pour régler cette affaire, au combien épineuse. Puis, je l’ai invité à rompre les rangs avec son escouade, m’occupant moi-même des deux humains.

Je vois, vous preniez la responsabilité de la sécurité des deux prisonniers en ce cas ?

En effet, cependant, le sergent Frisé m’a indiqué son envie de me prendre une partie de la tache demandée, en gardant les effets personnels des deux escortés.

Quels effets personnels exactement ?

Les armes, Madame la Procureure. J’ai ainsi détaillé le soldat me faisant cette requête, il semblait sincère et voulait se rattraper de sa bavure, je ne pouvais pas lui en tenir rigueur, j’ai donc accédé à sa demande, somme toute simple. C’est à ce moment-là que j’ai donné l’ordre à ses hommes de prendre congé à la caserne, leur disant que je les rejoindrais plus tard.

Et l’avez-vous fait ? Je veux dire, vous n’avez pu vous occuper du sergent Frisé, avez-vous pris le temps d’aller voir ces simples soldats de patrouille pour leur passer un savon ?

Oui, j’ai marqué le coup en me rendant à la fin de la journée dans la caserne où j’ai réprimandé chacun d’eux, pour leur manque de jugement.

Je vous remercie pour ces éclaircissements, vous pouvez continuer.

Merci. Suite à mes ordres, et la disparition de la cohorte du sergent, je me suis présentée aux deux prisonniers, m’excusant auprès d’eux, sachant la situation, je ne pouvais légumement pas valider le fait d’une exécution sommaire, sans jugement. J’ai ainsi assuré par la suite que la situation se réglerait rapidement, ce qui vous pouvez le voir, n’est pas véritablement le cas ici.

Petits sourires qui s’échangent dans la salle, même entre les différents juges, mais pas une seule parole, tous ont compris que le maillet pouvait retentir rapidement et que faire évacuer la salle ne semblait pas gêner les jurés.

Pouvez-vous continuer Amirale Relle ?

Bien sûr, désolé Princesse Pea. Nous avons alors échangé quelques paroles avec la Sénatrice Barbie Rhu, comme nous le savons maintenant, son aversion pour les deux humains était palpable, elle insinua même que je préférais la compagnie des humains à mes semblables.

Une accusation très dure.

En effet, cependant, je n’ai pas relevé l’insulte, préférant le silence, elle a bien tenté d’utiliser le sergent Frisé contre moi, mais il a gardé le silence aussi. Mademoiselle la Sénatrice a alors espéré que la princesse Pea trancherait la décision, à sa faveur, puis nous avons tous attendu, sans échanger un seul mot, la dirigeante du royaume Légume ainsi que de la Conseillère Carro Rott.

Que s’est-il passé quand la princesse est arrivée ?

Notre altesse s’est excusée, pour le traitement dont son armée avait fait preuve à leur arrivée, que notre hospitalité envers le genre humain avait, semblerait-il, changé depuis quelque temps. La conseillère Rott a exprimé son mécontentement, assurant à Son Altesse royale à quel point les deux étrangers étaient dangereux pour notre nation, vu que la jeune femme était une cuisinière, qu’elle aurait pu faire un massacre durant le laps de temps où elle était arrivée et celui où les hommes l’ont arrêté.

Des paroles sensées de la part de la Conseillère Royale, ne trouvez-vous pas ?

En effet, cependant, notre dirigeante a exprimé son désaccord, voulant s’intégrer au Gouvernement Mondial, et non le combattre, elle préférait ne pas faire exécuter ces deux humains sans jugement. Carro Rott, lui a répondu que de relâcher les deux prisonniers les mettraient en danger, j’étais d’accord avec elle, c’est pourquoi j’ai proposé d’escorter ces deux personnes en dehors de nos terres pour qu’elles ne reviennent pas.

Le bannissement aurait été une très bonne décision aussi en effet.

Exacte, cependant, pour blanchir les deux prisonniers de toute accusation, la conseillère a proposé à la Princesse Pea de faire passer les deux personnes en jugement, une formalité selon elle pour calmer les ardeurs du peuple, montrer que bien qu’ils soient cuisiniers, ou qu’elle soit cuisinière, vu que c’est le cas, cela montrerait au peuple qu’ils ne nous voulaient aucun mal et nous pourrions les relâcher.

Quelle bonté d’âme de la part de votre honneur Carro Rott.

La femme carotte fit un geste de la tête en direction de la procureure, jouant les femmes humbles face à ses paroles.

Vous avez tout à fait raison, c’est pourquoi la princesse, dans sa grande sagesse, a validé cette proposition, on m’a ensuite donné l’ordre d’escorter les deux accusés dans leur cellule, ce que j’ai fait dans l’instant.

C’est ici que vous êtes partis avec les deux humains, c’est bien ça ?

Exact, je les ai emmenés plusieurs étages au-dessus des appartements des invités, me trouvant un étage juste au-dessus, je me suis ainsi portée garante de l’enfermement de ces deux personnes.

Le maillet frappa sur le bureau des juges, la petite princesse Pea se leva, suivit par toute la salle ainsi que ses collègues, elle semblait avoir une annonce importante à faire.

Nous reprendrons la séance après une courte pause, sachant que le témoignage de l’Amirale Relle sera un des points les plus importants, nous lui laissons le temps de s’hydrater. Vous aurez ainsi le temps de reprendre vos notes Madame le Procureure, ainsi que vous, accusée, suite aux déclarations de l’Amirale. La séance est levée, reprise dans trente minutes.

Les chevaliers cactus ne bougèrent pas pour escorter la jeune femme, on lui intima juste de se lever quand les dix fruits et légumes sortirent de la salle par la porte de gauche, un bruit ambiant s’éleva dans les airs, la foule discutant des dernières paroles. La jeune femme aux longs cheveux bleus reprit ses notes, voir si elle pouvait trouver une faille pour s’en sortir dans ce que venait de partager son ami l’Amirale Chante Relle.
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Il ne fallut pas longtemps avant que les juges ne reviennent, l’Amirale rentra par la porte des témoins, elle croisa le regard de Robina, bien qu’elles ne pouvaient pas se parler, elles échangèrent un regard pour se réconforter, l’une envers l’autre. La cheffe de l’armée légumes semblait en pleine forme, vibrante de vie, attendant que les dernières modalités soient échangées entre le greffier et les juges, elle restait debout, droite comme un i, digne en toutes circonstances. Déjà, les échanges se finissaient et les honorables juges prenaient place dans leurs sièges, la salle les mima, quelques secondes en décalage, l’accusation se leva de sa place et fit le tour de son bureau avant de se rapprocher de la femme champignon.

Pouvons-nous reprendre Amirale ?

Tout à fait, j’ai pu boire tout mon saoul et me voilà fin prête pour la fin de mon témoignage.

Je vous en prie, continuez où vous en étiez avant cette pause.

Comme je le racontais avant cette hydratation, j’ai escorté les deux prisonniers jusqu’à leurs cellules, je leur ai demandé d’excuser la rudesse de leur accueil, que je gardais leurs armes, ne pouvant pas leur rendre vu la situation dans laquelle ils étaient.

C’est tout à fait logique, en effet, nous n’allons pas armer des prisonniers.

Tout à fait, j’ai ainsi fermé derrière eux après avoir reçu les remerciements de l’accusée ici présente.

Elle vous a remercié ?

Oui, j’ai pris sa défense contre la tentative de meurtre de ma sénatrice Rhu, c’est le pourquoi de ses mots. Suite à cela, j’ai vu le sergent Frisé ainsi que ses soldats dans la caserne peu de temps après, les reprenant sur le fait qu’ils avaient écouté les ordres de quelqu’un qui n’était pas des forces armées de notre nation.

Pas à cause de l’emprisonnement des deux humains ?

Aucunement, ils n’avaient fait que leur travail.

C’est bien noté, je vous en prie.

Plongée dans le brouillard, la cuisinière entendit la suite des paroles de Chante Relle, choquée par le fait que pour son amie, ses hommes n’avaient fait que leurs devoirs, elle s’était attendue à ce qu’elle critique ouvertement leur comportement, pas qu’elle ne leur mette qu’une légère tape sur les doigts.

C’est après cela que j’ai rejoint la princesse Pea et la conseillère Carro Rott, pour discuter du sujet des deux prisonniers, j’ai immédiatement proposé de faire disparaître les deux humains, une escorte rapide les aurait évacués vers la frontière le plus vite et discrètement possible pendant la nuit.

Vous vouliez sauver les humains ?

Les sauver, et nous aussi, tuer des humains reviendrait à déclarer la guerre au Gouvernement Mondial, selon mon avis, surtout sans jugement, et nous ne pouvons pas nous le permettre, nous serions en trop grande infériorité numérique.

Vous pensez ?

Des centaines d’hommes et de femmes vivent au-delà de la frontière, nous les voyons tous en montant sur le pic, pour les plus téméraires, nous pouvons même aller leur parler. Je connais la vérité, des centaines de milliers de personnes voguent sur l’océan, des millions vivent sur des terres que nous ne verrons jamais, si nous osons nous attirer leurs foudres que se passera-t-il pour nous ?

Un murmure d’inquiétude, de crainte et d’appréhension se diffusa dans la salle, même certains juges se remirent au fond de leur siège après avoir entendu une telle déclaration.

Êtes-vous sûre de ce que vous avancez ?

Si j’en suis sûre ? Oh oui, je vous rappelle les faits d’une femme si puissante qu’elle a détruite à elle seule le village d’humains qui se trouve de l’autre côté, faite de quelque chose de si chaud, que tout brûlait à son contact. Elle est partie après cette destruction gratuite, certains d’entre vous s’en souviennent encore alors que nous regardions cela depuis le pic, et de ce que j’ai compris, des centaines de personnes comme elle se trouvent partout dans le monde extérieur.

C’est un bien triste tableau que vous nous dépeignez là.

Triste et pourtant, si vrai, nous devons nous montrer prudents envers le monde extérieur.

Et quel a été la réaction de la princesse Pea et de la conseillère royale Rott ?

Carro Rott a préconisé de faire un jugement, j’étais contre, pour moi, il ne vaudrait rien, le peuple voudrait leurs têtes, dans tous les cas.

Pourquoi ce tribunal alors ? Si vous étiez tant contre l’idée d’un jugement, vous auriez pu empêcher tout cela.

La Conseillère Rott a insisté, malgré mon idée pour faire évacuer les deux humains, la Conseillère Rhu a même interrompu la session pour proposer de faire tuer les deux humains, des morts qui mettraient du baume au cœur selon elle, montrant aussi l’exemple que nous n’étions pas un peuple à prendre à la légère.

Des paroles sensées.

Nous avons cependant fait bloc toutes les trois, nous voulons nous intégrer avec le Gouvernement Mondial, et non nous créer des tensions inutiles, c’est pourquoi l’idée d’un jugement impartial a été choisie, ainsi, nous pourrons expliquer le pourquoi de la mort de cette femme s’il venait à arriver que les juges décident de sa mort.

Une bonne chose, nous voilà ainsi dans un moment historique, nous allons ainsi pouvoir voir, si les cuisiniers sont des ennemis de notre peuple.

Nous avons rapidement choisi que trois des juges seraient la conseillère, la princesse, ainsi que moi. Rapidement, la sénatrice Rhu s’est ajoutée aux cinq juges que devaient consister le tribunal exceptionnel des cinq légumes, ne laissant qu’une seule place à un dernier membre dans cette assemblée, la Conseillère Rott a annoncé qu’elle choisirait parmi l’armée pour avoir un autre point de vue d’un membre de l’armée, quelqu’un qui ne serait cependant pas influencé par moi-même.

Le lieutenant Nail Fenne.

C’est exact, un homme droit et qui fait preuve de force morale et tempérance, il est promis à un bel avenir dans notre armée. C’est quelques jours plus tard, que le Secrétaire Général Lemon, invité par une lettre de la conseillère Carro Rott, se présenta au palais royal, ayant eu vent de l’affaire qui nous occupait.

C’est bien étrange.

Pas tellement, madame Rott, voulant rapprocher nos deux peuples, alors en guerre, a pris contact avec le dirigeant de Frutopolis pour diminuer les tensions, pour prouver sa bonne foi, elle a ainsi parlé de l’événement, montrant que les humains n’étaient pas privilégiés sur les terres des légumes.

Je vois, c’est donc ce jour-là que s’est décidé la formation de ce tribunal exceptionnel pour les crimes contre la Légumanité ?

C’est ça. Le lendemain même, de cette décision, la prisonnière était entendue pour l’audience préliminaire devant quatre des hommes et femmes ici, la princesse Diana Pea, la conseillère Carro Rott, le Secrétaire Général John Lemon, ainsi que moi-même, l’Amirale Chante Relle.

Je vous remercie pour ce témoignage complet, je pense avoir toutes les pièces dont j’ai besoin pour l’accusation, je laisse la place à l’accusée pour vous posez des questions, même si je doute qu’elle arrive à tirer quelque chose de vous.

Accusée Robina Erwolf, c’est à vous d’interroger le témoin pour votre défense.

La chasseresse de primes prit une grande respiration avant de se lever, elle savait que ce que disait la femme champignon ici était pour l’aider, et non parce qu’elle voulait aussi sa tête, ou alors elle était la meilleure actrice que la Sanderrienne avait jamais connue. Elle souffla longuement pour se vider les poumons et s’approcha du témoin, et amie, pour commencer le contre-interrogatoire. Cependant, elle n’avait rien dit d’incriminant pour elle, malgré le fait qu’elle avait aussi pris la défense du sergent Frisé et des soldats, néanmoins, c’était normal, elle était la cheffe, elle se devait de montrer l’exemple, et de montrer une neutralité à toute épreuve.

La défense n’a rien à ajouter au témoignage du témoin Chante Relle.

Dans ce cas, les gardes vont vous escorter jusqu’à votre cellule mademoiselle Erwolf, demain, sera le jour de votre propre témoignage. Préparez-vous bien.

Oui votre honneur, je vais m’en assurer.

Après une demi-heure de marche, la revoilà de nouveau dans sa chambre, à attendre le lendemain, pour ce qui était, semblait-il le dernier témoignage du procès.
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Robina n’avait pas dormi de la nuit, elle n’aurait pas dû se sentir mal, pourtant le stress lui tordait l’estomac, lui donnant des nausées, elle ne s’imaginait même pas prendre une bouchée de ce qui restait par terre, dans un coin de la pièce. Tout ce qui restait, dégageait une odeur de putréfaction, doucereuse, presque sucrée parfois, mais cela ne voulait dire qu’une seule chose, rien n’était propre à la consommation dans la montagne de nourriture qu’il restait dans la chambre de la jeune cuisinière.

Ce fut une matinée difficile qui s’annonçait alors que la procession se faisait selon ce qu’elle avait compris pour la dernière fois, de nouveau, on la laissait devant les chevaliers cactus, les deux gardes de d’habitude, elle pouvait le comprendre à leur posture et la façon qu’ils avaient à marcher.

Alors messieurs, que pensez-vous de ce procès ? Vous pouvez bien me le dire, je crois que je serais morte, ou libre, ce soir.

Pour la première fois en cinq jours, la femme eut une réaction à ses paroles, les deux soldats s’entre-regardèrent, cependant, ils n’ouvrirent pas la bouche pour autant, ils allaient rester professionnels jusqu’au bout des épines.

Vous savez, ce que vous direz ne sera entendu que de nous trois, après tout, à la fin de la journée, ça sera finis.

Nouvel échange de regard, plus prononcé cette fois, la chasseuse de primes s’apprêtait à répliquer une troisième fois pour les faire répondre quand elle put enfin entendre le son de la voix du garde de gauche, rauque, légèrement éraillé, comme s’il n’avait pas l’habitude de parler.

Nous n’avons pas le droit de vous parler.

Chut, gros abruti, tu vas nous créer des ennuis.

Vous savez que vous venez de m’adresser la parole ? Tous les deux, de surcroît, alors maintenant que le mal est fait, nous pourrions discuter tranquillement non ?

Tu vois ce que tu viens de faire ? Maintenant, on est marron, on va se faire déshydrater à cause de toi, l’Amirale Relle va nous tuer, c’est sûr.

Pourquoi elle ferait ça ? Si personne n’est au courant, il n’y a pas lieu de se faire exécuter, vous savez ? De toute façon, je ne veux pas tailler une bavette pendant vingt ans, juste vous posez une simple question.

Les deux chevaliers s’arrêtèrent, légèrement décalés, ce fut la première fois qu’elle vit que l’ensemble armé se désolidarisait l’un de l’autre, cela la choqua autant que la surprit, elle ne s’était pas attendue à créer autant de chaos avec une simple discussion entamée.

Posez vite votre question, qu’on y réponde et que nous repartions jusqu’à votre cellule.

Au point où on en est, oui allez-y et faites vite.

En fait, c’est très simple, vous pensez que je vais être jugé coupable ou pas ?

Le premier à répondre fut celui à la droite de la Sanderrienne, comme voulant se débarrasser le plus vite possible du charbon ardent qu’il avait entre les mains.

Vous êtes coupable, pour moi, ça ne fait aucun doute, et c’est sûrement l’avis de la majorité des juges, pour moi, vous ne passerez pas la journée.

Tu dis n’importe quoi. Elle n’est pas coupable, elle n’a touché à aucun des citoyens de la Légumanité, à aucun moment elle n’a sorti une arme pour menacer quelqu’un ou même toucher un sabre. Tu ne vois pas clair, ça va se finir avec cette jeune femme libre, j’en suis persuadé.

Tu n'as pas bu assez d’eau aujourd’hui Ardie, ce n’est pas possible, tu crois vraiment qu’elle est innocente ?

Et toi, Monsieur Beau Rel, tout ça parce qu’il a des liens de champignons avec l’Amirale pense que son avis est plus important que le mien ?

Exactement ! Je sais que j’ai raison parce que si je n’ai pas raison, c’est que ce n’est pas possible.

Ah oui, monsieur sait tout mieux que tout le monde ! Monsieur fait partie de la haute société légumineuse.

Tout à fait ! Et si vous n’êtes pas contents tous les deux, je vous mets au soleil à déshydrater, quelques heures de plus ou de moins pour l’humaine ne changera pas grand-chose à son cas.

Félicitations Beau Rel ! Ça, c’est un bel exemple pour tous les chevaliers cactus, on doit présumer de l’innocence de tout le monde avant la fin du verdict, même les humains !

Ouais, sauf que c’est une cuisinière, là mon gars, pas une voleuse à la sauvette !

Elle n’a tué personne de notre peuple.

Mais elle a tué et torturé des dizaines de milliers des nôtres en dehors de cette île, tu y penses à ça ? Ah non ! C’était sorti de l’esprit de monsieur ! Bon, il est l’heure de vous emmener à votre cellule.

Ceux de dehors n’ont rien à voir avec nous, et tu le sais très bien.

Ils n’ont juste pas conscience de la vie qu’ils manquent, tu crois vraiment qu’ils veulent se faire manger par quelqu’un ? Non, tout le monde veut vivre et c’est normal, c’est naturel, pas comme la cuisine qui est une hérésie.

Pour moi, tu te goures Rel, on verra ce qu’en pensent les juges.

Dix verres que j’ai raison.

Tenu !

Ils se tapèrent dans la main l’un de l’autre et ouvrirent la porte de la cellule, ayant pris plus de temps qu’à l’accoutumé, il ne restait pour ainsi dire plus de temps, déjà le bruit des pas de leur supérieur se faisait entendre au coin du couloir. Ils refermèrent la porte alors qu’il passait le coin, une tension s’installa entre les deux gardes attitrés avant que l’homme n’ouvre la porte, sans faire de réflexion, il ne semblait pas avoir vu ou entendu ce qui venait d’arriver.

Quelques minutes, plus tard, elle se retrouvait à la place de la défense, assise dans sa chaise, la tension était à son comble, son destin allait se jouer dans les prochaines heures, elle le savait, elle se tourna vers la salle, chacun avait les yeux braqués sur elle. Elle déglutit de façon sonore, sa nouvelle adversaire au barreau la regarda avec un petit sourire amusé.

Vous vous rendez enfin compte que c’est votre dernier jour sur terre ? Ne vous inquiétez pas, à ce qu’on m’a dit, c’est extrêmement long et douloureux.

La jeune femme aux longs cheveux bleus voulut répliquer quand le greffier fit son entrée pour annoncer les juges, déjà la séance allait commencer et Robina n’allait pas pouvoir rendre la monnaie de sa pièce à cette pimbêche de laitue.

Aujourd’hui, se tiendra la dernière séance de ce tribunal. Nous entendrons le témoignage de l’accusée en personne, Robina Erwolf, merci de prendre place sur le siège des témoins.

Tel un automate, la jeune femme se leva de son siège et prit place là où tous ceux qu’elle avait contre-interroger, c’étaient tenus, elle n’était pas du tout à l’aise. Elle était maintenant sous le feu des projecteurs, et elle allait devoir se défendre bec et ongles pour ne pas finir à rôtir au soleil.
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Témoin, veuillez décliner votre nom, votre peuple ainsi que votre profession.

Robina Erwolf, je suis une humaine du Royaume-Archipel de Sanderr, je suis cuisinière.

Par le Grand Monolithe, jurez-vous de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité ?

Je le jure sur le Grand Monolithe.

Robina ne savait toujours pas ce qu’était le grand monolithe, peut-être le saurait-elle un jour, cependant, il n’y avait pas de questions à se poser pour l’instant, juste des réponses à donner pour se défendre et ainsi être acquitté, la partie la plus importante du procès se passait ici. La petite princesse Pea leva son maillet pour l’abattre sur le bois de son pupitre devant elle avant d’annoncer l’ouverture du témoignage.

Procureure Aythu, vous pouvez commencer.

Merci votre Honneur.Accusée Erwolf, expliquez-nous, comment êtes-vous arrivés sur Whiskey Peak. C’est bien le nom que donne le Gouvernement Mondial à notre île n’est-ce pas ?

C’est exact, nous la nommons ainsi depuis plus de cent ans. Je suis arrivé sur cette île, il y a de cela environ dix jours, je fais partie d’une association internationale nommée le Baroque Works, mon travail consistant à attraper les criminels contre de l’argent…

Votre travail ? Vous venez pourtant de dire que vous étiez cuisinière, et non… Quel est le nom de cette seconde profession ?

Chasseuse de primes, c’est vrai, je l’ai oublié, pas parce que je voulais le cacher, mais bien parce que je ne m’identifie pas comme tel, je suis avant tout une cuisinière selon moi.

Je vous remercie, poursuivez.

Comme je vous le disais, je suis venue il y a dix jours, pour rencontrer un de mes supérieurs, en effet, il y a de cela plusieurs semaines, j’ai arrêté une dangereuse criminelle du nom de Mayaku Miso, une femme pouvant créer et contrôler du chocolat, suite à cela, on m’a demandé de venir ici, sur Whiskey Peak, pour faire mon rapport ainsi que recevoir une promotion.

Cette femme était si dangereuse ?

J’ai bien failli mourir plusieurs fois durant mon combat contre elle, en effet madame. Après avoir remis la pirate aux marines, les autorités du Gouvernement Mondial, j’ai reçu la prime de la personne, cent quatre-vingt-huit millions de berries, ainsi que mes collègues qui ont eu leur part du butin.

Et est-ce que cette somme de berries est importante ? Je veux dire, nous faisons partie du Gouvernement, mais n’avons jamais eu d’échanges avec eux pour la mise en place d’une monnaie.

Très importante. Si je l’avais voulu, j’aurais pu arrêter mon travail pour vivre sur cet argent le reste de ma vie.

Pourquoi ne pas l’avoir fait ? Je veux dire, ici tout le monde ne travaille pas, car nous n’en avons pas un réel besoin, nous nourrissant des rayons du soleil et n’ayant qu’à boire l’eau de la rivière. La seule activité de notre peuple est de donner vie à de nouveaux membres à notre peuple en cultivant de nouveaux légumes.

Parce que j’aime mon travail. Être cuisinière, ça n’est pas qu’une simple façon de dire que je découpe des pommes de terre ou des carottes. Désolé à ceux présents dans la salle qui pourraient être choqués.

En effet, à l’évocation de ces derniers mots, des tubercules s’étaient retrouvés évanouis, s’imaginant à la merci de la cuisinière avec son couteau de cuisine, ou d’un épluche-légumes. Des gardes en armure cactus se dispersaient pour les emmener dans une salle plus loin dans le tribunal pour qu’ils reprennent leurs esprits.

Être cuisinière, c’est pour moi, rendre hommage aux aliments que je cuisine, mettre un poulet au four avec de l’huile de tournesol, tout le monde peut le faire, mais améliorer le goût, en travaillant la bête, pour qu’elle ne soit pas sèche en sortant du four, avec du beurre, des aromates, un fond de volaille que vous avez fait à l’avance, du gros sel à l’intérieur. Je m’emporte, néanmoins, sachez cela, être cuisinier, ça n’est pas découper des légumes ou des fruits, c’est les aimer.

Les aimer ? Pourtant, vous parlez de meurtre de masse, combien de poireaux, navets, pommes de terre, carottes, petits pois, fenouil et autres légumes avez-vous épluché dans votre vie ? Combien ont fini dans l’estomac de l’un de vos congénères ? Et que dire des fruits ? Vous n’en avez pas parlé, si ça se trouve, vous êtes aussi pâtissière !

Non, je ne suis pas pâtissière, je préfère travailler le salé, même si je ne dis pas non à une gourmandise. Et oui, j’aime les fruits, autant que les légumes, vous pouvez ne pas me croire, pourtant chacun de mes collègues de par le monde vous répondra la même chose, s’il aime un tant soit peu son métier.

Puis-je vous interrompre ?

Bien sûr, allez-y. Il y a quelque chose qui ne va pas ?

Oui, vous venez de dire, je cite :
« Chacun de mes collègues de par le monde »
Avez-vous beaucoup de collègues dans le monde extérieur ?


Eh bien, je ne les connais pas tous personnellement, je ne connais principalement que ceux de mon île natale Sanderr, où nous sommes environ une cinquantaine.

Une cinquantaine ? Pour une seule île ?

Eh bien, oui, j’ai commencé à apprendre le métier de cuisinière dans un petit restaurant, c’est là que j’ai fait mes premiers pas, pendant des années, j’ai assimilé tout ce qu’on pouvait m’enseigner, nous étions une dizaine à ce moment-là. Puis, j’ai évolué, cherchant encore à m’améliorer, à faire mieux, plus beaux, meilleur et surtout à être fier de ce que je faisais. Le chef des cuisines royales de Sanderr m’a pris sous son aile, il m’a montré ce que je ne savais pas encore, des astuces pour garder plus longtemps les aliments que l’on ne pouvait utiliser que sur une île hivernale. Je pense que nous étions une quarantaine de façon constante, parfois plus ou moins, selon les événements.

Plus de quarante dans une cuisine ? Mais que faisiez-vous pour être autant ?

Nous nous occupions des repas de chacune des personnes dans le palais, famille royale, gardes d’élite ou du rang, blanchisseuse, femme de ménage, conseillers royaux et que sais-je encore, je ne connaissais pas tout le monde dans le palais, loin de là.

Je vois, vous faisiez pour des dizaines de personnes, c’est pour ça que vous étiez quarante.

Des centaines plutôt, Madame la Procureure, rien qu’en comptant les gardes d’élite, dont la caserne se trouvait à l’intérieur du palais, ils devaient être environ deux cents. D’après mes estimations, quand je travaillais encore là-bas, j’en ai déduit que nous étions environ cinq cents à vivre à l’intérieur du palais.

Et pour le monde entier ? Si vous me dites qu’il y a déjà cinquante cuisiniers pour une seule île, je n’ose pas imaginer combien pour le monde entier.

Oh ! Nous n’étions pas que cinquante cuisiniers sur Sanderr, nous étions bien plus, comme je vous disais, se sont ceux que j’ai croisés souvent et avec qui j’ai travaillé, il y avait de nombreux autres restaurants. Sur l’Archipel, je crois que nous étions environ cent trente, si je multiplie ce nombre par le nombre d’île dans le monde, je dirais que nous sommes environ…
Treize mille cuisiniers de par le monde, si mes calculs sont exacts !


Treize mille !? C’est impossible !

La salle se vida encore de beaucoup plus de spectateurs, certains ne se sentant pas bien en entendant le nombre de meurtriers de masses, selon eux, de leurs congénères dans le monde qui les entourait. C’est après avoir joué des coudes que le navigateur Fang Shui ainsi que le Sergent Lanch passèrent la tête à travers la porte de la salle d’audience.

Capitaine !

Capitaine, vous allez bien ?

Silence dans la salle ! C’est inacceptable ! Si j’entends encore un bruit, je vous fais tous évacuer ! Et que font deux humains dans ce tribunal ? Qu’on les fasse évacuer !

Nous sommes des membres d’équipage de Robina Erwolf, nous sommes sous ses ordres monsieur.

Vous êtes ici pour faire évader la prisonnière, c’est bien ça ?! C’est inacceptable ! Qu’on les arrête sur-le-champ !

Secrétaire Général Lemon ! Ils n’ont absolument rien fait, ils n’ont eu en aucun cas un comportement déplacé et il se trouve qu’ils sont escortés par plusieurs gardes cactus, je pense que la sécurité de nos concitoyens est assurée.

Ils vont tenter de faire évader l’accusée !

Si tel est le cas, je suis sûr que les soldats dans cette cour feront bien leur travail et s’occuperont des complices.

Pardon, de m’être emporté princesse Pea, cela ne se reproduira pas.

Je l’espère bien Secrétaire Lemon. Continuez, s’il vous plaît. Et silence dans la salle, sinon je vous ferais évacuer, même les membres d’équipage de l’accusée.

C’est après ces paroles, calmes, mais néanmoins remplies de détermination que le procès reprit son cours.

Reprenez, voulez-vous ?

Avec plaisir. Comme je vous l’expliquais, mes collègues, et moi, aimons notre travail, il ne consiste pas qu’à nourrir nos semblables, à préparer un repas, ou à éplucher des légumes ou des fruits, non. Il faut savoir ce que nous faisons, un repas équilibré et sain, c’est ce qu’il faut, mais il faut aussi qu’il soit goûteux, remplis de saveurs et qu’il donne envie aux personnes de revenir. Puis-je donner un exemple ?

Allez-y.

Pour l’entrée, une salade de légumes, attention aux esprits sensibles, je préfère prévenir cette fois.

Je vous remercie.

Elle sera composée de câpres, de pommes de terre, de poivrons, d’oignons, de petits-pois, de carottes ainsi que de haricots verts.

Un véritable meurtre de masse de la plupart des membres de cette assemblée.

Pour vous, c’est ce que vous voyez, pourtant, nous humain, en avons besoin.
Les câpres vont aider à relever le goût de la salade, ainsi, les légumes autour de ces derniers vont se retrouver avec une meilleure saveur en bouche, elles évitent aussi plusieurs maladies, telles que le scorbut.
Les pommes de terre vont apporter plusieurs choses aussi, des vitamines, des minéraux, des protéines végétales, des glucides et des fibres alimentaires. Je ne ferais pas le détail, cependant sachez que sans tout cela, l’homme aurait de grandes difficultés à être en forme, perte d’énergie, de muscles, fatigue chronique…
Le poivron contient en différentes quantités les mêmes choses que la pomme de terre, cependant, il est aussi porteur de la vitamine E, elle aide à ne pas avoir certaines maladies, de fatigues musculaires et à rester en bonne santé.
Le petit-pois, contient quant à lui de la vitamine K, une vitamine essentielle à l’homme pour cicatriser rapidement, si l’homme en manque, il peut perdre beaucoup de sang, avoir du mal à cicatriser. Le manque de cette dernière peut aller jusqu’à faire vomir du sang.


Nous avons compris mademoiselle, vous pouvez vous arrêter là.

Ce que j’essaie de vous faire comprendre, c’est que sans vous, les légumes et les fruits, nous, les hommes, nous ne pourrions pas vivre, même en ne mangeant que de la viande. Les minéraux dont vous avez besoin pour vivre, avec la lumière du soleil, vous la tirez bien de l’eau que vous buvez ?

En effet, mais c’est moi qui pose les questions ici normalement !

Si l’eau se mettait à parler et à vous juger que vous avez bu ses semblables, trouveriez-vous normal de vous faire déshydrater parce que vous avez voulu vivre ?

Non, mais notre affaire n’a rien à voir avec ce cas-là.

Bien sûr qu’elle a tout à voir. Dans les deux cas, le jugement est impossible, car ici, vous voulez me condamner pour quelque chose qui est obligatoire pour la survie de l’homme. Le métier de cuisinier nous permet, non pas de faire en sorte de torturer, tuer, assassiner ou je ne sais de quel traitement vous m’accusez encore, mais bien de rendre hommage à ces fruits et légumes.

Hommage ? Comment pouvez-vous rendre hommage à des êtres que vous tuez ?

En les rendant meilleurs qu’ils ne l’étaient, dans le goût, dans l’aspect. Les membres de mon équipage, quand ils mangent ma cuisine, ils ont le sourire sur le visage, ils partagent un bon repas, un moment qui fait qu’ils ne seront pas malades, même s’ils ne le savent pas, ce moment de plaisir partagé entre tous, c’est ça le travail d’un vrai cuisinier.

Madame le Procureure, je pense que cela ira pour l’instant. Nous allons poser les questions à partir de maintenant.

Bien sûr votre honneur.

Vous n’avez pas nié avoir cuisiné d’autres légumes et fruits dans votre témoignage.

En effet, je ne peux pas le nier.

Vous dites que nous sommes indispensables à votre survie ?

C’est tout à fait cela, sans vous, nous mourrions.

Ma question est la suivante, accusée Erwolf, avez-vous pris du plaisir à tuer ces fruits et légumes ?

La question prit au dépourvu la jeune femme, elle s’était attendue à autre chose, pourtant, pas à cela.

Du plaisir dans mon travail, oui. Si, votre question est si j’ai pris du plaisir à éplucher des légumes ou des fruits, la réponse est non.

Jamais ?

Comme je l’ai dit en arrivant ici, si les cuisiniers devaient vous cuisiner vous, nous ne le ferions pas, pour moi, vous êtes comme des êtres humains, vous parlez, vous mangez, dans une moindre mesure avec l’eau, vous travaillez, vous donnez la vie, vous avez votre armée, votre système politique. Pour moi, la seule différente que nous avons réellement est le fait que vous venez des fruits et légumes et moi des humains.

Vous ne nous considérez pas comme de gros légumes ou fruits ?

À aucun cas, je n’ai cru cela, surtout en apprenant à vous connaître.

Le sujet le plus important n’est pas là, vous êtes une cuisinière et vous avez épluché, déporté, découpé, assaisonné des fruits et légumes dans le monde entier, vous avez mis fin à leur existence. Pourquoi, nous relâcherions vous ?

Je n’en sais rien, mais sachez que tous les produits que j’ai travaillés, étaient heureux de l’être, je ne l’ai appris qu’il y a peu de temps, mais je peux comprendre, à une moindre mesure, ce que veulent les aliments, que ce soit la viande, le poisson, les fruits, les légumes, ils me parlent, pour que je puisse les cuisiner au moins et les rendre les plus goûteux possible.

Vous voulez nous faire croire que les fruits et légumes sont heureux de se faire cuisiner dans le monde extérieur ? Nous prenez-vous pour des imbéciles ?

En aucun cas, je ne peux cependant pas, vous le prouvez, sauf si vous pouvez vous aussi parler avec les légumes et les fruits non-vivants.

Je vous remercie pour ce témoignage Robina Erwolf, nous allons maintenant délibérer et trancher, si oui ou non, vous serez exécutée. La séance est levée.
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Plusieurs heures passèrent, sans que rien ne bouge, l’attente minait le moral de la jeune femme, pourtant elle gardait espoir, n’était-il pas de bon augure que les juges prennent autant de temps pour décider si elle était coupable ou non ? Fang Shui ainsi que son quartier-maître s’étaient rapprochés d’elle, ils ne se trouvaient plus que de l’autre côté du cordon de sécurité composé de chevalier cactus.

Comment vous allez capitaine ?

Mal, je ne pensais pas me retrouver dans cette situation en allant voir des fruits et légumes vivants.

Je me doute bien capitaine, j’ai été surpris de revoir monsieur Shui revenir seul, mais quand il m’a expliqué ce qui se passait, j’ai été encore plus surpris qu’au départ. Nous avons bien tenté de vous rejoindre pour vous faire sortir de là, mais ces gardes sont encore plus collants que du goudron, nous n'avons pas voulu nous battre, déclencher les hostilités n’aurait fait qu’aggraver votre cas.

Et vous avez bien eu raison Sergent Lanch. Rentrez sur l’Iceberg, je ne veux pas que vous voyiez ça.

Pardonnez-moi mademoiselle l'ambassadrice, mais je resterais, si je dois dire à votre père que vous avez été exécutée par des fruits et légumes vivants, je préfère le voir de mes propres yeux pour être le témoin à sa place.

Des larmes coulèrent sur les joues de la jeune femme, elle ne se voyait pas finir la journée, elle allait finir son aventure, bien plus tôt qu’elle ne le pensait, et pas de la bonne façon. Elle ne dit rien, acquiesçant aux paroles de l’ancien givrelame, elle aurait fondu en larmes si elle avait ouvert la bouche à ce moment-là.

Si vous voulez, nous pouvons tenter de vous faire fuir, quelques coups bien placés et les gardes tomberont comme des mouches.

À ces paroles, les cactus s’animèrent, tournant tous la tête vers le quartier-maître de l’Iceberg, certains commencèrent à prendre leurs armes pour se arrêter les complices de l’accusée.

Ne faites rien, s’il vous plaît. Je ne veux pas que vous soyez tués par ma bêtise.

Mais je ne peux pas vous regarder vous faire juger pour un crime que vous n’avez pas commis capitaine !

Peut-être pour nous, mais pour ce peuple, il existe bel et bien. Mais chut, le greffier revient, le jugement va être donné.

Accusée, levez-vous !

Robina se leva de sa chaise, peut-être pour la dernière fois de sa vie, le greffier posa ses yeux sur elle et souffla avant d’annoncer la sentence, bizarrement, aucun des juges ne se trouvaient dans la pièce, ça n’était pas ce à quoi elle s’attendait.

Mademoiselle Robina Erwolf, vous êtes appelées dans la chambre des débats du tribunal, une dernière question, qui permettrait de trancher si oui ou non, votre culpabilité ne fait aucun doute doit vous être posée.

Les deux chevaliers cactus encadrant le bureau de la jeune femme se rapprochèrent imperceptiblement, néanmoins, la chasseuse de primes n’avait pas besoin qu’on la guide, la porte e trouvait juste en face d’elle, sur le mur du fond, à gauche de la pièce. Elle fit quelques pas avant que la porte ne s’ouvre devant elle, un garde l’attendait derrière, il la guida alors que les deux hommes qui la suivaient partout depuis le début de cette affaire ne la quittaient pas d’une semelle, refermant la marche, ne lui laissant aucune échappatoire.

Une pièce avec une porte à double battant se trouvait au fond d’un couloir, la pièce où délibéraient les juges, sans aucun doute, deux pages ouvrirent les portes, ici, chacun des dix juges se trouvaient dans un siège, les légumes d’un côté et les fruits de l’autre. On lui présenta une chaise vide, au milieu des dix paires d’yeux qui la regardaient sans ciller, elle ne se sentait pas à l’aise, mais c’était le moment de tout donner pour se faire acquitter.

Très bien, accusée, vous avez raconté durant votre témoignage, que les fruits et légumes, à l’extérieur de cette île, étaient heureux de se faire cuisiner. Est-ce exact ?

En effet.

Des inepties selon moi, rien qu’un mensonge pour ne pas se voir déshydratée au soleil. Qu’on en finisse, que tout le monde lève la main pour la juger coupable.

Trois mains timides se levèrent, cependant, ce qui surprit le plus la jeune femme fut que celle de John Lemon, celui qui voulait la tête de la jeune femme depuis le début du procès ne se leva pas, il était en train de fixer la jeune femme, il la jaugeait du regard.

Mademoiselle Erwolf, moi et ma femme, nous voulons vous croire, croire que les fruits et légumes du monde entier ne souffrent pas en se faisant cuisiner, pouvez-vous nous montrer ?

Bien sûr, sauf que je n’ai, ni mes instruments de cuisine, ni ma tenue. Et je ne sais pas s’ils vont prendre vie pendant que je les cuisinerais, je ne veux pas de ça.

Ne vous faites aucun souci, la taille d’un légume doit être minimale pour qu’il puisse prendre vie, nous avons fait le choix, à la majorité de vous laisser cuisiner un légume et un fruit de notre choix, pour savoir si vous ne mentez pas.

Un soldat de l’Amiral Chante Relle s’avança dans la pièce, dans ses mains, un plateau comportant un citron, ainsi qu’une carotte. Des sacrifices pour trancher si oui ou non la cuisinière était coupable de crime contre la Légumanité.

Est-ce que je peux récupérer mes armes s’il vous plaît ?

Pourquoi cela ?

Si je n’ai rien pour faire mon métier, comment vous prouvez que ce que je dis est vrai ?

Vous marquez un point. Amirale Relle, rendez une des armes de l’accusée, la plus petite, qu’elle ne puisse pas s’enfuir si l’idée lui venait de l’utiliser pour se battre.

Bien princesse.

C’est ainsi que Coupe-faim lui fut rendu, elle se retrouvait de nouveau presque en entière, il ne lui manquait plus que Libertalia, et elle pourrait cuisiner de nouveau au complet, ici, elle allait rester dans la simplicité des gestes, elle éplucha lentement la carotte, touchant à peine le tubercule. Le fil de la lame du meitou faisait absolument tout le travail, en quelques gestes amples, il se retrouva nu, la chasseresse de primes trancha les deux extrémités et mit son travail de côté, préparer une carotte était aussi simple que ça.

Le citron, elle ne savait pas, elle ne voyait pas d’autre façon de le préparer que de le zester et elle n’avait pas de zesteur, il ne lui restait plus qu’à trancher dans le vif en faisant des rondelles, déjà le couteau de cuisine mordait dans l’écorce de l’agrume. Plusieurs rondelles tombèrent sur la table avant que la jeune femme ne s’arrête, elle utilisa sa robe pour enlever le jus qui coulait le long de l’acier et tendit son arme à l’Amirale.

Déjà l’ambiance dans la pièce avait changé, le Secrétaire Général Lemon semblait pleurer, sa femme, la main devant la bouche, choquée, mit la deuxième sur l’épaule de son mari pour le soutenir, il lui prit la main en posant une des siennes sur celle de sa femme, chacun d’eux pleuraient. Les légumes étaient plus stoïques, cependant, l’ambiance était morose, ne sachant pas quoi faire, Robina sortit de la pièce, il ne restait plus rien à faire ici, le couperet allait tomber, vu la réaction des juges, ils la condamneraient, elle en était certaines.

La mine déconfite, elle entra dans la pièce, les fruits et légumes en la voyant, se dirent la même chose, la décision avait été prise, la femme se ferait déshydrater, ils en étaient certains. Quelques minutes plus tard, le greffier revint dans la salle, le navigateur et le quartier-maître, de l’Iceberg, avaient bien tenté de remonter le moral de la jeunette, de lui dire que tout espoir n’était pas perdu, pourtant leurs mots se stoppèrent en voyant les larmes dans les yeux de la fontaine qu’elle était devenue.

Les dix fruits et légumes posèrent leur regard sur Robina, le verdict avait été décidé, enfin, toute cette histoire allait se finir, que ça soit en bien ou en mal, elle n’aurait plus la boule au ventre tous les jours de savoir si elle allait vivre ou mourir.

Accusée Robina Erwolf, levez-vous !

Pour le chef d’accusation d’avoir voulu sciemment devenir une cuisinière, nous déclarons l’accusée : coupable.

Pour le chef d’accusation d’avoir torturé, tué et agressé des membres de la famille des fruits et légumes, nous déclarons l’accusée, non-coupable.

Pour le chef d’accusation de crimes contre la Légumanité, vous êtes jugées… Non-coupable.

Soulagement immédiat, elle se retourna vers ses deux hommes qui la regardaient avec un grand sourire sur le visage alors que la Princesse Pea continuait à énoncer les chefs d’accusation dont on la chargeait.

La femme humaine Robina Erwolf est jugée non-coupable des tous les chefs d’accusation et devient par la même, une invitée de nos deux peuples, fruits comme légumes.

Vous êtes libre, mademoiselle Erwolf, rejoignez vos compagnons.

C’est ainsi que la cuisinière put sortir, l’esprit serein, libérée de sa cellule, récupérant ses armes au passage, une amie en plus, certes, elle n’allait cependant plus se permettre de dire n’importe quoi à n’importe qui, elle tournerait sa langue sept fois dans sa bouche avant de dire ce qui lui venait en tête la prochaine fois. Elle retourna à l’Iceberg, un sommeil réparateur l’y attendait, et puis maintenant elle pouvait retourner sur les terres des fruits et légumes vivants, elle était une invitée !
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